FLUORESCENCE PHOTOINDUITE ET
DEGRADATION DES PESTICIDES BENZOYL
DEVENIR DES PESTICIDES DANS L’ENVIRONNEMENT
Les pesticides sont des produits chimiques ou préparations contenant une ou plusieurs substances actives destinés à protéger les cultures en repoussant ou en éliminant les espèces parasites nuisibles, tels que les insectes, les champignons, les rongeurs, les plantes indésirables etc. Ils sont également utilisés pour l’entretien des voieries, des places publiques et pour la lutte contre les maladies à transmission vectorielle [1]. Cependant, la plupart des pesticides utilisés n’atteint pas forcément leurs cibles. Des résidus de pesticides ont été détectés dans les différents compartiments environnementaux (sols, eaux, air…) ainsi que dans les fruits et légumes (Fig. I-1) . Ils contaminent l’écosystème en s’incorporant à la biomasse, passent du sol aux végétaux puis s’accumulent dans la chaine alimentaire. Ces résidus de pesticides finissent dans l’organisme humain et créent d’énormes problèmes sanitaires. Des études scientifiques et épidémiologiques attribuent certaines pathologies, telles que les troubles neurodégénératifs, les cancers et troubles de la reproduction, à l’ingestion de pesticides
Transfert des pesticides dans les eaux
La contamination des eaux de surface par les pesticides est due aux ruissellements, aux drainages, aux pulvérisations, à l’épandage et à l’érosion des terres agricoles. La contamination par ruissellement dépend de la pluviométrie mais également de la structure de la surface du sol [11]. Par exemple, dans le cas des sols limoneux, on note une diminution de la porosité sous l’effet de la pluie diminuant ainsi la capacité d’infiltration et, par conséquent, le transport par ruissellement devient de plus en plus important [12]. Par contre, pour les eaux souterraines, la contamination se fait suite aux ruissellements qui lessivent les surfaces traitées puis s’infiltrent dans le sol à travers ses pores et ses fractures [5, 13]. Cette contamination dépend du niveau de la nappe, de la constitution du système aquifère, mais également de certaines propriétés des pesticides telles que la mobilité, la solubilité aqueuse et la persistance dans le sol [14, 15] . Ainsi, une étude réalisée en France sur le contrôle de la qualité des eaux, entre 1992 et 1996, sur 43 rivières, a révélé la présence de pesticides en teneurs supérieures à 0,5 µg L-1 dans 54% des analyses. Les pesticides les plus fréquemment détectés étaient des herbicides dont l’atrazine, l’isoproturon et leurs métabolites. Les eaux des nappes phréatiques étaient moins contaminées avec des teneurs comprises entre 0,1 et 0,5 μg L-1.
Transfert des pesticides dans les sols
Les phénomènes de transport (sorption (absorption, adsorption), désorption et dispersion) sont les principaux responsables de contamination des sols. Les pesticides s’adsorbent facilement sur des sols riches en argiles ou en matières organiques. L’adsorption, facilite la fixation, par les micro-organismes du sol des pesticides, lesquels, par conséquent atteignent faiblement les plantes. Leur accumulation dans les sols est suivie de leur transfert par infiltration dans la nappe phréatique [13, 16, 17] . La contamination du sol dépend du pH, de la nature du sol (teneur en matières organiques, texture, perméabilité…), de son état physique, de la température, mais aussi de la quantité de pesticides utilisés. Le niveau de contamination du sol dépend de la distribution verticale et de la dispersion des pesticides, ainsi que de l’activité microbiologique [5, 18]. Bodin et al [8] ont détecté au niveau des mangroves du Sénégal, une forte bioaccumulation dans les sédiments de polluants organiques persistants (POPs) tels que les organochlorés dans l’estuaire du Sine-Saloum et sur la petite côte à Fadiouth.
Transfert des pesticides dans l’atmosphère
Les résidus de pesticides présents à la surface des sols et dans les eaux de ruissellement peuvent aussi atteindre l’atmosphère par volatilisation ou par érosion éolienne (Fig. I-1). L’épandage reste cependant la plus grande source de pollution atmosphérique. La contamination de l’atmosphère dépend non seulement des conditions météorologiques, mais aussi de certains facteurs physiques tels que la constante de Henry, la pression de vapeur et le temps de demi-vie du pesticide en question dans l’air [19]. Ce type de pollution sévit le plus dans les pays développés où l’agriculture se fait à grande échelle et dans laquelle l’épandage est effectué par avion. Les pesticides ainsi se trouvant dan l’air sont ensuite transportés par les courants aériens loin des lieux d’application. Ainsi, l’étude de Mbaye et al [20] a révélé la présence de traces de pesticides dans l’atmosphère parisienne.
Dégradation biotique et abiotique
Les pesticides peuvent subir différentes transformations chimiques et/ou photochimiques sous l’action de facteurs biotiques ou abiotiques dans les milieux naturels. – La dégradation abiotique dépend de la stabilité des pesticides dans les eaux. Elle est due à des réactions chimiques telles que l’oxydo-réduction, l’hydrolyse, l’oxydation, ou des réactions photochimiques, comme l’irradiation directe par les rayons UV du soleil [21] , laquelle peut provoquer une pollution à grande échelle . – La dégradation biotique est une décomposition par les micro-organismes (champignons, bactéries, etc.) et les enzymes. Cette dégradation dépend de la fixation du pesticide à la biomasse et des conditions anaérobiques et/ou aérobiques selon le type de micro-organismes [26-28] . La cinétique de dégradation d’un pesticide permet d’estimer sa rémanence en vue de prévoir les risques de pollution. En général, les pesticides qui se dégradent le plus rapidement sont ceux qui présentent le moins de risques pour l’environnement, sous réserve que les produits de dégradation ne soient pas toxiques. La dégradation peut prendre de quelques heures à plusieurs années selon les conditions environnementales, météorologiques et les caractéristiques physico-chimiques du pesticide (Fig. I-1) [29] . Par exemple, une étude de Schrack et al [30] indique la rémanence dans les eaux de quelques pesticides après traitement: l’atrazine (7 ans), l’isoproturon (3 ans), le buturon (12 ans) et les organochlorés (30 ans). La biodisponibilité, l’activité microbiologique et la nature du sol sont des facteurs déterminants sur l’activité des pesticides et leur devenir [16, 31] . Figure I-1: Mécanismes des transferts des pesticides dans les compartiments environnementaux et leur devenir .
GENERALITES SUR LES BENZOYL- ET PHENYLUREES (BPUs) ETUDIES
Structure et propriétés physico-chimiques
Les benzoylurées (BUs) (diflubenzuron, téflubenzuron, triflumuron, hexflumuron, lufénuron etc.) et les phénylurées (PUs) (fénuron, linuron, monolinuron, fluométuron, monuron etc.) sont une classe très importante de pesticides largement utilisés dans l’agriculture. Ces pesticides diffèrent par la nature et la position des substituants qui influent fortement sur leurs propriétés physico-chimiques ainsi que sur leur activité biologique.
Solubilité dans l’eau
Les PUs sont plus solubles dans l’eau que les BUs qui présentent un groupement benzoyle. La solubilité (s) baisse lorsque le nombre de substituants halogènes du cycle aromatique augmente. Par exemple, le fenuron (s = 3850 mg L-1) qui ne comporte aucun halogène est plus soluble dans l’eau que le monuron (1 substituant chlore, s = 230 mg L-1) lequel est plus soluble que le diuron (2 substituants chlore, s = 42 mg L-1). Marsella et al [32] ont montré dans le cas des BUs, à partir des coefficients de partage octanol-eau (Kow), que le diflubenzuron, est moins soluble que l’hexaflumuron, le flufénoxuron, le chlorfluazuron et le téflubenzuron. Comme pour les PUs, l’hydrophobicité dépend de la taille et du nombre d’atomes d’halogène de la molécule.
Sorption et désorption dans les sols
L’adsorption dépend des caractéristiques du sol (matière organique, argiles, pH) et des propriétés physico-chimiques des substances actives (solubilité, coefficient de partage). Baskaran et al [33] ont étudié la sorption et la désorption sur différents sols de culture du coton pour quatre herbicides dont le diuron et le fluométuron en mesurant le coefficient de partage (KOC) entre le carbone organique et l’eau. Les valeurs de KOC pour le diuron (entre 457 et 498 L kg-1) sont plus élevées que celles du fluométuron (entre 67 et 90 L kg-1), indiquant une plus grande adsorption du diuron aux sols. Une forte adsorption facilite chez les composés peu solubles leur fixation sur les sols et diminue ainsi les risques de contamination des eaux souterraines [34]. En général, les PUs se caractérisent par une très forte désorption qui fait d’eux des polluants potentiels des eaux souterraines [17, 35-37]. Par contre, Hsiao et al [18] ont montré que les BUs adhéraient mieux aux matières organiques du sol et étaient donc très exposés aux micro-organismes. Par conséquent, leur application sur les sols détruit la microflore plus qu’elle ne contamine les eaux souterraines.
Activité biologique et usage
Les BPUs sont des insecticides ou des herbicides très couramment utilisés pour tuer ou repousser les insectes ravageurs des récoltes et lutter contre les vecteurs de maladies.
Les benzoylurées (BUs)
Les benzoylurées (diflubenzuron, téflubenzuron, triflumuron, hexflumuron, lufenuron etc.) sont généralement des insecticides, des larvicides, des ovicides ou des acaricides. Il s’agit d’inhibiteurs de l’ecdysone (hormone importante pour la mue des insectes et des crustacés), très utilisés dans les programmes de lutte intégrée phytosanitaire [38-40] . Le diflubenzuron (DFB) est un régulateur non systémique de croissance qui agit soit en inhibant la formation de la chitine au niveau des cuticules des insectes, soit en bloquant le processus de mue des insectes ou encore en agissant sur l’éclosion des œufs [34]. C’est la première matière active commercialisée (1972) de la famille des insecticides BPUs, largement employée en agriculture pour lutter contre les ravageurs et surtout contre les invasions d’acridiens. Ce pesticide est également recommandé par l’OMS pour lutter contre les insectes vecteurs de maladies telles que le paludisme et les agents pathogènes responsables des maladies diarrhéiques.
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