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Contexte de l’étude
La stratosphère, située au-delà de 10 km d’altitude environ est une couche de l’atmosphère difficilement accessible à la mesure. Elle fut étudiée de manière détaillée à partir des années 1950. Dans les années 1980 après la découverte de la réduction de la teneur en ozone en antarctique, la communauté scientifique internationale s’est mobilisée afin de comprendre les mécanismes responsables. Ainsi, de nombreuses études ont vu le jour. Il a été clairement établi que les émissions de chlorofluorocarbures ou CFC inhérentes aux activités humaines étaient responsables de cette destruction d’ozone. Plusieurs signes encourageants montrent que les différentes actions entreprises dans le cadre des protocoles internationaux pour la réduction des émissions de CFC portent leurs fruits, avec une augmentation des quantités globales d’ozone (WMO, 2014). La couche d’ozone est toujours un sujet d’étude à part entière pour le suivi de son évolution et son potentiel de retour à la normale. Cependant, même si l’essentiel des processus chimiques la concernant est connu, les processus dynamiques engendrant une variabilité interannuelle associée à la circulation stratosphérique et par voie de conséquence une variabilité des sources et des puits d’ozone, présentent encore des zones d’ombre.
Très récemment, la diminution record d’ozone en région arctique observée au printemps 2011 met en évidence les difficultés à prévoir ce type d’événement « We cannot at present predict when such severe Arctic ozone depletion may be matched or exceeded » (Manney et al., 2011). Hurwitz et al. (2011) reportent des conditions dynamiques très inhabituelles en lien avec cet événement «Unusual dynamical conditions were observed in the Arctic stratosphere in March 2011. Tropospheric planetary wave driving was unusually weak, consistent with a strong, stable Arctic vortex in late winter and a relatively late vortex breakup ».Ils ouvrent de nombreuses questions sur les liens entre la dynamique troposphérique et la dynamique stratosphérique, ayant conduit potentiellement à des conditions géophysiques de vortex polaire intense, très stable et ayant perduré tard dans la saison (jusqu’au 30 mars 2011). En effet dans les régions polaires, les fortes activités ondulatoires présentes durant la saison d’hiver entrainent une évolution du vortex polaire qui est difficile à prévoir plusieurs semaines à l’avance, tant la propagation et le déferlement des ondes planétaires sont difficiles à représenter dans les modèles.
De récentes études (WMO, 2014), tendent à montrer également que la circulation méridienne, serait divisée en deux branches transportant méridionalement les masses d’air dans la stratosphère (figure 1.1). La première atteignant les hautes altitudes dans la stratosphère (voir la mésosphère) se voit redescendre à moyenne ou hautes latitude. Cette branche correspond à la circulation principale de la circulation de Brewer-Dobson. La deuxième branche, d’intensité plus faible, se propagerait à des altitudes plus basses et serait toujours existante dans l’hémisphère d’été. Cette deuxième branche expliquerait en partie les faibles valeurs d’ozone observée à moyenne latitude juste au dessus de la tropopause. Ce nouveau concept mérite d’être étudié et caractérisé plus avant.
Figure 1.1. Schéma représentant la circulation de Brewer-Dobson avec la branche principale en noir (DEEP BRANCH) et la branche secondaire (SHALLOW BRANCH). Le dégradé de couleur est proportionnel à la densité d’ozone (les fortes concentrations sont en foncé). D’après WMO, 2014.
Le contexte actuel nous place également dans la problématique du réchauffement climatique. Si l’augmentation de la teneur en gaz à effet de serre provoque un réchauffement de la troposphère, elle entraine un refroidissement de la stratosphère. Le questionnement sur les liens étroits (actions et rétroactions) entre l’évolution du bilan radiatif terrestre et l’évolution de la circulation stratosphérique a été introduit par Baldwin et al. (2007) dans son article dont le titre est «How will the stratosphere affect climate change ? ». Pour estimer l’impact à long terme des activités humaines sur le climat, des simulations à grande échelle intégrant un forçage des gaz à effet de serre sont réalisées. Les résultats de ces simulations suggèrent un renforcement de l’intensité de la circulation méridienne stratosphérique durant le 21ième siècle (WMO, 2011). D’après ces résultats, l’augmentation des moyennes annuelles du flux de quantité de matière circulant méridionalement serait d’environ 2% tous les 10 ans (Butchart et al., 2006 ; McLandress and Shepherd, 2009 ; Butchard et al., 2010 ; SPARC CCMVal chapitre 4, 2010). Une circulation de Brewer-Dobson plus forte entrainerait une diminution de la quantité d’ozone dans la basse stratosphère aux régions tropicales et augmenterait leur transport vers les pôles. Cependant dans le cas d’une augmentation de l’intensité des ondes planétaires, le risque de déferlement à plus hautes latitudes et d’apparition d’échauffements soudains augmente également (Butchart et al., 2006; Deckert and Dameris, 2008). Par ce mécanisme, la stabilité du vortex polaire arctique serait moindre
ainsi que les destructions d’ozone. Les estimations de l’intensité de la circulation méridienne basée sur les mesures chimiques et sur l’âge de l’air sont très variables et ont des barres d’erreurs d’amplitude plus grande que les tendances observées (Baldwin and Dameris et al., 2007 ; Engel et al., 2009 ; WMO, 2011). D’où l’importance d’estimer aux mieux l’intensité de cette circulation méridienne.
L’étude de l’évolution de la circulation stratosphérique dans le contexte du changement climatique passe en premier lieu par l’acquisition de mesures (température, vent, flux infrarouge provenant des basses couches, flux solaire incident) dans la stratosphère et par la modélisation/prévision réaliste des processus dynamiques. La confrontation aux mesures est le moyen d’estimer le réalisme des résultats d’un modèle. En cas de désaccord il s’agira de déterminer les écarts à la réalité et les biais afin d’évaluer le degré de confiance que l’on peut attribuer aux résultats. La connaissance de ces biais est primordiale pour détecter et comprendre les lacunes du modèle dans l’objectif d’identifier puis d’améliorer la représentation des processus. Or, la stratosphère est difficilement accessible à la mesure, les mesures de vent sont extrêmement rares au-delà de 30 km d’altitude. Des mesures éparses par lidar Doppler implantés sur quelques sites sont disponibles pour la haute stratosphère. Les sondages météorologiques effectués à l’aide de ballon dilatables n’atteignent qu’occasionnellement le niveau d’altitude de 30 km d’altitude (Durre et al., 2006 ; Moffat-Griffin et al., 2011). Actuellement seuls les ballons stratosphériques sont à même d’atteindre des altitudes de 40 km et de pouvoir résider dans la stratosphère suffisamment longtemps pour permettre l’acquisition de mesures in situ.
Les modèles de prévision météorologique évoluent sans cesse. Version après version, les modèles intègrent des algorithmes de plus en plus complexes ; les résolutions spatiale et verticale augmentent régulièrement. Le modèle de prévision météorologique à moyen terme actuellement opérationnel à l’ECMWF (European Centre for Medium-Range Weather Forecasts) offre une résolution horizontale de 0.25°×0.25° (soit une distance de 16 km entre chaque point) de grille et 137 niveaux sur la verticale (jusqu’à 0.01 hPa). Avant 2000 les prévisions étaient effectuées avec un modèle dont la limite supérieure était à 10 hPa et très peu ou pas de niveau dans la stratosphère. Depuis, le nombre de niveaux verticaux considérés dans la stratosphère augmente, même si cela reste insuffisant comme le déplorent les travaux de Gerber et al., (2010); Charron et al., (2012); Sigmond et al., (2013). Vitart (2004) atteste d’une amélioration significative des prévisions du modèle européen à long terme en le couplant avec la dynamique stratosphérique et avec une meilleure représentation des courants marins. L’autre voie d’amélioration des prévisions est l’assimilation de données permettant de contraindre le modèle. La figure 1.2 montre l’évolution du volume de données assimilées et utilisées dans le modèle de réanalyses ERA-Interim (Dee et al., 2011) entre 1989 et 2010. On observe que sur une période de 20 ans, le nombre de données assimilées à significativement augmenté. Par exemple, le volume des mesures de la température de brillance (mesures faites par satellite) a été multiplié par un facteur 7 entre 1989 et 2010. On notera toutefois que ces observations concernent essentiellement la troposphère. La stratosphère souffre d’un manque flagrant d’observations et la circulation dans la stratosphère est souvent extrapolée ou déduite très simplement des équations primitives en considérant l’équilibre entre le gradient de pression et la force de Coriolis (approximation du vent géostrophique) ainsi qu’en utilisant
Table des matières
CHAPITRE I – Contexte de l’étude
CHAPITRE II – Dynamique stratosphérique
II.1. Circulation générale
II.1.1. Circulation zonale
II.1.2. Circulation méridienne
II.2. Variations saisonnières de la dynamique stratosphérique
II.2.1. La circulation en région polaire de l’hémisphère nord
II.2.2. La circulation des moyennes latitudes
II.2.3. La circulation inter-tropicale
II.3. Conclusion
CHAPITRE III – Mesures des vents à partir des trajectoires ballon et données associées issues des réanalyses ERA-Interim
III.1. Introduction
III.2. Les différents types de ballon
III.2.1. Les radiosondages
III.2.2. Les Ballons Pressurisés Stratosphériques
III.2.3. Les Montgolfières Infrarouges
III.2.4. Les ballons stratosphériques ouverts
III.3. Les capteurs
III.3.1. Géo-localisation
III.3.2. Température et pression
III.4. Mesures issues des BSO
III.4.1. Formats des données
III.4.2. Les grandeurs météorologiques
III.4.3. Métadonnées
III.5. Les données du centre européen
III.5.1. Les données réanalysées
III.5.2. Les réanalyses ERA-Interim
III.5.3. Méthode d’interpolation
III.6. Pré-requis statistiques
III.6.1. Etude d’une répartition
III.6.2. Normalité d’une distribution
III.7. Logiciel et interface homme machine développé : ESTIBAL
III.7.1. Gestion des données
III.7.2. Traitement et outils
III.7.3. Outils statistiques
III.7.4. Sauvegardes
III.8. Conclusion
CHAPITRE IV – Validation de la base de données de vent et méthodologie d’analyse
biais mesures/modèle
IV.1. Introduction
IV.2. Méthodologie d’analyse des écarts mesures modèle.
IV.2.1. Comparaison directe
IV.2.2. Les conditions géophysiques comme critère de sélection
IV.2.3. Outil d’analyse de l’évolution des biais en fonction de la couche de pression.
IV.3. Validation de la base de données
IV.4. Conclusion
CHAPITRE V – Analyse des biais mesures/modèle en fonction des régions, saisons
V.1. Introduction
V.2. La région polaire arctique
V.2.1. Saison d’hiver
V.2.2. Printemps polaire
V.2.3. Saison d’été en région polaire
V.3. Evaluation d’ERA-Interim aux moyennes latitudes
V.3.1. Printemps des moyennes latitudes
V.3.2. Régime d’été aux moyennes latitudes
V.3.3. Automne aux moyennes latitudes
V.4. Evaluation d’ERA-Interim en région tropicale
V.4.1. Condition de QBO en phase d’Est
V.4.2. Condition de QBO en phase d’Ouest
V.5. Discussion-Conclusion
Conclusion
Perspectives
Annexes
Références
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