Caractérisation génétique des idéotypes d’oignon (Allium cepa L.)

Caractérisation génétique des idéotypes d’oignon (Allium cepa L.)

Origine géographique de l’espèce et introduction en Afrique

 La zone géographique comprenant la Turquie, l’Iran, le nord de l’Irak, l’Afghanistan, l’Asie du centre-ouest (y compris le Kazakhstan) et le Pakistan Occidental est considérée comme le principal centre de domestication des espèces Allium (Fig. 1). Le groupe ancestral dont provient vraisemblablement A. cepa comprend les taxas sauvages de l’alliance oschaninii de la section cepa, c’est-à-dire A. oschaninii (y compris A. praemixtum) et A. vavilovi. L’acclimatation de A. cepa a probablement commencé à l’intérieur du Tadjikistan, de l’Afghanistan et de l’Iran actuel. Cette zone du sud-ouest asiatique est reconnue comme le principal centre de variabilité. D’autres régions où les oignons manifestent une grande variabilité, comme le bassin méditerranéen, sont des centres secondaires (Van der Meer, 1994). Les variétés d’oignon d’Afrique tropicale ont pu être introduites à partir du sud de l’Egypte ou de l’Inde via le Soudan vers l’Afrique centrale et occidentale sous forme de graines ou de lots de bulbes génétiquement hétérogènes. Elles ont ensuite été sélectionnées par les agriculteurs locaux pour fournir des oignons mieux adaptés aux conditions écologiques de ces régions et des besoins des populations (Rouamba et al., 2001 ; Abdou, 2014). 

Biologie de l’oignon

 L’oignon (Allium cepa L.) appartient à la famille des Alliaceae à laquelle appartiennent également le poireau, l’ail et l’échalote. La caractéristique de cette famille est la présence d’un bulbe formé par le renflement plus ou moins important de la base des feuilles. Ce bulbe sert d’organe de réserve. Diploïde (2n = 2x = 16), allogame et entomophile, les populations sont maintenues grâce à la pollinisation libre et peuvent abriter d’importantes variations phénotypiques (Berninger, 1965 ; Abdou, 2014). L’oignon possède un grand génome (1 C * 16 GBP) avec une densité de gènes estimée très basse, soit un gène tous les 168 kb (Jakse et al., 2008 ; Baldwin et al., 2012). Plante monocotylédone et bisannuelle, l’oignon a besoin de deux saisons pour produire de la semence et présente un cycle végétatif de 120 jours en moyenne. La première saison, il forme un bulbe (souvent appelé bulbe-mère) comestible, de forme et de couleur variable suivant la variété. La deuxième année, après repos et plantation, le bulbe évolue pour donner une ou plusieurs tiges florales, lesquelles évolueront pour donner des graines. L’oignon a besoin de températures relativement élevées pour pouvoir produire des bulbes. Cependant, des températures trop élevées peuvent entraîner une maturation hâtive et donc une baisse de rendement (CDH/ISRA, 1996). La tige est constituée par un plateau sur lequel s’insèrent des feuilles allongées, cylindriques et creuses et d’où partent des racines adventives. Le bulbe est composé d’écailles charnues et est recouvert extérieurement d’une ou de plusieurs couches d’écailles desséchées qui sont aussi appelées tuniques (Foury et Schweisguth, 1992). Le fruit est une capsule contenant des graines de petite taille (200 à 300 au gramme), noires, anguleuses et dures. Chaque ombelle produit généralement 100 à 1 500 graines (De Lannoy, 2001 ; Abdou, 2014). La fécondation croisée est donc dominante dans la mesure où les étamines sont mûres avant le pistil. Les abeilles (Apis mellifera L.), les bourdons (Bombus pascuorum Scopoli), les guêpes (Vespula vulgaris L.) et les mouches (Musca domestica L.) constituent les agents de pollinisation les plus actifs (De Lannoy, 2001 ; Fritsch et Friesen, 2002). Les variétés sont très sensibles à la longueur du jour qui conditionne la bulbification. Elles sont subdivisées en variétés de jours courts, en variétés de jours intermédiaires et en variétés de jours longs. La plupart des variétés cultivées au Sénégal sont des variétés de jours courts et nécessitent entre 8 et 12 heures d’éclairage. La floraison en deuxième année est induite Figure 1 : Origine, zones d’introduction et principaux pays producteurs de l’oignon en Afrique de l’Ouest (réalisée avec R). Analyse bibliographique 6 par des températures basses, entre 4 et 15°C. Généralement, une vernalisation pendant 4 à 6 semaines à des températures de 8 à 12°C est suffisante pour l’induction florale. La variété Violet De Galmi ne nécessite pas de vernalisation. Cela a pour inconvénient une montée directement en fleurs en première année lorsque la température descend à 10-15°C, ce qui peut être le cas avec des semis d’octobre et novembre. Pour la production de semences, le temps doit être chaud et sec depuis la période de floraison jusqu’à la récolte des semences (CDH/ISRA, 1996). 

 Classification taxonomique 

La position taxonomique du genre Allium a fait l’objet de controverses (Abdou, 2014). Dans la première classification des angiospermes, ce genre a été placé dans la famille des Liliaceae. Sur la base de la structure des inflorescences, le genre Allium fût inclus dans la famille les Amaryllidaceae. Cependant, avec l’avènement des marqueurs moléculaires, le genre Allium est maintenant positionné au niveau d’une famille distincte Alliaceae et proche de Amaryllidaceae. Ainsi, le genre Allium appartient à la classe des Liliopsida, la sous classe des Liliideae, le super ordre des Liliianae, l’ordre des Amaryllidales, la famille des Alliaceae, la sous famille des Allioideae et la tribu des Allieae (Fritsch et Friesen, 2002). 

Différents usages de l’oignon 

Connu des égyptiens, des romains et des grecs, l’oignon fut d’abord exploité comme plante médicinale avant de devenir un condiment ou légume (De Lannoy, 2001). Les oignons sont utilisés dans plusieurs types de plats pour leurs caractéristiques culinaires assez remarquables aux goûts prononcés et piquants. Ils peuvent être consommés crus particulièrement les oignons sucrés qui ont un goût doux (Abdou et al., 2015), coupés en fines tranches pour assaisonner les salades et bouillis ou frits avec d’autres légumes. Au Sénégal, ils demeurent incontournables pour l’alimentation dans tous les grands rendez-vous du pays notamment dans les repas, cérémonies et événements religieux. En outre, les oignons sont utilisés dans les produits destinés aux soins, à la beauté du visage et du corps, comme pommades, poudres et parfums (Craig, 1999). Les feuilles, les jeunes plants entiers (appelés “oignons verts”) et souvent les jeunes inflorescences sont également utilisés dans la préparation des plats. Dans certaines régions d’Afrique de l’Ouest, les feuilles encore vertes au moment de la récolte des bulbes sont pilées pour en faire des boulettes qui, séchées au soleil et fermentées, vont être utilisées pour assaisonner les plats (Messiaen et Rouamba, 2004). Les oignons crus hachés ont des propriétés antibiotiques et peuvent réduire la contamination par les bactéries, les protozoaires ou les vers intestinaux dans les salades. L’oignon présenterait aussi des vertus en Analyse bibliographique 7 médecine en réduisant le risque des maladies cardio-vasculaires (Craig, 1999). Certains de ses composés comme les organo-sulfurés, flavonoïdes et fructanes sont conseillés pour assurer la santé du corps humain. Les composés organo-sulfurés donnent aux espèces du genre Allium, leur goût et odeur spécifique (Kamenetsky et al., 2005 ; Abdou, 2014). En médecine traditionnelle, les oignons sont utilisés en externe pour traiter les furoncles, les panaris, les blessures et les piqûres d’insectes, et en interne pour soulager la toux, la bronchite, l’asthme, les affections gastro-intestinales et la migraine (Messiaen et Rouamba, 2004). 

Les marqueurs moléculaires dans les études de diversité génétique de l’oignon 

Les marqueurs moléculaires sont des outils permettant de caractériser la diversité génétique à l’échelle individuelle. Un marqueur est un caractère mesurable qui permet de détecter une variabilité (Diack, 2013). Les marqueurs enzymatiques (isozymes) ont permis à Rouamba et al., (2001) de répartir des populations d’oignon en deux groupes. Un premier groupe composé des populations provenant des pays francophones (Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger) et un second groupe renfermant celles originaires du Nigéria (1NA et 2NA), pays anglophone. Ce qui leur amène à suggérer l’absence de flux de gènes entre les populations de ces deux groupes. Ces marqueurs présentent néanmoins certains inconvénients notamment un faible polymorphisme. Ils dépendent de l’état physiologique et du stade de développement de la plante (Diack, 2013). Les marqueurs Random Amplified Polymorphic DNA (RAPD), Restriction Fragment Length Polymorphism (RFLP), Amplified Fragment Length Polymorphism (AFLP) et Simple Sequence Repeats (SSR) ont été utilisés avec succès pour étudier la diversité génétique du genre Allium. Wilkie et al., (1993) ont utilisé des RAPD sur des cultivars d’oignon, des espèces du genre Allium (échalote (A. fistulosum), ciboule (A. schoenoprasum), poireau (A. ampeloprasum)) et l’espèce spontanée A. roylei. Ces marqueurs ont permis de montrer que l’espèce A. roylei est le plus proche parent d’A. cepa. Ils présentent cependant des inconvénients de dominance, des problèmes de reproductibilité et l’interprétation des bandes souvent en nombre très important reste fastidieuse. Les RFLP, utilisés par King et al., (1998), ont permis de regrouper d’une part les variétés de jours longs constituées majoritairement de variétés européennes, espagnoles et hollandaises Analyse bibliographique 8 et d’autre part celles de jours courts, japonaises et américaines. Ils ont aussi permis de distinguer les hybrides composés de variétés commerciales améliorées. Les marqueurs dominants AFLP ont permis à van Raamsdonk et al., (2003) de différencier avec succès les espèces A. cepa, A. roylei et l’hybride A. cepa X A. roylei (Abdou, 2014). Fischer et Bachmann (2000) furent les premiers à développer des marqueurs microsatellites (30 SSR) pour le genre Allium. Les microsatellites sont des séquences répétées en tandem de 2 à 6 nucléotides. Ils sont révélés après leur amplification grâce à des amorces spécifiques aux régions flanquantes conservées. Le polymorphisme est donc un polymorphisme d’unités de répétition. Ils sont co-dominants et révélés individuellement (Selkoe et Toonen, 2006 ; Diack, 2013). Ces marqueurs, dans le cas présent, n’ont pas été suffisamment robustes pour une utilisation plus large dans le génome de l’oignon. Seuls quatre ont été polymorphes, ce qui ne permet pas la discrimination inter-variétale. Par ailleurs, ils ont permis de différencier les espèces cultivées des espèces spontanées A. roylei et A. vavilovii, reconnues comme étant les plus proches parents de l’oignon. Avec l’avènement des microsatellites qui sont de loin les plus utilisés dans les études de diversité génétique, plusieurs travaux ont porté sur le développement des marqueurs SSR (Jakse et al., 2005 ; Tsukazaki et al., 2007 ; Baldwin et al., 2012) et leur utilisation dans les études d’évaluation de la diversité génétique du genre Allium mais également des SSR de types EST (Expressed Sequence Tag-SSR) développés à partir des régions codantes du génome de l’oignon (Kuhl et al., 2004 ; Martin et al., 2005) et en association avec des marqueurs SNP (Jakse et al., 2005). Ces marqueurs se sont révélés à travers ces études être assez discriminants pour refléter la diversité intra et inter spécifique. L’intérêt de leur utilisation réside principalement sur le fait qu’ils présentent toutes les propriétés recherchées chez un bon marqueur à savoir :  requièrent très peu d’ADN et pas forcément de bonne qualité ;  extrêmement polymorphes ;  répartis régulièrement dans le génome ;  interprétation des résultats simple ;  facilement automatisé, permettant le multiplexage ;  bonne résolution analytique et forte reproductibilité.  

Table des matières

Résumé
Abstract
Dédicaces
Remerciements
Liste des tableaux
Liste des figure
Liste des annexes
Liste des acronymes
Liste des sigles et abréviationsix
Introduction
Etude bibliographique
1. Généralités sur l’oignon
1.1. Origine géographique de l’espèce et introduction en Afrique
1.2. Biologie de l’oignon
1.3. Classification taxonomique
1.4. Différents usages de l’oignon
2. Les marqueurs moléculaires dans les études de diversité génétique de l’oignon
Matériel et méthode
1. Matériel végétal
2. Culture des plantes en serre
Méthodes d’étude
1. Extraction d’ADN
2. Le choix des marqueurs
3. Amplification en chaine par Polymérase (PCR)
 Tests d’amplification
 Electrophorèse
 Le génotypage
3. Etude du niveau de diversité génétique des idéotypes d’oignon
3.1. Calcul des indices de diversité
3.2. Structuration de la diversité génétique des idéotypes
Résultat
1. Extraction d’ADN
2. Amplification en chaînes par polymérase (PCR)
3. Niveau de diversité génétique des idéotypes d’oignon
3.1. Identification des doublon
3.2. Indices de diversité génétique
3.3. Structuration de la diversité génétique des idéotypes
Discussion
Conclusion et perspectives
Références bibliographiques
Annexe

 

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