Corrosion de l’acier
L’acier est un alliage métallique utilisé dans les domaines de la construction métallique et de la construction mécanique. L’acier est constitué de deux éléments au moins, majoritairement le fer puis le carbone dans des proportions comprises entre 0,02 % et 1,67 % en masse .
C’est essentiellement la teneur en carbone qui confère à l’alliage les propriétés du métal qu’on appelle «acier». Il existe d’autres métaux à base de fer qui ne sont pas des aciers comme les fontes et les ferronickels par exemple. Les aciers sont élaborés pour résister à des sollicitations mécaniques ou des agressions chimiques ou une combinaison des deux .
La plupart des métaux existent dans la nature sous forme de composés (oxydes, sulfures, etc.). Le passage de l’état de minerai à celui de métal, pour article de consommation courante (manufacturé), exige un apport de chaleur considérable (haut fourneau, etc.). Ce métal exposé à l’environnement naturel reviendra après corrosion à l’état de composé. La corrosion ne peut se produire que si les produits de corrosion sont plus stables que le métal et le milieu environnant. Elle peut avoir un rôle bénéfique lorsque la formation d’un produit de corrosion à la surface du matériau le protège d’une dégradation future, mais dans la plupart des cas, elle est nuisible.
Morphologie de la corrosion
On considère souvent la corrosion uniquement en fonction de la rouille et du ternissement. Cependant, la corrosion se produit aussi de façon différente conduisant par exemple à la rupture par fissuration ou à la perte de résistance ou de ductilité. En général, chaque type se produit grâce à des mécanismes électrochimiques, mais les produits de corrosion ne sont pas nécessairement visibles et la perte n’a pas besoin d’être appréciable. Parmi celles-ci on distingue :
Corrosion uniforme : C’est une perte de matière plus ou moins régulière sur toute la surface. Cette attaque est observée, par exemple, sur les métaux exposés aux milieux acides.
Corrosion galvanique : Appelée aussi corrosion bimétallique, elle est due à la formation d’une pile électrochimique entre deux métaux qui diffèrent par leur potentiel de corrosion. Le métal ayant le potentiel de corrosion le plus négatif subit une corrosion accélérée par l’autre métal.
Corrosion par piqure : C’est une forme de corrosion localisée produite par certains anions, notamment les halogènes et plus particulièrement les chlorures, sur les métaux protégés par un film d’oxyde mince. Elle induit typiquement des cavités de quelques dizaines de micromètres de diamètre.
Corrosion caverneuse : Elle est due à une différence d’accessibilité de l’oxygène entre deux zones d’une structure métallique créant ainsi une pile électrochimique. Il y a alors une attaque des parties métalliques les moins accessibles à l’oxygène.
Corrosion sous contrainte et fatigue-corrosion : C’est une fissuration du métal qui résulte de l’action commune d’une contrainte mécanique (force de traction) et d’une réaction électrochimique. La corrosion sous l’effet de la fatigue est due à l’application répétée des contraintes.
Corrosion et fragilisation par l’hydrogène : La présence d’hydrogène dans un réseau métallique peut entrainer d’importantes détériorations du métal, dues à une chute catastrophique de ses propriétés mécaniques pouvant conduire alors à la rupture de pièces ou de structure. Il est généralement admis que l’hydrogène est d’abord adsorbé à la surface du métal dans lequel il se déplacerait sous forme «protonique», même sous forme atomique. Les dégâts provoqués par l’hydrogène après pénétration dans le réseau sont sous diverses formes :
Pénétration sous forme d’hydrures : c’est le cas du titane et d’autres métaux très réactifs vis-à-vis de l’hydrogène.
Recombinaison sous forme d’hydrogène moléculaire : lorsque le métal présente des défauts, les atomes d’hydrogène peuvent s’y recombiner. On peut alors atteindre des pressions considérables qui conduisent à des cloques, des boursouflures ou même des éclatements.
Fragilisation : par interaction avec les dislocations du réseau, les atomes d’hydrogène entrainent une diminution importante de la capacité de déformation plastique du métal qui devient fragile.
Facteurs qui influent la corrosion
Les phénomènes de la corrosion dépendent d’un grand nombre de facteurs. Citons – en quelques phénomènes :
La température : Généralement, l’augmentation de la température accélère les phénomènes de corrosion car elle diminue les domaines de stabilité des métaux et accélère les cinétiques de réactions et de transport. L’importance de son influence diffère cependant en fonction du milieu corrosif dans lequel se trouve le matériau.
L’acidité du milieu : La susceptibilité du matériau à la corrosion est fonction du pH de l’électrolyte. Une forte concentration en protons dans la solution augmente l’agressivité du milieu, ce qui modifie les équilibres des réactions chimiques et électrochimiques. La corrosion augmente avec la diminution du pH du milieu .
Régime hydrodynamique : Le transport des réactifs vers l’interface et de celui des produits de réaction vers l’électrolyte est de nature à modifier la cinétique des réactions électrochimiques en changeant la concentration des espèces et donc le potentiel d’équilibre. Les conditions hydrodynamiques fixent les vitesses de réactions en contrôlant le transport de matières par l’établissement d’une couche limite de diffusion des espèces appelée couche de Nernst. Ce qui explique l’importance de l’agitation de l’électrolyte lors des essais de corrosion en laboratoire.
La salinité : Les chlorures sont des ions agressifs souvent à l’origine de la corrosion localisée, leur présence en solution s’accompagne d’effets complémentaires. D’une part, leur concentration locale induit une acidification du milieu et d’autre part, la salinité a une influence sur la conductivité du milieu aqueux .
Les argiles comme inhibiteurs de corrosion
Définition et propriétés des argiles : Le mot argile vient du grec Argilos dérivé d’argos qui veut dire blanc. Les argiles, en général, sont des produits de décomposition des roches siliceuses, par désagrégation physique et mécanique puis par altération chimique. Elles sont constituées de particules de phyllosilicates dont le diamètre des grains est inférieur à 2 micromètres . Elles contiennent souvent des minéraux non phyllosilicates (carbonates, quartz, feldspaths, composés minéraux amorphes sous forme d’oxyde ou hydroxyde de fer et d’aluminium, etc.).
Les minéraux argileux sont liés entre eux par des liaisons de natures très diverses, en formant des agrégats de tailles beaucoup plus grande . Le caractère argileux des minéraux est lié à quatre critères : division : les minéraux doivent se présenter à l’état de particules de très petite taille, inférieure à 2 μm. faciès : leurs particules dissymétriques à tendance lamellaire peuvent glisser les unes sur les autres, ce qui leur confère la plasticité. Cette forme favorise également le piégeage de molécules, en particulier de l’eau.
dispersion : leur dispersion dans l’eau constitue des suspensions colloïdales plus ou moins stables. dimension : ce sont des phyllosilicates dont au moins une dimension est d’ordre nanométrique. Ces inhibiteurs minéraux améliorent de façon notoire les propriétés de l’acier contre le phénomène de corrosion. Le tableau suivant donne en guise d’exemple quelques argiles utilisées comme inhibiteurs de corrosion des métaux.
Capacité d’échange cationique (CEC) : Les argiles en général, ont la propriété de fixer et libérer d’une manière réversible des cations contenus dans leur environnement. Les cations échangés sont des cations retenus par des liaisons faibles sur les surfaces internes et externes du minéral argileux .
Intercalation des cations organiques : L’intercalation est un processus réversible qui permet à une espèce invitée, molécule ou ion, de se loger au sein d’une espèce hôte, de structure lamellaire. Au cours de l’intercalation, les caractéristiques structurales de la matrice sont généralement conservées. Le terme intercalation englobe, en général, d’autres notions fréquemment employées telles que l’échange, l’insertion et l’inclusion. Cette technique a permis de modifier des minéraux argileux par de nombreux sels organiques.
Protection par inhibiteur de corrosion
Tout comme pour bien d’autres domaines, il est difficile de déterminer l’origine exacte de l’inhibition considérée comme une technologie à part. Les Romains connaissaient déjà la corrosion. En effet, dès le premier siècle, le grand naturaliste et historien romain, Pline l’Ancien , mentionne des méthodes de protection pour éviter la corrosion du fer et du bronze : de l’huile ou du bitume pour le bronze, de la poix, du gypse ou de la céruse pour le fer. Au moyen âge les maitres armuriers ajoutaient de la farine ou de la levure pour éviter la fragilisation des armes lors d’un décapage acide . Le mot inhibition a été employé en chimie et en science de la corrosion depuis 1907 . Néanmoins, il y a quelques décennies, il a été observé que le dépôt de calcaire formé à l’intérieur des conduites transportant certaines eaux naturelles protégeait cette conduite. En 1945, on comptait moins de 30 articles traitant de l’inhibition . De nombreux articles concernant l’inhibition ont été rédigés durant la période couvrant 1945 à 1954 : ceux-ci traitaient entre autres de l’inhibition dans le domaine de l’aviation, des chaudières, des circuits de refroidissement, des moteurs diesel, des sels de déneigement, des raffineries de pétrole, des pétroliers, etc. Les articles publiés durant cette période témoignent d’un grand développement technologique en matière d’inhibition. Durant les quarante dernières années, un nombre croissant de résumés, d’articles et autres ouvrages évoquant ce sujet a été recensé : au total, en 1970, 647 articles traitant de l’inhibition sont dénombrés .
Définition de l’inhibiteur : Selon la norme ISO 8044, un inhibiteur est une substance chimique ajoutée au système de corrosion à une concentration choisie pour son efficacité, celle-ci entraîne une diminution de la vitesse de corrosion du métal sans modifier de manière significative la concentration d’aucun agent corrosif contenu dans le milieu agressif . La définition d’un inhibiteur de corrosion retenue par la “National Association of Corrosion Engineers (NACE)” est la suivante : un inhibiteur est une substance qui retarde la corrosion lorsqu’elle est ajoutée à un environnement en faible concentration. Un inhibiteur de corrosion doit être actif à faible concentration, facile à mettre en œuvre, ne pas modifier les propriétés physiques de la solution et être peu onéreux. Il doit: Abaisser la vitesse de corrosion du métal tout en conservant les caractéristiques pshysico-chimiques de ce dernier, Être compatible avec les normes en vigueur de non-toxicité et de protection de l’environnement, Être efficace à faible concentration, Être stable en présence d’autres constituants, Être stable dans le domaine de températures utilisé.
Il existe différentes manières de classer des inhibiteurs de corrosion : Nature des molécules d’inhibiteur On distingue : Les inhibiteurs organiques : Les molécules organiques sont promises à un développement plus que certain en termes d’inhibiteur de corrosion : leur utilisation est actuellement préférée à celle d’inhibiteurs inorganiques pour des raisons d’écotoxicité essentiellement. Les inhibiteurs organiques sont généralement constitués de sous-produits de l’industrie pétrolière . Ils possèdent au moins un centre actif susceptible d’échanger des électrons avec le métal, tel l’azote, l’oxygène, le phosphore ou le soufre. Les groupes fonctionnels usuels, permettant leur fixation sur le métal, sont : Le radical aminé (-NH2), Le radical mercapto (-SH), Le radical hydroxyle (-OH), Le radical carboxyle (-COOH).
Les inhibiteurs inorganiques : La plupart des molécules inorganiques sont utilisées le plus souvent en milieu proche de la neutralité ou en milieu alcalin, et rarement en milieu acide. La quasi-totalité de ces molécules contiennent de l’oxygène dans leur formule . En fonction de leur nécessité plus ou moins d’oxygène dissous dans le milieu corrosif pour être efficaces. On les classe en inhibiteurs non passivant (sels d’acide faible et de base forte) ou en inhibiteurs passivant (nitrites et oxo-anions de type XO4n-). Les premiers agissent plutôt par formation d’un composé protecteur, précipité en surface, alors que les seconds agissent en aidant à la formation d’une couche d’oxyde homogène et isolante. Le nombre de molécules en usage à l’heure actuelle va en se restreignant, car la plupart des produits efficaces présentent un côté néfaste pour l’environnement.
Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 : Rappels bibliographiques
Introduction
1.1) Généralité sur la corrosion
1.1.1) Définition
1.1.2) Corrosion de l’acier
1.1.3) Processus de corrosion
1.1.4) Morphologie de la corrosion
1.1.5) Facteurs qui influent la corrosion
1.1.6) Réaction électrolytique
1.1.6.1) Aspect thermodynamique
1.1.6.2) Aspect cinétique
1.2) Protection contre la corrosion
1.2.1) Protection Cathodique
1.2.1.1) Principe
1.2.1.2) Protection cathodique par imposition de courant
1.2.1.3) Les anodes sacrificielles
1.2.2) Protection anodique
1.2.3) Protection par inhibiteur de corrosion
1.2.3.1) Historique
1.2.3.2) Définition de l’inhibiteur
1.2.3.3) Nature des molécules d’inhibiteur
1.2.3.4) Mécanismes d’action électrochimique
1.2.3.6) Les argiles comme inhibiteurs de corrosion
1.3) Méthodes d’évaluation de la corrosion
1.3.1) Suivi du Potentiel en circuit ouvert
1.3.2) Spectroscopie d’impédance électrochimique conventionnelle (SIE)
1.3.4.1) Principe
1.3.4.2) Représentations graphiques
1.3.4.3) Circuits équivalents
1.3.4.4) Spectroscopie d’impédance électrochimique appliquée aux études sur les inhibiteurs
de corrosion
Conclusion
Chapitre 2 : Partie expérimentale
2.1) Définition de quelques concepts
2.1.1) Electrode et électrolyte
2.1.2) Phénomènes d’oxydoréduction
2.1.3) Un oxydant
2.1.4) Un réducteur
2.1.5) Une anode
2.1.6) Une cathode
2.1.7) Passivation des aciers
2.2) Conditions expérimentales
2.2.1) Inhibiteur utilisé
2.2.2) Matériaux utilisés
2.2.3) Solutions corrosives utilisées
2.2.4) Préparation des plaques
2.3) Techniques de mesures électrochimiques
2.3.1) Appareillage
2.3.2) Mesure du potentiel à l’abandon
2.3.3) Spectroscopie d’impédance électrochimique
Conclusion
Chapitre 3 : Etude de la corrosion et de l’action inhibitrice d’une argile
3.1) Mesure et étude électrochimique de la corrosion des aciers
3.1.1) Suivi de Ecorr en fonction du temps d’immersion
3.1.2) Spectroscopie d’impédance électrochimique
3.1.2.1) Diagrammes de Nyquist
3.1.2.2) Circuit équivalent de Randles
3.2) Efficacité de l’inhibiteur de corrosion
3.2.1) Suivi de Ecorr en fonction du temps d’immersion
3.2.2) Mesure par la spectroscopie d’impédance électrochimique
Conclusion
Conclusion générale
Références bibliographiques