L’HYPOTHESE EUROPENNE DE L’AVENEMENT D’UN DROIT FONDAMENTAL AU DIVORCE
L’étude des droits fondamentaux ne peut se réaliser sans aborder l’ordre juridique européen, ne serait-ce que parce que le droit français est soumis à l’influence de la jurisprudence européenne. Il faut également ajouter que la vision de l’ordre juridique européen est souvent considérée comme libérale. La protection européenne dispose d’un large champ d’action dans le domaine des droits de l’individu. La jurisprudence européenne semble, dès lors, plus propice dans la réalisation de la tâche de reconnaissance de droit et notamment du droit au divorce. L’hypothèse de l’avènement du droit au divorce sur le plan européen pourrait s’expliquer par un mode opératoire favorable à la reconnaissance de droits (§1) et ainsi, favorise le passage de la notion du droit à la vie privée à l’hypothétique droit au divorce (§2).
L’analyse du mode opératoire favorable à la reconnaissance de droits
L’introduction d’un ordre juridique européen, parfois parallèle parfois complémentaire à l’ordre juridique interne, constitue une arme supplémentaire pour l’individu dans la revendication de prérogatives personnelles. La Convention européenne des droits de l’homme est à cet égard largement tournée vers la protection des droits de l’individu. Pour autant, « l’influence de la Convention européenne des droits de l’homme sur le droit civil n’avait, à l’origine, rien d’une évidence »719. Madame Debet décline deux raisons. Tout d’abord, les Droits de l’homme semblaient de prime abord relever de la sphère du droit public et pénal, puis les droits fondamentaux étaient destinés à protéger contre l’éventuel arbitraire de l’Etat. droits individuels720. La Convention européenne s’est appliquée à trouver un équilibre entre la protection de l’institution familiale et la protection des droits de l’individu. C’est par le biais de cet exercice que la Convention va influencer cette branche du droit sur le fond. L’étude des droits de l’individu et de la vie familiale ne peut être réalisée sans l’apport incontestable de la Convention européenne. L’influence croissante de la Convention en droit interne n’a plus à être prouvée. La première condamnation de la manifestations flagrantes de l’impact du droit européen en droit interne.
La Convention est une source supranationale, intégrée dans le droit interne et La Convention européenne des droits de l’homme ne constitue pas seulement l’expression la plus achevée du droit international des droits de l’homme. Elle ignore aussi ses faiblesses. Elle instaure tout d’abord un ordre juridique particulier, à la charnière de l’ordre juridique national et international, et cet ordre normatif et constitutionnel constitue un véritable ordre public propre aux démocraties La conception individualiste de la Convention européenne et de son mode d’interprétation représente une source providentielle de reconnaissance des droits les plus personnels. La sphère de la vie privée à l’aube de 1950 à nos jours a connu un constant élargissement. Si l’article 8 de la Convention européenne n’était destiné à l’origine qu’à garantir le droit qu’a toute personne de vivre à l’abri des immixtions arbitraires des pouvoirs publics, il s’est davantage consacré à une protection des intérêts purement privés entre particuliers. Au regard des revendications exponentielles, la Cour exerce un « dynamisme de conquête dans un processus évolutif tendant à limiter .
Le passage de la notion du droit à la vie privée à l’hypothétique droit au divorce
L’exaltation de la notion de respect de la vie privée par la Cour européenne (A.) est éloquente dans la démonstration du toujours plus et explique le franchissement du droit à la vie privée au droit à l’autodétermination par la Cour (B.) A. L’exaltation de la notion de respect de la vie privée par la Cour européenne des droits de l’homme La définition ou l’absence de définition de la vie privée laissait présager une large portée. La Cour et la Commission affirment que la vie privée doit être « conçue comme englobant, dans une certaine mesure, le droit pour l’individu de nouer et développer des relations avec ses semblables, y compris dans le domaine professionnel ». Monsieur le Professeur Sudre s’interroge sur les conséquences de cette formule. La vie privée va-t-elle s’étendre à « tout » ? L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme recouvre t-il à l’infini les choix respect de la vie privée. Cette brèche ouverte pourrait être opportune comme soutien au droit fondamental au divorce.
Madame la Professeure Meulders-Klein734 propose une distinction relative à la notion de vie privée ». La première consiste à protéger des empiétements des tiers et concerne : le secret, l’image, le nom, l’honneur, la réputation, le domicile…Cette rubrique a été enrichie par une protection en matière sociale, de la qualité de vie, ainsi que dans le cadre de la vie professionnelle. La seconde rubrique envisage une protection de la vie privée de manière plus poussée. La vie privée ce n’est plus « tellement la protection de l’intimité au sens de tranquillité et confidentialité ou de liberté d’aller et venir et de vaquer à ses activités, bien évidemment essentiels, que celui de l’affranchissement du sujet de toutes l’autonomie individuelle736. Dès lors l’expression de ce rejet pourrait trouver écho dans le droit au divorce. Un époux pourrait se prévaloir de son droit au respect de la vie privée et à l’épanouissement et brandir l’atteinte à celui-ci par le maintien d’un divorce fondamental au divorce serait à l’image d’un divorce objectif à l’excès. L’invocation de la faillite ne reposerait sur aucune condition, c’est-à-dire sur aucun constat temporel de l’échec (entendu une cessation de la vie commune). Le divorce serait directement déclaré suite à une simple demande sans autre condition ni conséquence liée à la demande.