Quelques stratégies d’amélioration des systèmes d’élevage

Le foin de brousse pour la continuité des productions en saison sèche dans les systèmes d’élevage extensifs

L’ELEVAGE AU TCHAD 

L’importance de l’élevage au Tchad n’est plus à démontrer. L’élevage représente 13% du PIB national et 32% du PIB agricole en 2001. Il est le premier poste d’exportation du pays après le pétrole avec une valeur estimée à 65 milliards de FCFA et un flux monétaire de 110 milliards par an (ABOULMALI, 2005). La production laitière est de 430 000 tonnes par an. Rien qu’à N’Djamena et Moundou, elle rapporte 5 milliards de FCFA par an. Le dernier rapport statistique du Ministère de l’Elevage avance les estimations résumées dans le tableau I sur le cheptel tchadien (TME, 2003). Tableau I: Effectifs estimés du cheptel tchadien en 2003 Espèces Bovins Ovins Caprins Camelins Equins Asins Porcins Effectifs 6 284 232 2 563 530 5 584 466 1 185577 359 655 395 650 70 895 Source : TME 2003 Le cheptel national, une grande richesse du pays, constitue un capital estimé à 1 000 milliards de fCFA (ALFAROUKH et SEID, 1998). Malgré cette importance numérique du cheptel, le Tchad n’est pas autosuffisant en lait et produits laitiers. Pour faire face à ce déficit, le pays a recours aux produits importés qui constituent 35% du lait et des produits laitiers consommés au Tchad en 2003 (KOUSSOU, 2003).

LES SYSTEMES D’ELEVAGE AU TCHAD 

SYSTEMES DE PRODUCTION ANIMALE 

Le système de production animale est l’ensemble des techniques et des pratiques mises en œuvre par une communauté pour faire exploiter dans un espace donné des ressources végétales par des animaux, en tenant compte de ses objectifs et de ses contraintes (LHOSTE, 1984). En milieu tropical et au Sahel en particulier, deux principaux systèmes de production se rencontrent : un système traditionnel extensif et un système moderne. 

Système moderne et intensif

 D’après PAGOT (1985), un examen superficiel de la répartition des régions réputées laitières à la surface du globe montre qu’aucune d’elles n’est située entre les tropiques. Les principaux pays producteurs laitiers, d’où s ont originaires les races spécialisées, sont tous des pays de la zone tempérée, au climat océanique doux et pluvieux tels que les Pays-Bas, le Danemark, la France (Normandie) et parfois des pays aux hivers rudes (Suisse, Écosse…). Les races bovines spécialisées les plus répandues et qui progressent le plus sont originaires de ces régions : Holstein-Frisone, Jerseyaise, Guerneseyaise, Brune des Alpes, Monbeliarde, Normande. Malgré qu’un certain niveau d’intensification soit atteint par certains pays africains, l’élevage intensif ou le système d’élevage moderne de gros bétail n’existe pas au Tchad bien que des tentatives d’intensification aient été menées dans les années 1950-70 pour améliorer la productivité. Les expériences les plus marquantes ont été l’embouche des zébus Arabe dans certaines régions du pays. Aucune de ces tentatives n’a été pérennisée et vulgarisée et l’élevage bovin reste encore sous sa forme traditionnelle (ABOULMALI, 2005). 3 Au Tchad, le système d’élevage prédominant est de type traditionnel ou pastoral conduit essentiellement par des transhumants, des nomades et des agro-pasteurs (TME, 1998 ; ABOULMALI, 2005).

Système traditionnel

 Il est plus important et se caractérise par l’utilisation d’animaux de races locales à faible potentiel génétique. C’est l’élevage traditionnel qui fournit l’essentiel de la production locale. Cet élevage est dit de subsistance. Il symbolise entre l’homme et son troupeau les rapports socio-culturels qui ont un poids considérable dans la conduite de l’élevage. Ces rapports sont plus passionnants par leur singularité que par les facteurs purement techniques et économiques (MAZOYER, cité par PAGOT, 1985). Dans ce système, l’élevage n’est pas spécialisé car les spéculations concernent à la fois la production du lait et celle de la viande. On y distingue en général le système pastoral pur, le système agropastoral et le système sédentaire. 

Système de production sédentaire

 En zone tropicale où les animaux domestiques et sauvages sont incités à s e déplacer pour atténuer l’incidence des fluctuations saisonnières des ressources fourragères, l’élevage n’est sédentaire que s’il est associé à d es activités de production végétale (PAGOT, 1985). L’association agriculture-élevage existe sous des formes extrêmement diverses. Elle est d’autant plus fréquente que la pluviométrie est plus élevée et favorise donc plus les spéculations de production végétale. L’élevage de cueillette est un type d’élevage coexistant avec l’agriculture sans complémentarité. C’est la forme de l’élevage sédentaire la plus primitive. Les animaux ne bénéficient que des soins extrêmement sommaires qui se limitent le plus souvent à une protection contre les fauves. La divagation du gros et du petit bétail est la règle. Les animaux ne sont pas nourris. Ils ne sont exploités ni pour le travail ni pour la production laitière. Ils ne sont pas exploités systématiquement pour la viande, mais plutôt sacrifiés à l’occasion des fêtes coutumières. Le fumier n’est que peu utilisé. L’élevage se limite à la possession des animaux et à un contrôle plus ou moins superficiel de leur présence. Cet élevage qui est sans doute proche des premiers essais de domestication vieux de plus de dix mille ans, se rencontre en Afrique en zone équatoriale et tropicale humide (DUPIRE, 1970). 

Système agro-pastoral

 Dans ce système d’élevage, le bétail revêt une importance considérable pour l’agropasteur. Il représente à l a fois une source de revenu supplémentaire, un moyen d’épargne, un outil de production pour la traction et une source de fumure organique (DIALLO, 1977; WILSON, 1987). Ce système de production concerne les éleveurs cultivateurs et les agriculteurs éleveurs. Il s’agit des Arabe et Foulbé du Chari Baguirmi, des Boudouma, des Kanembou, des 4 Toupouri et des Massa (TME, 1994). L’agro-pastoralisme peut prendre la forme d’une simple proximité géographique ou présenter une intégration marquée avec les productions végétales sous la forme de traction attelée ou de fumure organique. 

Système pastoral 

Le système d’élevage pastoral est extensif, la charge et la productivité animale par hectare sont faibles. Les pasteurs se caractérisent par l’exploitation et le déplacement sur de vastes territoires. Ceux-ci sont généralement des parcours pauvres de steppes arides et semi-arides ou de montagnes. Leurs troupeaux, en général de grande taille, sont constitués d’une ou de plusieurs espèces (LHOSTE et al, 1993) d’herbivores à instinct grégaire et migrateur : chameaux, ovins, caprins, bovins. Le système pastoral se distingue en deux grands ensembles selon le rythme du déplacement des éleveurs (PAGOT, 1985) : a. le nomadisme : c’est un élevage pastoral avec déplacement acyclique des troupeaux et des campements au hasard des orages et des jonchées de verdures qui les suivent (CAPO REY cité par PAGOT, 1985) dans les territoires très vastes dont l’usage est réglé par la coutume ou la force. Le nomadisme bovin n’est pas très répandu au Tchad, il est pratiqué par les pasteurs M’bororo et les Sahariens (LAOUNOUDJI et MONNIER, 1985). L’aire de nomadisation de ces pasteurs n’est pas facile à identifier et pourrait s’étendre au-delà du territoire national. Les semi-nomades se déplacent d’une habitation fixe à une au tre habitation fixe ou temporaire. Les M’Bororo du plateau de l’Adamaoua au Cameroun, par exemple, descendent dans la plaine d’inondation de la Ndop en saison sèche, abandonnant leurs cases d’hivernage sur le plateau (BOCQUENE, 1986). b. la transhumance : C’est le déplacement saisonnier cyclique des troupeaux, synchrone du régime des pluies, pour l’exploitation des ressources fourragères et hydrauliques temporaires dans un espace agraire dont les éleveurs ont la maîtrise technique par droit d’usage coutumier (PAGOT, 1985). C’est le système d’élevage dominant au Tchad puisque chaque année, 75% du cheptel est concerné par les mouvements de transhumance (TME., 1996). Selon LAPLANCHE, cité par TIMBO et OUEDRAOGO (1990), « la transhumance est un ensemble de mouvements de rythme pendulaire et de caractère cyclique intéressant la totalité de la masse pastorale qui l’effectue à l’intérieur de pâturages coutumiers; ce phénomène complexe, d’une impérieuse nécessité, est le mode d’élevage traditionnel de la zone sahélienne ». Cette définition s’inscrit bel et bien dans la logique des éleveurs transhumants tchadiens. D’après YOSKO (1994), TME (1998) et WIESE (2004), on distingue deux types de transhumance : -la grande transhumance qui se fait selon l’axe nord-sud et sud-nord, entre les zones tropicales et les zones sahéliennes sur une distance de plus de 300 km. Elle est pratiquée essentiellement par les Arabe Mysserié, Oueled Rachid, Mahamid et Mimi. -la petite transhumance avec une amplitude de moins de 300 km peut se faire selon les mêmes axes ou selon l’axe ouest-est le long des bordures des lacs ou d’autres points 5 stratégiques. Elle est mise en œuvre surtout par les éleveurs du Kanem, les Kecherda, les Kreda, les Arabes Choa et les Khozzam. Le système d’élevage pastoral est donc axé en permanence sur la recherche de l’eau et de la nourriture pour le bétail. Les animaux sont choisis en fonction de leur rusticité, de leur résistance à la privation d’eau, de leurs aptitudes aux déplacements. En conclusion, l’élevage, malgré sa place non né gligeable dans l’économie nationale, reste tributaire des contraintes du milieu. L’alimentation des animaux qui se fait essentiellement sur parcours naturels se positionne ainsi comme une contrainte majeure. En fonction des conditions agro-écologiques locales, des stratégies sont élaborées pour réduire ces contraintes alimentaires.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE SYNTHESE BIBIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : L’ELEVAGE AU TCHAD
I LES SYSTEMES D’ELEVAGE AU TCHAD
1.1. Systèmes de production animale
1.1.1. Système moderne et intensif
1.1.2. Système traditionnel
1.1.2.1. Système de production sédentaire
1.1.2.2. Système agro-pastoral
1.1.2.3. Système pastoral
1.2. Quelques stratégies d’amélioration des systèmes d’élevage
1.2.1. Constitution de réserves fourragères
1.2.2. Traitement des pailles
1.2.3. Complémentation alimentaire des pâturages
CHAPITRE II : LA FENAISON
2.1. Définition et principes généraux
2.2. Principales opérations de la fenaison
2.2.1. Opérations préliminaires
2.2.2. Période de récolte et stade végétatif.
2.2.3. Fauche
2.2.3.1. Matériel de fauche
2.2.3.2. Moment de fauche
2.2.4. Retournement et séchage
2.2.5. Transport
2.2.6. Stockage
2.2.7. Utilisation du foin
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
CHAPITRE I : MATERIEL ET METHODE
I. CADRE DE L’ETUDE
1.1. Caractéristiques physiques et démographiques
1.2. Présentation des projets T51 et T52
II. METHODOLOGIE
2.1. Collecte des données
2.1.1. Choix des élevages et durée de l’étude
2.1.2. Support de l’enquête
2.1.3. Evaluation des stocks de fourrage
2.1.4. Evaluation de la capacité de production d’un homme adulte
2.1.5. Critères d’appréciation de la qualité du foin et de l’aire de stockage
2.1.6. Evaluation de l’effet de la complémentation
2.2. Traitement statistique des données
CHAPITRE II : RESULTATS ET DISCUSSION
I. CARACTERISATION DES ELEVAGES
1.1 Statut socio-économique des enquêtés
1.2. Composition et gestion du chepteL
1.2.1. Composition et effectif du cheptel
1.2.2. Conduite de l’élevage
1.2.3 Conduite alimentaire
II. Analyse de la pratique de la fenaison
2.1. Rendement d’un homme en foin de brousse
2.2. Quantités et qualité produite en 2007
2.3. Facteurs de variation de la quantité et de la qualité de foin
2.4. Provenance du foin
2.5. Aire de stockage du foin et sa qualité
2.6. Utilisation du foin
2.6.1. Destination du foin produit
2.6.2. Durée de la complémentation
2.6.3. Catégories d’animaux bénéficiaires
2.6.4. Quantités distribuées selon les espèces
2.7. Outils utilisés pour la fauche et leur appréciation
2.8. Fauche, séchage, transport
2.9. Avantages de la fenaison
2.9.1. Effets généraux de la complémentation
2.9.2. Effets sur le niveau de la production laitière bovine
CONCLUSION
BIBIOGRAPHIIE

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