GLOMERULONEPHRITES PROLIFERATIVES LUPIQUES
Généralités
Les glomérulonéphrites prolifératives lupiques sont l’ensemble des manifestations cliniques et paracliniques en rapport à une prolifération cellulaire endocapillaire et/ou extra capillaire liée au lupus. Elles comprennent les classes III et IV associées ou non à la classe V . Le lupus est une maladie systémique non spécifique d’organe, auto-immune, d’étiologie inconnue, caractérisée par une production d’auto-anticorps, évoluant de façon chronique par poussées. I-2/Epidémiologie Le LES survient 85 fois sur 100 chez la femme, généralement en période d’activité ovarienne. Sa prévalence varie en fonction des ethnies mais est estimée à 1 pour 1000. En France, sa prévalence est estimée à 40 pour 100 000 et son incidence à 5 nouveaux cas annuels pour 100 000. L’atteinte rénale est l’une des manifestations les plus sévères du LED, et concerne 40 à 60 % des patients atteints de LED . Elle est inaugurale dans 50 % des cas, mais peut survenir tardivement dans l’histoire de la maladie. Les patients caucasiens (12Ŕ33 %) sont moins exposés au risque de néphropathie lupique que les sujets noirs (40Ŕ69 %), latino-américains (36Ŕ61 %) ou asiatiques (47Ŕ53 %). Dans une analyse rétrospective récente [94], il apparaît que la néphropathie est bien plus fréquente dans les populations asiatiques (70 %) que hispaniques et noires (40Ŕ50 %) ou caucasiennes (20 %). Ces mêmes auteurs rapportent que l’âge < 33 ans, le sexe masculin et l’origine ethnique non-Caucasienne sont des facteurs de risque de l’atteinte rénale précoce. Deux études antérieures, faites au Sénégal, faisaient état d’une prévalence hospitalière de la néphropathie lupique de 56 % et de 72 % . Les classes prolifératives sont les plus fréquentes dans la littérature, variant entre 40 et 80% des cas Aux Etats-Unis, Contreras avait trouvé une prévalence de 65% des classes prolifératives; en Egypte, Momtaz avait trouvé une prévalence de 88,5 % et en Afrique du Sud, Okpechi avait trouvé une prévalence de 41,4 % .
Pathogénie de la maladie lupique
La physiopathologie du lupus est complexe et vraisemblablement multifactorielle, dépendant de facteurs génétiques, environnementaux et hormonaux . Les principales pistes étiologiques évoquées à l’origine de l’auto-immunité du LED [88],impliquent à la fois un défaut d’élimination des débris cellulaires générés lors de l’apoptose (mort cellulaire 6 programmée), une modification des auto-antigènes générés lors de ce processus, une activation excessive des cellules dendritiques et des lymphocytes T par cet afflux d’autoantigènes et surtout une production importante d’auto-anticorps par des lymphocytes B qui sont stimulés de façon excessive. Tous ces mécanismes aboutissent à une perte de tolérance vis-à-vis de certains auto-antigènes nucléaires, à une lymphoprolifération polyclonale et finalement à une inflammation tissulaire touchant de multiples organes, processus en grande partie médiée par la déposition de complexes immuns.
Facteurs génétiques
La suractivation du système immunitaire observée dans cette maladie est favorisée par des facteurs de prédisposition génétique, même si la maladie lupique ne peut être considérée comme une maladie monogénique. De nombreuses études publiées ces dernières années [29] ont confirmé le rôle de certains polymorphismes, portant sur des gènes importants pour la régulation de l’immunité, tels certains haplotypes HLA, certains gènes liés à l’interféron γ (IRF5), des gènes codant pour des protéines du complément (C1q, C2, C4), des récepteurs d’immunoglobulines (Fc γR2A/3A/3B), des récepteurs Toll-like (TLR), des molécules d’adhésion cellulaire ou des molécules impliquées dans l’activation lymphocytaire (STAT4,BLK, PTPN22).
Facteurs hormonaux
La physiopathologie du lupus dépend également des facteurs hormonaux comme en témoignent la prévalence féminine, le rôle déclenchant de la grossesse ou des traitements inducteur de l’ovulation et de la pilule œstroprogestative.
Facteurs environnementaux
Le rôle déclenchant de certains médicaments, des rayons ultraviolets prouvent l’implication des facteurs environnementaux dans la physiopathologie du lupus.
Pathogénie de l’atteinte rénale
L’atteinte rénale la plus fréquente est la glomérulonéphrite lupique. Les lésions intra-rénales constatées sont à la fois liées aux dépôts glomérulaires d’immunoglobulines et de complément mais sont aussi souvent secondaires à l’infiltration du parenchyme rénal par des cellules inflammatoires, notamment par des macrophages activés. La présence d’anticorps anti-DNA natif est corrélée au développement des lésions glomérulaires dans le LED, mais les autoanticorps qui semblent directement et en grande partie responsables de cette atteinte rénale sont les anticorps anti-nucléosomes. Il a été ainsi démontré que les nucléosomes circulants dans le LED se déposent sur la membrane basale glomérulaire, associés à des anticorps antinucléosomes. Il n’est pas encore clair si ces complexes immuns sont formés in situ ou s’ils 7 sont générés dans la circulation générale, avant leur déposition intra-rénale. Ils sont néanmoins clairement pathogènes pour le rein dans des modèles animaux de néphropathie lupique, en induisant l’activation du complément ainsi qu’un recrutement local de cellules inflammatoires. Plusieurs types de cellules intra-rénales (macrophages, cellules dendritiques, cellules endothéliales ou cellules mésangiales) peuvent capter ces complexes immuns, soit via des récepteurs aux immunoglobulines (Fc γR), soit des récepteurs du complément, soit des TLR qui reconnaissent les structures nucléiques contenues dans les nucléosomes. Il en résulte une importante production intra-rénale de cytokines pro-inflammatoires et notamment d’interféron β et interféron γ, ainsi qu’une surexpression de molécules d’adhésion sur les parois de la microcirculation rénale, conduisant à l’afflux de lymphocytes T cytotoxiques et Th17, ainsi que de lymphocytes B, qui amplifient l’inflammation intrarénale.
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