Etude de la stabilité pour une classe d’équations
différentielles non linéaires à retard
Théorèmes de point fixe
Les théorèmes de point fixe sont des outils précieux et très intéressants en mathématiques, ils ont un rôle crucial dans le domaine des applications, surtout ils interviennent dans la résolution de plusieurs équations différentielles non linéaires en particulier, et pour les problèmes d’existance et d’unicité. Dans ce paragraphe on rappelle les théorèmes de point fixe qu’on va utiliser dans ce travail. Définition 2.2.1 Soit (E, k·kE ) un espace de Banach, T : E → E une application. On appelle point fixe de T tout point x ∈ E tel que T(x) = x, Ce qui est équivalent à dire que l’équation T(x) − x = 0 possède une solution. Exemple 2.2.1 La fonction f : R −→ R donnée par f(x) = x 2 admet {0, 1} comme points fixes. Exemple 2.2.2 Si f : [a, b] −→ [a, b] est une fonction continue alors f admet au moins un point fixe. Pour résoudre un problème de point fixe on doit identifier trois éléments fondamentaux, à savoir, 1. Un ensemble convenable S apte pour contenir les solutions du problème, 2. Une application P : S −→ S ayant la particularité qu’un point fixe est solution du problème, 3. Un théorème de point fixe qui assure l’existence d’un tel point fixe de P sur S. On va voir maintenant trois théorèmes de point fixe, le théorème de point fixe de Banach qui donne un critère général dans les espaces métriques complets, celui de Schauder qui est plus topologique et affirme qu’une application continue sur un convexe compact admet au moins un point fixe, et finalement le théorème hybride de Krasnoselskii.
Théorème de point fixe de Banach
En 1922, le mathématicien polonais Stefan Banach a prouvé son célèbre théorème (connu aussi sous le nom de théorème d’application contractante ou théorème de Banach-Picard) qui garantit l’existence et l’unicité d’un point fixe d’une application contractante d’un espace métrique complet dans lui-même. Ce théorème a fait preuve d’une grande utilité en analyse. En outre, il est basé sur un processus itératif assurant que ce point fixe peut être obtenu comme limite d’une suite itérée et qu’il est possible d’estimer la précision avec laquelle cette limite est atteinte. Théorème 2.2.1 ([75]) Soit (E, k·kE ) un espace de Banach et T : E → E une application contractante de constante k ∈ [0, 1[. Alors il existe un point unique x ∈ E tel que T(x) = x. Remarque 2.2.1 Si A est une application Lipschitzienne (pas nécessairement une contraction) mais l’une de ces itérées A P est une contraction, alors A a un seul point fixe. 12 En effet, soit x l’unique point fixe de A P on a A P (A(x)) = A(A p (x)) = A(x), ce qui convient à dire que A(x) est aussi un point fixe de A P et grâce à l’unicité A(x) = x. Ce résultat est valable pour tous les types de contractions qui assurent l’unicité du point fixe.
Théorème de point fixe de Schauder
Le théorème de point fixe de Schauder élaboré en 1930, assure l’existence d’un point fixe, qui n’est pas nécessairement unique, pour une application continue sur un convexe compact dans un espace de Banach. Il n’est donc pas nécessaire d’établir des estimées sur la fonction, mais simplement sa continuité, ceci nous donne la possibilité de traiter plus de cas qu’avec le théorème de Banach. Théorème 2.2.2 ([75]) Soit M un sous ensemble convexe fermé borné et non vide d’un espace de Banach E et T : M → E une application compacte. Alors T possède un point fixe. Remarque 2.2.2 Si M est compact et convexe, il suffit que T soit continue pour avoir un point fixe pour T.
Théorème de point fixe de Krasnoselskii
En 1955, Krasnoselskii a élaboré son théorème du point fixe qui affirme que dans un convexe compact, toute application qui se met sous la forme d’une somme de deux applications dont l’une est contractante et l’autre compacte admet un point fixe. Ce théorème est très efficace dans la résolution des équations différentielles non linéaires. Théorème 2.2.3 ([75]) Soit M un sous ensemble convexe fermé non vide d’un espace de Banach (E, k·k). On suppose que A, B : M → E sont deux applications satisfaisant (i) Ax + By ∈ M, ∀x, y ∈ M, (ii) A est complètement continue, (iii) B est une application contractante. Alors il existe z ∈ M avec z = Az + Bz. Preuve. D’une part, la 3ème condition donne k(I − B) (x) − (I − B) (y)k = k(x − y) − (Bx − By)k ≤ kx − yk + kBx − Byk ≤ kx − yk + k kx − yk ≤ (1 + k) kx − yk , (2.2) et d’autre part k(I − B) (x) − (I − B) (y)k = k(x − y) − (Bx − By)k ≥ kI (x − y)k − kBx − Byk ≥ kx − yk − k kx − yk ≥ (1 − k) kx − yk , (2.3) de (2.2) et (2.3), il résulte que (1 − k) kx − yk ≤ k(I − B) (x) − (I − B) (y)k ≤ (1 + k) kx − yk . Cette double inégalité montre que (I − B) : M → (I − B)Mest continue et bijective. Donc, (I − B) −1 existe et elle est continue. Posons U = (I − B) −1A, il est clair que U est une application compacte, puisque U est une composition d’une application continue et une application compacte. En vertu du théorème de Schauder, U admet un point fixe, c’est à dire ∃x ∈ M : (I − B) −1Ax = x, ceci équivaut à dire Ax + Bx = x, et la preuve est achevée.
Equations différentielles à retard et équations différentielles de type neutre
Une équation différentielle à retard est une équation différentielle dont la dérivée par rapport au temps présent de la solution dépend d’une donnée (de cette solution) sur un temps postérieur. Une équation différentielle à retard est un modèle spécifique d’équations différentielles fonctionnelles, dans lesquelles la partie fonctionnelle de l’équation est l’évaluation d’une fonctionnelle sur une étape postérieur (le passé) du processus ([45], [56], [57], [63]). 2.3.1 Equations différentielles à retard Etant donné un nombre r > 0. Soit C([a, b], Rn ) l’espace de Banach de fonctions continues définies sur l’intervalle [a, b] à valeurs dans Rn muni de la topologie de la convergence uniforme. Pour [a, b] = [−r, 0] on pose C0 = C([−r, 0], R n ), et on désigne la norme d’un élément ψ de C0 par kψk = sup {|ψ(s)| , −r ≤ s ≤ 0} , où |·| est une norme sur Rn . Soient t0 ∈ R, L > 0 et soit x ∈ C([t0 − r, t0 + L], R n ) et t ∈ [t0, t0 + L]. On définit la fonction xt de C0 par xt(s) = x(t + s), s ∈ [−r, 0]. Remarque 2.3.1 Pour tout t fixé, la fonction xt est obtenue en considérant la restriction de la fonction x sur l’intervalle [t − r, t], translatée sur [−r, 0]. Exemple 2.3.1 x(t) = t 2 + 2, t0 = 0, L = 2, r = 1 alors t ∈ [0, 2], s ∈ [−1, 0], xt(s) = x(t + s) = (t + s) 2 + 2, pour t = 1 on a x1(s) = (s + 1) 2 + 2. 15 Définition 2.3.1 Soit U un ouvert de R × C0 et soit f : U −→ Rn une fonction continue. On appelle équation différentielle fonctionnelle à retard égal r sur U une relation de la forme x 0 (t) = f(t, xt), (2.4) où xt(s) = x(t + s), s ∈ [−r, 0]. On la désigne parfois EDR(f). Le nombre r est appelé le retard. En clair, le cas r = 0 correspond au cas des équations différentielles ordinaires. Définition 2.3.2 On dit que l’équation (2.4) est autonome si la fonction f ne dépend pas de t. On note dans ce cas f(u) au lieu de f(t, u). Il est évident qu’une condition initiale appropriée au temps t = t0 exige la détermination de la fonction x sur tout l’intervalle [t0 − r, t0], c’est à dire, x (t) = ψ (t), t ∈ [t0 − r, t0] , où ψ : [t0 − r, t0] −→ Rn est une fonction donnée supposée continue appelée la condition initiale de l’équation à retard (2.4). Ainsi, l’équation (2.4) peut se mettre sous la forme x 0 (t) = f(t, xt), t ≥ t0, x(t) = ψ(t), t ∈ [t0 − r, t0], (2.5) avec ψ une fonction donnée continue sur tout l’intervalle [t0 − r, t0]. L’équation (2.4) est dite linéaire si f(t, ϕ) = L(t)ϕ, où L(t) est linéaire. L’équation (2.4) est dite non homogène si f(t, ϕ) = L(t)ϕ + h(t), où h(t) 6= 0. L’équation (2.4) est dite autonome si f(t, ϕ) = g(ϕ), g indépendante de t. A titre d’exemple, les équations suivantes sont des équations différentielles à retard x 0 (t) = 3x(t) + 2x(t − 1), (2.6) x 0 (t) = a(t)x(t) + b(t)x 0 (t − r(t)) + h(t), (2.7) x 0 (t) = Z 0 −r x(t + s)ds, (2.8) a(t), b(t),r(t) sont des fonctions continues. L’équation (2.6) représente une équation différentielle linéaire autonome à retard constant r = 1, l’équation (2.7) est une équation différentielle linéaire à retard fonctionnelle non homogène non autonome, et l’équation (2.8) représente une équation intégro-différentielle linéaire à retard. Définition 2.3.3 Etant donnés ψ ∈ C0 et t0 ∈ R, une solution du problème à valeur initiale x 0 = f(t, xt), t ≥ t0, xt0 = ψ, (2.9) est une fonction notée x(t) telle que x(t) = ψ(t) si t ∈ [t0 − r, t0] et satisfait (2.4) pour t ∈ [t0, t0 + L], L > 0. Une telle fonction x(·) est dite solution de (2.4) à travers (t0, ψ) et est notée souvent par x(·) = x(·, t0, ψ). Etant données une fonction ψ ∈ C0, t0 ∈ R et f(t, ψ) une fonction continue. La recherche d’une solution de l’équation (2.4) à travers (t0, ψ) est équivalente à la résolution de l’équation intégrale x(t) = ψ(t0) + Z t t0 f(u, xu)du, t ≥ t0, xt0 = ψ. On définit l’application A par l’expression Ax(t) = f(t, xt), t ≥ t0, xt0 = ψ. Pour démontrer l’existence d’une solution de cette équation à travers (t0, ψ) ∈ R × C0, on considère un nombre L > 0, et toutes les fonctions définies sur [t0 − r, t0 + L] qui sont continues et qui coïncident avec ψ sur [t0 − r, t0], c’est à dire, xt0 = ψ. On demande que les valeurs de ces fonctions sur [t0, t0 + L] répondent à la condition |x(t) − ψ(0)| ≤ β. La fonction obtenue A correspondant à l’équation intégrale est définie et on démontre que L et β peuvent être choisis de sorte que A envoie cette classe (de fonctions continues) dans elle-même, qu’elle est continue et à image compacte. Dans ce contexte, le théorème du point fixe de Schauder peut s’appliquer pour conclure l’existence d’une solution (pour de amples détails on renvoi aux livres [56] et [63]).
1 Introduction générale |