TOXICITE DE L’AFLATOXINE B1 CHEZ LE
POULET DE CHAIR
GENERALITES SUR LES AFLATOXINES
Le mot aflatoxine est formé à partir du genre Aspergillus pour la lettre « A », de l’espèce flavus pour les trois lettres « fla » et de toxine qui veut dire poison : c’est donc une toxine de l’A. flavus (MANDIOUBA, 1992). Les aflatoxines sont des métabolites secondaires d’origine fongique produits par les champignons du genre Aspergillus : A.flavus et A. parasiticus (TEDESCO et al., 2004 ; DENLI et OKAN, 2006 ; DENLI et al., 2009 ). Elles sont appelées métabolites secondaires car, contrairement aux métabolites primaires comme les acides nucléiques, les protéines ou les acides gras, elles ne sont pas essentielles au développement de la moisissure. Elles constituent une famille des composés extrêmement toxiques, mutagènes, tératogènes et cancérogènes (DEINER et al., 1987; KURTZMAN et al., 1987; MILLER, 1995 ; ROSA et al., 2001 ; TEDESCO et al., 2004). Ce sont des contaminants fréquemment rencontrés dans l’alimentation avicole (LEDOUX et al., 1998). Les aflatoxines sont principalement produites par deux souches d’Aspergillus. Il s’agit d’A. flavus qui produit principalement l’AFB1 et l’AFB2 et d’A. parasiticus produisant 4 aflatoxines : aflatoxine B1, B2, G1 et G2 (DORNER et al., 1984). Une troisième souche appelée A. nomius, rare mais proche de A. flavus est capable de produire des aflatoxines (KURTZMAN et al., 1987). L’AFB1 est la mycotoxine la plus toxique et qui cause des pertes énormes en aviculture (HUSSEIN et BRASEL, 2001; TEDESCO et al., 2004) et dans les industries de transformation alimentaire (KUBENA et al., 1998). Selon NGUYEN (2007) et PFOHL-LESZKOWICZ (1999), la toxicité des aflatoxines s’échelonne dans l’ordre suivant : B1 (100%) ; M1 (80%) ; G1 (50%) ; B2 (20%) ; G2 (10%).
Historique de la découverte des aflatoxines
Des documentations anciennes ont rapporté des empoisonnements causés par des ingestions de seigle et autres céréales infectés par les sclérotes de champignon Claviceps purpurea (HORACE et GRAHAM, 1980). 4 Au cours de la deuxième guerre mondiale, une toxicose associée à la consommation du riz jaune moisi provoqua beaucoup de dégâts au Japon. La mort intervient un à trois jours après l’apparition des premiers symptômes. Les champignons incriminés appartenaient au genre Penicillium (KING, 1984 cité par ABDELLAH, 2004). En 1945, au Maroc ont été décrites des tumeurs hépatiques chez les porcs nourris de tourteaux de coton, de karité et d’arachide moisis (ABDELLAH, 2004). Ce n’est qu’en 1960 que la curiosité scientifique fut éveillée par la mort brutale d’une centaine de milliers de dindonneaux dans le Sud-Est de l’Angleterre. Ce mal fut nommé « Turkey-X- Disease » ou « maladie X des dindes ». C’est plus tard qu’on constata que les tourteaux d’arachide distribués aux dindes étaient contaminés par Aspergillus flavus qui sécrète une substance toxique appelée « aflatoxine » (ABDELLAH, 2004; NGUYEN, 2007). Cette date a ouvert une série d’études et de recherches sur les substances actives élaborées par les moisissures. I.3. Structures et propriétés physiques des aflatoxines Comme beaucoup de métabolites secondaires, les aflatoxines sont une famille de composés structurellement proches. Parmi ces nombreux composés isolés, seuls quatre sont toxiques et ont été trouvés comme contaminants naturels : AFB1; AFB2; AFG1 et AFG2 (BATHILY, 1998). Le plus abondant et le plus toxique est l’AFB1 (NGUYEN, 2007). Les composés B sont bleus (blue) et les composés G sont verts (green). Les aflatoxines du type « B » sont caractérisées par un noyau pentacyclique carboné alors que dans celle du type « G », ce noyau est hexacyclique et hétérogène avec un atome d’oxygène supplémentaire (WHO, 1990 cité par BATHILY, 1998). Les structures chimiques des différentes aflatoxines sont illustrées par la figure 1. 5 Figure 1 : Structures chimiques des différentes aflatoxines Source : NGUYEN (2007) 6 Concernant les propriétés physiques et les réactions chimiques des aflatoxines, une connaissance exhaustive de ces dernières a permis de mieux appréhender leur détection et leur élimination dans les produits contaminés. Il s’agit des produits dont la masse moléculaire varie de 312 à 346 g avec un point de fusion compris entre 190 et 299°C (tableau 1). Tableau 1 : Propriétés physiques des aflatoxines Aflatoxine Formule moléculaire Masse moléculaire (g) Point de fusion (°C) B1 B2 G1 G2 M1 M2 B2A G2A C17 H12O6 C17 H14O6 C17 H12O7 C17 H14O7 C17 H12O7 C17 H14O7 C17 H14O7 C17 H14O8 312 314 328 330 328 330 330 346 268-269 286-289 244-246 237-240 299 293 240 190 Source : NGUYEN (2007) I.4. Conditions de formation des aflatoxines En Afrique tropicale, toutes les conditions exigées pour le développement des mycotoxines responsables des intoxications des produits alimentaires sont présentes. En effet, les conditions les plus favorables pour une croissance et une production optimale en aflatoxine par A. flavus sont une température comprise entre 10°C et 45°C ainsi qu’une humidité relative de 80 %, une teneur en eau du substrat de 10 à 30 % et une activité de l’eau relativement faible (0,84-0,86) (CHRISTENSEN et al., 1973). Ces microorganismes sont ubiquitaires étant donné qu’ils ont peu d’exigences de croissance. Il est à noter que les moisissures n’ont pas toujours les conditions optimales pour se développer et produire les mycotoxines.
EFFETS DE L’AFB1 SUR LA PRODUCTIVITE DES VOLAILLES
Les effets de l’AFB1 sur la santé animale varient suivant l’espèce, l’âge, le sexe, l’état physiologique de l’animal, le mode d’administration, la composition de l’aliment (PFOHL-LESZKOWICZ, 1999; TABUC, 2007). Les oiseaux sont les plus sensibles, en particulier le canard et le dindon tandis que le poulet est relativement résistant (GUERRE et al., 1996). Chez le poulet de chair, les effets de l’AFB1 se manifestent sur le poids vif, l’indice de consommation, le poids des organes ainsi que les réponses immunitaires (VERMA et al., 2004).
Effets de l’AFB1 sur la santé des volailles La palette des effets néfastes de l’AFB1 sur la santé est très étendue et est associée à la dose et la durée d’exposition.
Toxicité aiguë
L’intoxication aiguë résulte de l’ingestion en une seule ou plusieurs fois rapprochées d’une dose assez importante d’aflatoxines et se traduit par la mort des animaux dans des délais variant selon la sensibilité spécifique. L’intoxication aiguë par l’AFB1 se manifeste par un malaise, une perte de l’appétit puis un ralentissement du gain de poids, un ictère, une ascite et enfin la mort du sujet atteint. Sur le plan histologique, on retrouve un foie décoloré, hypertrophié avec prolifération des canaux biliaires, des lésions de nécrose, d’infiltration graisseuse, des hémorragies hépatiques, pulmonaires, rénales et des glandes surrénales, une congestion des poumons, des lésions rénales compatibles avec une néphrite glomérulaire (MOREAU, 1994).
Toxicité chronique
Les aflatoxicoses chroniques surviennent à la suite d’ingestion répétées de faibles doses d’aflatoxines pendant des périodes plus ou moins longues et sont plus fréquentes chez les animaux domestiques et chez l’homme (MOREAU, 1994). En effet, l’ingestion de faibles doses peut entraîner des effets insidieux comme la baisse des performances animales et une prédisposition accrue à des maladies par suite d’une déficience du système immunitaire .
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