Quelques illustrations du rôle de la surface dans des nanoparticules de ZnO
Phonons acoustiques
L’objet de ce chapitre est d’étudier les vibrations aux basses fréquences des nanoparticules de ZnO. Pour ce faire, il vient immédiatement à l’esprit de mener cette étude en appliquant le modèle de Lamb permettant de prédire les vibrations d’une sphère libre, homogène et isotrope dans le cadre de l’élasticité linéaire [Lamb(1882)]. Comme il n’aura pas échappé au lecteur de ce manuscrit, les nanoparticules étudiées ne sont pas de forme sphérique, et ZnO n’est pas du point de vue élastique un matériau isotrope. Certains objecterons que l’approximation en sphère isotrope est susante pour connaître les fréquences des modes propres de vibration, car seul compte le volume en première approximation1 . Le but de ce chapitre est justement d’expliquer ce qu’il se passe au degré d’approximation supérieur, lorsque la forme et l’anisotropie des nanoparticules est prise en compte de façon explicite dans la théorie de l’élasticité : la partie 1.1 de ce chapitre pose alors un cadre qui nous servira tout au long de l’étude. Ce ranement a un coût : la résolution analytique des équations de l’élasticité est très dicile, voire impossible, aussi avons-nous choisi une résolution numérique basée sur une approche originale et décrite dans la partie 1.2 de ce chapitre. Une autre façon de procéder à la détermination des modes propres de vibration des nanoparticules de ZnO est la simulation à l’aide de modèles atomistiques : ce sera l’objet de la partie 1.3. La forme et l’anisotropie élastique des nanoparticules est alors prise en compte implicitement. Si la mise en ÷uvre est encore alourdie par rapport à l’élasticité, les informations obtenues sont de toute première importance pour la compréhension des eets de surface : l’élasticité linéaire ne permet pas de traiter les eets de surface alors que ceux-ci sont pris en compte dans les simulations atomistiques . La comparaison entre les deux modèles, élasticité et atomistique, sera eectuée dans la partie 1.3.5. Enn, nous présentons en n de chapitre une comparaison entre les résultats théoriques que nous aurons formulés et la campagne expérimentale visant à les conrmer (partie 2).
Modes propres d’une nanoparticule
Dans cette partie, nous nous plaçons dans le cadre de la théorie de l’élasticité linéaire. Nous rappelons brièvement les résultats de la recherche des modes propres de vibration d’une sphère libre faite d’un matériau homogène et isotrope. Nous détaillons ensuite comment ces résultats sont modiés lorsque la sphère devient un ellipsoïde (paragraphe 1.1.2), et lorsqu’interviennent des discontinuités de surface comme dans un cylindre et un prisme (paragraphe 1.1.3). Un autre cas d’intérêt est la prise en compte ou non de l’anisotropie du tenseur des rigidités du matériau (paragraphe 1.1.4).
1.1.1 Cas d’école : la sphère isotrope en théorie de l’élasticité linéaire
Lamb a été le premier à s’intéresser aux vibrations d’une sphère libre homogène et isotrope [Lamb(1882)]. Le vecteur déplacement −→U associé à un mode propre de pulsation ω est solution de l’équation de Navier3 : ∂ 2−→U ∂t2 = (v 2 l − v 2 t )∇(∇ · −→U ) + v 2 t ∇2−→U (2.1) Dans cette équation, vl et vt désignent respectivement les vitesses longitudinales et transverses des ondes élastiques. En géométrie sphérique, les solutions sont de deux type [Verma(1999)]. Il y a d’une part les modes sphéroïdaux dont le déplacement s’écrit −→U S = ∇f + ∇ × ∇ × −→A, où f et −→A sont des potentiels scalaire et vecteur respectivement. D’autre part, il y a les modes torsionnels : leur déplacement est donné par : −→U T = k∇×−→A, où k = ω vt . Les expressions des potentiels sont les suivantes : f = 1 h zl(hr)Ylm(θ, φ)exp(−iωt) −→A = 1 k zl(kr)Ylm(θ, φ)exp(−iωt) −→ur, (2.2) où zl et Ylm sont les fonctions de Bessel sphériques et fonctions de Legendre respectivement, h = ω vl , −→ur le vecteur unitaire radial de la base sphérique et (r, θ, φ) les coordonnées sphériques. Chaque mode propre est caractérisé par un couple d’entiers (l; m) avec l ≥ 0 4 et −l ≤ m ≤ l. Il a été établi que les modes sphéroïdaux pour lesquels l est égal à 0 ou 2 présentent une activité Raman ; alors que les modes torsionnels sont inactifs [Duval(1992)]. Nous ne nous intéresserons donc pas à ces derniers dans la suite de ce travail. Concernant les modes sphéroïdaux, le mode l = 0 est appelé mode de respiration, car le déplacement associé est une succession de contractions/dilatations isotropes de la sphère. Le mode l = 2 est cinq fois dégénéré et s’appelle mode quadrupolaire. Attachons à la sphère un repère cartésien (Ox1x2x3) d’origine le centre de la sphère. Le mode quadrupolaire m = 0 consiste en une contraction selon la direction (Ox3) cependant qu’il y a une dilatation isotrope de la sphère dans le plan (x1Ox2), et vice versa. Pour les modes m = ±1, le schéma est le même que pour le mode m = 0 à ceci près que l’on procède à une rotation des axes autour de l’origine. Enn, pour les modes m = ±2, la dimension selon (Ox3) est inchangée, et l’on observe une contraction suivant une direction en même temps qu’une contraction suivant sa direction perpendiculaire, ces directions étant toutes deux perpendiculaires à (Ox3). Les fréquences des modes propres de vibration sont déterminées à partir des conditions aux limites imposées à la sphère, une contrainte nulle à la surface d’une sphère libre par exemple. Si l’on considère le mode de respiration, qui a sa seule composante radiale non nulle, on aboutit à l’équation [Verma(1999)] est le rayon de la sphère, J0 et J1 les fonctions de Bessel de première espèce d’ordre 0 et 1 respectivement. Dans l’équation précédente, la fréquence propre est contenue dans la grandeur adimensionnée ω vl R : elle est donc proportionnelle à l’inverse de la taille de la sphère. Ce résultat, valable également pour les autres modes sphéroïdaux, constitue la loi d’échelle des fréquences des modes propres.
Discontinuité de surface : le cylindre et le prisme
Dans cette section nous analysons de façon qualitative les modes de vibration d’objets tels que le cylindre et le prisme droit à base hexagonale, appelé prisme par commodité. Cette dernière forme a un intérêt tout trouvé : il s’agit de la forme des nanoparticules que nous étudions expérimentalement. Le cylindre constitue un bon intermédiaire an de passer des modes de vibration de la sphère à ceux du prisme. Considérons donc dans un premier temps une forme cylindrique de rapport d’aspect un. Le mode de respiration est présenté sur la gure 2.1. L’allure de ce mode est très diérente de celle de la sphère : il ne s’agit plus d’une succession de contractions/dilatations isotropes. Son allure est également diérente de celle de la respiration d’un cylindre inniment long, laquelle consiste en une respiration purement radiale et isotrope d’une section droite du cylindre [Hu(2003)]. Ces diérences sont dues à l’eet du rapport d’aspect : pour un cylindre inniment long, il est possible de résoudre l’équation de Navier en séparant les variables r et z. Une des solutions trouvées est alors le mode de respiration. Dès que l’on diminue le rapport d’aspect du cylindre et que la hauteur de celui-ci devient comparable à son diamètre, la séparation des variables n’est plus possible ce qui rend la résolution de l’équation de Navier beaucoup plus dicile analytiquement. Néanmoins, lorsque l’on allonge le cylindre à diamètre constant, le mode présenté sur la gure 2.1 s’identie bien à la respiration d’un cylindre inniment long en terme de déplacements et de fréquence. Les modes présentés sur les gures 2.2, 2.3 et 2.4 pourraient être qualiés de modes issus du mode quadrupolaire de la sphère : ils consistent tous en une contraction suivant une direction cependant que le plan perpendiculaire à cette direction s’étire, et inversement. Si la direction privilégiée est selon l’axe (Oz) du cylindre, ou une droite contenue dans le plan (xOy), ou bien encore une bissectrice de l’angle xOz d nous appelons le mode respectivement le mode extensionnel (gure 2.2), le mode peanut (gure 2.3) et le mode S (gure 2.4). Remarquons que les modes peanut et S sont chacun deux fois dégénérés, à cause de l’isotropie dans le plan (xOy).
Introduction |