Amélioration des prévisions d’ensemble des débits sur la France de SAFRAN-ISBA-MODCOU
Introduction
Les enjeux humains et economiques des inondations deviennent de plus en plus impor- tants. En effet, la population mondiale ne cesse de s’accroıtre. Ainsi, de nombreux logements et entreprises ou industries sont installes dans les zones proches des cours d’eau, voire dans des zones inondables. On estime par exemple qu’environ 40% des 150 millions d’habitants du Bangladesh vit en zone inondable. En France aussi les degàts et catastrophes li ês aux inon- dations sont nombreux. Par exemple, la crue de la Seine en 1910 represente le plus important debordement de ce fleuve, sur la majeure partie de sa vallée. La crue de la Seine a duré 10 jours, et sa decrue 35 jours, et fut provoquée par des importantes précipitations liquides et so- lides. Des milliers de logements furent touches. Plus récemment, dans le Sud-Est de la France, la crue de l’Ouveze du 22 septembre 1992 reste tristement cèlébre. 37 personnes furent tuèes du fait d’une crue rapide provoquee par des cumuls de pluie intenses. Des valeurs de 300 mm en moins de 4H furent par exemple relevees à proximitè du village de Vaison-la-Romaine (moyenne mensuelle : 80 mm). Au niveau du pont romain, l’eau atteindra 17 m, soit 15 m de plus que la hauteur normale de la riviere. Cette anthropisation des zones dites a risques (un tiers des communes franc¸aises sont situees en zone à risque) rend très importante la supervision des phènoménes pouvant pro- voquer les inondations, ainsi que l’organisation des secours. En effet, quand un bassin de plusieurs milliers de vies est concerne, les délais sont souvent trés courts pour intervenir. De plus, le cout financier des d êgàts occasionn ês est trés souvent important ( 250 millions d’euros par an en France, http ://www.eaufrance.fr/spip.php ?rubrique187&id article=709). Il est donc preférable, à la fois du point de vueèconomique et humain, de prendre les mesures en amont, plutot que d’avoir a rèparer les dégàts. C’est pourquoi, depuis les previsions mété orologiques, en passant par les modéles hydro- logiques et par l’organisme gerant la coordination des alertes, et en allant jusqu’aux experts locaux et autorites locales (préfecture, gendarmerie, pompiers), il est nécessaire que la cha ıne menant a l’alerte des individus et des biens menacès soit en tout point efficace. Malgre les progrés de ces dernières annèes, les prévisions météorologiques ainsi que les modeles hydrologiques ont toujours des faiblesses qui rendent leur utilisation ou interprètation parfois delicate. En effet, la nature chaotique de l’évolution de l’atmosphére fait qu’une prèvi- sion peut deriver de l’évolution réelle de la situation. De plus, il est difficile d’estimer les états initiaux des modeles atmosphèriques précisément (observations manquantes ou entachées d’erreurs). C’est pourquoi une vision ensembliste de la prevision météorologique s’est im- posee ces derniéres annèes. Ainsi, une estimation probabiliste de l’incertitude des prévisions peut etre donn êe, et donc permettre d’améliorer les prévisions et leur utilisation en ce qui concerne les previsions hydrologiques, la limitation de leur qualité vient de la difficulté de paramétrer correctement ces modèles, de bien prendre en compte la topogra- phie, ou de disposer d’etats initiaux adequats. De plus, les erreurs commises sur les prévisions metéorologiques, et plus spécialement celles commises sur les précipitations, se répercutent directement sur les previsions hydrologiques. Par exemple, la mauvaise localisation d’unévénement de pluie peut changer le bassin versant dans lequel cette eau s’ècoulera. Il est donc la aussi important d’avoir une indication sur la fiabilitè et sur l’incertitude des prévisions produites. C’est pourquoi la voie ensembliste se developpe de plus en plus dans le domaine de l’hydrologie. Un autre point d’amelioration possible des prévisions de débits concerne lesétats initiaux.én effet, il est commun dans la communaute météorologique d’utiliser des méthodes d’as- similation afin de coller au plus pres aux observations diverses tout en tenant compte desèrreurs liees aux mesures des observations. Cependant, ces méthodes ne sont que peu utilisées dans le cadre de l’hydrologie a l’heure actuelle, et lesètudes sont encore rares pour le moment. Sur le plan international, le programme HEPEX (The Hydrologic Ensemble Prediction EXperiment) est un projet international visant a rassembler les communautès météorologiqueét hydrologique, afin d’etablir un projet de recherche sur le théme des prèvisions hydrolo- giques ensemblistes. Ses themes principaux se situent au niveau de l’utilisation des prèvisions d’ensemble metéorologiques, de l’amélioration des prévisions d’ensemble hydrologiques, en particulier en ce qui concerne son incertitude, et de la maniere d’utiliser ces prèvisions d’en- semble hydrologiques pour l’utilisateur final. Ces trois themes dècrivent la quasi-totalité de la chaıne d’alerte des crues telle qu’elle a eté décrite plus haut. Dans ce cadre, diverseséxperiences sont menées sur des bassins et zones variés dans plusieurs pays.én Europe, le projet EFAS (European Flood Alert System) de l’Union Europeenne vise à mettre a disposition de l’ensemble des pays europèens membres, des prévisions ensemblistes de debits homogénéisées. Ce projet aété initié suite aux crues dévastatrices du Danube en 2002. Il conjugue a la fois des recherches sur le thème des prèvisions d’ensemble de débits, et l’amelioration de la fourniture, en cas d’alerte, à l’ensemble des pays membres, des prèvisions de debits produites. Outre l’amélioration proprement dite de la qualité des prévisions, le projetéFAS vise aussi a proposer des sorties exploitables le plus facilement possible aux utilisateurs finaux, par le biais par exemple de codes couleur simples. Le projet MAP D-PHASE (Mesoscale Alpine Programme, Demonstration of Probabilistic Hydrological and Atmospheric Simulation of flood Events in the Alpine region) est un projet du WWRP (World Weather Research Programme du WMO (World Meteorological Organization)). Il a pour but de montrer les capacites d’un systéme d’alerte de crues qui fournit des previsions déterministes et ensemblistes de débits. L’échéance visée est la courteéchéance (1-2 jours) et la moyenneéchéance (3-5 jours). Les modéles hydrologiques four- nis par les utilisateurs de divers pays ”alpins” ont eté implémentés sur certains des bassinsétudiés, et alimentés par certaines des prévisions météorologiques disponibles. Cette phase de demonstration a montré de bonnes performances, et va continuer sur un nombre réduit de bassins suisses, grace au soutien des autorit ês de protection civile et de MeteoSwiss.énfin, de nombreux pays tentent aussi de mettre en place de tels systemes opèrationnels de maniere indèpendante, afin de fournir des prévisions probabilistes aux services d’alerte locaux. Toutes ces experiences permettent de faire progresser les performances des modéles hy- drologiques et d’ameliorer les prévisions de débits à desèchelles diverses. De plus, elles ont mis en lumiere l’intèrét de l’approche ensembliste des pr êvisions de debits par rapport à l’approche dèterministe, du fait de ses performances plusélevées. La possibilite de disposer, gr àce a l’approche ensembliste, d’une estimation de la qualitè de la prevision, et donc de l’incertitude qui régit cette prévision, permet en effet au prévisionniste de mieux anticiper l’evolution possible des crues. Enfin, gr àce a cette amèlioration des prévisions due a la vision ensembliste, l’èchéance des prévisions peutétre allong êe. La modelisation hydro-météorologique est engagée depuis de nombreuses années à Mètéo- France, avec notamment le developpement et la validation de la cha ıne hydro-metéorologique SAFRAN-ISBA-MODCOU (SIM). Ce systeme est le couplage de trois modèles diffèrents : – SAFRAN (Systeme d’Analyse Fournissant des Renseignements A la Neige, Durand et al. (1993), Durand (1995)) est un systeme d’analyse mètéorologique. Il a pour but de fournir differents paramétres mètéorologiques nécessaires à ISBA (prècipitations liquides et solides, temperature à 2 m, vent a 10 m, rayonnements, humidite de l’air et nébulosité). Cette analyseést realiséeà partir d’observations de surfaces et d’analyses de sorties de modèles. – ISBA (Interactions entre le Sol, la Biosphere et l’Atmosphère, Noilhan and Planton (1989)) est un schema de surface. ISBA a pour r ole de simuler les bilans hydriques et ênergé- tiques entre le sol et l’atmosphere. Il utilise des donnèes de végétation et d’occupation du sol, àinsi que les parametres fournis par SAFRAN, afin de rèaliser ces calculs. – MODCOU (MODele COUplè, Ledoux et al. (1984)) est un modele hydrogèologique. Il simule les transferts hydrologiques de surface, souterrains, ainsi que les echanges entre les nappes aquiferes et les rivières. La chaıne SIM a eté appliquée et validée tout d’abord sur des grands bassins franc¸ais : le Rhone ( êtchevers (2000)), l’Adour-Garonne (Morel (2003)) et enfin la Seine (RoussetRegimbeau (2007)). Ces travaux ont montre la capacité de la cha ıne SIM a reproduire les bilans d’eau et d’energie sur ces bassins, ainsi qu’ à simuler de manière satisfaisante les dèbits sur les rivieres de ces bassins. L’adaptation de SIM aèté faite sur la France entiére et sa vali- dation (Habets et al. (2008)) a eté réalisée sur une période de 10 années. Elle a montré une trés bonne simulation de la plupart des debits ainsi que des scores (critére de Nash)èlevés, excepté dans les zones montagneuses, ou les dèbits sont trop influencés notamment par les barrages hydro-electriques. Suite a ces travaux, Mètéo-France a désiré développer une application nouvelle basée sur SIM : les previsions d’ensemble de débits, à moyenneèchéance. C’est pourquoi RoussetRegimbeau (2007) a mis en place et valide lors de sa thése la première application ensembliste basee sur le modéle SIM, chaque membre mètéorologique servant à produire un membre hy- drologique. Ainsi, les previsions d’ensemble météorologiques à 10 jours d’èchéance de l’EPS 14 (Ensemble Prediction System) du CEPMMT (Centre Europeen pour la Prévision Météorolo- gique a Moyen Terme) ontèté utilisées en tant que forc¸age de SIM. Cette cha ıne repond à l’attente des utilisateurs d’une meilleure anticipation des conditions hydrologiques extremes (a la fois en ce qui concerne les crues et lesètiages). La cha ıne de previsions d’ensemble de debits est désormais une cha ıne qui tourne en temps reel quotidiennement. Elle aété va- lidee par Rousset-Regimbeau (2007), montrant une faible dispersion des debits notamment àux premieresèchéances, ainsi que des scores (calculés par rapport aux débits d’analyse de SIM) tres bons pour quasiment toutes les stations et tous les seuils considèrés. Cependant, les previsions d’ensemble de débits à courteèchéance, notamment à cause de la faible dispersion des ensembles hydrologiques, restent difficilement exploitables alors que la courte echéance est un aspect trés important pour les prèvisionnistes. Ceci est d u au fait que l’EPS du CEPMMT est dediéà la moyenneèchéance. C’est pourquoi le premier objectif de ma these aèté d’améliorer les prévisions d’ensemble de débits à courteèchéance. Pour cela, il a eté choisi d’utiliser des prévisions d’ensemble dédiées à la courteèchéance, la PEARP (Prevision d’Ensemble ARPEGE) de Météo-France, en lieu et place de l’EPS du CEPMMT. Le second objectif a eté d’améliorer lesétats initiaux des deux cha ınes de previsions d’en- semble, grace a une assimilation de dèbits observés. En effet, la cha ıne SIM-analyse n’etait jusque la jamais recalèe par des observations de débits. La premiere partie de mon manuscrit est constituèe de l’introduction générale (Chap. 1), la description du modele SIM (Chap. 2), ainsi que des prèvisions d’ensemble à moyenneèchéance mises en place par Rousset-Regimbeau (2007) (Chap. 3). Ensuite, la description de l’utilisation la PEARP en remplacement de l’EPS du CEPMMT afin de mettre en place un systeme de prèvisions d’ensemble de débits à courteèchéance, est décrite. Les prévisions d’en- semble hydrologiques ainsi creees ontété validées et comparées à celles obtenues par RoussetRegimbeau (2007) grace a l’EPS du CEPMMT, sur les deux premiers jours d’èchéance en commun des deux systemes. Cette comparaison statistique utilisant une nouvelle fois comme reférence les débits de SIM-analyse pour les débits, et l’analyse SAFRAN pour les précipi- tations, a fait l’objet d’une publication dans le Journal of HydroMeteorology (Thirel et al. (2008)). La seconde partie de ma these aèté consacrée au développement d’un systéme d’assi- milation des debits. Le but du Chap. 5 a doncété d’implémenter ce systéme d’assimilation des debits dans la cha ıne SIM-analyse, afin de proposer des etats initiaux plus performants àux deux chaınes de previsions d’ensemble de débits. Pour cela, le coupleur dynamique de codes de calcul PALM du CERFACS a eté utilisé, et on a implémenté ce systéme en se servant de l’estimateur BLUE (Best Linear Unbiased Estimator). Ce systeme aèté décrit et validé dans differentes configurations par rapport à des observations de dèbits, et a fait l’objet d’une soumission a Hydrology and Earth System Sciences ( Thirel et al. (2010a)) (Chap. 6). Enfin, la derniere partie de ma thèse (Chap. 7) a concernè la quantification de l’apport des etats assimilés crées par le systéme d’assimilation, sur les prèvision d’ensemble de débits. àinsi, les previsions de débits utilisant la PEARP et l’EPS du CEPMMT ontété initialisées par des etats initiaux issus de l’assimilation de débits. Les prévisions d’ensemble de débits à 10 jours d’echéance utilisant l’EPS du CEPMMT ont doncété cette fois-ci validées par rapport à des observations de dèbits, et non plus par rapport à des dèbits de SIM-analyse. Enfin, les deux systemes SIM-PEARP et SIM-CEPMMT ont a nouveauèté comparés entre eux (par rapport aux observations de debits) afin de déterminer de quelle maniére chacun est influencè par les nouveaux etats initiaux. Ce travail a fait l’objet d’une soumission à Hydrology andèarth System Sciences
Le modele SIM (SAFRAN-ISBA-MODCOU)
. Revue de differents modéles hydro-mètéorologiques
La modelisation hydrométéorologique est engagée depuis plusieurs années à Mètéo-France, àvec le developpement et la validation de la cha ıne SAFRAN-ISBA-MODCOU (SIM) au Centre National de Recherches Metéorologiques (CNRM), ainsi que son utilisation pour des besoins operationnels à la Direction de la Climatologie (DP/DCLIM/HYDRO). Le schema de surface Interactions Surface Biosphére Atmosphère (ISBA, Noilhan and Planton (1989)) a eté développé au CNRM. Initialement, il avait pour objectif le couplage avec des modeles de circulation gènérale, pour l’étude du climat ou pour la prévision numérique operationnelle, avec de fortes contraintes numériques. ISBA est le schéma de surface du modele de climat de Mètéo-France ARPEGE-CLIMAT, et il est opérationnel depuis 1998 dans les modeles de prèvision de Météo-France ARPEGE et ALADIN, et dans le modéle de prevision AROME depuis fin 2008. Il aété progressivement enrichi, en particulier en ce qui concerne l’hydrologie. ISBA est couple au modéle hydrogèologique MODCOU (MODéle COUplè, Ledoux et al. (1984), Ledoux (2003), Habets (1998)), developpé par le Centre d’Informatique Géologique de l’Ecole Nationale Superieure des Mines de Paris, devenu depuis Centre de Géosciences de Mines-Paristech. Un tel couplage permet de valider a l’èchelle régionale les différents processus d’écoule- ment parametrisés par le modéle (superficiels et souterrains). Les dèbits intégrent en effet cette information et sont facilement comparables a des observations gr ace a un rèseau assez dense de stations de mesure en France. Le couplage entre ISBA et MODCOU a eté initié en 1998 sur les bassins de l’Adourét du Rhone ( Habets (1998)). Ces deux modeles sont complètés par le systéme SAFRAN pour l’analyse des parametres mètéorologiques de surface, afin de constituer la cha ıne SIM (SAFRAN-ISBA-MODCOU). Apres avoirèté validée sur trois grands bassins versants franc¸ais, le Rh one ( êtchevers (2000)), l’Adour-Garonne (Morel (2003)) et la Seine (Rousset-Regimbeau (2007), Rousset et al. (2004)), la chaıne SIM a etéétendue et validéeà l’ensemble de la France ( Habets et al. (2008)). De plus, elle est en partie exploitee de fac¸on opérationnelle à Mètéo-France, afin de fournir un suivi en temps reel des composantes des bilans d’eau et d’énergie, en particulier des reserves en eau du sol. C’est sur cette cha ıne hydrometéorologique qu’ont reposé les travaux de cette these. Les trois composantes de SIM, leur couplage ainsi que l’extension de la chaıne SIM a la France entiere vontètre d êcrits dans cette partie du manuscrit, aprés une brève revue des principaux modeles hydrologiques utilisès dans la communauté scientifique. 2.1 Revue de differents modéles hydro-mètéorologiques
DHSVM
DHSVM (Distributed Hydrology Soil Vegetation Model) est un modele hydro-mètéorolo- gique aèchelle régionale développéà l’Universitè de Washington (pour plus d’informations . voir : http ://www.hydro.washington.edu/Lettenmaier/Models/DHSVM/index.shtml). Ce modele distribuè a uneéchelle assez fine (quelques dizaines/centaines de métres, pa- rametre règlable par l’utilisateur). Il comprend l’interception par la canopée, l’évaporation, la transpiration, et l’accumulation et la fonte de la neige, de meme que la g ênération du ruissel- lement via un mecanisme d’excés de saturation ( Wigmosta et al. (1994)).
VIC
VIC (Variable Infiltration Capacity) est un modele hydro-mètéorologique distribuéà largeèchelle développéà l’Universitè de Washington (description compléte disponible sur http ://- www.hydro.washington.edu/Lettenmaier/Models/VIC/). Il comprend un schema de surface à mailles règuliéres et homogènes qui simule des pro- cessus sous-maille (Liang et al. (1994), Liang (1994)). VIC utilise un forc¸age metéorologique classique (precipitations, température, vent…) afin de simuler les cycles de l’eau et d’énergie.énfin, il utilise le modele hydrologique de Lohmann ( Lohmann et al. (1996), Lohmann et al. (1998)) afin de realiser le routage en riviére, par le biais d’hydrographes et desèquations de Saint-Venant.
MESH
MESH (Modelisation Environnementale Communautaire – Surface et Hydrologie) est un modele hydromètéorologique régional développéà Environnement Canada ( Pietroniro et al. (2007)). Il inclut 3 modeles de surface : un modèle force-restore, une version du modèle ISBA (Noilhan and Planton (1989)), une version du schema de Surface Canadien (CLASS, Cana- dian Land Surface Scheme, Verseghy (2000)), ainsi que le modele hydrologique WATFLOOD (Kouwen et al. (1993)). Il a eté calibré et validé sur la région des Grands Lacs ( Pietroniro et al. (2007)).
LISFLOOD
LISFLOOD est un modele hydromètéorologique distribué sur l’ensemble de l’Europe sur une maille de 5 km et developpé au Joint Research Center (le manuel de l’utilisateur est dispo- nible ici : http ://natural-hazards.jrc.ec.europa.eu/downloads/pdf/ec jrc lisfloodUserManual – JvdK-AdR.pdf). C’est un modele semi-physique, qui sert notamment à la prèvision des crues, le change- ment climatique, ainsi que l’occupation du sol. Il comprend un schema de surface simulant le cycle de l’eau, ainsi qu’un modele hydrologique utilisant lesèquations de l’onde cinématique. Ce modele est utilisè dans le cadre du systéme europèen d’alerte des crues (EFAS). Malheureusement, aucune etude comparative n’existe entre ces différents modéles. C’est pourquoi, suite aux nombreuses annees de développement, d’expertise et d’utilisation en opéra- tionnel de SIM a Mètéo-France, ce modéle a logiquementèté choisi dans le cadre de ma thése. Ses trois composantes, leur couplage, ainsi que l’application SIM-France vont etre d êcrites ici.
Le systeme d’analyse mètéorologique SAFRAN
Le systeme SAFRAN (Système d’Analyse Fournissant des Renseignements Atmosphèri- ques a la Neige) aèté développéà l’origine dans le cadre de la prèvision du risque d’avalanches sur le massif alpin (Durand et al. (1993), Durand (1995)). Il avait pour but d’analyser, sur les zones de relief, des parametres mètéorologiques de surface : la température de l’air à 2 m, le vent a 10 m, l’humidite de l’air, les précipitations solides et liquides, la nébulosité totale, et les rayonnements solaire (direct et diffus) et infrarouge, au pas de temps horaire, et avec une discretisation verticale variable (généralement fixéeà 300 m). Par la suite, ce systeme aètéétendu sur la France entiére, afin de fournir une analyse du forc¸age atmospherique sur l’ensemble du territoire (étchevers (2000) ; Le Moigne (2002)). L’analyse des parametres mètéorologiques effectuée par SAFRAN sur la France ainsi que sa validation ont eté décrites en détail dans Quintana Seguı et al. (2008). SAFRAN ne travaille pas sur un maillage regulier, mais sur des ”massifs”, c’est- à-dire des zones geographiquement et climatiquement homogénes. C’est le zonage SYMPOSIUM II de Metéo-France qui est utilisé. FIGURE 2.1 – Carte des zones SAFRAN sur la France et altitude des mailles ISBA (en m) Sur l’ensemble de la France, il y a 615 zones SAFRAN, de forme irreguliére, d’une surfaceèn genéral inférieure à 1000 km2 , et sur lesquelles les gradients horizontaux climatologiques (en particulier de precipitations) et d’altitude sont faibles. Ces zones sont représentées sur la figure 2.1. Le systeme SAFRAN fait appel a la fois a des observations et a des sorties de modèles (analyses ARPEGE ou CEPMMT) pour realiser son analyse. A partir de ces données, il four- nit pour chaque massif des profils verticaux des parametres mètéorologiques au pas de temps horaire (figure 2.2). FIGURE 2.2 – Schema simplifié du fonctionnement de l’analyse météorologique SAFRAN L’analyse SAFRAN se fait en plusieurs etapes : – Analyse des profils verticaux de temperature, vent, humidité, rayonnement et nébulosité : Pour chaque massif, une ebauche du modéle est comparèe aux observations aux niveaux ou ontèté faites ces mesures, afin de vérifier la cohérence des observations et d’éliminer les observations douteuses. Ensuite, l’analyse des parametres est effectuèeà l’aide des observa- tions valides et de l’ebauche en utilisant la technique de l’interpolation optimale, au pas de temps de 6H, et avec une resolution verticale de 300 m. Le cas du rayonnement est traite d’une autre maniére. En effet, en raison de la trop faible densite de postes météorologiques fournissant des observations de rayonnement (at- mospherique et solaire), ces derniers sont calculésà l’aide d’un modèle de transfert radiatif (Ritter and Geleyn (1992)). Ce modele utilise les profils verticaux analysès de température et d’humidite, permettant l’estimation d’un profil de nébulosité. – Analyse des precipitations : L’analyse des precipitations est faite au pas de temps journalier ( à 0600 UTC), afin de pouvoir prendre en compte les points de mesure ou seules des observations journalières sont disponibles. Ici, l’ebauche n’est pas fournie par des modéles : SAFRAN utilise un gradient climatologique moyen (Etchevers (2000)). – Interpolation horaire : L’ensemble des parametres est interpolè au pas de temps horaire. Cette interpolation se fait de maniere linèaire, sauf pour la température et les précipitations. Pour la temperature, les variations diurnes sont estimées à l’aide du rayonnement solaireèt d’un terme de rappel a l’èquilibre ( Martin (1988)). La temperature à 2 m a 1200 UTC est corrigee en fonction de la température maximale observée. La repartition horaire des précipitations est déterminéeà partir de l’humiditè spécifique. La limite pluie/neige est estimeeà partir de l’altitude de l’isotherme 0.5 ◦C issue de l’analyse de la temperature, altitude ajustée si besoin par les observations de pluie et de neige dans la zone concernee. à l’issue de ces etapes, SAFRAN fournit des analyses horaires des paramétres mètéorologi- ques sur l’ensemble des massifs, sous forme de profils verticaux de resolution 300 m. – Interpolation spatiale : Ces donnees sont ensuite interpolées sur la grille réguliére a 8 km sur laquelle travaille ISBA. Chaque maille appartient a un massif SAFRAN donnè, pour lequel on conna ıt le profil vertical des parametres mètéorologiques. Une maille ISBA ayant une altitude connue, l’inter- polation se fait entre les deux niveaux SAFRAN entourant cette altitude (distants de 300 m).
Le schema de surface ISBA
Presentation
Le schema de surface ISBA aété développé afin de simuler leséchanges d’eau et d’énergieéntre le sol, la vegétation et les basses couches de l’atmosphére. C’est un schèma de transfert Sol-Vegétation-Atmosphére (SVAT). Il est couplè avec les modéles opèrationnels de prévision numerique utilisésà Mètéo-France : ARPEGE, ALADIN, AROME, mais aussi avec des modé- les comme ARPEGE-climat (modele de circulation gènérale), Méso-NH (modéle de mèso-échelle non-hydrostatique), ou MODCOU (modéle hydrogèologique) (voir le principe de ce dernier couplage dans le paragraphe 2.5). ISBA utilise la methode force-restore pour determiner l’évolution de l’eau et de la tempéra- ture dans le sol. Cette methode est une simplification des principes physiques décrivant les transferts de l’eau et de l’energie dans le sol. L’évolution de la température et de l’eau dans le sol est regie par l’action d’une contrainte ( force) et sont rappelees vers une situation dite d’equilibre ( restore). Au cours du temps, la physique d’ISBA a eté complétée. Mahfouf and Noilhan (1996) ont introduit un drainage gravitationnel dans la version initiale du modele a deux couches pour le sol. Puis, ont eté introduits successivement : un schéma de neige simplifié ( Douville et al. (1995)), une vegétation interactive avec l’environnement ( Calvet et al. (1998)), une troisieme couche dans le sol (Boone et al. (1999)), les effets de la glace (Boone (2000)), un drainage sous-maille (Habets et al. (1999a) et Etchevers et al. (2001)), une description du ruissellement sous-maille (Habets et al. (1999b)), un schema de neige explicite à 3 couches ( Boone and Etchevers (2001)) et un profil exponentiel de conductivite hydraulique ( Decharme et al. (2006)). Dans SIM, on utilise la version d’ISBA force-restore a trois couches pour le sol ( Boone et al. (1999)) avec le schema de neige explicite à 3 couches ( Boone and Etchevers (2001)). Deux bilans d’energie sont donc calculés, le premier sur le sol et la végétation, et le second sur la neige. On peut voir sur la figure 2.3 le principe de fonctionnement d’ISBA. Les variables et parametres d’ISBA sont dètaillées ci-dessous.
Le schema de surface ISBA
Les parametres d’ISBA
Les parametres en entrèe d’ISBA sont classés en deux catégories : 1. Les parametres primaires, c’est- a-dire le type de sol (via les pourcentages de sable et d’argile), et le type de vegétation. 2. Les parametres secondaires : a partir de l’information texturale du sol dècrite ci-dessus, on peut estimer d’autres parametres a l’aide de relations continues ( Noilhan and Lacarrere (1995)). Ces parametres sont : (a) Les parametres liès au sol : On les determine à partir des relations de Clapp and Hornberger (1978) et du type de sol. Ils sont au nombre de 3 : – le contenu en eau du sol a la saturation wsat (en m 3/ m3 ), c’est le contenu en eau maximal du sol ou porosite. Sous ce seuil, il y a drainage gravitationnel, jusqu’a ce que le contenu en eau diminue et atteigne la capacitè au champ. – le contenu en eau du sol a la capacitè au champ wfc (en m 3/ m3 ), a partir duquel le drainage gravitationnel devient tres faible. Sous ce seuil, l’eau peutètre utilis êe par la plante par absorption par les racines, mais il y a stress hydrique, jusqu’a ce que le contenu en eau atteigne le point de flètrissement. – le contenu en eau du sol au point de fletrissement wwilt (en m 3/ m3 ). Sous ce seuil, l’eau contenue dans le sol est inutilisable par les plantes, car elle forme des films tres minces autour des particules du sol et les forces capillaires deviennent superieures au pouvoir d’extraction des racines. On definit alors la réserve utile RU par le produit de la difference entre capacitéàu champ et point de fletrissement, par la profondeur racinaire d2 : RU = d2 × (wfc − wwilt). Elle represente la quantité d’eau disponible pour la plante. (b) Les parametres lièsà la vègétation : – la fraction de vegétation dans la maille veg (0 ≤ veg ≤ 1). – l’indice foliaire LAI (Leaf Area Index) est le rapport entre la surface de feuilles vertes et la surface du sol. – la resistance stomatique minimale Rsmin est definie comme la résistance au transfert de l’eau des racines vers les feuilles dans un environnement optimal (rayonnement solaire important, sol tres alimentè en eau, air saturé et température optimale).- les longueurs de rugosite dynamique z0m et thermique z0h interviennent dans les equations de flux de la couche limite , et représentent les influences liées à la hauteur de la vègétation sur leséchanges turbulents avec l’atmosphére. – les profondeurs des trois couches de sol : d1, d2 et d3. La couche de surface a une profondeur d1 au maximum de 1 cm et controle l’ êvaporation du sol nu. Elle fait partie de la couche racinaire de profondeur d2 qui permet de definir la quantite d’eau utilisable par la plante ( RU). Enfin, la derniere couche a uneèpaisseur d3 − d2, d3 etant la profondeur totale du sol. (c) Enfin, a cette liste s’ajoutent l’albedo α et l’emissivité de la surface. 2.3.3 Les variables pronostiques d’ISBA ISBA calcule l’evolution temporelle de 11 variables pronostiques : – Ts, T2 : temperatures respectivement de surface et profonde. – wg, w2, w3, wr : contenus en eau respectivement de la couche de surface, de la zone racinaire, du reservoir profond et du réservoir d’interception de la pluie par la végétation. – wsf et w2f : les equivalents en eau du réservoir de glace respectivement à la surface et dans la zone racinaire. – Ws, Ds et Hs : le manteau neigeux est discretisé en trois couches pour lesquelles sont definis respectivement l’équivalent en eau, l’épaisseur, et la quantité de chaleur stockée par la neige. La version d’ISBA utilisee posséde trois rèservoirs d’eau dans le sol (ISBA-3L, Boone et al. (1999)). Pour etablir le bilan hydrique, ISBA calcule la quantité d’eau interceptée par la vegétation ( wr), l’equivalent en eau du manteau neigeux total ( Ws), la quantite d’eau présente dans le sol (wg, w2 et w3), ainsi que les flux d’eau ruisselee ( Qr), drainee ( D) et evaporée, par la surface du sol nu d’une part (Eg et sublimation de la neige Es), et par la vegétation d’autre part (transpiration Etr et evaporation de l’eau interceptéeér). Le bilan d’energie d’ISBA fait intervenir le rayonnement net (donnée d’entrée), le flux de chaleur sensible (H), le flux de chaleur latente (lie aux différents termes d’évaporation), et le flux de conduction dans le sol (G). C’est le terme de chaleur latente (i.e. d’evaporation) qui permet de coupler ces deux bilans. Le detail de ce fonctionnement est donné ci-dessous. àspect energétique 1. Les equations d’évolution de Ts et T2 : ∂Ts ∂t = CT (Rn − H − LE) − 2π τ (Ts − T2) (2.1) ∂T2 ∂t = 1 τ (Ts − T2) (2.2) La temperature de surface (équation 2.1)évolue à la fois sous l’influence du flux de chaleur dans le sol Rn −H −LE = G (avec Rn bilan radiatif a la surface, H et LE les flux de chaleur sensible et latente), et d’un terme de rappel a la tempèrature du sol profond T2. Le coefficient CT est la capacite thermique de l’ensemble sol-végétation. La temperature profonde T2 (equation 2.2) est la moyenne journaliére de la tempèrature de surface ; son evolution dépend d’un terme de rappel vers Ts avec une constante de temps τ = 1 jour.
1 Introduction |