Percolation sur les groupes et modèles dirigés
Percolations générales
Comme le suggère le début de cette introduction, cette thèse se place dans le cadre de la géométrie discrète. Rappelons donc quelques définitions de théorie des graphes. 0.1.1 Vocabulaire de théorie des graphes Un graphe est la donnée d’une paire G = (V, E) vérifiant la condition E ⊂
Percolation : définition et premiers exemples
Soit G = (V, E) un graphe. Une percolation (ou percolation par arêtes) sur G est la donnée d’une mesure de probabilité sur 2 E, l’ensemble des parties de E. Une percolation par sites est la donnée d’une mesure de probabilité sur 2 V . Lorsque X désignera E ou V , on identifiera 2 X et {0, 1} X, via l’opérateur « fonction indicatrice ». Un élément de 2 E ou 2 V sera génériquement noté ω. On pense une percolation (par sites ou par arêtes) comme encodant un sous-graphe aléatoire de G. Dans le cas d’une percolation par arêtes, on associe à ω ∈ 2 E le graphe Gω ayant pour ensemble de sommets V et pour ensemble d’arêtes ω. Une arête dans ω est dite ouverte tandis qu’une arête dans E\ω est dite fermée, et un chemin n’empruntant que des arêtes ouvertes est dit ouvert. Les questions qui se posent devant une telle figure se formulent, en grande partie, en termes de clusters. Etant donné un élément ω de 2 E, un cluster est une composante connexe de Gω, c’est-à-dire une classe d’équivalence pour la relation « être relié par un chemin dans Gω ». Si le graphe G est infini, on peut s’intéresser au nombre de clusters infinis ainsi qu’à leur géométrie. Autre exemple. Soit G = (V, E) un graphe fini. Le modèle d’Ising sur G de température inverse β est une mesure de probabilité sur {−1, +1} V définie par P (β) ({ω}) := 1 Z(β) exp β X {u,v}∈E ωuωv . Dans la formule ci-dessus, la constante de renormalisation Z (β) — dite « fonction de partition » — est déterminée de façon univoque par le fait que la masse totale de l’espace pour une mesure de probabilité vaut 1. On peut penser P (β) comme une percolation par sites. Si on interprète le « spin »
0.1. PERCOLATIONS GÉNÉRALES 11 ±1 en chaque site comme une aimantation, on dispose là d’un modèle du ferromagnétisme. Plus une configuration comporte d’arêtes dont les extrémités ont même spin, plus elle sera probable : les aimants en deux sites voisins ont tendance à s’aligner. L’amplitude de ce phénomène s’affaiblit à mesure que la température T = 1/β augmente, l’agitation thermique devenant de plus en plus prépondérante par rapport au phénomène magnétique. Lorsque β = 0, on retrouve la percolation de Bernoulli (par sites) de paramètre 1/2. Quand β tend vers l’infini, P (β) ({v 7→ +1}) et P (β) ({v 7→ −1}) tendent vers 1/2. Pour s’initier au modèle d’Ising, on pourra se référer à [Vel09]. Etudier tous les types de percolations sur tous les types de graphes est un trop vaste programme : sans hypothèse, il est difficile de dire quoi que ce soit de très intéressant. En effet, même en se restreignant à la percolation de Bernoulli, sans hypothèse sur le graphe d’étude, « tout peut arriver ». Par exemple, le nombre de clusters infinis peut 2 ne pas avoir de valeur presque sûre. Quand le nombre de clusters infinis est infini avec probabilité strictement positive, c’est automatiquement le cas avec probabilité 1 (d’après la loi du 0-1 de Kolmogorov), mais l’ensemble des p ∈ [0, 1] vérifiant cette propriété peut 3 ne pas être un intervalle. Pour les graphes transitifs (ou homogènes) — introduits en section 0.2 —, ces deux « pathologies » sont exclues (par la proposition 0.4.1 et le théorème 0.4.4). Dans cette thèse, on s’intéresse aux percolations sur les graphes transitifs qui respectent les symétries du graphe (les percolations invariantes, voir section 0.4), avec un intérêt tout particulier pour la percolation de Bernoulli. Remarque. Pour pouvoir étudier finement la percolation de Bernoulli, il est nécessaire de s’intéresser à une classe de graphes restreinte ; toutefois, on peut se restreindre à d’autres classes que celle des graphes transitifs. Par exemple, un beau théorème de Lyons [Lyo90] stipule que le point critique pour la percolation de Bernoulli sur un arbre est l’inverse du branchement de cet arbre. Sans entrer dans les détails, cela signifie que, si le graphe d’étude est un arbre, les transitions de phase pour la percolation de Bernoulli et pour une certaine marche aléatoire biaisée s’opèrent au même paramètre. La percolation de Bernoulli peut également être bien comprise sur certains graphes aléatoires : c’est le cas pour la triangulation planaire infinie uniforme d’Angel et Schramm (UIPT, voir [AS03]).
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