Traitement de l’hypercholestérolémie familiale
Objectifs :L’objectif des mesures hypocholestérolémiantes est la prévention de la maladie CV athéroscléreuse. Elle est dite primaire quand les patients n’ont pas d’antécédent de maladie CV et elle est secondaire lorsque les patients ont déjà présenté un événement CV .
Selon les recommandations des sociétés savantes, les patients atteints d’HF sont considérés comme des patients à haut risque voire très haut risque CV s’ils présentent des facteurs de risque CV associés. En France, les dernières recommandations sur le taux de LDL-c cible par la Nouvelle Société Francophone d’Athérosclérose (NSFA) datent de 2013, avec pour objectifs : Un LDL-c < 1,6 g/L chez les patients âgés de moins de 20 ans, Un LDL-c au moins < 1,3 g/L au-delà de l’âge de 20 ans en prévention primaire, Un LDL-c < 1,0 g/L voire < 0,7 g/L si possible, chez les patients âgé de plus.
de 20 ans en prévention secondaire ou en association avec des facteurs de risque CV (diabète, tabagisme, high-density lipoprotein-cholesterol (HDL-c) < 0,40 g/l, hypertension artérielle, lipoprotéine a (Lp(a)) > 50 mg/dl, antécédents familiaux coronariens précoces) ou la présence de xanthomes tendineux, ou en absence de traitement jusqu’à l’âge de 40 ans ou ≥ 40 ans avec un mauvais contrôle de LDLc prolongé. Une réduction du taux de LDLc d’au moins 50% est acceptable si le patient n’a pas atteint l’objectif et qu’il est sous traitement hypocholestérolémiant maximal ; Un traitement de première ligne par une statine à dose maximale tolérée en association avec les mesures hygiéno-diététiques ; L’ézétimibe peut être associé à la statine si l’objectif n’est pas atteint ; Une trithérapie ou l’indication de LDL-aphérèse relève d’un recours spécialisé.
Des recommandations plus récentes de l’ESC de 2019 préconisent un objectif de : LDL- c < 0,7 g/L ou réduction de LDL-c ≥ 50% en prévention primaire; LDL-c < 0,55 g/L ou réduction de LDL-c ≥ 50% en prévention secondaire et/ou avec des facteurs de risque CV associés; Une alimentation adaptée chez les enfants de moins de 8-10 ans et LDL-c < 1,35 g/L après l’âge de 10 ans. L’ensemble des sociétés savantes s’accordent sur le fait qu’il faut dépister tôt pour traiter tôt.
Stratégies de dépistage et de soins
Médecins généralistes et soins primaires
Le système de santé actuel est basé sur des soins primaires au centre desquels se trouve la discipline de la médecine générale. La Wonca Europe (Société Européenne de Médecine générale) a défini la spécialité en 2002 comme étant « une spécialité clinique orientée vers les soins primaires ».
En France, un document officiel (associant la majorité des organisations professionnelles de la médecine générale) élaboré au sein de la mission interministérielle « Évaluation des compétences professionnelles des métiers de la santé » a défini les compétences que chaque futur médecin généraliste se doit d’acquérir, schématisé sous forme d’une marguerite des compétences . Un axe est consacré au dépistage et à la prévention individuelle et communautaire.
Issue de l’analyse d’une quinzaine de référentiels (métiers ou compétences) nationaux ou internationaux existant en médecine générale, la compétence liée à la prévention et au dépistage, en lien avec la réalisation d’objectifs de santé publique, était systématiquement retrouvée. Le médecin généraliste se trouve au cœur de la prévention et du dépistage des maladies, il est un pivot central pour l’amélioration de la santé des patients dans le système de soins . La relation entre le médecin généraliste et le patient permet de renforcer la prévention du développement des facteurs de risque évitables et l’information sur les facteurs de risque inévitables/acquis avec la promotion des facteurs protecteurs . La participation active du médecin généraliste renforce l’adhésion et la participation des patients à leur santé et peut jouer le rôle d’informateur, d’acteur et de relais auprès des autres professionnels de santé.
Il connaît le patient dans sa globalité bio-psycho-sociale ce qui lui donne un avantage important pour l’accompagner dans la prévention et le dépistage de ses facteurs de risque. La communication avec les autres professionnels de la santé est un outil essentiel dans l’organisation des soins et la prise en charge optimale du le patient.
Stratégies de dépistage
L’identification efficace de l’HF nécessite la coordination de plusieurs stratégies de dépistage. Le renforcement de la détection précoce est un rôle central pour les soins primaires. Des modèles de soins efficaces nécessitent des équipes multidisciplinaires avec des réseaux de patients, des registres recueillant et centralisant les données des patients et des programmes de recherche . Le plus grand registre français de personnes atteintes d’HF est le registre REFERCHOL mis en place en 2015 comptant environ 20 centres avec plus de 6000 patients. Plusieurs pays ont également mis en place des registres nationaux (tel que l’Australie, la Norvège…), l’objectif étant de créer un environnement de recherche collaboratif sur la pathologie.
Afin d’améliorer le dépistage de l’HF, plusieurs modèles de parcours de soins et de lignes directrices ont été proposés pour sensibiliser et guider les praticiens .
Plusieurs approches de dépistage en soins primaires ont été décrites :
Le dépistage systématique ou universel : la population est non sélectionnée, le dépistage est considéré comme généralisé à l’ensemble de la tranche d’âge considérée (par exemple le dépistage néonatal obligatoire); Le dépistage opportuniste : la population est recrutée lors d’un recours aux soins (hospitalisation, médecine du travail, visite médicale…) ; Le dépistage en cascade : dépistage des membres de la famille d’un cas connu (ou index) ; Le dépistage ciblé ou sélectif : dépistage génétique des patients à haut risque CV.
Le dépistage en cascade parait être le plus rentable d’un point de vue bénéfices/coûts mais l’utilisation de stratégies mixte semble être nécessaire .
Peu importe l’approche de dépistage à adopter, la sensibilisation de la population générale et des professionnels de santé reste une étape essentielle.
Inhibiteurs de PCSK9
Ce sont des anticorps humanisés qui agissent en inhibant la PCSK9 et entrainent une augmentation de la disponibilité des récepteurs au LDL-c au niveau du foie et donc de la diminution du taux de LDL-c sanguin circulant .
Plusieurs études ont également montré une réduction significative du taux de Lp(a) de façon dose dépendante et corrélée au pourcentage de réduction de LDL-c, proportionnelle au taux de Lp(a) de base . Les inhibiteurs ont un effet synergique en association aux statines.
L’Agence Européenne du Médicament (EMA) et la Food and Drug Administration (FDA) ont autorisé la mise sur la marché en 2015 de l’Alirocumab (PRALUENT) à 75 mg, 150 mg et 300 mg par voie sous cutanée et de l’Evolocumab (REPATHA) à 140 mg par voie sous cutanée toutes les deux semaines ou 420 mg une fois par mois.
Une des barrières d’accès à ces nouveaux traitements est le prix, avec un prix d’environ 236 euros pour un stylo de PRALUENT et 218 euros pour le REPATHA avec une prise en charge par la sécurité sociale de 65%.
Depuis le 15 décembre 2020, la prise en charge par l’assurance maladie des inhibiteurs de PCSK9 est subordonnée à un accord préalable pour toute initiation annuelle par un médecin spécialiste en endocrinologie-diabète-maladies métaboliques, cardiologie ou médecine interne ; le renouvellement de traitement infra-annuel n’est pas restreint et est donc ouvert aux médecins généralistes.
Les indications de remboursement en France sont :
En cas d’HF :
L’Alirocumab est recommandé chez les patients âgés de plus de 18 ans avec une HFhe et avec une indication de LDL-aphérèse (régime hygiéno-diététique et un traitement hypocholestérolémiant maximal toléré avec LDL-c > 3 g/l en prévention primaire ou LDL-c > 2 g/l en prévention secondaire);
L’Evolocumab est recommandé chez les patients âgés de plus de 12 ans avec une HFho en association à d’autres traitements hypocholestérolémiants, et chez les patients adultes présentant une HFhe insuffisamment contrôlée par un traitement optimal et nécessitant une prise en charge par LDL-aphérèse.
Ils sont également récemment remboursés :
Chez les patients avec antécédent de syndrome coronarien aigu récent de moins d’un an et insuffisamment contrôlés (LDL-c ≥ 0,7g/l) malgré un traitement hypocholestérolémiant optimal comprenant au moins une statine à la dose maximale tolérée pour l’Alirocumab;
En association à un traitement hypocholestérolémiant optimal chez les patients adultes avec une HF ou dyslipidémie mixte, en prévention secondaire chez les patients à très haut risque CV (antécédent d’IDM, AVC non hémorragique,AOMI symptomatique) et non contrôlé (LDL-c ≥ 0,7g/l) malgré un traitement optimal comprenant au moins une statine à dose maximale tolérée pour l’Evolocumab.
Parcours de soins : DECHOL13
L’amélioration de la qualité de la prise en charge de patients atteints d’une maladie chronique telle que l’HF, passe par de bonnes pratiques professionnelles, une promotion du parcours de soins comprenant différentes compétences professionnelles, un développement d’une meilleure coordination d’interventions professionnelles et d’actions de prévention et d’échanges d’informations entre tous les acteurs impliqués.
L’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM), le service de Nutrition, Maladies métaboliques, Endocrinologie du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Marseille, l’Union Régionale des Professionnels de Santé (URPS) libéraux de Provence Alpes Côte d’Azur (PACA), l’Association Nationale des Hypercholestérolémies Familiales (ANHET) et les URPS Infirmiers, Biologistes et Pharmaciens PACA, en collaboration avec la NSFA, ont mis en place au cours de l’année 2017 dans les Bouches du Rhône, un programme de structuration du parcours de patients atteints d’HF. L’objectif est d’améliorer le dépistage des patients, le traitement et le suivi, dès le diagnostic avec une coordination interprofessionnelle ville-hôpital.
Le programme a été structuré autour des actions de :
Formation des médecins libéraux et hospitaliers, biologistes, infirmiers et pharmaciens , Mise en place d’alertes liées aux résultats biologiques des patients , Facilitation de l’adressage du médecin traitant vers le spécialiste hospitalier référent , Réalisation des examens des patients en ville ou à l’hôpital de jour spécialisé du CHU la Conception ,
Réalisation d’un diagnostic génétique, puis information des patients et des familles par un conseiller en génétique dans le but de favoriser le dépistage et le diagnostic de leurs proches, Suivi commun des patients entre les praticiens concernés grâce au déploiement de fiches de liaisons et de fiches retours après les recommandations de prise en charge issues des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP).
Ce parcours de soins s’est articulé autour de réunions de formations afin de sensibiliser les professionnels de santé avant la mise en place du programme. Des documents d’information sur la pathologie et le parcours au décours des réunions ont été distribués à l’ensemble des médecins de l’URPS; ils étaient également téléchargeables sur le site des URPS.
Dans la période de décembre 2016 à février 2017, six réunions de sensibilisations et de formation pluriprofessionnelles (Médecins, pharmaciens, biologistes, infirmières) ont été réalisées dans 3 villes différentes (Aix en Provence, Marseille, Martigues).
Les biologistes devaient alerter les prescripteurs lorsqu’un taux de LDL-c’était supérieur à 1,9 g/L et un message d’alerte figurait sur les résultats de biologie du patient : « une hypercholestérolémie familiale génétique est possible : il est important de montrer ce bilan à votre médecin ».
Les pharmaciens pouvaient questionner les patients sur leur traitement et leur remettre une brochure sur l’HF.
Les infirmières pouvaient être sollicités pour accompagner le patient, aider à la lecture de l’analyse du bilan biologique et réorienter vers le médecin traitant s’il y avait une anomalie.
Lorsqu’un médecin suspectait un patient d’être atteint d’HF, une fiche de liaison était à remplir avec l’adressage en consultation spécialisée à un médecin référent à l’hôpital la Conception dans le service de Nutrition, Maladies métaboliques, Endocrinologie. Si le patient était suspect d’avoir une HF, la réalisation de l’analyse génétique (envoyée à Paris dans le laboratoire de génétique de l’hôpital La Pitié Salpêtrière) et le dosage de la Lp(a) étaient réalisés au décours de la première consultation en fonction de la décision du médecin spécialiste. Les examens complémentaires dont le bilan CV étaient soit réalisés en ville, soit organisés en hôpital de jour. Une fois les résultats des analyses génétiques obtenus et les examens complémentaires réalisés, une RCP était organisée pour discuter du dossier de chaque patient, incluant un médecin référent AP-HM, un conseiller en génétique et d’autres médecins spécialistes du parcours de soins.
Table des matières
I. Introduction
a) L’hypercholestérolémie familiale
1. Généralités et épidémiologie
2. Diagnostic
3. Traitement de l’hypercholestérolémie familiale
4. Stratégies de dépistage et de soins
b) Parcours de soins : DECHOL13
c) Objectifs de l’étude
II. Matériel et méthodes
a) Type de l’étude
b) Population de l’étude
c) Questionnaire
d) Recueil des données
e) Analyses statistiques
III. Résultats
a) Diagramme de flux
b) Objectif primaire
1. Description de la population des médecins
2. Description des patients
3. Découverte du parcours de soins DECHOL13
4. Satisfaction de la fiche d’adressage
5. Accessibilité à une consultation spécialisée DECHOL13
6. Réception et satisfaction du contenu de la fiche RCP
7. Amélioration des connaissances et de la pratique
c) Objectifs secondaires
1. Comparaison des médecins participants et non participants
2. Evaluation des recommandations des RCP
3. Modifications du bilan lipidique
4. Dépistage en cascade
IV. Discussion
a) Limites de l’étude
b) Forces de l’étude
c) Analyse des résultats
d) Perspectives
V. Conclusion
VI. Références bibliographiques
VII. Table des illustrations
VIII. Annexes
IX. Liste des abréviations