Etude des contrôles de la minéralisation aurifère du
prospect de Sofia
PRESENTATION DU CRATON OUEST AFRICAIN
Le Craton Ouest Africain (COA) est situé dans la partie ouest du continent africain. C’est un immense craton d’environ 4.500.000 km2 de surface formé d’un ensemble de formations archéennes et paléoproterozoiques ceinturées par des zones mobiles d’âge panafricain à hercynien. Il est recouvert, dans une large part, par les formations du bassin de Taoudéni. Le COA est constitué de trois (03) unités lithostructurales (Figure 2) : au Nord la dorsale Réguibat formée dans sa partie ouest par des gneiss, orthogneiss et charnockites d’âge archéen d’environ 2,7 Ga et dans sa partie est par des granites et autres formations volcaniques et volcano-sédimentaires du Protérozoïque inférieur (Birimien). Ces deux domaines sont séparés par des zones de cisaillement correspondant à la faille de Zednès. A l’Ouest les fenêtres de Kédougou-Kéniéba et de Kayes respectivement à cheval entre le Mali et le Sénégal et au Mali. Elles sont formées exclusivement de formations birimiennes du Protérozoïque consistant d’étroites ceintures volcaniques et de larges bassins sédimentaires structurés et intrudés par des granitoïdes (Liégeois et al. 1991). L’Archéen n’ayant jamais été daté dans ces fenêtres. Au Sud la dorsale de Léo qui couvre une large région qui va du Liberia au Ghana en passant par la Guinée, le Mali, la Côte d’Ivoire et le Burkina-Faso. Elle est divisée aussi en deux parties : à l’Ouest, le domaine archéen de Man et à l’Est, le domaine birimien du Baoulé-Mossi qui serait le prolongement des formations birimiennes de KédougouKéniéba sous les formations paléozoïques du SW du bassin de Taoudéni (Bassot et Caen-Vachette, 1984). Les deux domaines sont séparés par l’accident de Sassandra. Ce craton est ceinturé par deux zones mobiles : – une zone mobile occidentale d’âge panafricain à hercynien correspondant à la chaîne des Mauritanides-Bassarides-Rockélides (Bassot, 1966 ; Dia, 1984 ; Diop, 1996 ; Dabo, 2007) ; – une zone mobile orientale comprenant du domaine du Gourma aux chaînes pharusiennes et des Dahoméyides d’âge panafricain (Gravelle, 1969 ; Bertrand et al. 1986 ; Bouiller, 1986 ; Haddoun et al. 1994). 6 Il est aussi recouvert par le bassin péricratonique sénégalo-mauritanien d’âge phanérozoïque et par le grand bassin intracratonique d’âge mesoprotérozoïque paléozoïque de Taoudéni, d’une superficie de 1.500.000 km2 qui recouvre en discordance majeure le cœur du COA. Ce dernier est le plus grand dépocentre néoprotérozoïque du monde. Le COA est limité à l’Est par Ahoggar et Adrar des Iforas, au Sud-Est par les boucliers du Bénin et du Ghana, à l’Ouest par la chaine calédono-hercynienne des Mauritanides et au Nord par l’anti Atlas Marocain. Figure 2 : Ensembles lithostructuraux du Craton Ouest Africain (Black, 1980, modifiée) Les formations archéennes comprennent des séquences de roches vertes ou « greenstones belts » et des roches volcano-sédimentaires recoupées par divers granitoïdes. Elles affleurent dans l’Amsaga (dorsale Réguibat) où les greenstones belts sont associées à des dômes gneissiques et des formations quartzitiques ferrifères. Dans le domaine Kénéma-Man (dorsale de Man), les greenstones belts reposent sur un socle gneissique et migmatique. Elles sont associées à des ceintures de roches vertes et à des faciès quartzitiques à magnétite (Camil et al., 1984). Le socle gneissique comprend des gneiss granulitiques d’âge léonien et des gneiss migmatitiques d’âge libérien. Les gneiss granulitiques localisés surtout au Sierra Léone et en Côte d’Ivoire correspondent à des gneiss rubanés orthodérivés. Les gneiss migmatiques correspondent à la migmatisation des gneiss granulitiques léoniens (Mac Farlane et al., 1981 ; Rollinson et Cliff, 1982). Les ceintures de roches vertes correspondent à des unités ultrabasiques et basiques différenciées et les faciès quarzitiques referment des niveaux ferrifères (Mac Farlane et al., 1981; Camil, 1984). Deux épisodes majeurs affectent le socle archéen de Man : – L’épisode léonien (2,9 à 2,7 Ga) responsable des structures orientées Est-Ouest. Il fait apparaître un métamorphisme atteignant le faciès granulitique (Vachette et al., 1973 ; Beckinsale et al., 1980) ; – l’épisode libérien (2,7 Ga-2,5 Ga) marqué par des structures subméridiennes (Vachette et al., 1973 ; Camil et al., 1984) présente un caractère polyphasé avec un métamorphisme méso à catazonal. Les terrains paléoprotérozoïques du COA sont constitués par le domaine Baoulé -Mossi (dorsale de Man) ; par la partie orientale de la dorsale Réguibat et par les boutonnières de Kédougou- Kéniéba et de Kayes. Dans le domaine Baoulé-Mossi, les formations paléoprotérozoïques constituent des complexes volcanique, volcano-sédimentaire et sédimentaire (Bessoles, 1977 ; Bassot, 1963 ; Alric et al., 1987 ; Lompo, 1991). Dans la dorsale Réguibat, les formations paléoprotérozoïques constituent le domaine du Yetti-Eglab où prédominent des formations volcaniques à volcano-détritiques recoupées par de grands massifs granitiques (Lassere et al., 1970 ; Barbey, 1974 ; Vachette et al., 1973). Dans la boutonnière de Kédougou-Kéniéba, Bassot (1987) distingue deux Supergroupes : – le Supergroupe de Mako à dominante volcanique basique ; – le Supergroupe de Dialé-Daléma à dominante sédimentaire. 8 Sur le plan structural, Bard, 1974 ; Tempier, 1986 ; Bertrand et al., 1989 ; Feybesse et al., 1989 ; Ledru et al., 1989 ; Milési et al., 1986, 1989, 1992 mettent en évidence une évolution polycyclique au cours de l’orogenèse éburnéenne qui affecte ce socle paléoprotérozoïque. On distingue : – un éburnéen I ou cycle burkinien daté entre 2,19 et 2,14 Ga (Tempier, 1986 ; Lemoine et al., 1985 ; Abouchami et al., 1990; Boher et al., 1992), et affectant les formations dabakaliennes caractérisées par une tectonique tangentielle vers 2,17 Ga (Cahen et al., 1984) et par un métamorphisme épi à mésozonal ; – un éburnéen II ou éburnéen au sens stricte affectant les terrains birimiens couvrant la Guinée, le Sud du Mali, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Burkina Faso, le Niger et le Nord du Togo. Il affecte aussi les boutonnières de Kédougou – Kéniéba et de Kayes, ainsi que la partie orientale de la dorsale Réguibat. Il est daté entre 2,12 et 2,07 Ga (Feybesse et al., 1989 ; Abouchami et al., 1990). Dans ce COA, Ledru et al. (1989) identifient trois phases majeures de déformation (D1 à D3) dans certains segments du Craton Ouest Africain. La première phase D1 tangentielle, intervient autour de 2,1 Ga entre le dépôt d’un Birimien inférieur BI sédimentaire et d’un Birimien supérieur BII volcanique. L’intensité de cette phase est variable suivant les régions. Pour Vidal et al. (1992), Vidal et Alric (1994), cette D1 se traduit par une déformation périplutonique et/ou une recristallisation métamorphique synchrone des intrusions granitiques. La deuxième phase D2 transcurrente, intervient autour de 2096 Ma (Feybesse et al., 1989). Elle est responsable de la formation de plis d’extension régionale et d’une première génération de décrochements N – S à NE – SW, le plus souvent senestres (Bassot et Dommanget, 1986 ; Pons et al., 1992) et chevauchant en certains endroits comme au Ghana (Milési et al., 1989). Cette D2 d’intensité variable, est marquée par une schistosité subverticale S2 et par des plis dans les faciès sédimentaires et volcano-sédimentaires, tandis qu’elle s’exprime de façon hétérogène dans les faciès volcaniques. La troisième phase D3 intervenant autour de 2073 Ma, est également 9 transcurrente. Elle a été définie au Burkina Faso (Feybesse et al., 1989). Les manifestations de cette D3 ont été retrouvées en Guinée, dans le Sud du Mali, en Côte d’Ivoire (Feybesse et al., 1989) et aux confins du Ghana et de la Côte d’Ivoire (Ledru et al., 1988). Au Burkina Faso, elle se marque par la formation de plis P3 (Ouédraogo et Prost, 1986 ; Ouédraogo, 1987) contrôlés par des grandes zones de cisaillements dextres (Yako, Zitenga, Zorgho) ou dextres inverses (Perkoa, Poura). L’évolution structurale des formations paléoprotérozoïques a entraîné la proposition de plusieurs modèles lithostructuraux. Ainsi, Kesse (1985), en se basant sur la synthèse des travaux antérieurs de Junner (1928) et sur des arguments essentiellement structuraux, adopte la succession lithostructurale suivante pour l’ensemble du Craton Ouest Africain : un ensemble B1 sédimentaire, flyschoïde, qui serait affecté par les trois phases de déformation marquées par une D1 tangentielle, les deux dernières phases D2 et D3 transcurrentes ; un ensemble B2 à dominante volcanique à volcano-sédimentaire qui serait affecté uniquement par les déformations transcurrentes D2 et D3. Le modèle de Kesse (1985), a été inversé par les dernières données lithostructurales de Feybesse et al. (2006) au Ghana qui montrent un B1 à dominante volcanique. Au Sénégal, Milési et al., (1986) ; Ledru et al., (1989), adoptent un schéma lithostructural, montrant un Birimien inférieur composé essentiellement de sédiments, affecté par les phases de déformations D1 et D2, surmonté par un Birimien supérieur volcanique et plutonique affecté uniquement par la déformation D2. La D1 est compressive et caractérisée par une tectonique cassante superficielle avec une tendance à l’écaillage. La deuxième phase tectonique D2 transcurrente est synchrone à la mise en place de complexes granitiques et de structures profondes décrochantes senestres. Elle induit un replissement de la schistosité dans l’ensemble B1, et le plissement de la stratification des sédiments intercalés dans l’ensemble B2. La boutonnière de Kedougou-Kenieba (BKK) couvre une superficie de près de 15000 Km2 .
PRESENTATION DE LA BOUTONNIERE DE KEDOUGOU-KENIEBA
Elle est recouverte au Nord et à l’Est par les formations épicontinentales néoprotérozoïques et paléozoïques du bassin intracratonique de Taoudeni. A l’Ouest et au Sud, elle est limitée respectivement par la ceinture hercynienne des Mauritanides et par leur prolongement (les Bassarides). Cette boutonnière est recouverte en discordance par les sédiments meso à néoprotérozoïques de la Falémé et du bassin de Segou-Madina-Kouta. La BKK est aussi recouverte par le bassin péricratonique sénégalo-mauritanien d’âge phanérozoïque. Elle est constituée de formations paléoprotérozoïques (appelées birimiens en Afrique de l’Ouest) mises en place durant l’orogenèse éburnéenne aux environs de 2,2 à 2 Ga (Abouchami et al., 1990 ; Liégeois et al., 1991). La lithologie de la BKK (figure 5) est marquée de ceintures de roches vertes, de volcanosédiments et d’unités sédimentaires intrudés par des granites calco-alcalins. En 2010, Théveniaut et al. proposèrent une nouvelle subdivision de la géologie du Sénégal oriental. Ainsi ils considèrent deux groupes d’âge paléoprotérozoïques : le groupe de Mako (2200-2170 Ma) et le groupe de Dialé-Dalema (2140-2100 Ma) regroupés dans le supergroupe du Birimien. Groupe de Dialé – Daléma : Au Sénégal oriental, les roches de ce groupe sont limitées, à l’Ouest et en contact anormal avec les formations du groupe de Mako par la MTZ. Elles se disposent de part et d’autre du batholite de Saraya avec les segments Dialé à l’Ouest et Daléma à l’Est. Ce groupe qui affleure aussi bien au Sénégal qu’au Mali est recouvert en discordance au Sud et à l’Est par les formations du Précambrien supérieur et du Primaire (Falaise de la Tambaoura). La position lithostratigraphique de l’ensemble Dialé-Daléma a fait l’objet de nombreuses controverses qui sont celles de la chronologie entre le Birimien volcanique (BV) et le Birimien sédimentaire (BS) dans le Craton Ouest Africain. La partie ou segment Dialé est constituée de calcaires métamorphiques (marbres rubanés de Bandafassi et d’Ilimalo, marbres conglomératiques d’Ibel), de grauwackes variés, de conglomérats polygéniques et surtout de schistes très variés. Ces roches sont associées à des basaltes épimétamorphiques faiblement représentés à l’affleurement. Le log indiqué par la figure 3 montre l’évolution générale des différentes formations dans le segment de la Daléma. On y observe de la base vers le sommet et en particulier au niveau du gisement de Loulo : • une importante formation de flyschoïde à niveau de cherts et d’épiclastites ; • un niveau de grès et de conglomérat à tourmaline qui est minéralisé en or ; • une formation carbonatée associée à des siltites, des conglomérats et des épiclastites, et à des volcanites et pyroclastites. Cette formation est recoupée par des dykes calco – alcalins et contient également le gisement de fer de la Falémé. Les minéralisations ferrifères forment un chapelet d’amas situés au contact entre les niveaux carbonatés et les roches du complexe volcano-plutonique et hypovolcanique. • Des pyroclastites andésito-basaltiques à rares blocs de basalte tholéiitiques précèdent localement les pyroclastites rhyodacitiques et dacitiques. Les zircons rencontrés dans ces derniers ont été datés à 2,117 Ga. • Les dykes basiques et intermédiaires intrusifs dans ces formations sont datés à 2,072 Ga (Clavez, 1989). La partie ou segment Daléma a une lithostratigraphie comparable à celle du Dialé. Elle comprend en plus, un complexe volcano-plutonique et hypovolcanique mis en place autour de 2,072 Ga (Milési et al. 1989). Les termes lithologiques identifiés comprennent : – sédiments fins, ferrifères, gondites, siltites, pélites et grauwackes ; – andésite, rhyodacite et volcano-sédiment (BDd4) ; – rhyolites.
Groupe de Mako
Le groupe de Mako (GM) est situé à l’Est de l’avant pays des Mauritanides et à l’Ouest de celui de Dialé – Daléma. Bassot (1966) propose pour le groupe de Mako la succession suivante du bas vers le haut : + des roches épimétamorphiques d’origine volcanique avec un domaine basaltique à l’Ouest et un domaine andésitique à l’Est ; + des roches flyschoïdes épimétamorphiques d’origine sédimentaire ; + des granitoïdes intrusifs recoupant les formations sus – jacentes. NB : Des dolérites filoniennes du Paléozoïque affectent également le GM. Figure 3 ; Modèle lithologique du Supergroupe de Dialé Daléma (Milesi et al., 1992, modifiée) En 1973, les auteurs soviétiques (Chotolov et Korj) décrivent 3 principaux groupes recoupés par des granitoïdes (massif de Badon – Kakadian et massifs plus tardifs) dans le super groupe de Mako actuel GM : .i. le groupe inférieur de Khossanto (1600 à 1700 m de puissance) constitué de roches d’origine sédimentaire et de roches d’origine volcanique ; .ii. le groupe moyen de Bérola (1300 à 1400 m de puissance) de nature essentiellement sédimentaire et volcano-sédimentaire avec un volcanisme intermédiaire à acide ; .iii. le groupe supérieur de Ouassa (1600 m) avec un volcano-plutonisme différencié allant des basaltes aux roches acides. Les observations faites dans la région de Sabodala amènent Milési (1978 , 1980) à envisager l’existence de deux unités lithologiques dans le GM (les unités de Khossanto et de Mamakono) avec probablement un synchronisme des épisodes volcaniques et sédimentaires. Plus récemment, l’équipe de recherches géologiques au Sénégal oriental du département de géologie de la FST (Dia, 1988 ; Diallo, 1983 et 1994 ; Ngom, 1985 et 1995 ; Dioh, 1986 et 1995) propose à partir d’observations nouvelles, une réinterprétation de la géologie du GM. La nouvelle échelle lithostratigraphique proposée reconnaît vers le haut, trois complexes épimétamorphiques plissés et granitisés : .i. un complexe inférieur à dominante volcano-plutonique basique ; .ii. un complexe moyen à dominante volcano-sédimentaire et sédimentaire ; .iii. un complexe supérieur de nature sédimentaire. Ces trois complexes passent progressivement les uns aux autres avec en particulier, une diminution des termes volcaniques vers le haut et une augmentation de la composante volcanosédimentaire et sédimentaire et du volcanisme andésitique vers le haut. Cette échelle est très voisine de celle proposée dans le domaine Baoulé-Mossi, en particulier en Côte d’Ivoire. En 2010 Théveniault et al. précisent que le groupe de Mako comprend deux formations : l’une à dominante volcanique et l’autre à dominante sédimentaire.
INTRODUCTION |