Identification multi-longueurs d’onde des sources X
faibles des amas globulaires
Variables cataclysmiques
Une variable cataclysmique est une binaire composée d’une naine blanche et d’une étoile peu massive, éventuellement en train d’évoluer en géante rouge. Une variable cataclysmique est suffisamment serrée pour qu’il y ait accrétion de matière sur la naine blanche et, comme dans le cas des binaires X (§2.5), il y a en général formation d’un disque d’accrétion autour de la naine blanche. Cette partie est un résumé de la synthèse détaillée que l’on peut trouver dans Warner (1996), sauf mention complémentaire. Je présente tout d’abord les principales caractéristiques observationnelles qui ont conduit à la différenciation des variables cataclysmiques en plusieurs classes et sous-classes. Ensuite, je décris les différents modèles proposés pour l’émission de ces objets.
Variabilité temporelle
Les variables cataclysmiques présentent de multiples variations de luminosité sur des échelles de temps de la seconde au siècle et des échelles d’amplitude variées et qui sont à l’origine de leur nom (p.ex. Hellier 2001, voir Figure 2.7). Cette variabilité se retrouve dans plusieurs domaines de longueurs d’onde, du visible aux rayons X (p.ex. Hellier 2001 ; Warner 1996).
Nova et supernova de type Ia
Les variables cataclysmiques ont d’abord été détectées sous forme de novae. Une nova est une source dont la luminosité dans le visible augmente d’une dizaine de magnitude, puis elle décroît exponentiellement avec un temps caractéristique de plusieurs jours à plusieurs centaines de jours (voir RS Oph dans la Figure 2.7). En fait, la matière est accumulée à la surface de la naine blanche et les conditions de température et de densité peuvent atteindre un seuil suffisant pour initier la fusion de l’hydrogène en hélium par le cycle CNO, ce qui donne naissance à la nova. Si le processus d’accrétion dure assez longtemps pour amener la naine blanche à la limite de Chandrasekhar (voir §2.1.1), la densité interne croissante pourrait allumer la fusion brutale du carbone et provoquer une explosion en supernova de type Ia (p.ex. Glendenning 2000). 2.6.1.2 Novae naines et quasi-novae Certaines variables cataclysmiques présentent une augmentation soudaine de la luminosité visible de 4 magnitudes en moyenne, qui peut durer plusieurs heures ou jours, puis la luminosité décroît sur plusieurs semaines voire des années (Warner 1996, §3, voir aussi VW Hyi à la Figure 2.7). On parle d’éruptions de nova naine (voir §2.6.3), ce qui définit la classe des novae-naines (sous-classes U Gem, SU UMa, Z Cam…). Le modèle le plus reconnu repose sur une instabilité thermique du disque (p.ex. Osaki 1996). Osaki (1974) fut le premier à proposer une origine dans le disque pour les éruptions. Le modèle a ensuite été développé par Meyer & Meyer-Hofmeister (1981), Bath & Pringle (1981) et d’autres auteurs (voir la revue de Osaki 1996, et ses références).
VARIABLES CATACLYSMIQUES
FIG. 2.7 – Variabilité des variables cataclysmiques dans le visible sur différentes échelles de temps. PQ Gem est une polaire intermédiaire qui présente deux périodes (voir §2.6.2.3). RX And, IY UMa, VW Hyi et Z Cam sont des novae naines et en particulier, VW Hyi et Z Cam montrent des éruptions de nova naine (voir §2.6.1.2). TT Ari est une quasi-nova (voir §2.6.1.2). RS Oph est une nova récurrente (voir §2.6.1.1). (Hellier 2001)
SOURCES X DANS LES AMAS GLOBULAIRES
Cette instabilité est basée sur la nature double du disque d’accrétion à une température d’environ 104 K, où l’hydrogène passe de sa forme ionisée à l’état neutre. Ce changement d’état change la viscosité de la matière, qui est beaucoup plus forte pour l’hydrogène ionisé, ce qui va précipiter la matière vers la naine blanche (p.ex. Osaki 1996). La matière emmagasinée dans le disque pendant la phase de quiescence est donc soudainement accrétée par la naine blanche à cause de cette instabilité, provoquant un surplus de luminosité dans le visible (p.ex. Osaki 1996). Les objets des sous-classes SU UMa et EX UMa présentent par moment des super-éruptions (plus fréquentes pour les EX UMa) et une modulation dans la courbe de lumière dans le visible (superhump) avec une période plus longue que la période orbitale (p.ex. Osaki 1996). Une deuxième instabilité du disque, appelée instabilité de marée rendrait le disque d’accrétion elliptique. La modulation dite superhump lors des super-éruptions serait alors causée par le mouvement de précession du disque d’accrétion (p.ex. Osaki 1996). Les objets de la sous-classe Z Cam présentent des périodes d’arrêt pendant laquelle la luminosité est intermédiaire entre les luminosités en éruption et en quiescence (voir Z Cam dans la Figure 2.7). D’autres variables cataclysmiques sont pratiquement toujours dans un état éruptif. On pense que ce genre de système va produire (ou a déjà produit) un phénomène de nova (voir §2.6.1.1). On parle donc de quasi-novae (voir TT Ari dans la Figure 2.7). Dans cette classe, on distingue les étoiles RW Tri qui ont un spectre de l’hydrogène en émission dans le visible, alors que les UX UMa ont un spectre en absorption, ce qui est sans doute dû à l’inclinaison du système. Les étoiles VY Scl sont aussi appelées anti-novae naines car elles sont en général en état éruptif et pour de courts moments en quiescence.
Caractéristiques
Période orbitale
Les périodes orbitales des différentes classes de variables cataclysmiques sont présentées sur la Figure 2.8. On constate que la distribution des périodes des variables cataclysmiques présente un déficit entre 2 et 3 h (p.ex. King 1988 ; Kolb et al. 1998, voir aussi §2.6.2.4). Les périodes plus longues peuvent atteindre quelques jours pour les novae naines les plus lentes et des périodes plus courtes sont atteintes par les novae naines de type SU UMa (Ritter & Kolb 2003). Une classe particulière est celle des variables cataclysmiques dégénérées (AM CVn, p.ex. Nelemans 2005). Ces binaires ont les périodes les plus courtes observées (< 65 min, voir Figure 2.8), impliquant la compacité des deux composantes de la binaire (p.ex. Nelemans 2005). On pense qu’il s’agit de deux naines blanches dont la plus massive accrète majoritairement de l’hélium de son compagnon. Le spectre dans le visible présente en effet de nombreuses raies d’émission de l’hélium et aucune de l’hydrogène. Les polaires et les polaires intermédiaires sont devenues une classe à part à cause de la présence d’un champ magnétique important (voir §2.6.2.3) FIG. 2.8 – Distribution des périodes orbitales des variables cataclysmiques, d’après les données du catalogue de Ritter & Kolb (2003). Le déficit entre 2 et 3 h est indiqué par des lignes en pointillés.
Taux d’accrétion
Une différence de taux d’accrétion permettrait d’expliquer la différence entre les novae naines et les quasi-novae (voir §2.6.1.2). Au delà d’une valeur limite du taux d’accrétion M˙ crit, le disque d’accrétion de la variable cataclysmique est en effet suffisamment chaud pour être stable, ce qui semble être le cas pour les systèmes de type quasi-nova (p.ex. Osaki 1996). Cette valeur limite peut être estimée à partir du modèle d’instabilité thermique du disque (Smak 1983 ; Osaki 1996) : M˙ crit ∼ 2,7×1017 (Porb/4 h) 1,7 g s−1 ∼ 4×10−9 (Porb/4 h) 1,7 M⊙ an−1 (2.1) en supposant une taille de disque de 35% de la séparation entre les deux membres de la binaire et une masse totale du système de 1 M⊙, Porb étant la période orbitale du système en heures. Les novae naines ont un taux d’accrétion plus faible que cette valeur critique et leur disque connaît des instabilités qui provoquent les éruptions de nova naine (Osaki 1996, voir aussi le §2.6.1.2). Pour les systèmes non-magnétiques, la classification des variables cataclysmiques est faite à partir du taux d’accrétion et de la période orbitale. taux d’accrétion des variables cataclysmiques. FIG. 2.9 – Diagramme période–taux d’accrétion des variables cataclysmiques. Le déficit des périodes est indiqué par des lignes verticale et la droite inclinée indique le taux d’accrétion critique. Les systèmes indiqués sont les superhumpers permanents (PS), les quasi-novae (NL) ainsi que les sous-types de novae naines ER UMa (ER), SU UMa (SU), Z Cam (ZC) et U Gem (UG). (Osaki 1996) Les systèmes sous la ligne de taux d’accrétion critique présenteraient une instabilité thermique dans le disque (voir §2.6.1.2). Les systèmes avec des périodes inférieures à 2 h présenteraient de plus une instabilité de marée (voir §2.6.1.2). On remarque que les systèmes ER UMa et Z Cam correspondent à des cas limites. La catégorie des superhumpers permanents (PS) est faiblement représentée avec trois membres (Osaki 1996).
Champ magnétique de la naine blanche
Pour certaines variables cataclysmiques, une émission polarisée dans le visible est détectée, signature de la présence d’un champ magnétique dominant (B ∼ 107 à 108 G, p.ex. Cropper 1990). Ces objets sont appelés polaires en référence à cette émission polarisée (ou de type AM Her). Le champ magnétique permet d’expliquer le fait que ces objets sont synchrones, la période de rotation de la naine blanche étant égale à la période orbitale de la binaire (p.ex. Cropper 1990). De plus ce champ magnétique va guider l’accrétion de matière directement sur les pôles magnétiques de la naine blanche. Ces systèmes ne possèdent donc pas de disque d’accrétion car il est rompu par le champ magnétique. Le taux d’accrétion est en général faible (p.ex. Cropper 1990, voir aussi le §2.6.3.4). D’autres systèmes sont asynchrones et présentent deux périodes caractéristiques associées à la période de rotation de la naine blanche (quelques minutes) et à la période orbitale de la binaire (quelques heures). Ces systèmes sont appelés polaires intermédiaires (ou de type DQ Her, Patterson 1994). Elles ont des propriétés intermédiaires entre les polaires et les variables cataclysmiques non-magnétiques. En particulier, les polaires intermédiaires posséderaient un champ magnétique intermédiaire (B ∼ 106 G), qui n’est pas suffisant pour synchroniser les deux objets de la binaire et qui tronque en partie seulement le disque d’accrétion pour guider le flux d’accrétion vers les pôles magnétiques de la naine blanche (p.ex. Patterson 1994, voir aussi le §2.6.3.4). La comparaison de la raie de l’hélium He■■ à 4 686 Å avec la raie Hβ permettrait de repérer les systèmes magnétiques (largeur équivalent de Hβ supérieure à 20 Å et rapport He/Hβ plus grand que 0,4 pour les systèmes magnétiques Silber 1986)
Évolution
On pense que les variables cataclysmiques évoluent des périodes les plus longues vers les périodes les plus courtes, en perdant du moment angulaire par des mécanismes de freinage magnétique (période supérieure à 3 h) ou d’émission d’ondes gravitationnelles pour les systèmes plus serrés (période inférieure à 2 h) (p.ex. Osaki 1996). Le déficit entre 2 et 3 h constaté pour les systèmes non-magnétiques serait dû à un détachement de la binaire au cours de l’évolution (p.ex. Osaki 1996). Ce détachement pourrait être dû à un arrêt du freinage magnétique lorsque l’étoile compagnon atteint la masse de 0,2 − 0,3 M⊙ et que son cœur devient entièrement convectif, ce qui entraîne une forte diminution de son champ magnétique (Grossman et al. 1974). La binaire ne se resserre donc plus régulièrement et le transfert de masse peut s’interrompre (Spruit & Ritter 1983 ; Rappaport et al. 1983). Le système peut alors perdre du moment angulaire par émission d’ondes gravitationnelles et se retrouver en contact plus tard avec une période plus courte (Rappaport et al. 1983). Ce mécanisme est en accord avec l’observation d’un déficit dans le diagramme des périodes (Spruit & Ritter 1983 ; Rappaport et al. 1983). Les polaires évolueraient sans présenter de déficit significatif dans l’histogramme des périodes. Il semble que dans le cas des polaires, le fait que la binaire soit synchrone empêche le freinage magnétique d’être efficace (Wickramasinghe & Wu 1994). La perte de moment angulaire se ferait principalement par émission d’ondes gravitationnelles (Wickramasinghe & Wu 1994), ce qui expliquerait le faible taux d’accrétion de ces objets. Les polaires pourraient être le stade ultime des polaires intermédiaires les plus magnétiques, qui sont asynchrones (donc présentent un freinage magnétique encore efficace) avec un taux d’accrétion plus élevé (Norton et al. 2004)
Composantes de l’émission
Le disque d’accrétion
Le disque d’accrétion peut être modélisé simplement par une succession d’anneaux ayant une émission de corps noir à différentes températures, qui sont croissantes lorsque l’on se rapproche de la naine blanche (La Dous 1989). Selon ses rayons intérieur et extérieur, ce disque émet de l’infra- rouge à l’ultraviolet lointain, voire jusqu’aux rayons X mous (Warner 1996, §2.6). Le disque d’accrétion est la principale composante de l’émission ultraviolet des variables cataclysmiques (p.ex. Godon et al. 2008). Un spectre simulé de l’émission de ce disque est reproduit à la Figure 2.10. A cause de la contribution du disque d’accrétion dans le visible, la position sur le diagramme HR d’une variable cataclysmique est à gauche de la séquence principale (plus bleue et plus chaude). FIG. 2.10 – Spectres du disque d’accrétion d’une variable cataclysmique. Les spectres correspondent à différents taux d’accrétion : (1) 10−7 , (2) 10−8 , (3) 10−9 M⊙ an−1 . (La Dous 1989) Ce disque d’accrétion est une composante importante des systèmes non-magnétiques, ainsi que des polaires intermédiaires. Les systèmes de type AM CVn semblent posséder un disque d’accrétion, cependant il est constitué principalement d’hélium, de carbone et d’oxygène (p.ex. Nelemans 2005).
La couche limite
La matière tombe sur la naine blanche au niveau de la couche limite, où l’énergie cinétique est convertie en rayonnement X. Cette émission a été modélisée par Patterson & Raymond (1985a,b) et est illustrée à la Figure 2.11. Le plasma optiquement fin (points dans la Figure 2.11) émet un rayonnement continu de freinage (bremsstrahlung) d’une température T ∼ 108 K (kT ∼ 10 keV) et le plasma optiquement épais (zone ombrée) émet comme un corps noir à une température T ∼ (1−3)×105 K. Ce modèle permet de rendre compte globalement de l’émission X des variables cataclysmiques du voisinage du Soleil (Patterson & Raymond 1985a). Les quasi-novae ont un fort taux d’accrétion et correspondent au cas (a) de la Figure 2.11 et les novae naines en quiescence correspondent au cas (b). L’émission des quasi-novae semble donc plus molle en X que celle des novae naines et est en partie décalée vers l’ultraviolet et le visible à cause de l’émission de type corps noir, ce qui semble être le cas dans les observations ROSAT 2.6. VARIABLES CATACLYSMIQUES FIG. 2.11 – Représentation de la couche limite dans une variable cataclysmique pour un taux d’accrétion fort (a) et faible (b). (Patterson & Raymond 1985a) (Verbunt et al. 1997 ; Motch et al. 1996). Une composante de rayons X durs est cependant attendue par le plasma optiquement fin d’une couronne dans tous les cas (Patterson & Raymond 1985a).
Éruptions de nova naine en X
L’émission X est aussi affectée par ces éruptions (Warner 1996, §3.3.6). Le milieu devient en effet optiquement épais lors de la phase d’éruption et l’émission X est donc plus molle et thermalisée. En moyenne, il y a trois fois moins d’émission de X durs par rapport à l’état quiescent. Cependant, dans la progression de l’éruption, le flux X peut augmenter d’un facteur 5 avant d’être atténué lors du maximum de luminosité dans le visible, comme c’est la cas pour SS Cyg (Wheatley et al. 2003 ; Warner 1996, §3.3.6). La nova naine YZ Cnc présente une anticorrélation marquée entre le flux X et le flux dans le visible lors d’éruptions successives (Verbunt et al. 1999). En général, les variations de flux X d’un facteur 5 à 10 sur une échelle de temps allant de plusieurs heures à plusieurs jours sont associées à des éruptions de nova naine (Wheatley et al. 2003 ; Baskill et al. 2005). Cependant, ce genre de variation en X peut aussi être observée pendant l’état quiescent de quelques variables cataclysmiques (Baskill et al. 2005). 2.6.3.4 Choc à la surface des pôles magnétiques Pour les polaires, le flot d’accrétion est guidé par le champ magnétique directement jusqu’aux pôles magnétiques, comme cela est représenté à la Figure 2.12 (Warner 1996, §6). L’émission X contient principalement deux composantes : une émission de rayons X durs de type bremsstrahlung à la température T ∼ 3×108 K (kT ∼ 30 keV) et une émission absorbée et ré-émise par la surface de la naine blanche sous la forme d’une émission de corps noir de température T ∼ 4 × 105 K, dans l’ultraviolet ou les X mous (Warner 1996, §6). Les polaires présentent un déficit d’émission en ultraviolet et dans le visible d’un facteur 100 environ, dû à l’absence de disque d’accrétion (p.ex. Webb et al. 1999 ; Warner 1996, §6).
Résumé |