LA PROTECTION DU TRAVAILLEUR CONTRE LE RISQUE PROFESSIONNEL
La conformité de la liste des maladies professionnelles au modèle international
Comme précedemment indiqué, la liste des maladies professionnelles est établie sous formes de tableaux. Ceux-ci témoignent de la modernité du moment qu’ils sont établis en fonction de la liste des maladies professionnelles la plus récente adoptée par l’O.I.T445. Le législateur sénégalais s’est en effet inspiré de cette liste internationale pour actualiser sa liste nationale de maladies professionnelles (§ 1) qu’il avait anciennement adoptée et qui s’est révélée par la suite dépassée. Cependant, eu égard aux nouvelles réalités qui caractérisent le monde du travail446 qui justifient une meilleure modernisation des tableaux, une nouvelle actualisation de la liste est attendue (§ 2).
Une liste actualisée en référence au modèle international nouvellement consacré
La liste nationale des maladies professionnelles n’est pas immuable. Elle a la vocation à évoluer constamment en prenant en considération les réalités nouvelles. Dans sa logique de se conformer aux normes internationales standards en la matière, le législateur sénégalais a mis à jour ses tableaux en reprenant la classification nouvellement consacrée par l’O.I.T. (A). Cependant, quand bien même il a adopté la même classification, force est d’admettre qu’il n’a pas repris intégralement la nouvelle liste internationale (B). A- L’adoption de la classification internationale 97. En application de la réglementation de l’O.I.T. qui a révisé sa liste, pour la dernière fois en date, le 25 mars 2010, Le législateur sénégalais a mis à jour ses tableaux des maladies 445 Recommandation n° 194 concernant la liste des maladies professionnelles et l’enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. professionnelles. Il a quasiment repris l’intégralité de la liste révisée de l’organisme international. La reprise s’est faite à travers l’arrêté interministériel n° 2312 du 08 mars 2011 portant tableaux des maladies professionnelles, qui a en conséquence abrogé celui de 1991447 . A la lumière de la nouvelle liste internationale, l’arrêté interministériel précité a désormais classé les maladies en quatre catégories : les maladies professionnelles causées par l’exposition à des agents résultant d’activités professionnelles, les maladies professionnelles affectant des fonctions et organes cibles, le cancer professionnel et les autres maladies. – Les maladies professionnelles causées par l’exposition à des agents448 , 98. Reprenant la classification de l’O.I.T., le législateur sénégalais en distingue trois. D’abord les maladies causées par des agents chimiques. Un agent chimique correspond à un corps chimique ou un composé chimique tiré de ce corps dans son état naturel ou modifié449 . Les agents chimiques sont bien nombreux450 et très dangereux pour la santé451, l’arrêté interministériel sur les maladies professionnelles en a cité quarante-trois (43). Pour chacun, il est établi la liste des maladies professionnelles pouvant en découler452. Ce qui fait qu’il y a donc quarante-trois tableaux de maladies professionnelles qu’ils peuvent provoquer. Ensuite, l’on note les maladies causées par les agents physiques, lesquels sont constitutifs d’énergies particulières inhérentes à l’environnement du travail. Plus précisément, ils « sont des sources d’énergie qui peuvent causer des blessures ou des maladies » 453. Au même titre que les agents chimiques, ils nuisent à la santé du travailleur en cas d’exposition en quantité suffisante. La liste des agents physiques que le droit sénégalais a dressée est presque la même que celle qui est retenue par l’O.I.T.454, une autre manifestation de sa modernité. A partir du moment où il a listé huit agents physiques455 comme l’O.I.T, le législateur sénégalais a dressé huit tableaux. Chacun énonçant les maladies susceptibles d’être provoquées par l’agent physique visé. Enfin, il y a les maladies causées par les agents biologiques qui sont des micro-organismes, comme les bactéries, les champignons, les parasites ou leurs composantes, les virus456. Ils sont très présents dans les laboratoires de bactériologie et les mines, mais aussi dans les secteurs de la santé, de l’agriculture, de l’élevage et du bois notamment457. Notre droit qui en a indiqué treize variétés a donc établi treize tableaux de maladies professionnelles qui peuvent en découler458 . Telles sont, en droit sénégalais, les trois groupes de maladies qui sont provoquées par les agents chimiques, physiques et biologiques. Il faut tout de même remarquer que les listes des agents sont données à titre limitatif. Elles sont fermées459 alors que la réglementation de l’O.I.T. dont le législateur sénégalais s’est inspiré préconise leur ouverture460. A la faveur d’une meilleure protection des travailleurs, il est souhaitable qu’il suive cette logique d’ouverture. Il faut reconnaître qu’il a essayé de laisser ouverte la liste des maladies découlant des agents même si ceux-ci sont cités à titre limitatif. Cet effort d’ouverture témoigne quand même d’une certaine hésitation de sa part. En effet, pour certains agents, les maladies énumérées le sont à titre indicatif alors que pour d’autres, elles le sont à titre limitatif. Heureusement, les listes indicatives sont beaucoup plus nombreuses que les listes limitatives de maladies professionnelles. Ce fait nous amène alors à soutenir que le caractère indicatif des listes est le principe et le caractère limitatif, l’exception. – Les maladies professionnelles affectant des fonctions et organes cibles 99. Nous référant à la recommandation n° 194 déjà évoquée, nous comprenons qu’il s’agit de maladies qui affectent des parties déterminées de l’organisme humain. L’O.I.T. en distingue quatre classes, à savoir les maladies de l’appareil respiratoire, les maladies de la peau, les troubles musculo-squelettiques et les troubles mentaux et du comportement. S’inspirant très largement de la liste internationale, notre législation nationale a fait la même classification mais en ne reprenant que les trois premières classes, préférant écarter la quatrième, en l’occurrence les troubles mentaux et du comportement461 . En vertu de l’arrêté interministériel sur les maladies professionnelles, les maladies de l’appareil respiratoire462 sont classées en deux tableaux463, chacun énumérant les maladies concernées après avoir indiqué les facteurs en cause. Mais à ce niveau, le législateur sénégalais semble manifester encore une certaine hésitation. Il a décidé de reprendre la classification de l’O.I.T. mais sans respecter toute sa logique d’ouverture. Alors que celle-ci cite de manière indicative les types de maladies de l’appareil respiratoire et les facteurs pouvant en être à l’origine, notre droit adopte une démarche intermédiaire. Ce qui attire particulièrement l’attention, c’est que seul l’un des deux indique les facteurs en cause464, l’autre restant muet sur la question. .
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