Conception, simulation et réalisation d’un micro
actionneur à base de matériau énergétique pour
l’actionnement microfluidique
Les microsystèmes fluidiques : historique et applications
Dès les années 90, la réduction des dimensions attendue de l’intégration microsystème des dispositifs d’analyse biologique et chimique ouvre des perspectives avantageuses : – l’utilisation des technologies microélectroniques pour la réalisation de systèmes de détection, permet la fabrication massive de microdispositifs et va réduire les coûts d’élaboration. – L’utilisation de faibles quantités de fluides et réactifs va réduire les coûts d’opération, en exploitant le fait que de faibles volumes de fluide peuvent être suffisants pour réaliser certaines analyses: chimie clinique (≈10-15l), immunoessais pour le diagnostic et la compréhension des maladies (≈10-9l), analyses d’ADN (≈10-3l), analyse des cellules unitaires (≈10-12l), séparation des espèces par électrophorèse (≈10-12l à 10- 6 l), analyse du glucose pour le contrôle du diabète (≈10-6l). – Les délais d’analyses pourront être réduits et la sensibilité des mesures accrues .
La situation dans le monde
Même si les premiers systèmes faisant intervenir un élément microfluidique sont proposés dès les années 80 par la Recherche Académique, comme par exemple le chromatographe à gaz miniaturisé dans une puce de quelques centimètres de coté , c’est à partir des années 90 qu’un réel travail de miniaturisation commence dans les domaines de la chromatographie, des systèmes de séparation par électrophorèse, des pompes électroosmotiques, des mélangeurs, etc. . Ainsi les premiers véritables systèmes microfluidiques intégrant de multiples fonctions ont commencé à voir le jour dans les années 90. On peut citer, par exemple, la puce à trois fonctions : mélange de réactifs, réaction enzymatique et séparation de Jacobson et al, et un système de titrage de solutés aqueux, intégrant des mélangeurs et des amplificateurs capables de faire de la digestion enzymatique et de l’électrophorèse de Burns et al . Au début des années 2000, les premiers « laboratoires sur puce » commerciaux permettant d’identifier des fragments d’ADN, différents bio-objets comme des virus par séparation électrophorétique et les protéines. Dans cette catégorie, il faut citer le système Agilent 2100 Bionalyzer, commercialisé à partir de 1999 par la société Agilent Technologies : les échantillons à analyser sont très petits (entre 1 et 4µl) et l’analyse ne dure que 30 minutes (Figure 3a). Notons que, ces systèmes ont encore besoin d’un ordinateur relativement encombrant pour réaliser les traitements du signal, les analyses et la consultation des bases de données (Figure 3b), ce qui montre que tous les verrous technologiques d’intégration ne sont pas levés.
Plus récemment, des systèmes ont été commercialisés pour détecter le niveau de glucose dans le sang et contrôler le diabète. La société Abbott Point of Care Inc. commercialise son dispositif FreeStyle Lite™ (à partir de mai 2007) qui prélève une très faible quantité de sang de 0,3µl (une goutte comparable à la taille de la tête d’une épingle) et fait l’analyse en 5 secondes environ. Le système fait 7,6×4×2cm soit un volume d’environ 63cm3 (Figure 4)[15]. Figure 4. Système FreeStyle Lite™ pour le contrôle de la diabète La même société commercialise aussi le système i-STAT® (Figure 5a). Il s’agit d’un système d’analyse du sang à partir de faibles volumes prélevés, de 17µl jusqu’à 95µl. Le système utilise des cartouches jetables utilisables une seule fois. Les résultats des analyses sont donnés avec seulement 10 minutes d’analyse ce qui est extrêmement performant par rapport à des analyses classiques dans les laboratoires spécialisées qui peuvent prendre facilement une dizaine d’heures. A noter ici que les cartouches utilisent le principe d’un stockage de gaz comprimé. Quand les cartouches sont introduites dans le système d’analyse (Figure 5b), par action mécanique, une membrane éclate et libère le gaz qui pousse le fluide dans une canalisation pour permettre des analyses d’électrolytes, de chimie générale, des gaz et de l’hématologie. Les cartouches utilisés ont une surface d’environ 3×3cm, le système d’analyse fait 6,41×20,97×5,21cm avec un poids de 520g. Il faut une cartouche différente pour chaque analyse. Une amélioration possible du système, au delà de la réduction de ses dimensions, serait l’intégration de plusieurs analyses dans une seule cartouche ainsi que l’automatisation de l’actionnement. Ce système fonctionne avec une batterie de Lithium de 9V. [16]. D’autres systèmes microfluidiques commerciaux peuvent être trouvés [17], pour des applications comme la cristallisation de protéines, les immunoessais, l’administration de médicaments, les pompes d’infusion implantables, et autres systèmes non invasifs.
Rappel des activités du LAAS-CNRS dans le domaine de la microfluidique
Notre activité s’inscrit naturellement dans l’effort que le LAAS consacre aux microsystèmes fluidiques depuis les années 90s, dans le prolongement des travaux de pionniers des équipes de BERKELEY [19] sur le micro usinage du Silicium : – la première étape de cet effort a porté sur la définition d’une filière d’actionneurs dont les valves fluidiques sont intégrées sur Silicium. Cette option est illustrée par le projet européen BARMINT [20] que le LAAS a coordonné dans le milieu des années 90s et par le projet CNRS qui a suivi, intitulé MICROMED [21]. Le projet applicatif portait sur l’intégration d’une pompe doseuse pour le traitement médical continu de l’hypertension. Le système associant toute l’électronique, les capteurs et le traitement de signal. Le projet couvrait à la fois le développement d’une filière fluidique sur silicium a) b) et la mise au point d’un procédé d’assemblage 3D des différentes fonctions associées aux fonctions fluidiques. D’intéressants résultats ont été obtenus sur les procédés technologiques notamment mais le projet a rencontré dans l’intégration Silicium, des difficultés graves de « collages électrostatiques Si-Si » qui ont mis en sommeil cette filière monolithique Silicium. – La deuxième étape a correspondu à l’émergence des puces à ADN et à la volonté du CNRS de définir des approches alternatives à l’approche par photolithographie proposée par AFFYMETRIX . Deux projets parallèles ont été lancés au LAAS : l’un, sur la base de la mise au point de matrices d’éjecteurs fluidiques commandables, éjecteur par éjecteur, par A.M. GUE, l’autre sur la base de matrices de poutres commandables par C. BERGAUD [25]. – Actuellement, plusieurs groupes du laboratoire sont concernés par la microfluidique et de nombreux projets sont en cours qu’il s’agisse d’applications à la médecine, à la biologie ou à la chimie. Des applications pour la chimie ont, en particulier, vu le jour avec un accord entre le LAAS et le laboratoire de chimie du CNRS sur Toulouse. Cette activité, coordonnée au niveau du laboratoire par J. TASSELLI et A. MARTY , vise à réaliser des systèmes de micro réaction chimique et aussi à intégrer des puces en Si dans des systèmes microfluidiques (avec la collaboration de S. CHARLOT) . D’autres études ont été réalisées aussi en technologie microfluidique pour réaliser l’intégration de réseaux de canalisations 3D, sur des puces actives de capteurs (thèse de P. ABGRALL sous la direction de A. M. GUE). Ce travail se poursuit maintenant par la thèse de R. FULCRAND, sous la direction de A. BOUCABACHE. Plus récemment enfin, en collaboration avec le LETI, des études ont été mises en place, sur le contrôle des fluides à partir des polymères thermosensibles, notamment avec la participation de J. SUDOR . L’idée d’exploiter la filière des microsystèmes pyrotechniques pour actionner des fluides remonte aux activités de C. ROSSI [30] qui, pour la première fois, a proposé d’exploiter l’énergie stockée dans les matériaux énergétiques pour réaliser des fonctions mécaniques de puissance dans les microsystèmes. Cette proposition à été explorée dans plusieurs directions, par le laboratoire, durant ces dix dernières années : micro propulsion [31][32], actionnement mécanique , sécurité civile et militaire …. Notre travail de thèse s’inscrit dans cette continuité et aborde l’idée d’un actionneur pneumatique de liquides. Les avantages que nous essayons de mettre en avant sont : – la capacité de stockage des matériaux pyrotechniques et la disponibilité immédiate de l’énergie en cas de besoin, – l’énergie par gramme que l’on peut ainsi stocker pour réaliser des efforts mécaniques très intenses, – l’aptitude à l’intégration dans les microsystèmes, biopuces, laboratoires sur puces…
NOMENCLATURE |