Étude expérimentale des forces de Casimir
Organisation du montage
Le montage se décompose en 3 étages. Le premier étage est formé par la partie d’émission du faisceau laser de longueur d’onde λ = 632.8 nm (représenté dans le rectangle rouge 1 sur la figure 4.2). L’élément biréfringent permettant de séparer le faisceau, la cellule contenant le levier AFM, ainsi que les éléments de positionnement de l’échantillon forment le second étage (rectangle 2 sur la figure 4.2). Les faisceaux sont réfléchis par le levier et renvoyés vers la tête de l’interféromètre qui constitue la troisième partie du montage (rectangle 3 sur la figure 4.2). Cette partie d’analyse est décrite dans la section 3.1. La partie du montage avec le laser de longueur d’onde λ = 476 nm sera décrite dans la section 4.16. La partie d’émission et la tête d’analyse ont été développées par Ludovic Bellon et Justine Laurent avant mon arrivée au laboratoire. Avec l’aide d’Artyom Petrosyan, Ingénieur de Recherche au laboratoire, nous avons réalisé les réglages optiques de la partie d’émission et de la tête d’analyse et nous avons développé la seconde partie du montage.
La partie émission
On utilise un laser He-Ne (Melles Griot 05ST P903) de longueur d’onde λ = 632.8 nm (puissance de sortie 3 mW). Un isolateur de Faraday (ConOptics 711/720s), placé juste après la source laser, permet d’éviter toute réflexion parasite dans la cavité optique du laser. Le faisceau laser polarisé linéairement est injecté dans une fibre optique monomode (Thorlabs P1630AF C2) à maintien de polarisation. L’entrée de la fibre est biseautée afin d’éviter le retour inverse de la lumière. À la sortie de la fibre, une lentille convergente permet de collimater le faisceau (produisant un faisceau d’environ 2 mm de diamètre), et un prisme de Glan Taylor permet de polariser linéairement le faisceau suivant une direction choisie ~y + ~z. Les éléments de la partie émission sont représentés dans le rectangle 1 de la figure 4.2. En sortie, le champ électrique s’écrit donc – Le faisceau incident E0 est séparé en deux faisceaux de polarisations orthogonales Eref et Etip par le prisme de Wollaston. En changeant la position du prisme W le long de son axe optique, on peut compenser les courbures faibles du levier. Après réflexion, les rayons sont recombinés et peuvent être analysés : la différence de chemin optique est égale à deux fois la déflexion. La distance entre les deux faisceaux étant 800 µm, le faisceau de référence Eref est situé sur le chip. Par ailleurs, nous avons fait le choix d’une lentille de focale f = 50 mm de façon à avoir un faisceau de largeur ω0 = fλ/(πω) suffisamment fine pour éviter la diffraction sur les bords du levier. Dans cette expresion, λ correspond à la longueur d’onde du laser et ω la largeur du faisceau avant son passage par la lentille L0. Nous ne pouvons utiliser une lentille de focale plus courte du fait de la taille de la platine placée entre la lentille et la cellule. Je décrirai la cellule dans la section suivante, mais tout d’abord, il convient d’expliquer où se situe la cellule par rapport à la lentille L0. Comme représenté sur la figure 4.5, la cellule est solidaire d’une platine fixée sur une cage Thorlabs placée quelques centimètres sous la lentille L0. Cette platine sert de support à la cellule. Elle comporte une ouverture circulaire qui permet le passage des faisceaux, ainsi que des vis pour régler l’orientation de la cellule. Des actuateurs piézoélectriques permettent de faire osciller chacune des vis pour exciter le levier lors de la calibration de l’interféromètre (cf 3.1). recouverte d’ITO et la plaque sur laquelle elle est collée, une fine bande d’or d’épaisseur 100 nm est évaporée en travers de la cellule à l’extrémité de la marche et de la plaque (7). Nous ajoutons une goutte de colle conductrice en chaque coin de la marche. Un fil est soudé dans le coin de la fenêtre. Ce fil permet d’appliquer une différence de potentiel entre la sphère et la plaque inférieure pour compenser le potentiel de contact (8). L’injection du liquide (ou du gaz lorsqu’on travaille avec de l’azote) se fait par un petit tuyau collé sur le côté de la cellule (9). Une ouverture permet l’évacuation de l’air lors du remplissage (10). – La partie supérieure de la cellule sur laquelle est fixée le levier, et le fond de la cellule sont reliés par une membrane en silicone (11) qui permet d’assurer l’étanchéité. L’utilisation d’une surface souple permet de déplacer librement le bas de la cellule. Le haut de la membrane est serré entre l’anneau en inox (1) et un anneau externe, lequel est encastré dans un support KC1 “Kinematic Mount” de chez Thorlabs, afin de régler l’orientation de la cellule.
Choix de la bille
Pour mesurer la force de Casimir, il faut utiliser les surfaces les plus lisses possibles. Lorsque les surfaces sont rugueuses, la dépendance de l’interaction avec la distance se complique car la distance de séparation n’est pas la même en tout point de l’espace. En effet, la force de Casimir varie fortement avec la distance, donc si les surfaces sont rugueuses, on devra prendre en compte les interactions entre chaque rugosité. La rugosité des premières sphères utilisées était de l’ordre de la centaine de nanomètres. Nous avons donc testé d’autres types de sphères pour sélectionner les moins rugueuses possibles (mesure au microscope à balayage électronique MEB). Nous les avons métallisées afin d’évacuer les charges piégées en surface. Nous avons essayé différentes techniques de dépôt d’or afin d’obtenir la couche la plus lisse possible. Nous avons également pris d’importantes précautions lors du collage des sphères. Les sphères finalement utilisées ont une rugosité quadratique moyenne wsp = 11 nm (mesure réalisée avec un AFM commercial Bruker). Nous utilisions au début des billes super paramagnétiques PLA-M green F de chez Micromod recouvertes d’une couche de polymères (polyacide lactique) et sur lesquelles sont greffées des colorants fluorescents. Ces billes devaient nous permettre de faire des mesures dynamiques de la force, grâce à une excitation magnétique, et une mesure indépendante de la distance, à partir du signal de fluorescence. Cependant, d’après les images MEB, ces billes présentent un très mauvais état de surface (cf figure 4.9). De plus, la fluorescence des billes était trop faible pour être détectée. Enfin, nous étions gênés par les charges électrostatiques présentes à la surface des sphères. Nous avons donc travaillé avec des billes en silice de chez Sigma-Aldrich, mais, comme avec les billes précédentes, nous avons constaté la présence de charges importantes. Nous avons donc choisi de travailler avec des surfaces métalliques afin de réduire les effets de charges piégées en surface, et de façon à appliquer une tension entre les deux surfaces pour faire des mesures dynamiques. La métallisation consiste à évaporer une couche d’or de 200 nm de chaque côté du levier et sur la bille. Le dépôt doit recouvrir toute la surface de la sphère et du levier 50 CHAPITRE 4. DÉVELOPPEMENT DU MONTAGE sans discontinuité électrique. On assure le contact électrique entre la sphère en or et le levier en attachant la bille avec une colle conductrice (colle POLYTEC). L’ensemble est rigidement attaché au montage avec un système de clips en inox, décrit dans la section 4.1.3. Le montage est lui-même connecté à la masse. Pour éviter les boucles de masse, tous les fils sont connectés à une masse commune. À ce stade, nous avons décidé de faire une mesure préliminaire à la mesure de Casimir critique : mesurer la force de Casimir électrodynamique. Comme le mode d’action de la force de Casimir électromagnétique est identique à la force critique, cette première mesure nous permettra de tester notre système. La force de Casimir électromagnétique dépendant du coefficient de réflectivité des matériaux, nous avons choisi de recouvrir les surfaces d’or. Cette mesure préalable nous permet donc de nous affranchir des effets électrostatiques compliqués entre des surfaces diélectriques. De plus, nous n’avons pas besoin de travailler dans les liquides dans un premier temps, ce qui nous permet de traiter un par un les effets physiques. Métallisation des surfaces La métallisation des surfaces demande beaucoup de précautions quant au choix de la technique de dépôt et au choix de la bille utilisée. Le dépôt doit être le moins rugueux possible. La première technique que nous avons utilisée est le dépôt par évaporation thermique sur les billes en silice de chez Sigma-Aldrich. Elle consiste à évaporer sous vide une couche d’accroche en chrome de 10 nm et une couche d’or de 200 nm, en chauffant le chrome et l’or à haute température, telle que la pression de vapeur soit supérieure à la pression restante dans la cuve à vide. La condensation des molécules de vapeur conduit ensuite à la formation d’une couche sur le substrat. Cependant, nous avons remarqué la présence de poussières et d’aspérités recouvertes d’or lorsque nous avons observé nos dépôts au MEB. Nous avons donc remplacé les billes en silice par des billes en polystyrène (Sigma Aldrich), qui ont une surface beaucoup plus lisse, et nous avons pris soin de coller les billes sous flux d’azote. Les couches d’or obtenues par évaporation thermique sur les billes en polystyrène sont très poreuses et présentent de gros grains. Nous avons joué sur la vitesse de dépôt pour améliorer l’état de surface. Il faut trouver un compromis entre une vitesse trop faible qui provoque l’inclusion d’impuretés dans la couche d’or et une vitesse trop élevée qui induit des défauts structuraux. La vitesse nous permettant d’obtenir les meilleurs dépôts est 0.35 nm · s −1 . Cependant, la rugosité des surfaces obtenues est encore trop grande pour espérer mesurer la force de Casimir. Dans le cas d’une évaporation thermique, les atomes atteignent la surface avec une faible énergie cinétique (0.1 eV), ce qui ne leur permet pas de se réarranger une fois qu’ils se sont déposés. Nous avons finalement réalisé les revêtements par pulvérisation cathodique magnétron. Ces dépôts ont été réalisés par Richard Perdurand au LMA. Ce procédé nous permet d’obtenir des surfaces beaucoup plus lisses. Le plasma est créé sous argon à la pression 1 − 10 mbar, en appliquant une différence de potentiel entre deux électrodes en cuivre. Un feuillet d’or est attaché sur la cathode, tandis que les leviers sont disposés sur un support posé sur l’anode. L’application d’une différence de potentiel (V ≈ 100−1000 V) permet la création d’un plasma froid, composé d’électrons et d’ions. Les espèces chargées sont accélérées sous l’effet du champ électrique et entrent en col
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