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Hydratation des composés du ciment Portland
Réactions d’hydratation du clinker
Les ciments couramment utilisés en génie civil contiennent en majorité du clinker Portland, à l’origine des propriétés liantes du ciment ou du antli composé. Ce clinker est constitué d’une proportion massique au moins égale à 2/3 (norme [NF EN 197-1]) de silicates de calcium (C3S et C2S en notations conventionnelles de la chimie des ciments), la partie restante contenant du C3A et C4AF. Nous présenterons ici succinctement les réactions d’hydratation de ces quatre composés de base du clinker.
Hydratation du C3S
L’hydratation des C3S produit des C-S-H et de la portlandite (CH) et s’accompagne d’un dégagement de chaleur important compte tenu de l’exothermie de la réaction. La stoechiométrie des C-S-H évolue tout au long de l’hydratation mais on s’accorde pour considérer une valeur pour l’hydratation du clinkerde C/S=1,65 ([BROWN ET AL. 84], [ADENOT 92]).
La valeur de y dépend de l’humidité relative intern. Taylor propose pour un matériau saturé y=3,91 [TAYLOR 90]. Adenot donne une teneur en eau des C-S-H fonction du rapport C/S [ADENOT 92]. Ainsi il propose y=0,8+C/S, soit pour les C-S-H formés par la réaction du C3S une teneur en eau de y=2,45.
La différence peut s’expliquer par une progressive perte d’eau des C-S-H (eau faiblement adsorbée) pour un matériau non saturé.
Cependant, par rapport au C3S, on observe une différence de cinétique et d’exothermie. En effet la réaction d’hydratation du CS est beaucoup plus lente et moins exothermique que celle rapide de la pâte par formation de C 3AH6.
Après épuisement du gypse l’ettringite se dissout ourp former du monosulfoaluminate.
La réaction globale s’écrit :
hydratée va donc dépendre de la quantité de gypsentroduite.
Hydratation du C4AF
L’hydratation du C4AF est gérée par des réactions comparables à cellesmises en jeu pour le C3A à la différence que la cinétique est plus lente et que les produits formés contiennent Fe2O3.
Récapitulatif général des réactio ns
Les réactions globales d’hydratation de chaque composé principal du ciment sont récapitulées ci-dessous.
Si l’on considère une hydratation globale de la pâte de ciment on peut écrire plus simplement : ciment anhydre nH hydrates Q
Les conséquences de cette hydratation sont donc de3 types :
– une consommation d’eau,
– un dégagement de chaleur dû à l’exothermie de toutes les réactions d’hydratation,
– une variation volumique [LE CHATELIER 1900].
Ces différentes conséquences sont à la base des phénomènes moteurs des variations volumiques de la pâte de ciment au très jeune âge.
Evolution de l’hydratation
Le degré d’avancement de l’hydratation est définiommec le rapport entre la masse de ciment hydraté à l’instant t et la masse de ciment anhydre à l’origine : mcan (t 0) mcan (t 0)
Où mch et mcan sont respectivement les masses de ciment hydraté et anhydre.
Ce paramètre peut être déterminé directement par alysean d’images de la quantité d’anhydre à l’instant t. Il a été également largement développédes méthodes de mesures indirectes basées sur l’exploitation des conséquences de l’hydratation conduisant principalement à trois définitions du degré d’hydratation : L’hydratation se produit lorsque l’eau se trouve encontact avec les grains de ciment anhydres et présentent plusieurs phases de cinétiques différentes. La Figure I-1 met en évidence la présence de ces différentes phases.
On observe ainsi :
1- une phase initiale (phase I sur la Figure I-1) correspondant au premier pic de chaleur observé suite au passage en solution des anhydres dès leur contact avec l’eau ;
2- une phase progressive d’hydratation associée au deuxième pic de chaleur sur la figure. Le sommet du pic correspond à un degré d’hydratation critique à partir duquel la couche d’hydrates entourant l’anhydre est suffisamment épaisse pour que la diffusion à travers cette couche pilote les réactions [FUJI ETAL. 74] ;
3- enfin, le troisième pic observé sur la Figure I-1 orrespondc à la transformation de l’ettringite (TSA) en monosulfoaluminate (MSA) suite à l’épuisement du gypse, sa présence et son intensité dépendent donc des quantités de gypse et de C3A initialement présentes dans le béton.
En conditions réelles, l’hydratation est égalementinfluencée par les variations de température et de teneur en eau au sein du matériau. En effet, la température agit sur les cinétiques de réaction à travers l’énergie d’activation apparentede chaque réaction d’hydratation.
Le Tableau I-1 présente les énergies d’activation apparente de chacun des composés du clinker.
Les variations de teneur en eau au sein du matériauvont également influencer les cinétiques de réactions, pouvant même conduire à l’arrêt deséactionsr d’hydratation par manque d’eau. Le degré d’hydratation maximal atteint dans un matériau cimentaire sera d’autant plus élevé que le rapport E/C est fort [POWERS ET AL. 47].
Au contraire, dans les premiers instants de l’hydratation, une légère augmentation de cinétique est observée lors de la diminution du rapport E/C [MOUNANGA 03]. Cette augmentation de cinétique pour des faibles E/C peut être expliquéearp la sursaturation plus rapide de la solution interstitielle.
Réactions des additions minérales
Comme nous l’avons vu en introduction, les liants à base de clinker pur tendent à être de plus en plus remplacés par des liants composés de clinker et d’additions minérales dont la production dégage moins de CO et qui confèrent au béton une durabilité améliorée.
Parmi les additions minérales utilisées, on dégagetrois familles :
1- Les additions inertes telles que les fillers calcaires qui n’ont pas de pouvoir réactionnel mais qui peuvent influer sur l’hydratation du clinker par « effet filler » en jouant le rôle de sites de nucléation [NONAT 94].
2- Les additions pouzzolaniques telles que les fumées de silice ou les cendres volantes qui réagissent avec la portlandite produite par le clinker pour former des C-S-H et des aluminates de calcium hydratés. Ces additions n’ont cependant aucun pouvoir hydraulique et ne peuvent donc réagir qu’en présencde portlandite.
3- Les laitiers de haut fourneau qui combinent un pouvoir hydraulique latent avec un caractère pouzzolanique puisqu’ils réagissent également avec la portlandite produite par le clinker.
Le caractère pouzzolanique des additions minéralesest dû aux réactions de la silice et de l’alumine présentes dans les additions.
D’une part, la silice réagit avec la portlandite duclinker pour former des C-S-H de type différent de ceux formés par la réaction primaire udclinker puisqu’ils présentent un rapport C/S de l’ordre de 1,1/1,2 ([JUSTNES 92], [ADENOT 92]) : S1,15CH yH C1,15 SH y1,15 (I-9) La consommation d’eau (y) par la réaction pouzzolanique de la silice est un paramètre sur lesquels les auteurs ne s’accordent pas. On trouve en effet des valeurs de y allant de 0,5 ([JUSTNES 92], [LU ET AL. 93]) jusqu’à 2,75 [BENTZ ET AL. 97]. Ces différences s’expliquent par la difficulté que l’on a à déterminer la quantité d’eau fixée chimiquement et physiquement par les nouveaux C-S-H formés.
Par ailleurs, l’alumine réagit avec la portlandite produite par le clinker pour former des aluminates similaires à ceux produits par l’hydratation du clinker : La silice et l’alumine peuvent également se combiner afin de former des silico-aluminates de calcium hydratés .
Modélisation
Dans le paragraphe qui va suivre, nous allons présenter, de façon non exhaustive, les différents modèles permettant de prévoir l’hydratation d’un liant cimentaire en nous attachant aux différentes approches retenues (et simplifications associées).
Modèles en conditions isothermes et endogènes
Modèles considérant l’hydratation globale
Plusieurs auteurs proposent des lois empiriques donnant l’évolution du degré d’hydratation global du ciment en fonction du temps. On citera par exemple les lois suivantes. Où k, β, t0, et t1 sont des paramètres de modèle propres au liant étudié.
Ces modèles, qui ont l’avantage d’être simples etednécessiter la détermination de très peu de paramètres, ont un champ d’utilisation fiable limitée car ils se placent dans des conditions endogènes et isothermes en négligeant totalement lecaractère thermoactivé des réactions d’hydratation. De plus, ils utilisent une variable d’hydratation globale peu adaptée à la modélisation de liants composés.
Modèle d’Avrami
Le modèle d’Avrami [AVRAMI 39] apporte un degré deprécision supplémentaire car il permet d’estimer l’évolution du degré d’hydratationi de chaque constituant i du clinker (C3S, C2S, C3A, C4AF) en fonction du temps : Où ai , bi et ci sont déterminés empiriquement pour le type de ciment utilisé.
Dans ce modèle, les composés du ciment sont supposés’hydrater de façon indépendante.
De plus, le caractère thermoactivé des réactions hydratationd’ n’est pas pris en compte puisque les paramètres du modèle sont fixes pour un type deciment donné.
Modèle de Knudsen
Le modèle de Knudsen [KNUDSEN 84] est un modèle analytique basé sur la notion de distribution locale des grains de ciment.
Ainsi le degré d’hydratation du ciment sera obtenupar intégration du degré d’hydratation de chaque grain pondéré par la densité de distributiondes tailles de grains correspondant à son rayon. L’auteur parvient finalement à une relation polynomiale du type : Avec : – b0, b1 et b2 des constantes d’ajustement qui dépendent de la température initiale, du type de ciment utilisé ainsi que des ajouts Ce modèle, plus précis puisque prenant en compte l’effet d’ajouts ainsi que celui de la température initiale, a été implanté par Bentz dansle code de calcul microstructural CEMHYD3D [BENTZ 00]. Cependant, il suppose également que chaque composé s’hydrate séparément et nécessite des temps de calcul importants.
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1. INTRODUCTION
2. HYDRATATION DE LA PATE DE CIMENT
2.1. Hydratation des composés du ciment Portland
2.1.1. Réactions d’hydratation du clinker
2.1.2. Evolution de l’hydratation
2.2. Réactions des additions minérales
2.3. Modélisation
2.3.1. Modèles en conditions isothermes et endogènes
2.3.2. Modèles en conditions endogènes
2.3.3. Modèles en conditions réelles
3. EFFETS DE L’HYDRATATION A L’ECHELLE DU MATERIAU BETON
3.1. Transferts hydriques et thermiques induits
3.1.1. Transferts hydriques
3.1.2. Transferts thermiques
3.2. Déformations induites par les évolutions de la pâte
3.2.1. Déformations d’origine chimique
3.2.2. Déformations d’origine hydrique
3.2.3. Déformations d’origine thermique
3.3. Evolution des caractéristiques du matériau
3.3.1. Méthodes basées sur les théories d’homogénéisation
3.3.2. Notion de seuil de percolation
3.3.3. Lois empiriques modélisant les conséquences de l’hydratation sur les propriétés du béton vieillissant
3.3.4. Méthode utilisant la maturométrie (notion de temps équivalent)
3.3.5. Cas des liants composés
4. CONSEQUENCES DES EVOLUTIONS DU MATERIAU A L’ECHELLE DES STRUCTURES : LE RISQUE DE FISSURATION PRECOCE
4.1. Les différentes origines de la fissuration précoce
4.1.1. Déformations localement empêchées
4.1.2. Gradients de déformations
4.1.3. Déformations structurellement empêchées
4.2. Le comportement différé du béton
4.2.1. Fluage en conditions endogènes
4.2.2. Fluage en conditions de séchage
4.3. La modélisation de la fissuration par endommagement
4.3.1. Généralités
4.3.2. Modèles isotropes
4.3.3. Modèles anisotropes
4.4. Application pour le béton au jeune âge
5. CONCLUSIONS ET OBJECTIFS DU TRAVAIL
CHAPITRE II : MODELE D’HYDRATATION MULTIPHASIQUE
1. INTRODUCTION ET OBJECTIFS
2. PRESENTATION DU MODELE
2.1. Modèle général et éléments de couplage
2.2. Loi de cinétique de réaction
2.2.1. Considérations physiques générales
2.2.2. Activation chimique
2.2.3. Accessibilité de l’eau aux phases anhydres
2.2.4. Activation thermique
2.2.5. Effet retard dans le cas de réactions secondaires
2.2.6. Récapitulatif de la loi cinétique globale
2.3. Equation de conservation de la masse d’eau
2.3.1. Mise en équation
2.3.2. Conditions aux limites
2.4. Equation de conservation de la chaleur
2.4.1. Mise en équation
2.4.2. Conditions aux limites
3.MISE EN OEUVRE NUMERIQUE
3.1. Principe général de couplage
3.2. Implantation dans CASTEM
4.METHODE DE DETERMINATION DES PARAMETRES DE LA LOI D’HYDRATATION
4.1. Données matériau
4.1.1. Principe général
4.1.2. Méthode de détermination des paramètres du clinker
4.1.3. Détermination des paramètres des additions pouzzolaniques
4.1.4. Détermination des paramètres des laitiers
4.2. Paramètres de calage
4.2.1. Principe général de calage
4.2.2. Description de l’essai de calorimétrie semi adiabatique [NF EN 196-9]
4.3. Etude de sensibilité
4.4. Tableau récapitulatif
5. VALIDATION DU MODELE EN LABORATOIRE
5.1. Etude calorimétrique de liants composés
5.1.1. Principe de l’étude
5.1.2. Calage des paramètres des composés
5.1.3. Etude de liants ternaires et quaternaire
5.2. Etude de l’effet de la quantité d’eau
6. VALIDATION DU MODELE SUR UNE STRUCTURE IN SITU
6.1. Choix du chantier d’étude
6.2. Structure étudiée
6.2.1. Géométrie
6.2.2. Formulation du béton étudié
6.2.3. Conditions environnementales
6.3. Détermination des paramètres du modèle multiphasique
6.4. Validation du modèle sur la structure
6.5. Etude paramétrique
6.5.1. Effet de la température du béton frais sur la température atteinte à coeur
6.5.2. Effet du choix du liant sur la température atteinte à coeur
7. CONCLUSION
CHAPITRE III : MODELE DE COMPORTEMENT MECANIQUE
1. INTRODUCTION ET OBJECTIFS
2. PRESENTATION DU MODELE HYDROMECANIQUE POUR LE BETON NON EVOLUTIF
2.1. Principe général de modélisation
2.2. Modèle rhéologique
2.2.1. Présentation générale du modèle
2.2.2. Mise en équation du module viscoélastique consolidant
2.3. Effet des pressions hydriques
2.3.1. Principe général
2.3.2. Evolution du coefficient de Biot pour la gestion du fluage de dessiccation
2.4. Modèle d’endommagement
2.4.1. Variable d’endommagement
2.4.2. Cas des contraintes de traction
2.4.3. Cas des contraintes de compression
2.4.4. Contrainte totale
2.4.5. Gestion de la localisation
3. ADAPTATION POUR LE BETON AU JEUNE AGE
3.1. Principe général de modélisation
3.1.1. Principe de la prise en compte des phénomènes physicochimiques au jeune âge
3.1.2. Cas particulier des liants composés
3.2. Lois constitutives
3.2.1. Lois rhéologiques
3.2.2. Contrainte hydrique
3.3. Evolution des variables internes pendant l’hydratation
3.3.1. Endommagement
3.3.2. Variables de consolidation
3.4. Mise en oeuvre
3.4.1. Conditions initiales
3.4.2. Evolution des caractéristiques mécaniques
4.MISE EN OEUVRE NUMERIQUE
4.1. Principe général
4.2. Résolution numérique adaptée au couplage chémo-mécanique
5.METHODE DE DETERMINATION DES PARAMETRES DU MODELE
5.1. Récapitulatif des paramètres d’entrée
5.2. Principe de calage des paramètres
5.2.1. Caractéristiques mécaniques instantanées
5.2.2. Caractéristiques différées
5.2.3. Effet de l’eau
5.2.4. Paramètres d’endommagement
5.3. Récapitulatif
6. APPLICATION DU MODELE EN LABORATOIRE
6.1. Application sur béton durci
6.1.1. Application vis-à-vis de l’endommagement
6.1.2. Application vis-à-vis du comportement différé
6.2. Application sur béton au jeune âge
6.2.1. Caractéristiques du matériau testé
6.2.2. Caractéristiques mécaniques instantanées
6.2.3. Fluage propre
6.2.4. Retrait
6.2.5. Fluage de dessiccation
6.2.6. Cas particulier du fluage en traction
7. VALIDATION DU MODELE SUR STRUCTURE DE LABORATOIRE
7.1. Etude de la fissuration lors de l’essai de retrait empêché à l’anneau
7.1.1. Protocole d’essai
7.1.2. Modélisation numérique
7.1.3. Résultats
7.2. Suivi de la déformation d’une structure à base de liant composé
7.2.1. Présentation de la structure étudiée
7.2.2. Essais préliminaires
7.2.3. Résultats
8. CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE A : METHODES D’HOMOGENEISATION
1. PRINCIPE GENERAL DE LA METHODE
2. APPLICATION POUR LE CALCUL DE MODULES EFFECTIFS
2.1. Modèles à bornes
2.2. Estimations effectives
ANNEXE B : CARACTERISTIQUES DES CIMENTS ET ADDITIONS
ANNEXE C : VALIDATION THERMODYNAMIQUE DU MODELE D’ENDOMMAGEMENT
1. DISSIPATION PAR ENDOMMAGEMENT
1.1. Endommagement de traction
1.2. Endommagement de compression
2. DISSIPATION PAR DEFORMATIONS VISQUEUSE
ANNEXE D : PRINCIPE DE L’APPROCHE INCREMENTALE ADAPTATIVE
ANNEXE E : SCHEMA DE PRINCIPE DE LA RESOLUTION D’UN PROBLEME MECANIQUE EN DEPLACEMENTS
TABLE DES ILLUSTRATIONS