L’Église et l’État dans la correspondance de Saint Augustin
De Valentinien à Honorius (364- 395)
André Piganiol, op.cit. p. 163. Pour des informations relatives à l’abandon de la Perse et de l’Arménie, voir Ammien-Marcellin, XXV, 6-7 et Zosime, III 44 D’après Piganiol Jovien s’était empressé de signer ce traité de paix pour fortifier son pouvoir personnel car il craignait Procope et les Gaulois. P.163. L’Empire romain devait céder cinq des neuf satrapies acquises en 297, le protectorat d’Arménie, ainsi que quinze places fortes frontalières, s’il voulait ramener ses armées indemnes. L’Église et l’État dans la correspondance de saint Augustin avec les hauts fonctionnaires de l’État romain par Sergino Paolo César Diedhiou 37 1. Le règne de Valentinien (364-375) D’après André Piganiol, l’empereur Valentinien était un homme vigoureux avec des cheveux blonds et des yeux gris. C’était un militaire, un officier qui avait le sens du patriotisme. Son règne est marqué par des réformes militaires, politiques et sociales, mais aussi par des guerres contre les Alamans sur les frontières gauloises et contre Firmus, en Afrique. Sur le plan religieux, l’empereur Valentinien prit totalement le contre-pied de ses prédécesseurs en prônant sa neutralité dans les problèmes de religion. Toutefois il aura à prendre des décisions importantes au sujet de ces groupes religieux présents au sein de l’empire. a. La politique administrative et militaire de Valentinien Au début de son règne, Valentinien n’avait qu’un souci, celui de protéger les frontières contre l’invasion des Barbares précisément des Alamans. Ammien Marcellin décrit l’engagement de l’empereur au début de son règne : « L’empereur Valentinien avec un excès de zèle, manifestait un brûlant désir de protéger les frontières ce qui était du reste louable ; c’est pourquoi il exigea la construction d’un camp au-delà du Danube dans les territoires des Quades (peuples Germains) comme si cela avait été prévu par la loi. » 46 En effet, ces Alamans avaient profité de la mort de Julien pour multiplier leurs incursions meurtrières qui finirent par défaire Charietto, le comte des deux Germanies (supérieure, inférieure), parce qu’il avait tenté d’arrêter leurs opérations. Alors Valentinien s’installa à Paris pour surveiller les mouvements de ces peuples barbares. De ce lieu, il envoya le magister equitum (maitre de la cavalerie) Jovin qui anéantit les barbares et sécurisa la Gaule. Parallèlement à ce souci de défendre la frontière rhénane, Valentinien annonce d’importantes mesures légales relatives d’abord au contrôle des armes pour lutter contre les pastores, puis il prend des mesures contre les déserteurs de l’armée, incitant tout de même l’engagement des jeunes dans l’armée en augmentant les avantages fiscaux, sociaux et économiques. Il instaure 45 André Piganiol, op.cit. p. 190. 46 Ammianus Marcellinus, Liber XXIX, 2 : « Valentinianus enim studio muniendorum limitum glorioso quidem sed nimio ab ipso principatus initio flagrans, trans flumen Histrum in ipsis Quadorum terris quasi Romano iuri iam vindicatis aedificari praesidiaria castra mandavit. » L’Église et l’État dans la correspondance de saint Augustin avec les hauts fonctionnaires de l’État romain par Sergino Paolo César Diedhiou 38 aussi l’impôt pour tous sans distinction de religion, puis il réforma la poste en confiant l’administration aux honorati,enfin il institue une loi contre les délateurs. Zosime nous fait savoir qu’après le partage de l’Empire avec son frère Valens, Valentinien exerça le pouvoir avec une rigueur accrue. Il nomma avec méthode de hauts fonctionnaires et se montra très exact pour ce qui concernait la perception des contributions et le ravitaillement pour l’armée qu’on se procurait grâce à elle.48 Devant la baisse des effectifs militaires, Valentinien décida de baisser la taille minimale requise pour être enrôlé dans l’armée afin de maximiser le nombre de candidats. Mais aussi il prit de nouvelles recrues chez les Barbares rhénans et chez les paysans gaulois qu’il devait soumettre à un entrainement militaire. Toutes ces mesures concouraient à avoir une gestion impériale de qualité, car presque toutes les couches sociales étaient concernées par ses réformes et cela semblait bénéfique à l’Empire. S’étant rendu à Amiens en 367 pour contrôler la Bretagne, alors en proie à des troubles militaires, l’empereur tomba gravement malade. Mais cette maladie lui donna l’idée de se trouver un successeur qui prendrait les rênes du trône en cas d’impotence. Ainsi, il éleva au rang d’auguste son fils Gratien, âgé à peine de neuf ans ; l’armée acclama le nouveau viceempereur qui reçut le diadème et la robe de pourpre, c’était le 24 août 367. Après sa campagne militaire contre les Alamans à Solicinium49 en 368, Valentinien prit la résolution de fortifier la ligne du Rhin. Ammien Marcellin nous livre dans son Histoire romaine une description de cette forteresse avec ses murs imposants qui auraient permis de réduire la capacité de nuisance des barbares à l’intérieur du territoire impérial. 50 Dans beaucoup de ses campagnes militaires, Valentinien bénéficia de l’expertise militaire d’un grand stratège, le magister equitum Théodose l’Ancien, père du futur empereur. Théodose a beaucoup aidé Valentinien dans le règlement de ses conflits qui l’opposaient aux Barbares en Europe et aux circoncellions en Afrique. En effet, il pacifia d’abord la Bretagne qui était infestée par les pirates saxons, restaura le mur d’Hadrien et fit de la ville de Londres une capitale en la renommant Augusta51 . Puis il s’attaqua aux Alamans en Rhétie (au sud de la Bavière) en les repoussant jusqu’à la plaine du Pô et combattit les Sarmates qui représentaient une menace pour la ville de Sirmium. En Afrique, Théodose vint à bout de Firmus, ce prince berbère qui avait tenu tête à l’armée romaine avant l’arrivée du général. Firmus avait le soutien des circoncellions et des donatistes qui menaient une lutte acharnée contre le pouvoir impérial et l’Eglise catholique. Après la chute de Firmus, Théodose l’Ancien meurt décapité en 376 à Carthage. Cependant il est difficile de trouver des réponses quand on veut savoir d’abord la cause de sa mort, ensuite l’auteur de sa décapitation, et enfin celui ou ceux à qui profitait la mort de Théodose. Toutefois il faut souligner qu’il s’était attiré l’hostilité du comte Romanus qu’il avait arrêté, or ce dernier était un ami de Mérobaud un magister militum sous Valentinien et consul sous Gratien. Il y a donc quand même une forte probabilité de voir Romanus impliqué dans la mort de Théodose l’Ancien, car il eut la chance d’avoir été acquité par Mérobaud après son arrestation. Mais André Piganiol atteste que c’est sous l’ordre de Gratien que Théodose fut décapité car Valentinien 1er étant déjà mort un an plus tôt, c’est en toute logique que les décisions politiques reviennent à son fils qu’il avait fait auguste neuf ans plus tôt. La cause de la condamnation rapide et surprenante de Théodose peut être liée à une crainte de voir le magister equitum usurper le pouvoir parce qu’il était devenu célèbre grâce à ses succès militaires. La seule question qui se pose, c’est de savoir à qui profitait la mort de Théodose. Nous écartons d’emblée, l’hypothèse selon laquelle Valentinien aurait donné l’ordre de le condamner, puisqu’il semble que Théodose jouissait de beaucoup de faveurs pendant le règne de cet empereur et qu’en retour, il avait réussi à juguler la menace barbare et celle des circoncellions. C’est pourquoi l’hypothèse d’un ordre venant de Gratien reste la plus plausible d’autant plus que le jeune empereur était entouré de personnages assez influents et ennemis du magister equitum. Il s’agit de Maximinus, magister officiorum, de Romanus, comes Africae, de Merobaudes (Mérobaud), consul et de Petronius Probus, magister militum de Gratien et praefectus praetorio sous Valentinien. Ces derniers seraient jaloux des succès militaires de Théodose et peut être, craignaient-ils qu’il usurpât le pouvoir depuis l’Afrique (Carthage). On retiendra toutefois que Valentinien avait l’un des meilleurs généraux avec lequel il a su régler des situations périlleuses en Bretagne, en Rhénanie et en Afrique. Mais André Piganiol trouve malheureux que l’empereur ne puisse pas s’entourer de « conseillers assez cultivés et intègres », préférant la compagnie des militaires, ce qui est du reste, assez compréhensible parce que l’Empire se trouvait en perpétuelles crises militaires liées aux attaques barbares. Il fallait donc s’entourer de personnes aguerries et expérimentées dans l’art de la guerre pour retrouver un climat apaisé. Cependant leurs ambitions et leurs intérêts personnels les éloignaient souvent des idéaux politiques et étatiques. Sur le plan politique et social, Valentinien semblait avoir une compassion envers les plus pauvres, les paysans et les artisans qui travaillent durement pour lutter et sortir de la pauvreté. Comme nous le montre le Code théodosien XIII.3.8 ; au sujet des médecins et des professeurs, Valentinien s’adresse surtout aux médecins de la cour impériale à qui il demande plus d’attention et plus de soin pour les pauvres que pour les riches : « Les Empereurs Valentinien, Valens et Gratien à Prétextat, préfet de Rome. Que les médecins de la cour impériale soient installés aussi bien dans les périphéries de la ville que dans la cour impériale à l’exception du portique de Xystum des vierges et des vestales. Et que pour leurs avantages, ceux-là veuillent bien se mettre honnêtement, au soin des plus démunis plutôt que de s’occuper des riches.» 55 En outre, en ce qui concerne la défense des cités, il manifestait le souci de protéger la plèbe. Dans une correspondance adressée à Sextus Petronius Probus, alors préfet du prétoire d’Illyrie, il demande à ce qu’il y ait des hommes forts pour défendre la plèbe contre les injustices venant des plus puissants : « Les empreurs Valentinien et Valens à Probus, préfet du prétoire. Puisque nous légiférons avec passion pour la plèbe, nous avons pensé que rien n’avait été fait en leur faveur, sinon nous leur aurions donné des protecteurs idoines. Donc qu’ils ne proviennent pas du corps des décurions mais d’un autre plus illustre, assurément qu’ils proviennent des magistrats tels que les anciens consuls et les chefs dans l’administration, ou qu’ils proviennent des agentes in rebus ou des officiers de l’armée, qu’ils fassent partie de l’élite de vos vicaires. Donné le 03 des nones de novembre sous l’augustat de Valentinien et de Valens.»
La politique religieuse de Valentinien
Valentinien et son co-empereur Valens, ont mis en place leur politique religieuse dans un contexte troublé, marqué par l’héritage des querelles théologiques sous Constance et la renaissance païenne sous Julien. Valentinien, pour sa part opte pour la neutralité et la liberté de conscience au début de son règne car, à notre avis, il était plus préoccupé par la situation La tendance à la baisse de fréquence des hivernages à début précoce est liée à la fréquence des hivernages à fin tardive qui traduit une prédominance des saisons normales (60% de début normaux et 93% de fins normaux) (Tableau18). .I.1.5 Durée de l’hivernage et fréquence des événements pluvieux à la station de Linguère de 1950 à 2010 Les débuts et fins d’hivernage varient d’une saison à l’autre tout comme l’est les mois pluvieux. A l’image de la durée des saisons pluvieuses, l’analyse de la dynamique des débuts et de fins d’hivernage sont affectées, au même titre que l’évolution de la pluviométrie, par une rupture à partir de 1969. Ainsi de 1950 à 1969, on a pu constater que 70% des saisons ont une durée supérieure à la durée normale contre 30% des saisons à durée normale. politique de l’Empire que par les problèmes religieux. Toutefois, comme la plupart de ses prédécesseurs, il aura à s’occuper de quelques questions religieuses. Le conflit entre les Papes : Damase et Ursin Depuis l’an 358 sous le règne de Constance II, il y avait à Rome deux papes : Libère et Félix. Deux papes qui étaient séparés à cause de la question arienne qui divisa l’Eglise au temps de Constance II. Après la déportation de Libère qui s’opposait farouchement à l’empereur, Félix fut élu évêque sous la pression et les manigances de Constance II. Cependant, seul le clergé reconnaissait ce nouveau pape, mais pas le peuple qui était du côté de Libère. Or après le retour d’exil de Libère en 357, le peuple choisit le camp de celui-ci et Félix fut chassé. Et depuis, Rome avait un pape pour le peuple et un autre pour le clergé. Félix mourut plus tôt, en 365 et Libère en 366 à Rome. A la mort du Pape Libère le 24 septembre 366, le diacre Ursin se précipita pour se faire élire pape à cette même date et se fait consacrer dans la basilique Julia de Rome. Huit jours après, le 1er octobre 366, c’est au tour de Damase, un diacre qui avait suivi le pape Libère lors de sa déportation, de se faire consacrer dans la basilique, saint Laurent de Lucine. Ce conflit entre les partisans de Damase et ceux d’Ursin provoqua un schisme au sein de l’Eglise de Rome. L’affrontement entre les partisans des deux évêques fut violent et meurtrier car selon Ammien Marcellin on avait dénombré cent trente-sept cadavres57 en un seul jour de combat. Damase sortit vainqueur de ce conflit pour avoir bénéficié du soutien populaire et celui du préfet Viventius qui n’hésita pas à déporter les partisans d’Ursin. Cette épisode montre effet la forte influence politique et la grande autorité de Damase. Alors Valentinien envoya durant l’été 367 le préfet Prétextat pour unir les deux partis, mais c’était une tentative qui échoua car les troubles avaient continué jusqu’en 371, une année qui voit Ursin et ses partisans interdits de séjour à Rome et dans l’Italie suburbicaire
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