Etude des insectes associés à l’Acacia senegal (L.) Willd.(Mimosaceae) dans les parcelles de reboisement
GÉNÉRALITÉS SUR L’ACACIA SENEGAL (L.) WILLD
Distribution de l’Acacia senegal (L.) Willd.
L’Acacia senegal (Fig. 3) s’étend dans pratiquement tout le continent africain. Les pays originaires sont : l’Angola, le Botswana, le Burkina Faso, l’Érythrée, l’Éthiopie, la Gambie, le Kenya, le Mali, le Mozambique, la Namibie, le Niger, le Nigéria, le Sénégal, le Soudan, la Tanzanie, l’Uganda, la Zambie et le Zimbabwe (Orwa et al., 2009). Cependant, les gros pays producteurs de gomme arabique se situent principalement en Afrique saharienne (Mali, Sénégal, Tchad, Égypte, Soudan) (Sall, 1997). L’Acacia senegal a été introduit en Australie, en Egypte, en Inde, au Pakistan, en Afrique du sud, en Virgin Island (US) (Orwa et al., 2009) et à Porto Rico dans les îles Vierges (Sall, 1997). 6 Figure 3. Acacia senegal (L.) Willd. (Aout 2016 –Widou Thiengoly, Ferlo).
Description botanique de l’Acacia senegal
C’est un arbuste ou arbre épineux de 2 à 6 m (Sall, 1997) parfois jusqu’à 8 m de hauteur (Eisa et al., 2008), avec une couronne en parasol. Le tronc excède rarement 20 cm de diamètre (Détienne, 2005). Le port est flabelliforme très rameux (Vassal & Dione, 1993), les branches sont ramifiées ascendantes, et les rameaux supérieurs sont divergents (Sall, 1997). L’écorce est gris clair à brun clair lisse sur les jeunes rameaux et peut se desquamer (Sall, 1997 ; Orwa et al., 2009 ). Les épines se présentent sous forme de trois griffes acérées, les deux latérales sont courbées vers le haut et la médiane vers le bas (Sall, 1997), elles mesurent 3-5 mm de long. Les griffes sont tranchantes, avec quelques attaquants qui sont pointant et d’autres en arrière (Orwa et al., 2009). Les feuilles sont petites, de couleur vert gris et bipennées (Vassal & Dione, 1993), elles sont alternes avec 3 à 6 paires de pennes ayant 10 à 20 paires de foliolules ovales de 3 à 6 mm de long et de 2 mm de large (Sall, 1997). Les inflorescences sur des épis mesurent de 3 à 8 cm ; elles sont blanches pédonculées insérées par 2 ou 3 ou isolées à l’aisselle des feuilles très odorantes (Sall, 1997). Les fruits gousses (Fig. 4) mesurent de 7 à 10 cm de long et 2 cm de large ; elles sont aplaties finement pubescentes et de couleur grisâtre, la plupart du temps elles se 7 rétrécissent en pointe aux deux bouts ; elles contiennent 3 à 6 graines aplaties rondes brun clair (Sall, 1997 ; Orwa et al., 2009 ). Elles sont déhiscentes (Sall, 1997). Figure 4. Gousse d’Acacia senegal (L.) Willd. (Entière à gauche ; ouverte à droite)
Importance de la gomme arabique : Acacia senegal
Les Acacia sont des éléments caractéristiques du paysage au Sahel, domaine dans lequel ils jouent un rôle éminent sur le plan écologique et socio-économique (Vassal & Dione, 1993). Ils sont des agents anti-érosion, contribuent à fixer les sols grâce à un réseau racinaire dense et profond (Vassal & Dione, 1993). Par leurs associations symbiotiques, ils favorisent l’amélioration de ses sols en azote (Vassal & Dione, 1993). Par ailleurs, ils sont source de bois de feu, de charbon de bois, de bois d’œuvre, de fourrage aérien précieux en saison sèche, ainsi que de gomme dite arabique (Vassal & Dione, 1993). L’Acacia senegal fixe l’azote atmosphérique (Diallo, 1994) lorsqu’une symbiose fixatrice a pu s’établir (Dupuy et al., 1991) ; il a une remarquable capacité d’adaptation à la sécheresse et au gel (NAS, 1983). L’Acacia senegal joue un rôle important dans la lutte contre la désertification, l’amélioration des sols et la mise en valeur du Sahel (Badji et al., 1989). En effet, pour ce dernier point, l’A. senegal fournit, non seulement la gomme arabique, produit d’intérêt industriel, atoxique et non polluant (Vassal & Dione, 1993) mais aussi du bois de feu et du fourrage aérien (Badji et al., 1989). L’intérêt fourrager d’A. senegal est apprécié selon trois paramètres majeurs : la valeur alimentaire, la phénologie et la biomasse fourragère ainsi que l’utilisation par les ruminants (Ickowicz et al., 2005 ). Cependant, son intérêt majeur réside dans le fait qu’il est le plus important producteur de gomme arabique commercialisée. La sécrétion de gomme est communément appelée graine 8 gommose ou exsudation (Diallo, 1994). La gommose résulterait d’une dégénérescence cellulaire due à une altération du cambium et du liber (Giffard, 1974). Cette gomme a d’excellentes qualités : elle est dure, claire et a de bonnes caractéristiques sur le plan du pouvoir rotatoire spécifique, de l’hydro solubilité et de la viscosité (Vassal & Dione, 1993). D’après Vassal & Dione (1993), la gomme arabique a de nombreuses applications industrielles dues à son pouvoir émulsifiant, stabilisant et épaississant. Elle est utilisée comme ingrédient ou additif en confiserie, dans les aliments diététiques, les crèmes et desserts ainsi que pour les boissons pulpées (action suspensoïde dans les sodas, mousse de bière…). Elle est aussi très employée en pharmacie (pastilles et dragées, sirops, crèmes, lotions…). On l’exploite également dans des domaines comme la pyrotechnie, les peintures à l’eau, les colles… Sur le plan alimentaire, la directive CEE ‘74/329 du 1806.q1974 autorise la commercialisation de la gomme arabique sous le code E414.
Écologie
Le domaine climatique du gommier en Afrique se situe de la zone sahélienne à la zone soudanienne qui reçoit une pluviométrie moyenne annuelle de 150 à 860 mm (Sylla, 1984). Au Sénégal, son aire de distribution correspond à la moitié Nord du pays avec une limite Sud qui est la même que celle du secteur soudano-sahélien (Diallo, 1994). Le gommier apparaît alors comme une espèce à large amplitude écologique ; mais il trouve ses conditions optimales de développement dans les stations moyennement humides qui lui permettent de survivre à la sécheresse (Sylla, 1984). Acacia senegal est associé à un large éventail de types de végétations, et préfère les plaines argileuses et les pentes des collines rocheuses (Orwa et al., 2009). Son système racinaire particulièrement développé contribue à la fixation des sols et de l’azote atmosphérique, son couvert limite l’érosion tant hydrique qu’éolienne (Soloviev et al., 2010).
Phénologie
La phénologie est la science qui étudie l’influence des facteurs climatiques locaux sur le comportement physiologique des végétaux (Boullard, 1988). Elle est principalement conditionnée par la pluviométrie, la température et l’évaporation ; par conséquent, la feuillaison, la floraison et la fructification dépendent de ces paramètres. 9 Chez Acacia senegal, la feuillaison commence en mars-avril (Nongonierma, 1978) parfois en avril-mai pour s’estomper en novembre-décembre (Giffard, 1974). À Fété-Olé (Nord-ouest de Mbiddi), la feuillaison du gommier s’étend de mai à décembre (Poupon, 1980 ; Diallo et al., 2016) et dans la dépression à Mbiddi, la feuillaison commence avant le mois de juin et dure au moins 9 mois (Sylla, 1984). La floraison commence en mai-juin (Giffard, 1974) avec un pic en juillet-août (Nongonierma, 1978) parfois en janvier (Diallo et al., 2016). À Fété-Olé (Nord-ouest de Mbiddi) la floraison du gommier s’étend d’août en novembre (Poupon, 1980) et de juillet à septembre dans la dépression (Sylla, 1984) à Mbiddi. La fructification commence en novembre-décembre (Giffard, 1974) parfois entre août et décembre (Nongonierma, 1978). À Fété-Olé, elle commence en décembre (Poupon, 1980) soit en septembre-octobre et la chute des gousses a lieu entre janvier et février (Sylla, 1984).
FACTEURS DE DEGRADATION DE L’ACACIA SENEGAL
Facteurs écologiques La faible pluviométrie (crises climatiques) dans la région sahélienne a conduit à la chute des rendements de la gomme arabique et à la raréfaction des gommiers sahéliens (Vassal, 1991). La sécheresse (début des années 70) a provoqué des hécatombes parmi les gommiers notamment dans le Sud de la Mauritanie (Trarza), au Nord du Mali, au Ferlo Sénégalais, au Burkina Faso (Sall, 1997). I.3.2. Facteurs anthropiques Hormis les facteurs écologiques, l’homme est aussi responsable de la régression de l’Acacia senegal notamment par des abattages abusifs, le surpâturage et les feux de brousse. I.3.2.1. Abattages abusifs Avec l’accroissement des troupeaux, les bergers pratiquent diverses mutilations au niveau des arbres pour assurer l’alimentation en fourrage du bétail pendant la saison sèche (Sall, 1997). D’autre part, l’écorce est prélevée soit pour la fabrication des liens pour attacher les fagots soit dans le cadre de la médecine traditionnelle (Poda, 1987). Par ailleurs, dans le but d’augmenter la production de gomme arabique, des saignées 10 profondes, extensives et trop répétées fragilisent l’arbre provoquant ainsi un stress physiologique (Vassal, 1991).
Surpâturages
La raréfaction des arbres est aussi liée au piétinement par les troupeaux de bovins (Sall, 1997) à l’ingestion par les troupeaux des jeunes plantules entravant notamment la régénération naturelle (Vassal, 1991).
Incendies
Les feux de brousse constituent une contrainte majeure à la régénération naturelle des formations ligneuses. La zone sylvo-pastorale enregistre annuellement des milliers d’hectares détruits par les feux (Poda, 1987).
Maladies
Les arbres d’Acacia senegal sont légèrement sensibles aux nématodes à galles des racines (http://www.prota4u.org/protav8.asp?fr=1&p=Acacia+senegal+-(L.)+Willd.). Par ailleurs, un parasitisme important des pieds d’Acacia senegal par Tapinanthus bangwensis (plante parasite) a été observé au niveau des branches d’Acacia. Ceci entraine une mortalité importante des pieds ou des branches envahies (Poda, 1987). I.3.4. Déprédateur Des sauterelles peuvent défolier de vastes étendues en une nuit, mais les arbres récupèrent généralement. Le cérèse buffle (Stictocephala bubalus) détruit 15–85% des graines tombées au sol (http://www.prota4u.org/protav8.asp?fr=1&p=Acacia+senegal+- (L.)+Willd.). D’autres insectes phytophages se nourrissent de diverses parties de la plante (feuilles, tiges, racines, graines). D’après la terminologie de Graham et Knight (1965), les insectes phytophages opèrent un choix qui permet de distinguer différents types de déprédateurs : les défoliateurs, les suceurs de sève, les insectes des méristèmes, les insectes corticoles, les insectes corticoles et xylophages, les insectes xylophages typiques). D’après Sall (1997), les principaux ravageurs de pieds d’Acacia senegal sont les insectes. Par ailleurs, on note quatre (4) ordres (Coleoptera, Hemiptera, Hymenoptera, Lepidoptera) d’insectes qui parasitent les semences d’Acacia senegal (Gaye, 1985). 11 Ordre des Coléoptères Ce sont principalement des ravageurs secondaires dont les possibilités d’attaque et de multiplication sur l’arbre dépendent de son état physiologique. On trouve dans cette catégorie les insectes corticoles et xylophages et les xylophages typiques qui appartiennent à la famille des Curculionidae, Cerambycidae, Buprestidae et Bostrychidae (Bovey, 1970). Famille des Bostrychidae (Bostryches) Ce sont des insectes avec un tibia munis d’éperons apicaux et d’une hanche postérieure non sillonnée pour la réception du fémur, (Delvare & Aberlenc, 1989). Les larves creusent des galeries dans les troncs et les branches des arbres sur pied ou abattus (Sall, 1997). Famille des Buprestidae (Buprestes) Ce sont des insectes à reflets métalliques en général. Les adultes se nourrissent de feuillage et d’écorce et les larves sont xylophages (mangent du bois) en général. Au niveau du bois, leur trou de sortie est en forme de « D » (http://www2.cegep-ste-foy.qc.ca/profs/- gbourbonnais/entomo/7_coleopteres.pdf). Famille des Cerambycidae (Longicornes) Ce sont des insectes xylophages qui présentent des yeux échancrés (l’antenne s’insère dans l’échancrure), le prothorax est plus étroit que les élytres, ils se reconnaissent par des antennes généralement très longues (couvrent au moins la moitié du corps). Les larves sont xylophages. Contrairement aux Buprestes, leur trou de sortie est rond (http://www2.cegep-ste-foy.qc.ca/profs/gbourbonnais/entomo/7_coleopteres.pdf). Famille des Curculionidae (Charançons) Ce sont des insectes qui présentent des pièces buccales à l’extrémité d’un rostre plus ou moins allongé . Autres Des chenilles défoliatrices (Lepidoptera, Noctuidae) détruisent les nouvelles pousses entrainant un important retard de croissance (Sall, 1997). On note aussi la présence d’Acridiens (Orthoptera, Acrididae) polyphages susceptibles d’occasionner des dégâts sérieux aux plantations forestières (Poda, 1987). L’espèce la plus dangereuse est le criquet arboricole Anacridium melanorhodon qui broute les feuilles, les pousses et les jeunes tiges.
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