STRATEGIES DE SURVIE DES FEMMES
TRANSFORMATRICES D’HUILE DE PALME DE BADIANA
L’échantillonnage et populations ciblées PARAGRAPHE
Echantillonnage
Notre souhait dans cette étude est de constituer un échantillon qui soit représentatif de la population étudiée c’est-à-dire un échantillon constitué statistiquement de telle sorte que tous les membres de la population aient la même probabilité de faire partie de celui-ci. Il serait plus intéressant de procéder à un tirage au sort du nombre d’individus divisé à partir d’une base de sondage. Malheureusement celle-ci fait défaut. Lorsque le chef du village nous a fait savoir qu’il y avait un recensement en cours et que le dépouillement n’était pas achevé, nous nous sommes rendus à Djinaki la communauté rurale, ensuite à Diouloulou le chef-lieu d’arrondissement, enfin à Bignona le département mais sans succès. Dans toutes ces structures, une seule réponse : « les données ne sont pas encore publiées ». Raison pour laquelle la méthode d’échantillonnage non probabiliste a été favorisée avec notamment la technique boule de neige. Le nombre de femmes que nous avons pu interrogées est de 40.
Population ciblée
Notre étude s’adresse exclusivement à toute les femmes transformatrices d’huile de palme à Badiana sans distinction aucune de race d’ethnie, d’age, d’origine. L’essentiel pour nous c’est qu’elle soit mariée à un homme natif de ce village, résident ou pas. Mais cette dernière doit obligatoirement, nécessairement demeurer dans cette localité. N’empêche nous interrogerons certaines personnes ressources influentes tel que le chef du village, l’imam, le directeur de l’école, le chef du poste de santé, des notables, des jeunes afin d’avoir une banque de données susceptibles de nous aider dans la compréhension de certains phénomènes.
Les obstacles rencontrés
Les difficultés rencontrées tout au long de la réalisation de ce mémoire peuvent être regroupées en trois catégories. D’abord les écrits sur la Casamance peuvent se compter par dizaines surtout dans la presse sénégalaise. Au cours des vingt dernières années, la rébellion a occupé tous les débats. Raison pour laquelle nous avons pratiquement fait le tour de tous les centre de recherche de Dakar, de Bignona et Ziguinchor où il fallait faire des va-et-vient pour avoir quelques documents parce que soit le documentaliste est absent, soit les documents n’étaient pas rangés ou parfois ce n’était pas un jour consultable. La 20 documentation se faisait sur place. Donc lire et prendre note en même temps n’est pas une chose facile surtout si le récit est long. Ensuite comme nous l’avons dit plus haut, cette recherche, nous l’avons commencé en février. Or c’est pendant ce moment que nous avons commencé les cours de sociologie politique qui se tenaient une fois par semaine et sur place. L’observation directe et participante a toujours été très importante pour nous afin de pouvoir faire une description minutieuse du cadre et de l’objet de l’étude. Ce qui faisait que quand nous avions commencé l’étude nous restions six jours au village, revenir assister au cours et retourner la nuit suivante. Le passage par la Gambie a toujours été un calvaire pour nous. Les nombreux changement de voitures nous a fait perdre une fois tous nos bagages sans compter les multiples contrôles policiers et douaniers où tout est fouillé de fond en comble. Nous partions souvent vers minuit et arrivons à Badiana le lendemain matin. Parfois dès notre arrivée, nous partions à la brousse. Puisque nous avions dit aux populations que notre souhait est de participer du début à la fin de l’opération, elles nous invitaient à chaque fois et nous ne pouvions pas dire non quelque soient les conditions. Même sans la recherche, il serait incorrect de notre part de les regarder faire et rester tranquille. Du moment que nous faisons partie de cette ethnie, c’est inadmissible de croiser les bras et de les regarder travailler. Il fallait s’impliquer. La brousse était très éloignée des habitations et puisque nous n’avions pas les conditions physiques requises pour faire le déplacement en même temps, nous partions souvent en charrette ou en compagnie des enfants avec la possibilité de se reposer en cas besoin. Parfois c’est un peu ennuyant car nous partions seul avec les grimpeurs et traînons à la campagne jusqu’à la descente. Et puisque nous n’amenions pas de quoi noter, il fallait faire un rapport tous les jours une fois à la maison. Ce sont des individus très accueillant qui aiment l’étranger. Donc la nuit parfois tous les jeunes du quartier se regroupe à la maison autour d’un verre de thé et par respect pour ces personnes même fatiguée nous sommes obligée de discuter avec elles jusqu’au alentours de minuit, une heure du matin pour se réveiller tôt et aller travailler. Il est simple de deviner que ces conditions affectent notre santé. Raison pour laquelle nous tombions souvent malade et le rétablissement se poursuit jusqu’à aujourd’hui. Enfin nous avons souffert financièrement. Le billet à l’aller est d’environs 10.000F CFA de 21 même qu’au retour. Or nous ne savons pas le nombre de fois que nous avons fait le trajet. Sans compter les déplacements à l’intérieur de la casamance. Le transport est beaucoup plus chair là-bas qu’à Dakar. Il fallait aussi avoir tout le temps de l’argent de poche. A un certain moment tout cela était devenu assez compliqué pour nous. Nous avons donc eu l’idée de demander une disponibilité de 21 jours en rédigeant une demande d’autorisation d’absence que nous avons adressé à notre directeur de mémoire qui nous a compris aussitôt. Nous le remercions au passage pour cette indulgence. Cependant nous avons passé des moments très agréables à Badiana où nous nous sentions vraiment chez nous. Il n’est pas évident d’être étranger quelque part et assisté pleinement aux activités de ces habitants de même qu’à des réunions. Les hommes et les femmes nous appelaient « ma fille », « ma mère », « nia soeur » parce que nous portions le même nom que leur parent. A chaque fois que nous venions à Dakar tout le monde nous accompagnait et nous souhaiter bon retour. Nous avons beaucoup appris surtout avec les vieilles femmes avec qui nous ramassions les graines de palme ensemble.
Les difficultés rencontrées
Elles sont nombreuses mais nous n’en citerons que quelques unes et les plus importantes. A travers la description que nous venons de faire du calendrier d’occupation, il est évident qu’il y a des difficultés sérieuses pour concilier lés travaux agricoles des travaux domestiques de même que ces préoccupations personnelles des différents groupements, les intérêts personnels de ceux du village. Ainsi au niveau de cette localité un problème d’eau potable se pose avec acuité. Un seul puits est sensé alimenter tous les habitants or son eau n’est pas tout à fait limpide. Elle est assez trouble et pas très agréable. Ce manque d’eau se constate également au niveau des rizières. Ceci est la conséquence directe du déficit pluviométrique remarqué ces vingt dernières années et la profondeur de la nappe phréatique. Ce phénomène ne se limite pas seulement au niveau de l’eau mais aussi la salinisation, la déforestation, les feux de brousse et les conséquences sont souvent fâcheuses car beaucoup d’arbres fruitiers tels que les acacias, les palmiers disparaissent à petit pas. La salinisation est un problème très sérieux. L’eau est salée et les cultures ne sont pas bonnes. Une femme explique : « avant nous avions un jardin des femmes du village où nous plantions de l’oignon, des tomates, du piment, des carottes, des pommes de terre, des bananiers. Les recettes étaient tellement bonnes qu’elles couvraient nos besoins en nourriture et le reste nous le vendions pour avoir des revenus monétaires et aucune femme ne manquait d’argent. Aujourd’hui il n’existe plus. Les pépinières ne poussent pas ». Un projet de construction de forage de digue anti-sel et de rétention a été élaboré. Mais ne trouve pas de réalisation concrète. Ce qui justifie l’insuffisance de la production agricole et de la dépendance alimentaire vis-à-vis des autres localités. Les populations manquent de matériels adéquats car jusqu’à nos jours les travaux s’effectuent avec le kadyendo et une absence de semence sélectionnée se pose. De surcroît la divagation des troupeaux qui dévastent les jeunes plantes. Ainsi beaucoup de jeunes ont quitté le village abandonnant ces terres naguère domaine généreux de la riziculture, de la fruiticulture mais qui se révèle aujourd’hui hostile à l’homme. Ce n’est pas seulement la crise agricole qui à la base de l’exode rural mais également la rébellion qui prévaut dans cette région depuis quelque temps. Aujourd’hui avec le processus de paix, tout le monde pouvait en parler ouvertement. Mais il fut des temps où il était interdit de prononcer ce mot. Cela s’est constaté au cours des focus group organisés où la question revenait souvent. Chacun a expliqué comment il l’a vécu. Une jeune femme K.B explique : « nous n’avons pas enregistré de morts dans le village. Mais je suis sûr que des vieux ont été tués par la misère causée par les nombreuses humiliations et parfois les coups de battons qu’ils recevaient de la part des rebelles et des militaires aussi. Dans le premier cas parce qu’ils avaient refusé d’encourager leurs fils dans le combat et dans le deuxième cas pour avoir des informations ». Un autre vieux raconte son histoire : « ma fille je suis mieux placé pour vous parler des dégâts de la crise casamançaise. Je suis un vieux retraité qui a décidé de revenir vivre au village car n’ayant rien à faire en ville. Il y’a deux ans de cela j’ai débloqué mon compte bancaire et avec l’aide de mes enfants j’ai ouvert une boutique. Deux jours après son équipement, ils sont venus ramasser le tout et mobiliser les hommes du quartier pour le transport de ces marchandises. Moi-même j’ai amené un sac de sucre jusqu’à la foret avant de rentrer ».
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