CANCERS DES PARTIES MOLLES BUCCO-FACIALE
Diagnostic anatomo-pathologique
Même si le diagnostic est souvent suspecté cliniquement, la réalisation d’une biopsie est toujours recommandée. Pour des petites lésions, une biopsie-exérèse permet d’enlever complètement les tissus atteints. Et pour des lésions plus étendues, un prélèvement biopsique est généralement réalisé. Elle doit être suffisamment profonde, afin de dépister un composant infiltrant avec une marge de la peau d’apparence saine. C’est à l’anatomo-pathologiste que revient la prise en charge des prélèvements et d’apprécier le caractère complet ou incomplet de l’exérèse. 16 Le compte rendu doit préciser le type histologique de la tumeur, son degré de différenciation, son caractère in situ ou infiltrant et la mesure de l’épaisseur maximale du front d’invasion. Cet examen permet ainsi d’évaluer le pronostic et d’indiquer le traitement adéquat.
Bilan d’extension
La suspicion d’un envahissement locorégional et ou à distance peut justifier la réalisation d’examens complémentaires d’imagerie tels que : − Le cliché panoramique dentaire : il peut mettre en évidence un envahissement osseux sous la forme d’une image lytique. − Le scanner ou Tomodensitométrie (TDM) cervico-facial, cérébral et thoraco-abdomino-pelvien : il trouve son intérêt dans la recherche d’adénopathies profondes et d’extensions osseuse et viscérale. − L’imagerie par résonnance magnétique (IRM) : elle est d’un avantage certain dans l’appréciation de l’extension au niveau des parties molles. − La radiographie pulmonaire : elle sera systématique à la recherche de métastases pulmonaires. − La scintigraphie osseuse : elle sera indiquée en cas de douleurs osseuses à la recherche de métastases osseuses. − L’échographie abdominale : elle est indiquée en cas de douleurs abdominales ou d’ascite faisant suspecter une dissémination.
Bilan préthérapeutique
− le bilan préopératoire standard (état général du patient, comorbidités, groupages sanguins rhésus, bilan d’hémostase, sérodiagnostic de la syphilis et VIH), − le bilan préchimiothérapie (hépatique, rénal, cardiaque, respiratoire, sanguin).
Traitement
But − Eliminer les cellules tumorales. − Eviter les métastases et les récidives tumorales.
Traitements proprement dits
C’est au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) qu’on décide la stratégie thérapeutique. Elle fait intervenir les chirurgiens (ORL ou maxillo-faciaux, plasticiens), les oncologues médicaux, les radiothérapeutes, les anatomo-pathologistes, et les spécialistes en imagerie. Après la suppression totale de l’intoxication éthylo-tabagique, ainsi qu’une éradication de tous les foyers infectieux dentaires, trois options thérapeutiques vont être combinées en fonction du stade d’évolution du cancer.
Moyens − Chirurgie
Le traitement est essentiellement chirurgical, mais dépend du stade d’évolution et de la nature de la tumeur. Le but est d’enlever la tumeur en totalité, en emportant une «marge de sécurité», c’est-à-dire en passant au large, sur les côtés et en profondeur, afin d’éviter la récidive. La pièce opératoire sera envoyée à l’anatomo-pathologiste afin de confirmer le diagnostic et vérifier les marges. Le curage ganglionnaire est indiqué en fonction du stade d’évolution de la tumeur [28]. − Chimiothérapie La chimiothérapie est un traitement à la fois local, régional et général. Elle empêche la dissémination à distance. Elle peut être néo-adjuvante (indiquée avant la chirurgie et ou la radiothérapie pour diminuer la taille de la tumeur) ou adjuvante (indiquée après la chirurgie et ou la radiothérapie pour limiter le risque de récidive) soit concomitante à la radiothérapie. Elle peut être curative si la tumeur est curable ou palliative lorsque le pronostic vital est engagé et l’incurabilité est certaine, ou lorsque la radiothérapie et la chirurgie sont contre-indiquées [28]. 18 − Radiothérapie Il s’agit d’un traitement locorégional. Son objectif est de détruire les cellules tumorales tout en épargnant les organes sains environnants. Elle peut être néo-adjuvante (indiquée avant la chirurgie pour diminuer la taille de la tumeur) ou adjuvante (indiquée après la chirurgie pour limiter le risque de récidive) soit concomitante à la chimiothérapie. On distingue deux types : la radiothérapie externe et la curiethérapie.
Elle impose un contrôle histologique préalable de la tumeur traitée. Cette technique consiste à utiliser soit les rayons X de basse énergie, soit les photons ou électrons pour la radiothérapie de haute énergie, soit la radiothérapie interstitielle (curiethérapie). Les radiations vont ioniser les cellules cancéreuses et altérer leur ADN. Les cellules saines seront touchées également par le faisceau mais seront plus aptes à s’auto réparer. Le choix de la radiothérapie dépendra de la localisation tumorale, du type histologique de la lésion et de son extension. La dose totale délivrée est comprise entre 50 et 70 Grays. Cette dose est administrée par fractionnement de 1,8 à 2 Grays par séance, à raison de 5 séances de 10 minutes par semaine [28]. − Association thérapeutique Elle est indiquée en cas de tumeur étendue, et ou en présence des facteurs de risque de dissémination locorégionale tels que les marges d’exérèse insuffisantes, l’emboles néoplasiques, l’envahissement ganglionnaire multiple, et les ruptures capsulaires.
Indications
Les cancers cutanés de la face
La chirurgie • L’exérèse chirurgicale classique Elle doit être carcinologique, c’est-à-dire que le traitement est toujours chirurgical quelque soit la taille de la tumeur (petite ou grande). L’exérèse ne tient pas compte de la réparation. Et la marge d’exérèse varie de 3 à 10mm pour les carcinomes basocellulaires et pour les carcinomes épidermoïdes, elle varie de 1cm dans les formes débutantes et 3 à 6cm dans les formes évoluées. 19 L’examen histologique est systématique pour confirmer la totalité de l’exérèse. Et si elle n’est pas complète, on doit faire la reprise de sécurité. L’exérèse peut être en un seul temps. Elle est tout de suite suivie de suture si le résultat de l’examen anatomo-pathologique est complet.
Mais elle peut être aussi en deux temps c’est à dire, qu’après l’exérèse initiale, on procède après quelques jours à une reconstruction plastique (utilisation de lambeau cutané local, d’une greffe cutanée, ou d’une cicatrisation dirigée de la perte de substance…). Le curage ganglionnaire est indiqué en cas d’atteinte ganglionnaire [29]. • La chirurgie micrographique de Mohs Proposée par MOHS en 1941, cette technique nécessite une coordination permettant de réaliser en même temps le geste chirurgical, les coupes en congélation et la lecture des lames sur place par les anatomo-pathologistes. Et permet l’étude à 100% des marges chirurgicales latérales et profondes. Le sacrifice inutile de peau saine est ainsi évité. Par contre sa réalisation est très coûteuse [30]. Chimiothérapie Elle est avant tout basée sur l’utilisation de sels de platine. Elle peut être néo-adjuvante. Et elle est aussi indiquée en cas de tumeurs inopérables et ou métastatiques. Radiothérapie Si la chirurgie est contre-indiquée, la radiothérapie est indiquée notamment pour les tumeurs récidivantes, inopérables, et ou en cas d’effraction de la capsule ganglionnaire. La radiothérapie est contre indiquée en cas de carcinomes basocellulaires sclérodermiformes et dans les syndromes de prédispositions génétiques.
Les cancers de la cavité buccale
Le traitement est essentiellement chirurgical surtout dans les formes initiales. Si la tumeur est limitée et petite avec une marge d’exérèse saine, la chirurgie seule suffit. Le curage ganglionnaire n’est indiqué qu’en cas d’atteinte ganglionnaire. 20 La radio-chimiothérapie concomitante est indiquée en cas de tumeurs très étendues dont les marges d’exérèses sont infiltrées par des cellules tumorale, en cas de métastases ganglionnaires et ou en cas de tumeurs inopérables. La mise en place de fluor à titre préventif est indiquée avant la radiothérapie.
Les cancers des glandes salivaires
Pour les cancers salivaires, l’exérèse chirurgicale complète de la glande salivaire est le traitement de première intention. Mais elle doit être élargie pour les cancers salivaires accessoires et en cas d’extension aux éléments nobles (nerf). Au niveau de la glande parotide, on préserve dans la mesure du possible le nerf facial. Mais s’il est atteint, on procède à sa dissection complète. Le curage ganglionnaire est indiqué en présence d’adénopathie détectable cliniquement ou sur l’imagerie. Suivie d’une radiothérapie postopératoire en cas de tumeurs de haut grade, d’envahissement ganglionnaire et ou de marges d’exérèse positives à l’examen histologique (c’est-à-dire que la chirurgie est incomplète). L’association concomitante de chimiothérapie (cisplatine avec ou sans 5-fluoro-uracile) et de radiothérapie peut être le traitement de première intention pour les cancers localement évolués, inopérables et ou récidivantes. La chimiothérapie est indiquée en situation « palliative » au cours de métastases ou tumeurs localement avancées inaccessibles à un traitement chirurgical ou à la radiothérapie .
Les cancers mésenchymateux
L’exérèse chirurgicale large de la tumeur est indiquée pour les tumeurs opérables et accessibles. Suivi d’un curage ganglionnaire en cas d’atteinte ganglionnaire. On fait la reprise chirurgicale en cas de chirurgie incomplète. La chimiothérapie peut être indiquée en néo-adjuvante. La radio-chimiothérapie concomitante n’est utilisée qu’en cas de récidive locale .
Les cancers particuliers
La chimiothérapie est indiquée pour les tumeurs malignes hématopoïétiques. La radiothérapie est complémentaire à la chimiothérapie. 21 Pour les mélanomes non métastatiques, la chirurgie d’exérèse large avec une marge de sécurité latérale de 1 à 3cm est indiquée (en fonction du type histologique et épaisseur). Et la marge de sécurité en profondeur est réalisée selon la topographie anatomique et emportant tout l’hypoderme. Suivie d’un curage ganglionnaire en cas d’atteinte ganglionnaire. Pour les mélanomes métastatiques, la chimiothérapie dite « palliative » est indiquée. A l’état actuel, deux voies thérapeutiques sont apparues ce sont la thérapie ciblée et l’immunothérapie
Surveillance
Le suivi permet de détecter à temps une éventuelle récidive, extension à distance et dépister les effets indésirables des traitements. Le rythme de surveillance dépend de l’agressivité tumorale évaluée lors du diagnostique. Pour les tumeurs agressives et intermédiaires, la surveillance est réalisée tous les trois mois pendant deux ans, puis deux fois par an jusqu’à la cinquième année, puis une fois par an.
INTRODUCTION |