ETUDE D’EXPRESSION DE GENES LIES AU DEVELOPPEMENT ET A L’ADAPTATION DU MIL [Pennisetum glaucum ssp. glaucum (L.) R. Br.] EN ZONE SAHELIENNE
Généralités sur le mil
Position systématique
Le terme « mil » regroupe plusieurs genres de plantes appartenant à la famille des Poaceae, anciennement connues sous le nom de Graminées, de l’ordre des Cyperaceae, de la classe des Liliopsida, de la division des Magnoliophyta, du règne des Plantae. C’est une plante sexuée diploïde (2x = 2n = 14) à fleurs hermaphrodites, allogame à protogynie prononcée et à pollinisation anémophile. Selon N’Doye et al. (2002), les types de mil les plus communs sont :Le mil à chandelles ou mil perlé : Pennisetum glaucum (L.) R. Br ;Le mil commun ou mil Proso : Panicum miliaceum ;Le Mil digital ou Eleusine: Eleusine coracana (Gaeth)Le petit mil : Panicum italicaLe mil indigène : Paspalum scrobiculatum Le mil à grappe ou mil “Queue de Renard” : Setaria italica Le mil japonais ou mil de Basse-cour : Echinochloa crus-galli Le mil perlé [Pennisetum glaucum (L.) R. Br] est l’espèce la plus cultivée. Il appartient à la sous-famille des Panicoideae, à la tribu des Paniceae, au genre Pennisetum (Brunken, 1977).
Origine et distribution
Pennisetum glaucum a été domestiquée il y a plus de 4800 années (Clotault et al.,2012) en Afrique de l’ouest (Haussmann et al., 2006; Oumar et al., 2008) dans le Sahel SubSaharien, dans la zone constituée par le nord du fleuve Sénégal et le nord-ouest du Mali(Tostain, 1998).Grâce à une adaptation génétique à différents climats, le mil a pu être cultivé en Afrique équatoriale puis en Inde et aux USA (Bilquez, 1975 ; Safe Ulla, 1977). En Afrique de l’Ouest, le mil est généralement cultivé sans irrigation ni apport d’engrais chimiques, sur des sols légers, bien drainés et pauvres en matière organique. Il se cultive surtout dans les zones tropicales sèches ou humides où la pluviométrie varie entre 200 et 800 mm répartie sur 3 à 6 mois.
Importance du mil
Classée septième céréale au monde en termes de production, le mil est cultivée pour ses grains et son fourrage. Il représente la composante principale dans les systèmes traditionnels de culture et demeure la céréale de base de l’alimentation des populations dans certaines zones de l’Inde et de l’Afrique de l’Ouest chez lesquelles il joue un rôle crucial dans leur sécurité alimentaire (Gowda et Mai, 2006).Le mil est une plante modèle dans plusieurs domaines de la recherche biologique,physiologique et génétique : étude de la résistance à la sécheresse (Winkel et DO, 1992; Inada Et al., 1992), de la stérilité mâle cytoplasmique (Smith et Chowdhry, 1991), de l’apomixie pour fixer l’hétérosis chez une céréale allogame (Dujardin et Hanna, 1989 ; Bashaw et al.,1992). Pour certains auteurs, le mil serait dans le règne végétal, l’équivalent de la drosophile dans le règne animal (Hanna, 1987).Vu l’importance de cette céréale dans l’alimentation humaine et animale, et sa capacité d’adaptation à diverses conditions agro-climatiques, les mils ont un rôle majeur à jouer dans les programmes agricoles africains. Leur meilleure connaissance va favoriser une gestion durable de leur biodiversité et leur meilleure utilisation dans les programmes d’amélioration variétale.
Le cycle de développement du mil
Selon le cycle de développement, le mil est catégorisé en deux types: hâtif ou précoce, cultivé dans les zones à faible pluviométrie avec un cycle de 75 à 100 jours; tardif, cultivé dans les régions les plus humides, avec un cycle de 110 à 150 jours (Ndiaye et al., 2005). Au Sénégal, on retrouve ces deux cultures: le type précoce (hâtif) appelé Sunna qui occupe pratiquement 85 % des surfaces de cultures de mil et le type tardif dénommé Sanio qui est essentiellement cultivé dans les zones les plus arrosées du Sud et de l’Est du pays. Cette différence chez les mils suppose que le temps de floraison serait placé sous le contrôle de deux systèmes différents impliquant de multiples gènes. Les gènes mis en évidence par l’analyse des différences de précocité chez les mils sont essentiellement des gènes impliqués dans la régulation de la voie photopériodique de floraison (Bilquez et Clément, 1969; Saïdou Et al., 2009; Vigouroux et al., 2011).Le cycle de développement du mil comporte trois (3) phases (Vanderlip, 1972; Maiti et Bidinger, 1981) : la phase végétative, la phase reproductive et la phase de maturation.
Phase végétative
Elle commence avec l’émergence des semis et se poursuit jusqu’à l’initiation de la panicule (ou initiation florale). Pendant cette phase, la jeune plante établit son système racinaire primaire et forme plusieurs racines adventives. Toutes les feuilles sont initiées au cours de la phase végétative; et, chez les variétés précoces, six ou sept feuilles (y compris les feuilles embryonnaires) sont entièrement développées à la fin de cette phase. Les bourgeons de talles sont formés, leurs primordia foliaires initiées, et plusieurs tailles apparaissent à la fin de la phase. Les talles produites tardivement ne forment généralement pas d’épis; même si elles en donnent, ceux-ci parviennent rarement à la maturité. Pendant la phase active du tallage, la taille de la plante reste réduite (plante en rosette) du fait que l’allongement descente-nœuds n’est pas encore entamé. L’accumulation de biomasse est presque entièrement limitée aux feuilles et aux racines. Elle peut aussi concerner les tiges notamment en cas d’un semis précoce si la variété est photosensible (dont la floraison dépend de la durée du jour).L’initiation de la panicule est marquée par l’allongement du dôme apical et la formation d’un rétrécissement à la base de l’apex. Elle a lieu entre 50 et 80 jours après le semis selon les variétés (précoces ou tardives) et permet l’entrée dans la phase reproductive (Maiti Et Bidinger, 1981).
Phase reproductive
Elle s’étend de l’initiation de la panicule à la floraison. Pendant cette phase, toutes les feuilles pleinement développées ainsi que les premières feuilles situées à la base de la tige entament leur sénescence. L’élongation de la tige se fait par allongement séquentiel des nœuds en commençant à la base de la tige. Les premières talles émergeant, subissent l’initiation florale, l’expansion des feuilles…, au même titre que la tige principale mais avec un certain décalage dans le temps. La pointe de la feuille drapeau est visible dans le creux de la dernière feuille enroulée. La feuille drapeau se distingue des autres feuilles par le fait qu’aucune autre feuille n’apparaît dans son creux. La panicule est enveloppée par les gaines de la feuille drapeau et des feuilles sous-jacentes. L’accumulation de biomasse a lieu dans les tiges et les panicules, en plus des racines et des feuilles. La panicule demeure enveloppée dans la gaine de la feuille drapeau mais n’a pas encore émergé. Son développement est presque complet, elle croît rapidement en longueur et en épaisseur. A la suite de ce stade, la panicule émerge en même temps que le dernier entre-nœud s’allonge.Au cours de l’élongation de la tige, la panicule subit une série de changements morphologiques et de développement distincts. Ceux-ci incluent le développement d’épillets sur lesquels émergent des fleurs mâles et femelles et, après fécondation, des grains. La floraison a lieu deux à trois jours après l’apparition effective de la panicule. Les fleurs femelles s’épanouissent avant les mâles et leur apparition se fait progressivement du sommet de la panicule à la base. Cinq à six jours plus tard, la floraison et la fécondation de la panicule sont terminées (Maiti et Bidinger, 1981)
Phase de maturation
Cette phase commence avec la fécondation des fleurs de la panicule de la tige principale et continue jusqu’à la maturité complète de la plante. L’accumulation de réserves au cours de cette période est en grande partie dans les grains. La sénescence des feuilles basales se poursuit et, à la fin de la phase de remplissage du grain, normalement, seules deux à quatre feuilles supérieures restent vertes. Certaines variétés développent de petites tailles dans les nœuds supérieurs de la tige, en particulier vers la fin de la phase de remplissage du grain. Les grains traversent une phase laiteuse, une phase cireuse ou vitreuse avant de parvenir à la maturité physiologique environ 20 à 25 jours après la floraison selon les variétés(Maiti et Bidinger, 1981).La fin de la phase de remplissage du grain (maturité physiologique) est marquée par le développement d’une petite couche de tissu noir au niveau du hile du grain. L’apparition de ce trait correspond à l’arrêt de la migration des sucres dans les cellules du grain et à l’arrêt de son grossissement.
Importance de la floraison dans le développement du mil
La floraison est une étape cruciale dans la vie de la plante car elle permet à celle-ci d’assurer la multiplication des individus et la survie de l’espèce. La date de floraison est un trait important qui permet à la plante de s’adapter aux différentes conditions environnementales. Elle est particulièrement déterminante pour la reproduction des plantes annuelles qui meurent après un seul cycle de floraison et de fructification. La date de floraison des plantes annuelles varie selon les espèces mais aussi entre les populations d’une même espèce croissante dans différents environnements. En effet, lorsque le milieu est favorable, une floraison tardive permet d’allonger la phase de développement et de croissance des organes végétatifs (racines, tiges, feuilles) entraînant ainsi une forte production de biomasse qui permet à son tour de produire beaucoup de graines. Par contre, une durée de vie brève associée à une floraison précoce diminue les risques d’exposition à, par exemple, des conditions climatiques défavorables et à des attaques d’herbivores et de pathogènes. Une floraison précoce constitue donc une stratégie d’évitement dans les milieux peu favorables et instables. La variation de la date de floraison est donc un caractère clé dans l’adaptation des populations de plantes cultivées ou des populations naturelles aux conditions environnementales (Roux et al., 2006).
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