CAUSES D’HOSPITALISATION ET DE DECES DES PATIENTS INFECTES PAR LE VIH
Prévalence et caractéristiques sociodémographiques des patients
Prévalence hospitalière
La prévalence hospitalière de l’infection à VIH dans notre étude était de 3,2%. Notre résultat était plus bas par rapport aux données des autres pays africains. Déguenonvo et al. avaient colligé durant leur période d’étude 527 PVVIH hospitalisés sur 1947 admissions, soit une prévalence hospitalière à 27% [45]. Ntamako et al. avaient trouvé 407 cas de PVVIH sur 3381 patients hospitalisés, donnant une prévalence hospitalière de 12% [46]. Cependant, nous avions noté une réelle augmentation de la proportion de PVVIH hospitalisées à partir de 2013. En effet, la majorité de nos patients était diagnostiquée à un stade tardif de la maladie. Ce qui signifie que les patients venaient de plus en plus maintenant parce que leur maladie a eu le temps d’évoluer et sont de plus en plus malade. Ce qui constitue par ailleurs une défaillance dans le dépistage car l’objectif est de dépister les patients surtout au stade asymptomatique. 38 2. Nombre d’hospitalisation Vingt sept pour cent de nos patients étaient hospitalisés plus d’une fois au cours de notre période d’étude. Notre résultat est semblable à ceux de Berry et al. (38%) et Crum-Cianflone et al. (33%) [24,47]. En effet, l’infection à VIH conduit progressivement à une immunodéficience à médiation cellulaire. Ainsi, les PVVIH sont plus vulnérables aux différentes infections opportunistes ou non. Ce qui pourrait affirmer le risque accru d’hospitalisation. 3. Age, genre et stade de l’infection à VIH L’âge médian de notre population d’étude était de 36 ans. Les femmes étaient plus jeunes par rapport aux hommes puisque la tranche d’âge entre 20 et 30 ans était majoritairement composée de femme (27/42), tandis qu’au-delà de 30 ans, les hommes étaient les plus représentés. Le genre masculin était majoritaire dans notre série (61,5%) avec un sex-ratio de 1,6.Plus de 65% des patients avaient un taux de CD4<200/mm3 et 76,3% étaient au stade III/IV de l’OMS à l’admission. Les résultats de notre étude rejoignent ceux des autres pays à ressources limitées. Agaba et al.au Nigeria avaient trouvé un âge moyen de 35 ans, avec une moyenne d’âge de 39 ans pour les hommes et 33 ans pour les femmes [26]. Il était de 37 ans pour Essomba et al. à Douala avec majoritairement des femmes dans la tranche d’âge de 25 à 34 ans et des hommes au-delà de 35 ans [48]. O Kra et al. en Côte d’Ivoire avait retrouvé un âge moyen de 39 ans[49]. En fait, l’infection à VIH affecte surtout les sujets les jeunes qui sont les plus sexuellement actifs dans la population générale, et du fait de leurs comportements sexuels à risque, ils sont très susceptibles d’acquérir l’infection. Dans notre étude, les patients étaient assez jeunes mais en même temps, la majeure partie était à un stade avancé de la maladie à l’admission. Cependant, d’après la littérature, l’infection peut prendre dix ans pour évoluer vers un stade avancé de la 39 maladie [50]. Ce qui suggère donc que ces patients se sont contaminés très jeunes, probablement entre 16 à 26 ans. II. Statut immunitaire Le VIH était découvert au cours de la première admission chez 55,7% des patients. Le statut est connu antérieurement à la première hospitalisation chez 44,3% des patients. Le délai médian entre la découverte du VIH et l’hospitalisation était de 22 mois. Sur les 169 hospitalisations, les patients étaient déjà sous traitement ARV avant l’admission, seulement au cours de 68 hospitalisations, soit 40,2%. Ces résultats signifient que les patients sont diagnostiqués et pris en charge très tardivement. En fait, ceci est un problème commun à tous les pays à ressources limitées. Une étude effectuée en Afrique de l’Ouest, a révélé que 76% des patients étaient diagnostiqués avant l’hospitalisation. Cependant le délai médian entre le diagnostic et l’hospitalisation était de 3,7 mois seulement et 54% de ces hospitalisations étaient liées à des causes classant SIDA. Ce qui signifie que les patients étaient tout de même diagnostiqués très tardivement [51]. Ford et al. dans une méta-analyse sur les causes d’hospitalisations des PVVIH dans le monde avaient montré que le statut VIH était connu antérieurement à l’hospitalisation dans 70% des cas et seulement 43% des patients étaient déjà sous traitement ARV avant leur admission, avec un délai médian de 11 mois entre l’initiation de l’ARV et l’hospitalisation [23]. Le taux médian des CD4 au cours des 169 admissions était de 141/mm3 et plus de la moitié des patients avaient un taux de CD4 <200/mm3 . Notre résultat était compatible à ceux de Guerro et al., Ford et al., Essomba et al.[23,48,50]. Par ailleurs, que le VIH soit diagnostiqué avant ou au cours de la première hospitalisation, une grande proportion de notre population d’étude était classé stade III/IV de l’OMS. Au total, 76,3% des PVVIH étaient au stade III/IV de l’OMS. Des études faites à Douala, à Dakar et en Afrique de l’Ouest avaient trouvé respectivement 56,2%, 88%, et 94% de patients au stade III/IV de l’OMS [45,48,51]. En tout, la majorité de nos patients étaient diagnostiqués en cours d’hospitalisation et à des stades avancés de la maladie.
Causes d’hospitalisation
Symptomatologie à l’admission
L’altération de l’état général était rencontrée dans 65,1% des cas et l’amaigrissement dans 71% des cas. Ces résultats étaient similaires aux données de la littérature. A Dakar, l’amaigrissement et la fièvre étaient retrouvés dans 83% des cas [45]. Au Bénin, l’amaigrissement était présent dans 88% des cas et la fièvre dans 80% des cas [52]. Au Mali, une fièvre était notée chez 87,9% des patients, en Inde, 96% des patients avaient présenté une fièvre, et au Cameroun, Kouanfack et al. avaient trouvé un amaigrissement dans 76% des cas et une fièvre dans 41% des cas [53–55] En effet, la fièvre est un signe clinique commun chez les PVVIH, notamment ceux qui ne sont pas sous traitement et dont l’infection évolue. Elle est souvent causée par une infection opportuniste dont le type dépend du stade de la maladie. Mais d’autres causes doivent être considérées comme les SRIS, les néoplasies et les fièvres liées aux effets secondaires des différents traitements médicamenteuses. L’altération de l’état général est également une manifestation fréquente observée chez les PVVIH. Elle peut être liée à l’infection elle-même ou à d’autres pathologies présentes lors de la découverte de l’infection comme les diarrhées chroniques et les candidoses buccales.
Causes d’hospitalisation
Les causes d’hospitalisation des PVVIH étaient des causes classant SIDA dans 55,6% des cas. Dans une étude faite par Rakotoarivelo et al. dans le même service, 68,8% des PVVIH avaient présenté une maladie classant SIDA lors du diagnostic de l’infection[56]. Dans d’autres études, Traoré et al. au Mali et Lewden et al. en Afrique de l’Ouest avaient montré que les causes classant SIDA étaient la cause d’hospitalisation des patients dans respectivement 79% % et 54% des cas [51,55]. Cependant, dans les pays développés, une nette diminution de la prévalence des 41 admissions pour des causes classant SIDA a été rapporté depuis l’avènement de la thérapie antirétrovirale hautement actif [23,26]. La forte prévalence des hospitalisations dues à des causes classant SIDA aussi bien dans notre étude que dans les autres études au sein des pays à ressources limitées est attribuable au retard diagnostique des patients. En général, le diagnostic des maladies dans les causes classant SIDA et en particulier les infections opportunistes, est difficile. En effet, parmi les causes classant SIDA diagnostiquées lors de l’hospitalisation, seules 44,7% étaient confirmées. Ces résultats seraient en rapport avec l’insuffisance et la non disponibilité des plateaux techniques pour le diagnostic de certaines infections opportunistes. En outre, les bilans de confirmations disponibles ne sont pas toujours à la portée de tous les patients du fait de leurs coûts. Le diagnostic est alors posé sur des faisceaux d’arguments. Il y a alors un risque de sous-diagnostic avec les conséquences sur le pronostic du patient et également un risque de sur-diagnostique avec mis en route de traitement inutile engendrant des interactions médicamenteuses difficiles à gérer ou accroissant le risque de toxicité.
INTRODUCTION |