Bilan de l’azote atmosphérique à l’échelle des écosystèmes africains
L’azote (N) est un élément essentiel dans l’atmosphère terrestre, la biosphère et l’hydrosphère (Galloway et al., 2003). Le cycle de l’azote dans les écosystèmes dérive initialement de trois principales sources : la fixation biologique de N, la minéralisation et les dépôts atmosphériques. L’azote N, présent majoritairement sous la forme N2, est donc converti en N réactif (Nr), qui comprend des formes inorganiques oxydées (par exemple, NOx, HNO3, NO3(acides aminés et l’urée), avant son utilisation par des microbes ou des plantes. L’accroissement de la formation de l’azote réactif et sa redistribution globale par l’atmosphère dans l’environnement, peut avoir des impacts positifs comme une fertilisation et une amélioration de l’approvisionnement alimentaire, mais aussi négatifs sur la santé humaine et les écosystèmes. La compréhension actuelle du cycle de l’azote et de son altération par les activités humaines, est illustrée par le schéma conceptuel de la cascade de l’azote proposé par Galloway et al. (2003) (Figure 5.1).
l’atmosphère, et son accumulation dans plusieurs de leurs compartiments, mettant en exergue d’une part les risques environnementaux et de santé liés à ces accumulations, et d’autre part la partie liée aux activités humaines dans les flux observés. Après dépôt, l’azote peut induire une augmentation de l’acidité des sols, une diminution de la biodiversité, une pollution des nappes phréatiques et ainsi une eutrophisation des milieux aquatiques. Le cycle de l’azote joue donc un rôle fondamental dans l’étude des échanges biosphère- atmosphère (Galloway et al. (2003, 2008) ; Holland et al., 1997 ; Dentener, et al., 2006 ; Matson et al., 1999 ; Phoenix et al., 2006,…). L’importance de l’étude des dépôts atmosphériques est liée à « la notion de Charge Critique », une estimation quantitative de l’exposition à un ou plusieurs polluants en dessous de laquelle aucun effet néfaste sur les éléments sensibles spécifiés de l’environnement ne se produit, dans l’état actuel des connaissances (Nilsson and Grennfelt, 1988) ; l’excédent défini comme la différence positive éventuelle entre le dépôt effectif et la Charge Critique, fournit une bonne estimation de la vulnérabilité d’une certaine zone (Hirst and Storvik 2003 ; Morselli et al., 2003a,b ; Skeffington et al., 2007, Bouwman et al., 2002a, Bobbink et al., 2010). Le principal objectif de ce chapitre est de faire un bilan des dépôts atmosphériques (secs et humides) d’azote à l’échelle des écosystèmes du réseau IDAF. Ce bilan prend en compte les 3 types de mesures réalisées par le réseau qui sont : la composition chimique des pluies et des aérosols et les concentrations des gaz. Mon travail de thèse m’a permis de contribuer à une première étude de bilan du cycle de l’azote incluant les émissions et les dépôts atmosphériques à l’échelle de la région sahélienne avec une étude couplée mesures IDAF / modélisation (Delon et al., 2010). Dans ce chapitre, le deuxième objectif sera d’étendre ce bilan émission-dépôt des principales espèces azotées à l’échelle de l’ensemble des écosystèmes africains (savanes sèches, savanes humides et forêts). Le troisième objectif sera de comparer les flux de dépôt d’azote, estimés dans le cadre du programme IDAF, d’une part aux flux simulés par les modèles globaux, et d’autre part aux valeurs de charges critiques d’eutrophisation existantes dans la littérature afin d’essayer d’appréhender l’impact du dépôt d’azote sur les écosystèmes tropicaux d’Afrique de l’Ouest et Centrale.
Bilan des dépôts atmosphériques d’azote à l’échelle des écosystèmes africains
de savane sèche, savane humide, et forêt (Galy-Lacaux et al., 2009, Yoboué et al., 2005, Sigha et al., 2003). Ces études couvrent différentes périodes de mesure : par exemple 1996- 2003 pour le site Zoétélé en forêt, 1995-2002 pour le site Lamto de savane humide et 1994- 2005 pour le site Banizoumbou de savane sèche. Dans notre étude, afin de faire un bilan de dépôt (sec et humide) d’azote sur le transect des écosystèmes, nous avons pris en considération les concentrations moyennes pondérées mensuelles et annuelles des ions NH4Sur la figure 5.2, nous présentons l’évolution des concentrations mensuelles moyennes des ions ammonium et nitrate sur la période d’étude et sur le transect savane sèche-savane humide-forêt. Sur cette figure la pluviométrie moyenne mensuelle mesurée sur chaque site IDAF est représentée. Pour l’écosystème forêt, seul le site Zoétélé est considéré. Le début (et la fin) de la saison des pluies permet le lessivage d’une atmosphère plus chargée en gaz et particules conduisant à de fortes concentrations des ions NH4lessivage fréquent de l’atmosphère en pleine saison des pluies explique la diminution des concentrations moyennes pondérées par volume d’eau des ions en saison humide (figure 5.2). Les concentrations moyennes pondérées annuelles des ions NH4
échantillonnées de tous les sites IDAF. Le contenu en ammonium dans les précipitations résulte de la capture de l’ammoniac gazeux et des particules contenant de l’ammonium par l’eau nuageuse et précipitante. Seinfeld (1986) a indiqué que généralement dans l’atmosphère, l’ammoniac (particulaire) se trouve sous la forme de sulfate d’ammonium ((NH4)2SO4) mais il est possible de le trouver sous la forme de nitrate d’ammonium (NH4NO3) (Parmar et al., 2000). Les principales sources d’ammoniac gazeux proviennent de la décomposition de l’urée dans les excréments d’animaux et les sols fertilisés ou naturels (Schlesinger and Hartley, 1992), les feux de savanes et les combustions domestiques (Delmas et al., 1991). Sur le transect des écosystèmes, les concentrations moyennes annuelles de NH4qu’en savanes sèches. Ces fortes concentrations à Lamto sont dues à la combinaison de la source animale et des émissions des feux de savanes en saison sèche (notamment de décembre à Mars) (figure 5.2).