PREVALENCE ET DIVERSITE GENETIQUE DES VIRUS AICHI DANS L’ENVIRONNEMENT
Généralités sur les gastroentérites
Les maladies entériques représentent la deuxième cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans, avec 2,5 milliard de cas estimés, conduisant à 1,5 million de morts chaque année (Liu L et coll., 2012; Kotloff K.L. et coll.,2013; Parashar U.D et coll., 2003; Parashar U.D et coll., 2006 ;Walter C.L. et coll.,2013}. Dans les pays en développement et particulièrement ceux de l’Afrique subsaharienne, ces maladies sévissent de façon endémo-épidémique surtout chez les jeunes enfants et les personnes âgées avec une mortalité relativement élevée favorisée par la déshydratation, la malnutrition et les problèmes de prise en charge sanitaire (Ciasen T. et coll., 2007). De nombreux agents microbiologiques dits «entériques» sont à l’origine de ces diarrhées infectieuses. Il peut s’agir notamment de bactéries (Salmonella, Shigella, E.coli, Campylobacter jejuni, Vibrio cholerae, Clostridim difficile, etc.), de virus (Rotavirus connus comme première cause de diarrhée chez l’enfant, Norovirus, Astrovirus Adénovirus, etc.), parasites et protozoaires (Cyclospora, Entamoeba histolytica, Cryptosporidium, Giardia, lamblia, etc.). A côté de ces agents classiques de gastroentérites, nous notons l’apparition de pathogènes dits « émergents », c’est-à-dire soit récemment découverts, soit dont l’apparition ou l’expression est favorisée par certaines conditions (réchauffement climatique modifiant la zone de présence d’un pathogène, réchauffement des eaux littorales permettant la multiplication d’un pathogène, mauvaise urbanisation, etc.). Les norovirus sont responsables d’au moins 80 % des gastro-entérites chez les plus de 65 ans. Ces virus subissent une dérive génétique tous les 2 à 3 ans avec apparition de nouveaux variants antigéniques à l’origine de gastroentérites épidémiques. Un nouveau variant a été détecté dans l’hémisphère Sud en 2012 et a connu une rapide diffusion dans la moitié nord du globe. Le virus Aichi (Espèce Aichi virus, genre Kobuvirus) de la famille des picornaviridae est responsable de gastroentérites chez l’homme. C’est un virus à ARN très résistant à la chaleur, à l’éther à 10 % et aux doses de chlore utilisées pour la chloration habituelle des eaux de boissons. Il a été découvert en 1989 au Japon (Aichi) suite à une épidémie de gastroentérite non bactérienne consécutive à une consommation d’huîtres (Yamashita, T. et coll., 1991). Il a une diffusion mondiale car ayant été responsable d’épidémies de gastroentérites dans de nombreuses zones du monde (Asie, Amérique du Sud, Europe et en Afrique) (Ana Alcalâ et coll., 2010; Di Martino B. et coll., 2013; Ambert-Balay K. et coll., 2008; Sdiri-Loulizi K., et coll., 2010) Les produits de mer ont été indexés initialement comme réservoir du virus ; mais il a également été détecté dans les eaux usées et emprunterait donc la voie orofécale comme tous les autres Picornaviridae.
Le genre Kobuvirus
Historique et définition
En 1989, au Japon dans une sous-préfecture du nom de Aichi, un nouveau virus cytopathique sur des cellules BS-C1 (cellules de rein de singe de l’espèce Cercopithecus aethiops) a été isolé chez des patients souffrant de gastro-entérite. Sa capacité à croître dans des cellules en culture, ainsi que d’autres propriétés biologiques (résistance au chloroforme et stabilité sous un faible pH) ont fait suggérer que le virus Aichi était membre des entérovirus. Cependant, aucun des sérums d’entérovirus n’a neutralisé le virus Aichi. Et inversement, le sérum antivirus Aichi n’a pas réagi avec les entérovirus ou tout autre virus entériques tels que les norovirus et les astrovirus. Ce virus a été affecté au début des années 90 à un nouveau genre appelé Kobuvirus classé en 1997 dans la famille des Picornaviridae (Yamashita T. et coll., 199l).l e terme japonais « Kobu » signifie bosse ou molette en japonais, a été choisi pour désigner le genre à cause de la structure icosaédrique distinctive de ces virus (Mahy B., 1999).
Classification
Les Kobuvirus appartiennent à la famille des Picornaviridae qui est constituée de virus humains et animaux. Cette famille regroupait 12 espèces pouvant affecter l’homme en 2013 (entérovirus de A à H et rhinovirus A, B etC) eux même subdivisés en plus de 300 sérotypes. Cette nouvelle classification a été approuvée par I’ICTV {International Committee on Taxonomy of Viruses) en février 2013 (ICTV 2013). Leur classification évolue très rapidement, notamment suite à la découverte récente de nombreux génomes grâce à la metagénomique (séquençage à haut débit d’échantillons biologiques). Le genre Kobuvirus se compose de trois espèces : Aichi virus A (anciennement appelé virus Aichi), Aichi virus 8 (anciennement appelé Kobuvirus bovin) et Aichi virus C (anciennement appelé Kobuvirus porcin). Récemment, deux autres types ( canin de type 1 et murin 1), ont été décrits et appartiennent probablement à l’espèce Aichi virus A (Phan Tung G. et coll., 2011). D’autres virus apparentés (kobu-like) ont été identifiés chez les chauves-souris (li et coll., 2010;Reuter G. et coll., 2011).
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