Impact de la procalcitonine dosée au sang du cordon sur la prise en charge des nouveaux-nés à terme à risque d’infection materno-fœtale
L’infection néonatale bactérienne précoce (INBP) est une infection du nouveau-né transmise par la mère de survenue précoce c’est-à-dire durant les 3 premiers jours de vie. Les infections tardives, qui ne seront pas abordées dans ce travail, concernent les nouveau-nés et les petits nourrissons jusqu’à l’âge de 90 jours. Bien qu’elle soit relativement rare, elle reste l’une des préoccupations permanentes des néonatologues et des pédiatres de maternité en raison de sa gravité potentielle et des difficultés diagnostiques. L’INBP peut être classée de la manière suivante : – L’INBP certaine : signes cliniques et/ou biologiques de sepsis associés à un germe identifié dans le sang et/ou le liquide céphalo-rachidien (LCR). – L’INBP suspectée : anomalies cliniques et/ou biologiques associée ou non à l’isolement d’un germe dans un prélèvement périphérique. La simple colonisation bactérienne est définie comme l’isolement d’un germe dans les prélèvements bactériologiques périphériques sans anomalie clinique ou biologique associée.
Epidémiologie
Les mesures préventives débutées dans les années 1990 en France et dans de nombreux pays industrialisés (Etats Unis (CDC 1996)) par le dépistage vaginal systématique en fin de grossesse du Streptococcus agalactiae ou Streptococoque B (SGB) et l’antibioprophylaxie per- partum des femmes porteuses, ou dans les situations à risques comme la fièvre maternelle ou la rupture prématurée et prolongée des membranes (RPM), ont permis une nette diminution de l’incidence des INBP, au prix d’une augmentation des explorations paracliniques des nouveau- nés et de l’exposition néonatale aux antibiotiques.
Facteurs de risque d’INBP
Les principaux facteurs de risques d’INBP sont : la prématurité, la RPM, la chorioamniotite qui est souvent limitée à la présence d’une fièvre maternelle supérieure ou égale à 38°C, un antécédent d’INBP et la colonisation maternelle au prélèvement vaginal (PV) à SGB, même si l’on sait que l’antibioprophylaxie per-partum a diminué le risque de 80% d’INBP à SGB (CDC, 2010) ; ce n’est donc pas tant le portage de SGB mais plutôt l’existence d’autres facteurs de risque notamment une antibiothérapie inadéquat qui constitue un facteur de risque. En France les critères ont évolué au cours du temps. Selon les recommandations de 2002 les facteurs de risque étaient classés en critères majeurs, peu fréquents mais fortement liés à une infection : tableau évocateur de chorioamniotite, jumeau atteint d’une INBP ou température maternelle en début de travail 38°c, prématurité spontanée <35 semaines d’aménorrhée (SA), durée d’ouverture de la poche des eaux (OPDE) 18 h, RPM < 37 SA et en dehors d’une antibioprophylaxie maternelle complète : un antécédent d’INBP à SGB, un portage vaginal du SGB chez la mère ou une bactériurie à SGB pendant la grossesse et en critères mineurs, relativement fréquents et peu liés à une infection : OPDE entre 12 et 18 heures, prématurité spontanée < 37 SA mais 35 SA, anomalies du rythme cardiaque fœtal (ARCF) non expliquées ou liquide amniotique teinté ou méconial (Annexe 1).
Les récentes recommandations de la Haute Autorité en Santé (HAS) et de la Société Française de Néonatologie (SFN) ont simplifié cette classification en ne retenant que la fièvre maternelle > 38°c isolée ou non en per partum ou dans les deux heures suivant l’accouchement, la colonisation maternelle au SGB durant la grossesse actuelle, l’antécédent d’INBP à SGB lors d’une précédente grossesse, une durée de RPM > 12 heures ou une prématurité spontanée et inexpliquée < 37 SA.
Physiopathologie
Il existe trois voies de contamination : (1) la voie transmembranaire ou ascendante, la plus fréquente, secondaire à une colonisation du fœtus à partir du liquide amniotique, lui-même colonisé par les germes de la flore vaginale maternelle. Ce mode de contamination peut survenir sans RPM, mais une OPDE prolongée augmente significativement le risque ; (2) la voie transplacentaire ou hématogène, est secondaire à une septicémie maternelle, conduisant à une contamination hématogène du fœtus par voie ombilicale à partir d’une bactériémie maternelle ; et (3) le nouveau-né peut également se contaminer lors du passage dans la filière génitale avec ingestion des germes présents dans les sécrétions vaginales. Différents facteurs vont favoriser le passage de la colonisation du fœtus à son infection, notamment la virulence et le caractère pathogène du germe, la durée de la colonisation, la quantité d’inoculum, la présence d’une RPM et l’immaturité immunitaire du fœtus.
Les germes les plus fréquemment incriminés sont le SGB (40-50%) et l’Escherichia coli (E. Coli) (10-15%) chez les nouveau-nés à terme et proche du terme. Cette répartition des germes étant différente chez le nouveau-né prématuré, avec une prédominance des infections à E. Coli. Le SGB, appartenant à l’ordre des lactobacillales, est une bactérie capsulée, hémolytique, à Gram positif, commensale des voies digestives et vaginales. La colonisation vaginale bactérienne varie au cours de la grossesse, ainsi 10 à 35% des femmes sont colonisées à SGB, et 5 à 9% à E Coli. Chez les mères porteuses de SGB, en l’absence d’antibioprophylaxie, 40 à 60% des nouveau-nés seront colonisés mais seulement 1 à 2% seront infectés. La contamination fœtale peut alors survenir quelques heures à quelques minutes avant la naissance et l’INBP peut s’exprimer dès la naissance ou de plusieurs heures à jours post-naissance. Malgré les mesures de prévention elle reste la première cause d’infection néonatale bactérienne dans le monde, (Six A et al. 2014).