Dispensation et gestion des medicaments antiretroviraux
LE VIRUS Le VIH-SIDA
autrefois baptisé LAV (Lymphadenopathy Associeted Virus) est un agent infectieux viral. Il a été isolé pour la première fois en 1983 par le professeur Luc MONTAGNIER et son équipe de l’Institut Pasteur à partir des cellules ganglionnaires d’un patient atteint de lymphadénopathies persistantes généralisées. [9,20] Trois ans plus tard, un autre rétrovirus apparenté au VIH (le VIH2) a été découvert chez des patients en Afrique de l’Ouest par une équipe dirigée par le professeur BARIN et MBOUP. [61] Le VIH2 cause également le SIDA, mais semble prendre beaucoup plus de temps que le VIH1 avant d’en arriver à la maladie et semble être moins facilement transmissible sexuellement ainsi que de la mère à l’enfant [23]. Ce virus sévit beaucoup plus en Afrique de l’Ouest ; il a été isolé plus particulièrement dans les anciennes colonies portugaises et françaises.
Taxonomie et structure du virus
La classification établie pour le virus du SIDA est la suivante : – Famille = Retroviridae – Sous-famille = Lentivirinae – Genre = Lentivirinae – Types = VIH1 et VIH2 (42% d’homologie entre les deux) [9]. Le VIH se présente au microscope électronique comme une particule d’environ 90 à 120 nm de diamètre et comporte : -une enveloppe virale externe de 100 nm de diamètre. Elle est constituée d’une bicouche lipidique et de deux sortes de protéines : gp 120 et gp 41 pour le VIH1 ; et gp120 et gp 36 pour le VIH2 ; -une capside contenant une couche de protéine p17 et une couche plus profonde de protéine p24 ; -un génome qui est constitué de deux copies d’acide ribonucléique simple brin. Trois enzymes virales sont associées aux protéines précitées: la protéase (p10), la transcriptase inverse (p64) et l’intégrase (p32). [9, 28] Figure 1 : Structure du virus [9] II.2- Cycle de réplication Le VIH se multiplie à un rythme très rapide même pendant la phase asymptomatique. Il s’agit de libérer dans le sang des personnes vivant avec le VIH environ un à dix milliards de virions matures infectants quotidiennement [43, 29]. La connaissance de ce cycle de réplication est à la base de la mise au point de molécules antirétrovirales. Le VIH a pour cible principale les lymphocytes TCD4 qui constituent le support de l’immunité. Il attaque également les macrophages, les cellules folliculaires dendritiques, les cellules de Langerhans ainsi que les cellules gliales. [28] ¾ La première étape du cycle de réplication consiste en une fixation du virus au récepteur CD4 de la cellule hôte par interaction du gp 120 et de la molécule CD4: c’est l’adhésion. ¾ La deuxième étape est une fusion de l’enveloppe virale et de la membrane cytoplasmique cellulaire. L’ARN viral est transformé en ADN pro viral sous l’action d’une enzyme qui est un ADN polymérase ou transcriptase inverse (ou reverse). ¾ La troisième étape est la phase d’intégration de l’ADN pro viral dans le génome de la cellule infectée grâce à l’intégrase. Elle est suivie de la transcription de l’ADN pro viral en ARNm puis traduction en protéine virale par action de la protéase par synthèse protéique. ¾ La dernière étape consiste en la maturation et en l’assemblage de ces protéines sous l’action de la protéase avec libération dans la circulation sanguine de millions de virus matures infectants. [12, 28] Figure 2 : Cycle de réplication virale [64] II.3- Classification et manifestation clinique de l’infection à VIH Les signes cliniques de l’infection à VIH varient considérablement selon le stade de la maladie. Afin d’utiliser un outil nosologique commun, le CDC (Center of Deseases Control) et l’OMS ont proposé une classification des différentes manifestations en quatre phases : ¾ Phase de primo-infection Le stade I correspond à la primo-infection qui est souvent inaperçue. Mais lorsqu’elle existe, elle peut se présenter, deux à six semaines après la contamination ; comme un épisode fébrile de type mononucléosique, accompagné de lymphadénopathies. ¾ Phase de séropositivité asymptomatique Trois mois en moyenne après la contamination, des anticorps anti-VIH sont détectables dans le sang : c’est la période de séroconversion. Elle sera suivie d’une longue période au cours de laquelle la personne séropositive n’aura aucun signe clinique. Le temps qui sépare la contamination du développement d’une immunodépression sévère est variable. Le délai moyen est de huit à onze ans et le sujet peut présenter ou pas des anomalies du bilan biologique. ¾ Phase lymphadénopathique généralisée et persistante Elle se définit par la présence d’adénopathie évoluant depuis plus de trois mois, de diamètre supérieur à un cm, siégeant au niveau de deux aires ganglionnaires autres qu’inguinales en l’absence de toute autre étiologie. Au cours de ce stade, on note des anomalies biologiques en particulier une baisse du taux des lymphocytes TCD4. ¾ Phase symptomatique Ce stade est caractérisé par des signes cliniques ou des pathologies associées : -IV A : fièvre persistante de plus d’un mois, un amaigrissement involontaire de plus de 10% du poids du corps et une diarrhée chronique. -IV B : atteintes au niveau central et périphérique avec émergence possible du syndrome de démence. -IV C : développement des infections opportunistes à la faveur d’une immunodéficience liée à la chute du taux des lymphocytes TCD4. Ces infections sont majeures (cryptococcose neuroméningée, tuberculose extrapulmonaire, candidose oesophagienne…) ou mineures (candidose orale, zona, tuberculose pulmonaire….) – IV D : Sarcome de Kaposi qui peut être aussi viscéral, lymphome hodgkiniens localisé notamment au niveau cérébral. – IV E : Manifestations auto-immunes, pneumonie interstitielle lymphoïde, thrombopénie. Le SIDA correspond aux stades IV A, IV C1, IV D. Au cours de cette phase, on note une chute rapide du taux de CD4 avec une remontée de la virémie. Elle dure en moyenne deux ans et aboutit au décès du patient. [33, 17, 5, 9] Figure 3 : Evolution d’une infection par le VIH chez l’homme
TRAITEMENT ANTIRETROVIRAL
Objectifs du traitement
Les objectifs du traitement antirétroviral sont : 9 d’arrêter la progression de la maladie afin de prolonger la durée de la vie sans en altérer la qualité ; 9 d’abaisser au maximum la charge virale pour freiner voire arrêter la progression de la maladie et restaurer au mieux l’immunité ; 9 de réduire le risque de survenue des infections opportunistes ; 9 de restaurer au mieux l’immunité ; 9 d’éviter la sélection des souches virales résistantes ; 9 de réduire la morbidité et la mortalité liées au SIDA. L’état clinique, le niveau de la charge virale et le taux de lymphocytes TCD4 sont les trois facteurs prédictifs essentiels. Les résultats du traitement sont évalués à partir des taux de la charge virale qui devraient montrer une diminution, pour aboutir à des taux indétectables (<50 copies/ml).
Traitement antirétroviral initial
Les principes de base La prescription du traitement antirétroviral n’est pas une urgence. Elle doit être longuement expliquée au patient et débuter après que celui-ci a exprimé sa volonté d’être traité. Pour les enfants, il faut s’assurer de la motivation d’un parent ou tuteur disponible. Le traitement doit être adapté au type de virus (VIH1, VIH2), à l’état clinique et au mode de vie du patient afin que celui-ci soit observant de façon optimale. Les associations antirétrovirales sont plus efficaces sur la diminution de la charge virale ; elles induisent une augmentation plus nette, plus durable des CD4 et limitent l’émergence de souches virales résistantes. Le traitement antirétroviral doit être encadré par un bilan clinique et biologique afin d’en apprécier l’efficacité et la tolérance. Une élévation de la charge virale sous traitement impose d’imaginer d’abord les causes d’ascension transitoire de la charge virale notamment la vaccination, la grossesse, une infection intercurrente, un arrêt thérapeutique temporaire avant d’envisager un échec thérapeutique. En thérapeutique antirétrovirale le premier traitement doit être le bon et le puissant. Le premier choix des molécules influence les options thérapeutiques ultérieures. Mais au moment de ce choix il faut prévoir d’emblée des alternatives pour d’éventuels cas d’échec ou de toxicité. Lorsque l’arrêt du traitement s’impose, il faut interrompre toute la combinaison afin d’éviter le développement de résistances vis-à-vis des molécules maintenues. Mais quelle que soit la puissance d’une association antirétrovirale, son efficacité est moindre chez le patient prétraité que chez le patient jamais traité.
Comment initier le traitement ?
L’initiation du traitement antirétroviral, nécessite un bilan pré-thérapeutique qui permet d’apprécier le retentissement de l’infection à VIH sur l’état général, d’obtenir des paramètres biologiques de références susceptibles d’être modifiés par le traitement antirétroviral et de détecter éventuellement une double infection (les co-infections VIH/hépatites). Chez les femmes, il faut s’assurer de l’existence ou de la possibilité de grossesse.
Quand commencer le traitement ?
Pour débuter le traitement antirétroviral, le patient doit être éligible c’est-à-dire remplir un certain nombre de critères. Il s’agit des critères de l’OMS et /ou du CDC. Ces critères sont basés sur les stades cliniques et/ou le comptage des CD4 Critères d’éligibilité des adultes -Patient symptomatique appartenant à la catégorie C (CDC) ou au stade 4 (OMS) quel que soit le niveau de CD4 ; – Patient pauci symptomatique appartenant à la catégorie B (CDC) ou aux stades 2 ou 3 (OMS) avec des CD4 <350/mm3 ; – Patient asymptomatique ayant des CD4 <200/mm3. Critères d’éligibilité des enfants de plus de 18 mois -Stade 3 (OMS) ou stade C (CDC) quel que soit le taux de CD4 ; -Stade 1 et 2 (OMS) ou stade A ou B (CDC) avec CD4<20%. Critères d’éligibilité des enfants de moins de 18 mois Les enfants de moins de 18 mois sont éligibles s’ils remplissent l’une des conditions suivantes : -La preuve virologique de l’infection a été faite quelque soit le stade clinique. -En l’absence de preuve virologique sont éligibles les enfants répondant aux critères suivants : * Stade 3 (OMS) ou stade C (CDC) quelque soit le taux de CD4 ; * Stade 1ou 2 (OMS) ou stade A ou B (CDC) avec CD4<20% ; * Et mère séropositive au VIH. [34, 15] III.2.4- Quel traitement proposer ? L’objectif du traitement initial doit être de réduire la charge virale plasmatique au niveau le plus bas possible. L’association de plusieurs molécules antirétrovirales est la seule façon d’atteindre cet objectif et d’empêcher ainsi l’émergence de résistance du VIH aux médicaments ARV. Contrairement à la monothérapie et à la bithérapie, la trithérapie constitue une combinaison potentielle pour une bonne réduction de la charge virale. Avec cette trithérapie, la qualité de vie des PVVIH est aujourd’hui nettement meilleure qu’il y a quelques années.
INTRODUCTION |