Contribution à la cohérence de gestion des déchets
d’équipements électroniques et informatiques
Cadre juridique et institutionnel de la gestion des déchets
Le cadre juridique L’analyse du cadre juridique de la gestion des déchets montre qu’aucun texte spécifique n’est adopté pour la gestion des déchets d’équipements électroniques et informatiques. Vu leur augmentation durant cette décennie et leur potentialité à porter atteinte à la santé et à l’environnement, une attention particulière doit leur être accordée. Pour mieux comprendre l’engagement de l’Etat du Sénégal dans la gestion des déchets, il est pertinent de parcourir les texte et lois régissant la gestion des déchets. A l’exception du centre ville (Dakar plateau et Médina) où la gestion des déchets est confiée au concessionnaire Veolia, le code des collectivités locales et la loi 96-07 portant transfert des compétences attribuent aux régions, aux communes et aux communautés rurales la gestion de leurs déchets. En revanche, l’Etat doit manifester plus de soutien envers ces collectivités locales qui se plaignent souvent que « l’Etat a transféré les compétences mais pas les moyens ». La loi 72-52 du 12 juin 1972, fixant le taux maximum et déterminant les modalités d’assiette et de perception de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères au Sénégal, prévoit 6% pour la commune de Dakar et 5% pour les communes de l’intérieur du pays. Le montant maximum de la taxe frappant les personnes non imposées à un impôt sur le revenu est fixé à 300 frs .Cette Taxe vient en appoint aux collectivités locales dans la gestion de leurs déchets. La loi 2001-01 portant code de l’environnement (LCE), à son Chapitre III, statut sur la gestion des déchets. Les articles L 30, L 31, L 33, L 36, L 37, L 39, L 41, L 42 du même chapitre traitent des modalités de GER des déchets, de la responsabilité des producteurs, du régime d’interdiction de l’importation des déchets dangereux sur le territoire sénégalais, de leur immersion, incinération, etc. dans les eaux continentales. En outre, ces dispositions autorisent les collectivités locales à créer une redevance spéciale pour gérer les autres déchets spécifiques aux ordures ménagers. Les DEEI peuvent être classés, par voie de conséquence, parmi ces déchets spécifiques. La convention de Bâle ratifiée par le Sénégal en 1997 et celle de Bamako, sont des réglementations sur le plan international traitant de la question des déchets, notamment des déchets dangereux. Ces conventions ont pour objectif principal de favoriser le contrôle des mouvements transfrontières, de réduire la quantité de déchet dangereux au minimum et de gérer et d’éliminer ces déchets d’une manière écologiquement rationnelle. Malgré l’entrée en vigueur de la convention de Bâle et de Bamako respectivement le 5 mai 1992 et le 20 mars 1996, on assiste souvent à des scènes de transferts illicites déguisés de déchets dangereux. La situation produite en Côte d’Ivoire en 2006 est un exemple pertinent, illustrant l’évacuation de déchets dangereux dans les pays en développement6 . L’entrée en vigueur de l’amendement de la convention de Bâle qui vise une interdiction des mouvements transfrontaliers des déchets dangereux pourrait être un palliatif à ce fléau. Cet amendement a été ajouté à la convention de Bâle lors de la troisième conférence des parties en 1995. Cependant, pour entrer en vigueur, il devait être ratifié au moins par les trois quart des pays ayant ratifié la convention de Bâle. Au demeurant, sont application tarde et le commerce des déchets dangereux continue d’affecter surtout les pays pauvres. Du fait de la composition en éléments toxiques des DEEI faisant partie des catégories de déchets à contrôler selon les conventions précitées, le trafic dont ils font l’objet est en faux avec les termes desdites conventions. L’absence d’un cadre juridique spécifique aux déchets d’équipements électroniques et informatiques au Sénégal, explique l’urgence de procéder à un contrôle des équipements en fin de vie importés. Pour respecter scrupuleusement les conventions de Bâle, de Bamako et les lois à caractère général édictées par le Sénégal pour la gestion des déchets, des institutions œuvrent et veillent au gré. 3-2 cadre institutionnel Le caractère transversal de la gestion des déchets incite le concours de beaucoup de structures pour une réponse efficace à la problématique de l’étude. Le Ministère de l’Environnement, de la Protection de la Nature, des Bassins de Rétention et des Lacs artificiels (MEPNBRL) est l’autorité interpelée au premier chef pour la prise en charge des déchets. Par le biais de la 6 En 2006, dans plusieurs sites de la ville d’Abidjan (Côte d’Ivoire), le navire Probo Koala a déchargé plusieurs centaines de tonnes de déchets toxiques présentant des produits toxiques comme les mercaptans et l’hydrogène sulfuré. Le bilan sanitaire fait état de huit décès, plusieurs dizaines de personnes hospitalisées et environ 100 000 consultations médicales. 34 Direction de l’Environnement et des Etablissements Classés (DEEC) définissant la politique environnementale du Sénégal et coordonnant son exécution, ce ministère veille à l’application de la loi relative aux déchets dangereux et au respect des Conventions de Bâle et de Bamako. Pour plus de performances dans sa démarche, la DEEC s’appuie sur ses trois divisions à savoir la division chargée de la lutte contre les pollutions et nuisances, celle chargée des études d’impacts environnementaux et enfin celle s’occupant de la communication, de l’information et de la sensibilisation sur les questions environnementales. L’article L 34, chapitre III du code de l’environnement, confère au ministère de l’environnement les compétences de fixer les conditions de la gestion écologiquement rationnelle (GER) des déchets en collaboration avec les autres ministères concernés directement et/ou indirectement. Il s’agit : Du Ministère de la Santé et de la Prévention médicale, qui dans son programme, accorde une importance particulière à la lutte contre l’insalubrité. L’état de l’environnement pouvant déterminer l’état de santé des individus, sa prise en charge est une forme de prévention contre certains effets indésirables ; Du Ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat, de l’Hydraulique urbaine, de l’Hygiène publique et de l’Assainissement, ministère tutelle de l’APROSEN ; Du ministère du commerce pour un suivi des importations de déchets sur le territoire ; Et du ministère de la décentralisation et des collectivités locales. La coordination des actions de tous ces ministères donne une efficacité aux projets de gestion des déchets et peut faciliter le respect des textes et règlements établis dans ce sens. Pour faciliter cette harmonie, la DEEC devrait abriter un cadre de concertation des représentants de tous les services d’environnement des ministères concernés. Après la définition de la politique environnementale, l’exécution fait appel à des sociétés concessionnaires et à des prestataires privés. Suite au succès de l’APRODAK dans la gestion de l’environnement à Dakar, il a été question d’étendre à l’échelle nationale ses réalisations avec la création d’une agence nationale de la propriété. Ainsi l’APROSEN est créée par décret no 2006-08 du 09 janvier 2006. Ses actions vont dans le sens de renforcer les capacités techniques des acteurs impliqués dans la gestion de l’environnement et d’aider l’Etat à réussir son programme d’appui équitable aux collectivités locales dans la gestion de leur environnement immédiat. L’APROSEN participe à l’élaboration de la stratégie nationale de gestion des déchets en relation avec les pouvoirs publics qui la valide. Malgré que cette 35 société assure ce travail, il existe toujours des difficultés d’accès équitables aux opportunités offertes aux collectivités locales par l’Etat demeurent. La différence est nettement observée à Dakar où la CADAK, créée par décret no 2004-1094 du 04 août 2004, assure la gestion des déchets et de la voirie d’une partie très limité de la région (Plateau et Médina) avec sa société concessionnaire (Veolia). Pour harmoniser et développer des actions concertées des systèmes de gestion de la salubrité dans l’espace dakarois, l’entente CADAK/CAR a vu le jour en 2005. Le ministère de l’environnement s’appui sur d’autre prestataires privés pour assurer la gestion des ordures des zones non couverte par l’entente CADAK/CAR, cela pose le problème des disparités dans la gestion de l’environnement à Dakar. Les systèmes de gestion des déchets à Dakar ne bénéficient pas d’infrastructures pour le traitement ultime des déchets. Fort de ce constat, une attention particulière doit être accordée à la gestion des déchets dangereux dont les effets indésirables sont plus significatifs. Au demeurant, une coordination des actions de tous les acteurs impliqués pour l’élaboration d’un plan national de gestion des déchets dangereux intégrant les DEEI, est nécessaire pour la réduction de la masse et de leurs impacts sur l’environnement et la santé. Cela peut permettre de développer des progrès, notamment sous un angle préventif. Car mieux vaut, en effet, éviter de produire des déchets, plutôt que d’avoir à les éliminer une fois qu’ils sont là. Ainsi un état des lieux est à faire pour mieux apprécier la situation qui s’impose à Dakar.
La situation des déchets dangereux, cas des déchets d’équipements électroniques et informatiques
Les déchets dangereux Les déchets dangereux sont classés en fonction de leurs possibilités de porter atteinte à l’environnement et à la santé humaine. Ils sont de nature très diverses et peuvent provenir des industries, des hôpitaux, des ménages, des entreprises… Les déchets dangereux identifiés sont de natures solide, liquide ou gazeux. Les déchets solides sont entre autre les métaux, les plastiques, les déchets électriques électroniques et informatiques. Les déchets liquides sont généralement des produits chimiques (huiles, graisses, solvant usé…) Les déchets gazeux résultent des émissions de gaz dans les différents secteurs d’activités (industrie, agriculture…) Les déchets biomédicaux sont des déchets résultant des structures médicales. L’agglomération de Dakar concentre tous les Etablissements Publics Sanitaires de niveau 3 (EPS 3), 90 % des cabinets de spécialistes, 61 % des cabinets de médecins généralistes et 60 % des cliniques privées (IAGU, 2007). La DEEC, assurant le point focal de la convention de Bale et de Bamako, est chargée de traduire les Conventions dans la législation sénégalaise et de mettre sur place des instances pour leur application. C’est dans ces circonstances que le Plan National de Gestion des Déchets Dangereux de 1999 a été mené. A la suite d’un entretien réalisé avec les responsables de la DEEC chargés de l’application des conventions de Bale et de Bamako, il en ressort qu’aucune décision, prenant en charge spécifiquement les DEEI, n’émane de ces traités. Le problème de la gestion desdits déchets est observé dans tous les secteurs d’activités. Les équipements électroniques et informatiques utilisés dans les laboratoires d’analyses et dans les services d’accueils et d’informations, constituent une part non négligeable des déchets dangereux identifiés dans les structures hospitalières. A l’exception de quelques 37 hôpitaux qui bénéficient d’incinérateurs, aucune infrastructure de traitement ultime des déchets dangereux n’est disponible (SENECLIC, 2009). La gestion des DEEI constitue un lourd fardeau pour les ménages et les multiservices. Ces déchets finissent leur vie en décharges ou se trouvent stocker dans les ateliers de réparation, les magasins ou même les maisons sans suite favorable. Eu égard à l’augmentation rapide des déchets d’équipements électroniques et informatiques (DEEI) et à l’impérieuse nécessité de leur gestion, une analyse situationnelle demeure importante.
Les déchets d’équipements électroniques et informatiques (DEEI)
A l’instar de toutes les nations, le Sénégal connaît une évolution croissante des déchets d’équipements électroniques et informatiques. La mondialisation et la libéralisation des échanges ont facilité la circulation des produits à l’échelle planétaire. Les équipements électroniques et informatiques font partie de notre vie de tous les jours. Pour s’informer, pour communiquer et pour accomplir certaines tâches inhérentes de la vie sociale, un recours aux dits équipements s’impose. Les équipements électroniques et informatiques par le biais des coopérations ou d’importateurs, finissent leur vie dans notre pays. La masse des DEEI est constituée par les équipements entiers ou les résidus, les matériaux, les substances ou débris leur appartenant, qui sont rejetés à la suite d’un processus de production, de fabrication ou d’utilisation. Ils sont produits principalement aux niveaux des ménages, des utilisateurs professionnels ou au niveau des acteurs de la valorisation. Après la production, ces DEEI entrent dans une phase de gestion. Celle-ci est l’œuvre des réparateurs, des recycleurs, des récupérateurs. Alors que ces acteurs et les institutions actuelles qui œuvrent dans la gestion des déchets ne sont pas suffisamment outillés pour gérer rationnellement ces types de déchets, ces dernier se diversifient et augmentent suivant une tendance exponentielle. Dans une société où le taux d’équipements est de plus en plus élevé et où les produits sont très rapidement obsolètes avec l’évolution rapide des technologies, les quantités de DEEI s’accroissent. Un argument suffisant pour développer une réflexion autour de la question de la prise en charge de ces résidus dont les effets indésirables sur l’environnement et sur la santé ne sont plus ignorés. Malgré les conventions et les textes en vigueur, le problème demeure et devient de plus en plus complexe. 38 Le flux global d’équipements électriques et électroniques entrant annuellement au Sénégal a subi une augmentation de 25% par ans de 2000 à 2007 (Douane sénégalaise, 2008), ce qui augmente évidemment le taux de déchets pendant cet intervalle de temps très court. Certains distributeurs désignés confirment leur prise de conscience de la situation par des opérations de reprise et de réparation d’équipements obsolètes destinés après à des œuvres sociales. SAMSUNG – CCBM électroniques est un exemple qui s’est fait distingué au Sénégal, par son opération « Révolution », en organisant des réparations gratuites des équipements SAMSUNG (Ndoye, 2010). Etant donné que des marques et des équipements utilisés se diversifient à Dakar, des actions de ce genre doivent être amplifiées pour une diminution significative des DEEI. En se basant uniquement sur le poids qui varie selon les équipements et selon la gamme pour un même type d’équipement, l’évolution de ce flux sera difficilement appréciable. En effet, ils deviennent, de plus en plus, « intelligents » et performants avec des composantes plus légères. En illustration de cette situation, le cas impressionnant des téléphones portables au Sénégal nous semble pertinent. Bien que la tendance géométrique des flux (en poids) soit négative (- 2%) lorsque l’analyse prend en considération les données de la période 2000 à 2007, leur nombre a pourtant augmenté durant la même période (SENECLIC, 2009). A cet effet, beaucoup de paramètres (le nombre, le poids, les services rendus…) doivent être pris en compte pour une analyse tendancielle de chaque équipement donné.
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