Gestion intégrée des principaux insectes ravageurs des céréales et légumineuses stockées par l’utilisation des métabolites secondaires
L’utilisation des plantes et effets de quelques métabolites secondaires
Les plantes produisent des composés secondaires pour se défendre contre divers organismes tels que les pathogènes et les ravageurs (Meric, 2005 ; Phylogène, 2008). Ces composés secondaires présentent une grande variété d’effets sur les insectes, entre autres substances répulsives défensives et inhibitrices de la digestion (Regnault-Roger et Hamraoui, 1997). L’intérêt d’utilisation des composés d’origine végétale comme biopesticide remonte au XIX e avec les alcaloïdes (nicotine) extraits du tabac, Nicotiana tabacum, N. rustica et N. glauca, toutes de la famille des Solanacées (Phylogène, 2008 ; Markussen et Kristensen, 2010). Des études telles que celles de Li et al. (2012) ; Liu et al. (2007) puis Markussen et Kristensen (2010) ont prouvé que la Nicotine (C10H14N2) par inhalation et par ingestion est un insecticide très actif. L’Anabasine d’Anabasis aphylla de la famille des Chénopodiacées. L’anabasine est très toxique sur le puceron Aphis rumicis (Phylogène, 2008). La famille des Papilionacées est aussi une source des molécules à effet insecticide telles la roténone trouvée dans 67 espèces de cette famille. La roténone fut extraite dans les racines de Derris elliptica (Phylogène, 2008). Les Pyrèthres isolés de Chrysanthemum (Pyrethrum) cinerariaefolium de la famille des Astéracées sont des insecticides botaniques. L’activité insecticide à l’égard des poux des préparations végétales des espèces du genre Chrysanthemum est rapportée par Wanga et al. (2012). Le neem, Azadirachta indica de la famille des Méliacées est utilisé en Inde depuis les temps anciens contre les insectes des denrées stockées (Phylogène, 2008). L’Azadirachtine est le composé prédominant isolée du neem et commercialisé sous différentes formulations ; Azatin, Turplex, Align, Neemex etc. (Taylor, 2005). Au Sénégal, Seck et al. (1996) ont mené des études dans des systèmes hermétiques de stockage et ont montré que l’utilisation des fruits de Boscia senegalensis Pers, à 16 la dose de l, 2g/L réduit considérablement les émergences de C. maculatus F. Aux doses de 2,4 à 4,8g/l, l’émergence de la nouvelle génération de cette espèce est complètement inhibée. Au Cameroun, les feuilles de Chenopodium ambrosioides L et d’Eucalyptus saligna Smith sont couramment utilisées dans la protection du maïs, du niébé et du haricot (Tapondjou et al., 2003). L’activité insecticide des huiles essentielles d’Ageratum conyzoides L. (Asteraceae), de Citrus aurantifolia Christm (Rutaceae) et de Melaleuca quinquenervia L. (Myrtaceae) a été évaluée à l’égard de C. maculatus (Nondenot Aboua et al., 2010). D’après ces auteurs, ces huiles essentielles présentent une activité insecticide et réduisent la ponte chez les femelles de C. maculatus de 4.79±0.75 pour Citrus aurantifolia, 75±0.28 Ageratum Conyzoides et 1.81±0.53 Melaleuca quinquenervia à la concentration de 6.7 µl/l comparativement au contrôle qui est de 51.23±0.32. Bachrouch et al. (2010) ont évalué l’effet insecticide de Pistacia lentiscus sur le troisième stade larvaire et les adultes de T. castaneum. L’huile essentielle testée a montré une toxicité vis-à-vis des larves et des adultes. Le taux de mortalité étant de l’ordre de 51% pour les larves et de 100% pour les adultes à une concentration de 1023 µl/l air après 24 h d’exposition. L’effet fumigant est plus important sur les adultes (LC50 = 28.03 µl/l, LC95 = 63.46 µl/l) que sur les larves (LC50 = 112.12 µl/l, LC95 = 253.53 µl/l). L’effet insecticide de l’huile essentielle, de la poudre et de l’extrait à l’acétone des feuilles sèches de Callistemon viminalis (Myrtaceae) contre les adultes d’Acanthoscelides obtectus a été testé (Ndomo et al., 2009). A la fin du premier jour d’exposition, les plus fortes doses d’huile essentielle appliquées sur graines (0,40 µl/g) et sur papier filtre (0,251 µl/cm2) avaient causé respectivement 72,6% et 80% de mortalité. Ces mortalités ont atteint au quatrième jour d’exposition 97,5% et 100% respectivement. Les valeurs de DL50 de l’huile essentielle des feuilles de Callistemon viminalis contre les adultes d’Acanthoscelides obtectus calculées à la fin du deuxième jour d’exposition ont été de 0,103 µl/cm2 pour le test par contact sur papier filtre et de 0,152 µl/g pour le contact sur graines. De plus, cette huile a présenté un taux de répulsion moyen de 60,8% (Ndomo et al., 2009). Paul et al. (2009) ont évalué l’effet insecticide de Chenopodium ambrosioides, de Tagetes minuta, d’Azadirachta indica et Cupressus lusitanica à l’égard 17 d’Acanthoscelides obtectus et de Zabrotes subfasciatus sur Phaseolus vulgaris. Chenopodium ambrosioides, appliqué sous forme de poudre ou sous forme de feuilles entières, était le plus efficace, avec une mortalité de 100% sur les adultes en moins de trois jours pour une dose d’environ 200 g de poudre pour 100 kg de graines de Phaseolus vulgaris. Tagetes minuta appliqué sous forme de poudre a également entrainé la mortalité et la réduction de la ponte d’Acanthoscelides obtectus et de Zabrotes subfasciatus. Selon ces auteurs, tous les traitements ont été significativement plus efficaces que le contrôle pour réduire le nombre d’insectes vivants et le pouvoir germinatif des graines est maintenu après 5 mois de stockage. Rajapakse et Van Emden (1997) ont prouvé que les huiles de maïs, d’arachide, de tournesol et de sésame ont réduit significativement la ponte et la longévité des trois espèces de C. chinensis, de C. maculatus et de C. rhodesianus à la dose de à 10 ml / kg. Le nombre d’œufs pondus par les trois ravageurs a été significativement réduit dans les traitements auxquels les poudres de Cymbopogon citrutus, Cinnamomum camphora, Derris inudata, Monodora myristica, Zingiber spectabile ont été ajoutées (effet synergie). Les études sur l’activité insecticide des huiles essentielles d’Acorus calamus, Allium sativum, d’Artemisia spp., Chenopodium ambrosioides, Curcuma longa, Mentha spp., Ocimum spp., Rosmarinus officinalis, Foeniculum vulgare, Citrus spp., Cuminum cyminum, Elettaria cardamomum, Eruca sativa, Pimpinella anisum, Piper chaba, Evodiarutae carpa, Cinnamomum aromaticum de Lavandula hybrida ont été réalisées par Rajendran et Sriranjini (2008). L’effet fumigant a été testé sur T. castaneum, S. oryzae, S. zeamais, R. dominica, Acanthoscelides obtectus, C. maculatus et C. chinensis. Les adultes étaient généralement sensibles, alors que les œufs étaient tolérants ou très sensibles selon les espèces d’insectes et le type d’huile essentielle ou d’un composant. Les huiles essentielles se sont révélées efficaces en mélange avec le CO2 ou le formiate d’éthyle. L’effet insecticide des extraits à l’Acétone, au Chloroforme, à l’Ether de pétrole, au Méthanol, à l’Hexane et à l’eau de Caparis decidua a été testé sur T. castaneum. L’extrait à l’Hexane est le plus efficace avec une différence hautement significative (p<0,05). Cette efficacité se traduit par un effet inhibiteur après 16 heures de traitement sur les paramètres biochimiques tels que le glycogène, les protéines, l’ADN, l’ARN, les acides aminés, les phosphatases acides et alcaline, le glutamate 18 pyruvate transaminase, le glutamate oxaloacétate transaminase, la LDH et l’acétylcholinestérase (Upadhyay, 2011)
Les minéraux
Lyamugema (1984) a comparé l’efficacité de la poudre de latérite et celle d’un pesticide nommé Actellic à l’égard d’Acanthoscelides obtectus, ravageur des graines de haricot. La latérite s’est montrée plus efficace puisqu’elle a complètement bloqué le développement des bruches.
Utilisation d’huile
L’utilisation d’huile pour la protection des denrées permet l’inadhésion des œufs à la graine (Schoonhoven, 1978). Cruz et al. (1988) ont démontré que le mélange d’huile d’arachide aux graines de légumineuses dans des proportions de 5 ml/kg est une technique efficace pour la lutte contre les insectes.
Les greniers traditionnels et les magasins de stockage améliorés
Les greniers traditionnels sont faits à base de branches d’arbres renforcées ou par des mottes de terre. Chez les pygmées Aka de Centrafrique, les greniers peuvent être construits dans le village ou dans les champs et servent des fois de cuisine aux femmes ; la fumée dégagée permet de faire fuir les insectes (fig. 1-13). Au Sénégal, la plupart des greniers traditionnels sont recouverts d’un toit conique en paille (Imperata cylindrica). Nous ne disposons pas de documents publiés sur l’efficacité des greniers traditionnels pour la protection des céréales et légumineuses stockées néanmoins c’est une méthode de protection des denrées stockées largement pratiquée par les paysans dans la sous-région. Fig. 1-13 : Grenier traditionnel chez les Pygmées Aka de Centrafrique (Source : Aba Toumnou, 2010). 26 Les magasins améliorés de stockage sont faits avec une toiture en tôle, la base avec les matériaux de récupération ou en tôle (fig.1-14). Ils sont largement répandus dans les Communes rurales du Sénégal. Ces structures améliorées pour la plupart manquent de système d’aération et sont orientées de sorte à bien emmagasiner le rayonnement solaire. Le réchauffement du système au-delà d’une certaine température (60 °C) élimine toutes les formes d’insectes ravageurs des denrées sans conséquence sur le pouvoir germinatif des grains (Beckett et Morton, 2003). Fig. 1-14: Magasins améliorés de stockage des grains au Sénégal (Source : Aba Toumnou, 2010).
L’insolation
Le séchage traditionnel sur le sol permet de déshydrater les produits jusqu’à ce que leur métabolisme et celui des microorganismes associés soient fortement ralentis. Le séchage se fait avant le stockage des récoltes afin de faire fuir les insectes grâce à la chaleur et à l’incidence directe des rayons solaires (Gueye et al., 2011). Au Sénégal, Sembène et al. (2006) ont démontré l’efficacité de l’incidence directe des rayons solaires à l’égard Caryedon serratus sur l’arachide. Ils ont déduit que pour une exposition d’une heure de temps à une température de 33°C externe au sol, l’incidence directe des rayons solaires permet de tuer tous les stades de développement de Caryedon serratus.
Généralités sur les plantes indigènes à effet insecticide potentiel étudié
Quatre plantes indigènes ont présenté une activité insecticide sur S. zeamais et T. castaneum. Il s’agit de Drypetes gossweileri, de Trichilia gilgiana, de Zanha golungensis et d’Afrostyrax lepidophyllus. I
Biologie de Drypetes gossweileri (S. Moore) Position systématique Règne: Végétal Famille : Euphorbiacées Genre : Drypetes Espèce : Drypetes gossweileri Description botanique et écologie de Drypetes gossweileri D gossweileri (fig. 1-15) mesure entre 30 à 42 m de haut avec un tronc pouvant atteindre 120 cm de diamètre. Les Feuilles sont alternes et simples à stipules petites (Tailfer, 1989). Les fleurs femelles à ovaire supère, à poils courts comportent 2 styles. Les fleurs mâles possèdent 30 étamines avec un disque en forme de coupe. Le fruit est une drupe brun verdâtre ou jaune, brun velouté de poils jaune pulpe constitué de 3 à 7 graines. Le genre Drypetes comprend environ 210 espèces réparties dans les régions tropicales et subtropicales. Environ 60 espèces sont présentes en Afrique continentale et environ 15 dans les îles de l’océan Indien (Aké Assi et al., 1985 ; Tailfer, 1989
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