Mémoire présenté pour l’obtention.
Madame Crystel Dhalluin-Tetaert, notre Maître de mémoire De nous avoir accompagnées, aidées et soutenues tout au long de ce travail. Mesdames Nathalie Lévêque et Christine Pointon De nous avoir accordé un témoignage. Madame le Docteur Danel-Brunaud, Neurologue au centre SLA, hôpital Salengro, CHR de Lille. Monsieur le Docteur Pollez, chef du service Synergie, La Bassée. Madame le Docteur Mallart. Les orthophonistes Mesdames Annie Leforestier et Héléna Guillaume. Monsieur le Docteur Demory, médecin généraliste à Armentières et responsable d’une association dans l’accompagnement des malades en soins palliatifs. Les professionnels de santé : Delphine Guelleton, ergothérapeute à La Bassée ; Marie-Laure Duléon, ergothérapeute à La Bassée ; Isabel Tonnerre, kinésithérapeute au centre SLA de Roger Salengro ; et Mme Chombart, diététicienne au centre SLA de Lille. Madame Gimomprez., psychologue au CHR. Les orthophonistes D’avoir participé à ce mémoire en répondant aux questionnaires. Les patients et familles de patients pour leurs témoignages et leur implication dans la réalisation de cet outil DVD. Monsieur Jean-Pierre Delattre du service I-Care de l’Université de Lille 2. Brigitte Hennart De son aide précieuse. Jean-Luc Boussekey De sa relecture et ses précieux conseils. Nos maîtres de stage, pour leur soutien et leur intérêt tout au long de cette année. Nos familles et proches pour leur soutien. Jean et Thomas pour leur patience. RESUME L’orthophonie est actuellement de plus en plus sollicitée, notamment dans le cadre de pathologies neurodégénératives de l’adulte. Il est donc indispensable que les orthophonistes connaissent ce genre de pathologies afin d’adapter au mieux leur travail. Nous nous sommes intéressées dans ce mémoire à la prise en charge orthophonique de la Sclérose Latérale Amyotrophique (SLA). Nous sommes parties d’un constat : la SLA est peu connue des orthophonistes et sa prise en charge, particulièrement lourde, fait souvent peur. La dimension humaine, l’accompagnement de ces patients et le suivi orthophonique à effectuer aux différents stades de la maladie sont autant de points abordés dans ce mémoire, au travers notamment d’un outil DVD. Prendre en charge des patients atteints de SLA est éprouvant pour les orthophonistes et pour l’ensemble des soignants, mais représente toutefois une expérience professionnelle et humaine très enrichissante. Bien que la prise en charge de la SLA soit maintenant abordée dans la formation des orthophonistes, il nous semblait important de leur permettre d’appréhender de façon plus « assurée, sereine » et de réaliser dans les meilleures conditions possibles cette prise en charge. Mots clés : neurologie, handicap moteur, thérapie, adulte, accompagnement. ABSTRACT Speech therapy is at present increasingly required, especially within the framework of neurodegenerative diseases in adults. It is therefore essential for speech therapists to be aware of this type of pathologies in order to best adapt their work. In this thesis we focused on the treatment of the Amyotrophic Lateral Sclerosis (ALS) from the speech-language pathologist’s perspective. As a starting point, we acknowledged one fact: ALS is hardly known among speech therapists and its, particularly heavy, treatment can often be scary.
ABSTRACT.
En 2OO2, les compétences des orthophonistes en France ont été réévaluées dans la nouvelle nomenclature. Désormais, la mention « maintien et adaptation des fonctions dans les maladies neurodégénératives et de la communication » y figure. La formation initiale a donc changé, abordant une nouvelle approche, celle des prises en charge de pathologies incurables. Les progrès de la médecine permettent aujourd’hui de prolonger la vie des patients atteints de maladies neurodégénératives graves. Parallèlement, les notions de qualité de fin de vie se sont développées. La loi n° 99-477 du 9 juin 1999 stipule que « toute personne dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». Pourtant, dans notre société, les soins palliatifs et l’accompagnement sont encore souvent ignorés. La médecine est surtout connue comme étant l’outil de lutte contre les maladies, c’est-à-dire dans sa dimension curative. Elle est moins considérée comme un accompagnement des malades inguérissables. La prise en charge de la Sclérose Latérale Amyotrophique fait partie des prises en charge lourdes, difficiles émotionnellement et nécessitant présence et investissement. Le rôle de l’orthophoniste dans cette prise en charge est nécessaire, d’autant plus qu’un suivi psychologique est loin d’être systématique. Ecoute, soutien, conseils sont autant de qualités dont l’orthophoniste doit savoir faire preuve. Cet accompagnement peut se poursuivre jusqu’au terme de la maladie, la fin de vie, qui est bien souvent une extraordinaire faim de vie malgré les handicaps, les incapacités et la douleur. Dans un premier temps, ce mémoire se propose de présenter la sclérose latérale amyotrophique, de citer ses différentes prises en charge, en insistant plus particulièrement sur le suivi orthophonique, et de traiter de l’aspect psychologique et des questions éthiques suscités par cette pathologie incurable. Dans un second temps, nous avons élaboré, à partir d’une enquête traitée de manière qualitative, un outil DVD destiné aux orthophonistes et autres professionnels désirant se documenter. Ce DVD contient de brefs rappels théoriques, des fiches pratiques d’exercices orthophoniques illustrées par des films ainsi que des témoignages de patients, de proches et de professionnels. 1. / HISTORIQUE 1.1. / J.M CHARCOT La SLA, Sclérose Latérale Amyotrophique, est une maladie neurodégénérative à l’origine de handicaps moteurs sévères et évolutifs. Elle est également appelée maladie de Charcot, maladie du motoneurone* ou encore maladie de Lou Gehrig, célèbre athlète américain qui en fut atteint. L’histoire de cette maladie est en étroite relation avec une des préoccupations importantes du docteur Jean-Martin Charcot au milieu du XIXème siècle : la recherche de la lésion anatomo-clinique responsable de l’hystérie. Jean-Martin Charcot (Paris, 1825 ; Montsauche, 1893) est l’un des plus illustres médecins français du XIXème siècle. Il commence à enseigner à l’Université de Paris en 1860, dans le quartier « Vieillissement-femmes », service qu’il avait déjà parcouru en tant qu’interne et dont il disait « il faudrait y revenir et y rester ». Professeur réputé, il attira des étudiants de toutes les parties du monde. Le plus célèbre d’entre eux fut, en 1885, Sigmund Freud, dont l’intérêt pour les origines de la névrose fut stimulé par l’emploi que faisait Charcot de l’hypnose, en vue de découvrir une base organique à l’hystérie. A ce sujet, il publie en 1865 son mémoire (Charcot, 1865), et l’intitule : « Sclérose des cordons latéraux de la moelle épinière, chez une femme hystérique, atteinte de contracture permanente des membres inférieurs ». Il souligne dans ce mémoire deux points essentiels : la notion de contractures musculaires, phénomène qu’il rapproche alors des contractures paroxystiques observées chez les hystériques, et la notion de sclérose fasciculaire, qu’il décrit pour la première fois, sur laquelle il va insister à de nombreuses reprises et qu’il va distinguer de la sclérose en plaques (Charcot, 1874 ; Charcot et Gombault, 1875).
Charcot associe alors très vite l’atrophie* musculaire observée chez ces patients, à l’atteinte des motoneurones* de la corne antérieure de la moelle épinière, notamment grâce au remarquable travail de M.Cruveilhier (médecin et anatomiste français, 1791-1874 ; Cruveilhier, 1853) et à celui du docteur Duchenne de Boulogne (médecin français 1806-1875 qui décrivit l’atrophie* musculaire progressive ou myopathie de Duchenne). En 1869, il publie avec Joffroy (Charcot et Joffroy, 1869) deux cas d’atrophie* musculaire progressive qui conduisent en fait à la formalisation de la SLA. En 1870, (Charcot, 1870), il rattache à la SLA une entité anatomo-clinique reconnue dès 1859 par Duménil (Duménil, 1859), la « paralysie musculaire progressive de la langue, du voile du palais et des lèvres » qui deviendra la paralysie labio-glosso-pharyngée. 1.2. / Recherches actuelles La SLA provoque donc une dégénérescence systématisée des cellules nerveuses qui commandent les muscles volontaires, les motoneurones*. L’atteinte concerne à la fois les motoneurones* périphériques (en relation directe avec les muscles) et les motoneurones* centraux (situés dans le cortex moteur). De nombreuses hypothèses sur l’origine ou les origines de cette maladie sont avancées. La recherche fondamentale dans la SLA est très active. L’accroissement des connaissances sur la maladie repose sur de nouvelles hypothèses physiopathologiques mais également sur l’approfondissement de mécanismes déjà connus. Ainsi, aujourd’hui, de très nombreux champs de recherche font l’objet d’études approfondies afin de comprendre les mécanismes de la SLA et d’élaborer de nouveaux traitements. En annexe n°1 figurent les étiologies de la SLA. Cette liste n’est pas exhaustive mais les principales hypothèses actuelles sont développées. Actuellement, seul le Riluzole a prouvé son efficacité dans le traitement de la SLA. Toutes les études faites montrent qu’il prolonge, en moyenne, d’un à deux ans la durée de vie. Ce médicament est aujourd’hui le seul à posséder une autorisation de mise sur le marché (AMM depuis le 10/06/1996) dans la SLA. Mais de nombreux chercheurs travaillent en laboratoire, sur d’autres hypothèses, et tentent, à partir des modèles animaux puis humains, de mettre au point d’autres traitements efficaces pour la SLA. 2. / EPIDEMIOLOGIE 2.1. / Généralités Sur le plan épidémiologique, la SLA a fait l’objet de nombreuses études depuis plusieurs dizaines d’années. Elles ont permis de mieux connaître la maladie par l’étude de sa distribution en termes de fréquence, de sex-ratio, de taux de mortalité, mais aussi son histoire naturelle par l’analyse des facteurs influençant son expression clinique (Munsat et al., 1991 ; Brooks et al., 1995). Les résultats de ces travaux sont relativement concordants et sont considérés comme robustes d’un point de vue épidémiologique. Par contre, la recherche de facteurs de risque (génétique, environnemental ou toxique) est plus difficile et les résultats des études de cohorte et de cas témoins sont souvent contradictoires. Une des limites de la recherche épidémiologique sur la SLA est liée à la difficulté d’identifier des cas de façon certaine, du fait d’une grande hétérogénéité clinique.