Manipulation des composites
Utilisation Moyens d’isolement
Lors des restaurations aux résines composites, un des préalables essentiels est l’isolement du champ opératoire afin d’éviter toute contamination par la salive et/ou autres fluides buccaux. Le moyen d’isolement de choix est la digue qui assure un isolement parfait. L’absence de champ opératoire augmente le risque de contamination salivaire qui est un facteur nocif surtout lors des restaurations adhésives en général. Nos résultats ont montré que la digue n’est utilisée que par 1,7% des praticiens ayant participé à notre étude. Les mêmes constatations ont été faites par plusieurs auteurs. En effet, Avoaka (4) dans une étude menée à Abidjan a 54 rapporté qu’aucun praticien n’avait recours à la digue dans la pratique endodontique. N’Bouké (35) à Dakar a trouvé un taux d’utilisation de la digue de 16,5%. En Irlande, Lynch (30) a trouvé que 15% des praticiens utilisaient la digue dans tous les cas de restaurations postérieures comme antérieures. A défaut de disposer de la digue, des dispositifs alternatifs peuvent être utilisés. Dans notre étude, les rouleaux de coton seuls (37,8%) ou associés à un système d’aspiration (56,3%) sont les moyens d’isolement les plus utilisés par les praticiens du département de Dakar. N’Bouké (35) à Dakar a trouvé que des praticiens utilisent les rouleaux de coton seuls (24%) et l’associent à un système d’aspiration (42,6%) pendant les actes thérapeutiques. Une tendance inverse a été retrouvée dans l’étude d’Avoaka (4) à Abidjan. En effet, cet auteur a trouvé que les rouleaux de coton constituaient le moyen le plus utilisé lors des actes thérapeutiques qu’ils soient utilisés seuls (67%) ou associés à un système d’aspiration (28,4%). Ces résultats montrent que bien que la digue ne soit pas systématiquement posée par les praticiens dakarois, ceux-ci ont recours à divers dispositifs alternatifs pour assurer la siccité du champ opératoire. Taux et fréquence d’utilisation : Notre étude a montré que 98,3% de l’échantillon (119 praticiens) effectuaient des restaurations aux composites. En moyenne, entre 1 et 5 restaurations aux composites étaient réalisées par semaine par 68% des praticiens dakarois. Ces résultats montrent une forte demande en restaurations aux composites. Cela peut s’expliquer par la demande esthétique croissante des patients pour une meilleure qualité de vie et par le coût moins élevé comparé aux restaurations prothétiques comme rapporté par l’étude d’Ellias (16).
Conservation
En dentisterie adhésive, la conservation des matériaux de restauration est importante car elle peut avoir une influence sur la qualité des restaurations. Les fabricants recommandent de les conserver au frais et à l’abri de la lumière afin 55 d’éviter toute altération du matériau. Le moyen idéal de conservation est donc le réfrigérateur. Dans notre étude, 42,9% des praticiens ont respecté cette recommandation pour la conservation des composites et adhésifs. Cependant, 39,5% d’entre eux les gardent dans l’armoire et 15,1% les stockent à l’air libre. Notre étude met donc en exergue le déficit d’application des recommandations de stockage des composites par les fabricants ; ce qui impactera négativement sur la qualité de nos restaurations.
Indications
Nos résultats ont montré de forts taux d’utilisation des composites dentaires par les praticiens dakarois. Les pertes de substances dentaires antérieures étaient les plus représentées avec 81% pour les classes III de Black, 72,7% pour les classes IV de Black et 83,5% pour les classes V de Black. Cette utilisation des composites au niveau antérieur a été rapportée dans l’étude menée par Kane et coll. (25). Les taux d’utilisation étaient de 66,32% pour la classe III, 33,67% pour la classe IV et 18,36% pour la classe V. Au niveau postérieur, nos résultats ont montré une utilisation des résines composites de 66,4 % dans les cavités de classe I de Black et 53 % dans les classes II de Black. Cette tendance dans l’utilisation au niveau postérieur est plus marquée dans les pays scandinaves comme au Danemark. En effet, Pallesen (38) dans une étude sur la longévité des restaurations aux résines composites dans le secteur public a montré un taux d’utilisation de 90% au niveau molaire et 49% de classe I. Cette importante utilisation des composites au niveau postérieur est en rapport avec les améliorations apportées dans les propriétés mécaniques de ces biomatériaux. En effet, les progrès notés dans la forme, la taille et le pourcentage des charges ont conduit à l’apparition de composites microhybrides et nanochargés qui permettent d’allier de bonnes propriétés mécaniques et un meilleur rendu esthétique.
Causes d’échecs
Secteurs concernés Nos résultats ont montré que le secteur antérieur présente plus d’échecs avec un taux de 75,6% contre 24,4% au niveau postérieur. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait que les dents antérieures sont les plus concernées par les restaurations aux composites. De plus, des habitudes alimentaires comme le grignotage et/ ou certains tics comme le fait de couper les fils avec les dents par exemple peuvent s’avérer nocifs à nos restaurations.
Délai
Seize praticiens (13,2%) estiment perdre les restaurations aux composites qu’ils ont placées en bouche dans un délai inférieur à un an. Cependant, 52,1% des praticiens les perdent entre 1 et 2 ans. Dans l’étude de Burrow (6) portant sur des lésions cervicales non carieuses (LCNC) restaurées aux résines composites et évaluées après un an, 100% des restaurations étaient jugées cliniquement acceptables. Cependant les LCNC ne subissent probablement pas de contraintes occlusales ; ce qui expliquerait cette différence dans le comportement clinique. Les différentes études menées sur l’utilisation des composites dans les restaurations des LCNC ont rapporté de bons comportements cliniques même après cinq ans (7, 27, 40, 49, 51). Selon nos résultats, la durée minimale d’une restauration aux composites est comprise entre un an (24%) et deux ans (28,1%). Cependant 26,4% des praticiens affirment que leurs restaurations ont une durée de vie de 3 ans et plus. Les études suisses et françaises menées par Lasfargues et coll. (28, 29) en 1995 ont montré qu’après 3 ans, 80% des restaurations aux composites présentaient des détériorations. Une autre étude menée à Genève par Lasfargues (28) a montré une dégradation de 87% des restaurations aux composites entre 1 et 3 ans.
Types d’échecs
Dans cette étude, la fracture de la restauration (68,6%), la perte totale de la restauration (58,7%) et l’absence d’étanchéité (53,7%) sont les types d’échecs les plus cités par les praticiens. Ces résultats sont très au-delà de ceux trouvés par Kopperud (26) en Norvège. Les taux respectifs rapportés sont de 5,3% pour la fracture de la restauration, 8% pour la perte totale de la restauration et 2,4% pour les défauts marginaux. Ces défauts marginaux peuvent conduire à des infiltrations des fluides buccaux et à des changements de teinte de nos restaurations selon Sano (48). Une des causes qui pourrait être évoquée est la faible utilisation de la digue (1,7%) au sein de notre échantillon. Ces discolorations ont été notées par 45,5% des praticiens. Selon Lasfargues (29), 90% des restaurations aux composites subissent une détérioration au niveau de la teinte.