Régulation des cellules NK par le TGF-β

Régulation des cellules NK par le TGF-β

 Rôles des cellules NK dans l’immunité

Les cellules NK sont capables de reconnaître différents types de cellules stressées. Nous détaillerons ici leur rôle dans l’immunité infectieuse ainsi que dans la régulation de la réponse immunitaire. Leurs fonctions dans l’immunité anti-tumorale seront discutées dans le troisième chapitre de cet exposé. 

Immunité anti-infectieuse

Bien que le modèle viral reste le plus utilisé pour étudier les fonctions des cellules NK, elles sont capables de répondre à des infections contre tous les types de pathogènes intracellulaires (bactéries, parasites), mais également extracellulaires par des mécanismes indirects (Horowitz et al., 2012). 

Immunité antivirale

Les réponses des cellules NK ainsi que leur fonction ont été évaluées dans de nombreux modèles d’infection virale. L’activation de la cytotoxicité médiée par les cellules NK ainsi que leur production d’IFN-γ sont observées après infection par LCMV (lymphocytic choriomeningitidis) (Biron et al., 1996; Welsh, 1978), MCMV (Murine Cytomegalovirus) (Grundy et al., 1982; Orange and Biron, 1996a, 1996b; Orange et al., 1995), HSV (Herpes Virus Simplex) (Ching and Lopez, 1979) ou le virus de la grippe (Santoli et al., 1978). En général, le pic de la réponse des cellules NK s’observe dans les heures ou jours qui suivent une primo-infection alors que la réponse adaptative met plus d’une semaine à apparaître. L’importance des cellules NK dans la défense antivirale précoce a été démontrée chez la souris par la mise en évidence d’une plus grande susceptibilité à de nombreux virus comme MCMV (Orange et al., 1995), HSV (Habu et al., 1984) ou Influenza (Stein-Streilein and Guffee, 1986) après déplétion des cellules NK. La contribution des cellules NK dans la défense contre les infections virales, chez l’homme, est également documentée. Une faible activité cytotoxique des cellules NK est, en effet, associée à une sensibilité accrue aux infections par HSV (Biron et al., 1989; Ching and Lopez, 1979), EBV (Epstein-Barr Virus) (Joncas et al., 1989) ou CMV (Biron et al., 1989; Quinnan et al., 1982). Dans les phases tardives d’infection par le VIH (virus de l’immunodéficience humaine), des défauts de l’activité des cellules NK ont été mises en évidence (Bonavida et al., 1986; Katz et al., 1987). Ces anomalies sont associées à une réduction importante des cellules NK CD3- CD56+ et plus particulièrement de la sous-population de cellules NK CD56bright (Alter et al., 2005; Brenner et al., 1989). Cette observation a d’ailleurs conduit certains auteurs à émettre l’hypothèse que cette réduction du nombre de cellules NK serait liée à l’émergence d’une population de NK rare chez les individus CD3- CD56- CD16+ (Mavilio et al., 2005). Des déficits en cellules NK sont également associées à des formes sévères d’infection par le papillomavirus (Ballas et al., 1990) tandis que la survenue d’infections chroniques par EBV chez des patients ayant une altération de la fonction NK suggèrent que les cellules NK contribuent au contrôle de l’EBV (Joncas et al., 1989). Les cellules NK semblent également jouer un rôle dans les infections par le VHC (virus de l’hépatite C). En effet, lors de la phase aigüe, le rapport du nombre de cellules NK CD56bright/CD56dim augmente ainsi que l’expression de NKG2D et les capacités fonctionnelles des cellules NK (cytotoxicité et production d’IFN-γ) (Amadei et al., 45 2010). A l’inverse, lors d’un défaut d’élimination du virus, en phase chronique, l’expression de NKG2D et des NCR (NKp30 et NKp46) diminue (Alter et al., 2011). La distribution des cellules NK est également affectée puisque leur nombre dans le sang périphérique est réduit, mais est rétabli par une thérapie antivirale efficace (Dessouki et al., 2010).Enfin, chez les patients répliquant le VHB (virus de l’hépatite B), il a également été mis en évidence des défauts de coopération entre les pDC et les cellules NK (Martinet et al., 2012). Si de nombreux mécanismes peuvent conduire indirectement à l’activation des cellules NK lors d’infections virales (soi manquant, non soi, ADCC ou activation par des cytokines comme l’IL-15, l’IL-12 ou les interférons de type I), les cellules NK sont également capables de reconnaître certains ligands microbiens de façon directe. Les premiers indices d’une reconnaissance directe de déterminants viraux par les cellules NK dans les infections virales viennent de la découverte de l’interaction entre l’hémagglutinine du virus de la grippe avec NKp46 (Mandelboim et al., 2001). La découverte de l’importance du récepteur Ly49H dans le contrôle des infections par MCMV (Cytomégalovirus Murin), via sa liaison avec la protéine virale m157, a eu lieu à peu près à la même période (Arase et al., 2002). Cette reconnaissance est d’ailleurs essentielle dans la réponse contre MCMV puisque la mutation de m157 bloque l’activation des cellules NK Ly49H+ et augmente la susceptibilité des souris à l’infection (Bubić et al., 2004). 

Immunité contre les autres types de micro-organismes

Si les cellules NK sont capables d’éliminer des cellules infectées par des bactéries intracellulaires (Griggs and Smith, 1994; Katz et al., 1990; Klimpel et al., 1986), in vitro, leur rôle in vivo est essentiellement d’activer les macrophages qui, à leur tour, assureront l’élimination du pathogène. En effet, dans cette fonction, leur capacité de production de cytokines semble plus importante que leur capacité cytotoxique. Dans les souris SCID, l’infection par Listeria monocytogenes induit la sécrétion d’IL-12 et de TNF-α par les macrophages qui activent la production d’IFN-γ par les cellules NK (Tripp et al., 1994). La neutralisation de l’IL-12 produite diminue la résistance à Listeria, mettant en évidence un rôle important de l’IFN-γ dans le contrôle de ce type d’infection. De façon surprenante, certains auteurs ont observé que la délétion des cellules NK augmentait la résistance à certains pathogènes comme Listeria (Schultheis and Kearns, 1990, 1990; Takada et al., 1994), Escherichia coli (Badgwell 46 et al., 2002), Streptococcus pneumoniae (Christaki et al., 2015; Kerr et al., 2005) ou Pseudomonas aeruginosa (Newton et al., 1992). Les mécanismes qui expliquent ces phénomènes ne sont pas identifiés, mais il est important de noter que la majorité des expériences visant à dépléter les cellules NK utilisent soit un anti NK1.1 soit un antiasialo GM1. Ces deux anticorps peuvent donc cibler d’autres populations lymphoïdes comme les NKT (anti NK1.1) ou certains lymphocytes T (anti-asialo GM1). 2.6.2. Régulation de la réponse immunitaire Les cellules NK sont capables d’interagir avec de nombreux types cellulaires différents, comme les DC et les macrophages, qui participent à l’activation des cellules NK au cours de la réponse antimicrobienne, mais également avec les lymphocytes T et B. Concernant l’interaction avec les DC, les cellules NK participent à leur homéostasie, en éliminant les DC immatures in vitro et en facilitant leur maturation mais également en favorisant la mise en place d’une réponse spécifique humorale et cellulaire (Walzer et al., 2005). Les cellules NK sont également capables d’interagir avec les lymphocytes T. L’élimination de lymphocytes T activés par les cellules NK a d’abord été mise en évidence in vitro, chez la souris (Rabinovich et al., 2003). Dans ce travail, les auteurs ont montré que cette élimination impliquait l’interaction de NKG2D avec ses ligands exprimés par les cellules T. Chez l’homme, l’activation des cellules T via leur TCR (T Cell Receptor) augmente l’expression des ligands de NKG2D, ce qui rend les cellules T sensibles à une élimination par les cellules NK (Cerboni et al., 2007). In vivo, il a été plus récemment montré que les cellules T activées sont aussi la cible des cellules NK d’une manière dépendante de NKG2D et de perforine, chez la souris (Soderquest et al., 2011). L’élimination des lymphocytes T a également été observée dans des contextes d’infection virale, notamment dans les infections à LCMV, pendant laquelle les cellules NK sont capables d’éliminer les lymphocytes T spécifiques. Un travail récent a montré que la déplétion des cellules NK pendant les phases précoces de l’infection permettait un meilleur contrôle de l’infection. Les auteurs ont suggéré l’existence d’un système de régulation en 3 voies dans lequel les cellules NK sont capables d’éliminer les lymphocytes T CD4 activés, qui, à leur tour, régulent la fonction des lymphocytes T CD8 (Waggoner et al., 2011). Des travaux soutenant cette hypothèse ont également montré que la déplétion des cellules NK réduit les phénomènes immunopathologiques et prévient la chronicité des infections (Lang et al., 2012). 47 De façon intéressante, des travaux suggèrent que les lymphocytes T ont développé des mécanismes de résistance à l’élimination par les cellules NK. Lors d’infections virales, les lymphocytes T incapables de répondre aux IFN de type I (Ifnar-/-) sont plus sensibles à l’élimination des cellules NK (Xu et al., 2014). Cette sensibilité augmentée s’explique par l’augmentation de l’expression de ligands de récepteurs activateurs (Crouse et al., 2014) tout comme la diminution de l’expression de ligands de récepteurs inhibiteurs (Xu et al., 2014) par les lymphocytes T Ifnar-/-. 3. Régulation des cellules NK par les cytokines 3.1. Régulation par l’IL-15 L’IL-15 a un rôle central dans le développement, la survie et l’activation des cellules NK. Découverte en 1994, elle se fixe à des récepteurs ayant des sous-unités communes avec le récepteur de l’IL-2. En conséquence, ces deux cytokines partagent un nombre important de fonctions biologiques (Ring et al., 2012). 3.1.1. Préambule L’IL-15 murine est une protéine de 14-15kDa avec une similarité de séquence nucléique de seulement 19% avec l’IL-2, mais une structure tridimensionnelle très proche. Ces deux cytokines interagissent avec des récepteurs possédant la chaîne gamma commune (γc) (CD132) et la chaîne β du récepteur de l’IL-2/15 (CD122). La chaîne γc est aussi une sous-unité des récepteurs d’autres cytokines (IL-4/7/9/21) alors que la chaîne β est seulement impliquée dans la signalisation induite par l’IL-2 et l’IL-15. Les récepteurs de l’IL-2 et de l’IL-15 ne diffèrent que par leur chaîne α, IL2Rα (CD25) étant spécifique de l’IL-2 et IL-15Rα de l’IL-15. A la différence d’IL-2Rα, IL-15Rα possède une très forte affinité pour son ligand (constante d’affinité de l’ordre de 10-11M contre 10-8M pour l’IL2Rα). Cette propriété, couplée au fait que l’IL-15 et l’IL-15Rα sont co-exprimés par les mêmes cellules, permet leur liaison intracellulaire dans le réticulum endoplasmique. Ce complexe est ensuite transporté à la surface de la cellule et présenté aux cellules avoisinantes qui expriment les chaînes β et γc du récepteur de l’IL-2/15. Ce mécanisme, appelé trans-présentation a permis d’expliquer le fait que l’expression d’IL-15Rα par les cellules NK n’était pas nécessaire au maintien de leur homéostasie. Un tel phénomène permet une délivrance précise du stimulus en provoquant une activation locale des cellules NK. 48 En effet, une disponibilité systémique de cette cytokine semble être néfaste comme en témoigne le développement de leucémies dans les souris transgéniques pour l’IL15 (Fehniger et al., 2001; Mishra et al., 2012). L’existence d’une voie de présentation en cis, dans laquelle l’IL-15 est co-exprimée avec ses récepteurs à la surface des cellules NK a également été décrite (Figure 15). Certains auteurs suggèrent même qu’elle contribue autant que la présentation en trans à l’activation des cellules NK (Zanoni et al., 2013). 

Table des matières

PREMIERE PARTIE : PARTIE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Les Cellules Innées Lymphoïdes
2. Les Cellules Natural Killer .
2.1. Développement des cellules NK
2.1.1. Dans la moelle
2.1.2. Dans le foie
2.1.3. Autres sites de différenciation des cellules NK
2.1.4. Facteurs impliqués dans la différenciation des cellules NK
a. Facteurs intrinsèques: rôle des facteurs de transcription
b. Facteurs extrinsèques: rôle de l’environnement
2.2. Circulation des cellules NK
2.3. Récepteurs NK
2.3.1. Récepteurs activateurs .
a. Récepteurs de la cytotoxicité naturelle (NCR)
b. NKG2D
c. 2B4
d. DNAM-1
e. NKp80 .
f.KIR/Ly.
g. CD16
h. Synthèse
2.3.2. Récepteurs inhibiteur
a. Les récepteurs de la famille des Ly49/KIRs
b. KLRG1
2.4. Education des cellules NK
2.5. Fonction des cellules NK
2.5.1. Voies d’activation des cellules NK
a. Activation non dépendante des anticorps
b. Activation dépendante des anticorps
2.5.2. Conséquences de l’activation
a. Formation de la synapse immunologique
b. Cytotoxicité
c. Production de cytokines
2.6. Rôles des cellules NK dans l’immunité
2.6.1. Immunité anti-infectieuse
a. Immunité antivirale
b. Immunité contre les autres types de micro-organismes
2.6.2. Régulation de la réponse immunitaire
3. Régulation des cellules NK par les cytokines
3.1. Régulation par l’IL-15
3.1.1. Préambule
3.1.2. Rôle
3.1.3. Régulation
3.1.4. Signalisation
3.2. Régulation par l’IL-2
3.3. Régulation par le TGF-β
3.3.1. Préambule
3.3.2. Structure et sécrétion
3.3.3. Récepteurs du TGF-β
3.3.4. Signalisation
a. Voies canoniques .
b. Voies non canoniques
3.3.5. Effets du TGF-β
3.4. Régulation par l’IL-12
3.5. Régulation par l’IL-18
3.6. Régulation par l’IL-10
3.7. Régulation par l’IL-7
3.8. Régulation par l’IL-4
3.9. Régulation par l’IL-21
3.10. Régulation par les IFN de type I
4. Cellules NK et Cancer
4.1. Concept d’immunosurveillance
4.2. Rôle des cellules NK dans le cancer
4.2.1. Cancers solides
4.2.2. Cancers hématologiques
a. Mécanismes d’échappement dans les hémopathies malignes
b. Cas du myélome
c. Traitements visant à moduler l’activité des cellules NK
OBJECTIFS DU TRAVAIL DE THESE
DEUXIEME PARTIE : RESULTATS
Article 1 : TGF-β inhibits NK cell activation and functions through repression of the mTOR pathway
Résultats complémentaires
1. L’effet du TGF-β sur les cellules NK est, en partie, médié par FKBP12
2. La sur-activation de mTOR compense partiellement l’activation constitutive des voies du TGF-β dans les cellules NK
3. L’activation des cellules NK par l’IL-15 induit un rétrocontrôle négatif médié par le TGF-β in vitro.
DISCUSSION
ANNEXE
1. Article 2 : Monitoring NK cell activity in patients with hematological malignancies
2. Article 3 : Regulation of mouse NK cell development and function by cytokines
3. Article 4 : T-bet and Eomes instruct the development of two distinct natural killer cell lineages in the liver and in the bone marrow
4. Article 5 : The metabolic checkpoint kinase mTOR is essential for IL-15 signaling during the development and activation of NK cells
5. Article 6 : Natural Killer cells from Multiple Myeloma patients display an exhausted phenotype and their functions are not improved by lenalidomide treatment
6. Article 7 : Alteration of Natural Killer cell phenotype and function in obese individuals
BIBLIOGRAPHIE

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