Modélisation des essais de lixiviation à 80°C et pression atmosphérique

Modélisation des essais de lixiviation à 80°C et pression atmosphérique

Etat de l’art sur la modélisation de l’altération des ciments

Les modèles développés répondent à plusieurs besoins. Le premier est de mieux comprendre les phénomènes physico-chimiques mis en jeux lors de la dégradation d’une pâte de ciment, d’un mortier ou d’un béton. Pour cela, les modèles servent à reproduire de la manière la plus fidèle possible les expériences de lixiviation. Le deuxième besoin est d’estimer les performances de matériaux cimentaires, tel qu’un coulis de béton dans le cas d’un stockage de déchets radioactifs, ou d’un annulaire cimenté dans le cas du présent travail. En effet, les expériences sur 100 ou 1000 ans sont impossibles à entreprendre. Pour pallier ces manques, les modèles de dégradation permettent de comprendre comment évolue le matériau dans le temps en prenant en compte les phénomènes de transports (diffusifs ou advectifs), et l’équilibre chimique des phases minérales présentes dans le matériau. La liste des modèles présentés dans ce chapitre n’est pas exhaustive, mais rend compte de l’évolution des modèles permettant de simuler le comportement du matériau soumis à la lixiviation. Modélisation des essais de lixiviation à 80°C et pression atmosphérique 173 Plusieurs modèles permettant de décrire la lixiviation de matrices cimentaires ont été développés. L’un des plus anciens est le modèle d’Adenot [ADE,92] qui permet de simuler la dégradation par l’eau (à température ambiante) d’une pâte de ciment Portland avec ou sans fumée de silice, en supposant que l’hydratation est complète. Ce modèle, DIFFUZON, repose sur le transport par diffusion des espèces en solution et sur l’hypothèse des équilibres chimiques locaux entre les phases solides et la solution. Ainsi, la diffusion est beaucoup plus lente que les réactions chimiques qui se produisent. Les principaux phénomènes pris en compte dans ce modèle sont : – La diffusion des principales espèces chimiques du ciment hydraté, – La dissolution ou la précipitation à l’équilibre des différentes phases minérales initialement présentes, – La décalcification progressive des C-S-H jusqu’à la formation d’un gel superficiel très peu soluble dans le cas d’une lixiviation par l’eau pure d’une pâte de ciment. Ce modèle a permis de prendre en compte différentes configurations de matériaux cimentaires lixiviés par divers fluides. Ainsi, Richet [RIC,04] a pu modéliser la dégradation de matériaux cimentaires par des eaux faiblement minéralisées. Le modèle a donc donné les quantités lixiviées (calcium, silicium, sulfate et hydroxyde) et leur évolution au cours du temps, la profondeur du front de dissolution de la portlandite et sa vitesse de propagation ainsi que la minéralogie dans chaque zone. Ces informations ont été validées par des données expérimentales. Des modèles simplifiés, se limitant à l’étude de l’élément calcium (qui est l’élément majoritaire des matrices cimentaires) ont été développés. C’est le cas du modèle de Gérard [GER,97] ; ce modèle peut simuler des géométries en deux dimensions (trois dimensions avec une symétrie comme pour un cylindre) et permet une résolution par élément fini ou volume fini. Le modèle permet l’étude des couplages lixiviation-endommagement mécanique. L’évolution minéralogique d’un béton soumis à l’action de l’eau de mer (qui contient du NaCl et contient également des carbonates et du magnésium, donc des espèces chimiques comparables à notre saumure) a été simulée par Guillon [GUI 04]. La composition du matériau sain hydraté est celle déterminée par le code CEMHYD3D [BEN 97]. Les interactions avec l’eau de mer ont été modélisées à l’aide d’un code de transport diffusif 174 multi-espèces, couplé à un code d’équilibres chimiques (PHREEQC). Cette simulation met en évidence la dissolution du monosulfoaluminate de calcium hydraté initial au profit de la précipitation de chloroaluminate de calcium hydraté et d’ettringite Le modèle développé par Kamali [KAM,03a] LIXIMOD3, qui repose sur le modèle de Gérard, a permis d’étudier de façon plus simple la cinétique de lixiviation en 1D pour une large gamme de pâtes de ciment en prenant en compte la température. Ce modèle permet de prédire également l’évolution des propriétés physiques comme la porosité, le coefficient de diffusion, ainsi que le module élastique dans le matériau lixivié à l’eau pure ou au nitrate d’ammonium.

Le logiciel HYTEC

Le code de calcul HYTEC permet de simuler l’évolution géochimique de notre système saumure-ciment en fonction du temps, mais aussi des changements des propriétés physiques du matériau. Ce logiciel prend en compte les hétérogénéités géochimiques ainsi que la variation des certains paramètres comme la porosité, le coefficient de diffusion etc. lors des changements minéralogiques (précipitation et/ou dissolution) [VdL,01] [VdL,02] [VdL,03]. La modélisation du transport au sein du milieu poreux repose sur le module de transport, R2D2, qui effectue le transfert en 1D ou 2D en volumes finis ; ce module a été développé par Lagneau [LAG,00]. La spéciation géochimique est prise en compte par le module CHESS, qui peut être alors couplé à ce module de transport. Ce couplage permet de rendre compte des changements physiques d’un matériau, liés aux différentes réactions chimiques pouvant se dérouler lors des interactions fluides-roches. CHESS est un modèle de spéciation qui est couplé à HYTEC. Il permet d’évaluer l’état d’équilibre chimique entre les différentes phases d’un système (les espèces aqueuses, l’eau, les minéraux, les espèces gazeuses, les colloïdes). Ces calculs s’opèrent à partir d’une base de données thermodynamiques, qui contient les constantes d’équilibre d’espèces minérales, aqueuses, gazeuses etc. Une équation de bilan de masse est écrite pour chaque espèce de base et chaque espèce dérivée est exprimée en fonction d’une constante de formation et des composantes de base. Le résultat est un ensemble d’équations non-linéaires. Le système d’équations représentant l’état d’équilibre thermodynamique est résolu à l’aide du schéma de Newton-Raphson, qui est une méthode d’itération. Lorsque le transport d’un fluide en milieu poreux engendre des réactions au sein de celuici, la porosité n’est pas constante : c’est la rétroaction de la chimie sur le transport. Le matériau peut en effet se dissoudre à certains endroits, ou être le siège de précipitations secondaires. La résolution du transport tient compte des changements minéralogiques du matériau, liés à ces phénomènes de dissolution et/ou de précipitation de minéraux. Le problème du couplage entre le transport et la spéciation chimique est résolu à l’aide d’un système d’itération séquentielle. Le transport et la chimie sont résolus séquentiellement et itérativement au cours d’un même pas de temps jusqu’à atteindre la convergence. HYTEC peut faire varier la porosité dans le temps : aussitôt que des phases minérales commencent à précipiter ou à se dissoudre, le volume poreux est recalculé sur la base du changement de volume des minéraux à chaque pas de temps. La porosité varie dans le sens inverse des concentrations des minéraux. Ainsi, les phénomènes de dissolution font intervenir des volumes minéraux plus faibles, donc la porosité augmente. A l’inverse, les phénomènes de précipitation ont pour effet d’augmenter le volume minéral global, donc la porosité baisse. Le couplage entre la variation de la porosité et la rétroaction sur le système chimique est traité séparément dans HYTEC, ce qui se traduit par une conservation de la masse du système chimique. Dans HYTEC, le transport est couplé à la chimie par cette équation [WIN,07a – WIN,07b] : Dd=De+mU est le coefficient dispersif/diffusif, Le terme De est le coefficient de diffusion effectif, m est la dispersivité, U est la vitesse de Darcy, ω est la porosité, ci and sont respectivement les concentrations mobile et immobile d’un élément par unité de volume de la solution, t est le temps. Le coefficient de diffusion effectif est calculé par HYTEC en fonction de la variation de la porosité via une loi d’Archie modifiée : α ω − ω ω− ω D (ω) = D (ω )( ) 0 c c e e 0 Où De est le coefficient de diffusion effectif, ω est la porosité, ω0 est la porosité initiale, ωc est la porosité critique et α est le coefficient d’Archie.  

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