Stratégies vers la rémission du VIH
Infection par le VIH
Histoire et découverte du virus
En juin 1981, le Center for Disease Control (CDC) à Atlanta (USA) est informé de l’utilisation anormale de pentamidine pour le traitement de cinq jeunes homosexuels atteints d’une pneumonie grave à Pneumocystis carinii,associée à une immunodépression sévère . Quelques semaines plus tard, un nouvel article décrit la recrudescence, toujours chez de jeunes homosexuels, de sarcomes de Kaposi. Ce syndrome sera tout d’abord appelé « gay syndrome » ou « gay cancer ». Mais des observations montrent néanmoins que ce syndrome ne touche pas exclusivement les homosexuels. Il se manifeste également chez les hémophiles, les hétérosexuels, les usagers de drogues par injection intraveineuse. La transmission de ce que l’on nommera dorénavant syndrome de l’immunodéficience acquise (SIDA) se fait donc par voie sexuelle, sanguine et materno-fœtale. Au vu de ces modes de contamination, l’hypothèse d’une origine virale est privilégiée . A l’initiative de Willy Rozenbaum, infectiologue français, se constitue, fin 1982 à l’Institut Pasteur, un groupe de travail composé, entre autres, de Françoise Barré Sinoussi, Jean Claude Chermann et Luc Montagnier, dont les recherches au sein de l’unité d’oncologie virale concernent les rétrovirus connus pour provoquer des immunodéficiences. A partir d’une biopsie ganglionnaire de patient atteint d’une lymphoadénopathie généralisée, les chercheurs mettent en évidence une activité transcriptase inverse, caractéristique des rétrovirus dans des cultures de cellules ganglionnaires dont des lymphocytes T CD4+, cibles apparentes du virus . Ils observent également l’effet cytopathique du virus sur les lymphocytes T CD4+. Le virus est ensuite observé pour la première fois au microscope électronique. L’équipe de l’Institut Pasteur, appela ce nouveau virus « Lymphadenopathy Associated Virus », soit LAV puis il fut désigné en 1986 par le comité international de taxonomie des virus : « Virus de l’Immunodéficience Humaine 1» (VIH-1).
Epidémiologie
En 2017, on comptait dans le monde 36,9 millions de personnes vivant avec le VIH et 21,7 millions de personnes avaient accès à la thérapie antirétrovirale. De plus, 1,8 millions de 18 personnes sont devenues nouvellement infectées par le VIH et 940 000 personnes sont décédées de maladies liées au SIDA. L’Afrique subsaharienne est la région la plus touchée avec 25,7 millions de personnes vivant avec le VIH en 2017 et près de 60% d’entre elles sont des femmes. Il compte également plus de deux tiers des nouvelles infections par ce virus dans le monde. En France, 6 000 personnes ont découvert leur séroposivité VIH en 2016. Depuis la découverte du virus, le VIH a fait plus de 36 millions de morts dans le monde. Le SIDA reste un problème majeur de santé publique particulièrement dans les pays en voie de développement malgré des traitements antirétroviraux qui améliorent la qualité de vie des patients et la mise en place de moyens de prévention. En effet l’accessibilité au traitement antirétroviral dans les pays en voie de développement et particulièrement en Afrique subsaharienne reste encore difficile, les moyens de prévention tels que le préservatif qui protège de l’infection ne sont pas forcément acceptés d’un point de vue culturel par les hommes. Les jeunes femmes d’Afrique subsaharienne sont particulièrement exposées au VIH du fait d’un manque d’accès à l’éducation et de la difficulté à imposer à leur partenaire un moyen de protection. C’est dans ce contexte que l’organisation International Partnership for Microbicides (IPM) a développé un moyen de prévention qui permet aux femmes de se protéger : un anneau vaginal microbicide à base de dapivirine, inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse. Cet anneau offre une protection significative. En effet deux essais cliniques, Aspire [3] et Ring Study [4] ont conclu que cet anneau entraine, une réduction du taux d’infection de 27 % et 31 %.Une diminution encore plus importante a été observée dans deux autres études, Hope et Dream, avec respectivement une diminution du risque de 53,6% et 53,6%. Un autre moyen de prévention qui montre une efficacité de 86% en prévention est la prophylaxie pré exposition (PrEP) [5]. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d’éliminer le risque d’infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. La conception d’un vaccin prophylactique est une priorité de la recherche sur le VIH. En effet il n’y a à ce jour pas de vaccin prophylactique. Ceci est dû à une grande diversité du virus qui compte de nombreux sous types circulants dans le monde mais également des variants viraux, « quasi espèce » au sein d’un même individu.
Caractères virologiques : 1. Classification et sous types
Le 18 juillet 1986, un nouveau virus fut identifié chez des patients venant d’Afrique de l’ouest et nommé virus de l’immunodéficience humaine 2 (VIH-2) [6]. Ce virus est morphologiquement proche du VIH-1 mais génétiquement différent. Le VIH-2 se rencontre essentiellement en Afrique subsaharienne occidentale (Figure 1). Il est moins pathogène que le VIH-1 avec une progression plus lente vers le stade SIDA et une plus faible transmissibilité. Les VIH-1 et VIH-2 sont proches des virus simiens SIV (simian immunodeficiency virus) retrouvés chez les primates non humains . L’arbre phylogénétique représente les relations d’évolution entre les différentes lignées. Il a été construit avec la méthode du maximum de vraisemblance à partir d’un alignement protéique de séquences SIV/VIH dans Env. L’échelle représente 0,02 substitution par site. Les SIV des mangabeys enfumés d’Afrique de l’Ouest sont à l’origine du VIH-2. D’après « Origine du VIH, une réussite émergentielle » L. Etienne, M. Peeters, 2010. 20 Il a été mis en évidence que le virus de l’immunodéficience humaine présente une grande diversité génétique. Notamment pour le VIH-1, le plus présent dans le monde, 4 sous-groupes ont été identifiés: groupe M (Major), O (Outlier), N (non M non O) et P, dernier identifié en 2009 [9].Ces différents groupes proviennent de passages inter-espèces distincts. La transmission à l’homme serait liée à des morsures de singes infectés, notamment lors de la chasse, ou par la consommation de viande. Les groupes M et N sont liés aux SIV de chimpanzés alors que les groupes O et P sont liés à un virus de gorille (Figure 2). Les VIH-1 du groupe M sont responsables de la pandémie et comprennent 9 sous types ou clades (A, B, C, D, F, G, H, J, K). De plus, de nombreuses formes recombinantes entre ces sous types (circulating recombinant forms, CRF) ou entre formes recombinantes sont apparues du fait de la co-infection de patients par des VIH-1 de sous types distincts. Le sous type B est responsable de l’épidémie dans les pays industrialisés et il prédomine dans le monde et cause plus de 50% des cas d’infections.
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