Eléments de Microbiologie médicale
La prise en charge d’un patient suspect d’infection bactérienne repose classiquement sur l’identification de l’agent pathogène au site d’infection et sur le choix du meilleur traitement antibiotique, basé sur l’antibiogramme (DESCY et al., 2010). Le laboratoire doit mettre en évidence et identifier l’agent pathogène responsable, étudier sa sensibilité aux différentes molécules antimicrobiennes, rechercher la présence de facteurs de virulence et, le cas échéant, comparer les différentes souches isolées afin d’établir un lien de clonalité notamment en cas d’épidémies. La réponse à toutes ces demandes nécessite la mise en route de différentes techniques dont certaines sont laborieuses, coûteuses et difficiles à réaliser en routine. Elles requièrent d’autre part un certain temps de manipulation, et ces délais ne sont pas toujours compatibles avec une prise en charge thérapeutique optimale du patient. Actuellement, l’identification et l’étude de la sensibilité des microorganismes nécessitent plusieurs étapes qui reposent principalement sur la détection des caractéristiques phénotypiques du germe étudié. L’utilisation de colorations (coloration de Gram par exemple), la morphologie des colonies, l’examen au microscope, l’isolement en culture sur différents milieux, les tests biochimiques, qu’ils soient réalisés manuellement ou par des automates, sont les principes sur lesquels se basent la classification et l’identification des pathogènes étudiés. Cependant, ces techniques présentaient certains inconvénients tels que de nécessiter plusieurs heures de délai d’analyse ou encore de devoir disposer de suffisamment de matériel biologique issu des cultures pour être réalisées (CARBONNELLE et NASSIF, 2011). L’apparition de la biologie moléculaire, méthode de référence dans bien des cas, a certes permis une identification bactérienne plus rapide et précise mais se caractérise par le coût élevé des intrants nécessaires.
Ces difficultés ont conduit au développement de méthodes alternatives avec des applications récentes de technologie émergente comme la spectrométrie de masse MALDI-TOF. Le MALDI-TOF est une révolution technique utile pour l’identification rapide des bactéries, virus, champignons et arthropodes. Il est déjà utilisé depuis une vingtaine d’années dans différent domaines d’application et en particulier dans les laboratoires de chimie pour la détection de molécules diverses comme les sucres, les acides nucléiques et les protéines. Plus récemment, la technique s’est élargie au diagnostic vétérinaire et au niveau environnemental (POLET et al., 2013). Aujourd’hui, la SM-MALDI-TOF (MS-MALDI-TOF) est adaptée à une utilisation dans les laboratoires de microbiologie, où elle sert de méthode révolutionnaire, rapide et robustepour une identification microbienne (bactéries et champignons) précise (CLARCK et al., 2013). En effet, au lieu des 18 à 24 heures nécessaires par les méthodes classiques, cet identification se fait ici en quelques minutes et de façon précise (FALL et al., 2013). Dans le cadre de la coopération scientifique entre l’HPD, l’IRD et la Fondation Méditerranées Infections, un spectromètre de masse ” MALDI-TOF (Matrix Assisted Laser Desorption Ionisation-Time Of Flight), premier spécimen du genre dans la sous-région, a été installé à l’Hôpital Principal (HPD) depuis 2012 (FALL et al., 2013). L’objectif de notre mémoire est d’évaluer l’apport du MALDI-TOF dans l’identification des bactéries et levures isolées au laboratoire de l’Hôpital Principal de Dakar.
Eléments de Microbiologie 1. médicale
La bactériologie médicale, comme d’autres sciences, est étroitement liée à l’évolution des techniques. Malgré des intuitions parfois anciennes sur l’origine infectieuse de certaines maladies (Fracastor et ces théories de la contagion, au XVIe siècle, Semmelweis et son concept sur la transmissibilité de la fièvre puerpéral dans les maternités de Vienne en 1844), ce sont des faits d’observation puis des faits expérimentaux (grâce à la mise au point de l’outil essentiel le microscope dont A .Van . Leeuwenhoek est l’inventeur) qui ont permis d’aboutir à la véritable révolution microbiologique de l’ère pasteurienne. La découverte de quelques bactéries agents de maladies infectieuses dominantes, de leur pouvoir pathogène et des mécanismes de défense de l’hôte infecté, ont fait qu’en quelques décennies de la seconde moitié du XIXe siècle est née la bactériologie médicale et, avec elle, l’immunologie (MOUSSAOUI, 2012).
Méthodes d’identification bactérienne au laboratoire
L’intérêt de la culture bactérienne porte sur le développement de la bactérie, son isolement et la détermination de ses caractéristiques culturales. Cela nécessite de regrouper des conditions d’atmosphère (aérobie, anaérobie, enrichi en CO2), de température et de culture favorable au développement microbien. L’ensemble de ces informations donne une orientation qui permettra de guider la démarche pour l’identification bactérienne. Ainsi deux méthodes permettent d’orienter l’identification :L’étude de l’aspect des colonies sur gélose ainsi que la capacité de croissance sur des milieux sélectifs, pouvant être complétée par l’observation de la mobilité entre lame et lamelle, fournissent des éléments d’orientation étiologique. La réalisation de tests rapides directement à partir des colonies bactériennes tels que l’oxydase et la catalase, oriente l’identification selon les caractéristiques du métabolisme bactérien (NOCON, 2013).
Chaque espèce bactérienne possède des substrats préférentiels et exprime des caractéristiques métaboliques propres à son mode de vie. Ces caractères métaboliques définissent des groupes à la base de la taxonomie bactérienne. Les industriels ont créé des galeries constituées de cupules remplies de substrats lyophilisés que l’on réhydrate par une suspension mono-bactérienne de concentration standardisée dans un bouillon prédéfini. Après incubation d’une durée de 12 heures, la croissance bactérienne fournit un profil réactionnel que l’on peut lire de façon manuelle ou automatisée. Pour aboutir à une identification, ce profil est ensuite comparé à une base de données du fournisseur qui a été établie à partir de souches de référence (NOCON, 2013).