La maladie de Parkinson
Histoire de la maladie : La maladie de Parkinson fut découverte en 1817 par un célèbre médecin britannique, Sir James Parkinson, qui la décrit à ce moment-là comme « paralysie agitante ». Ce ne sera qu’en 1872, qu’un neurologue français Jean Martin Charcot, après l’étude des tremblements et de la paralysie engendrés, lui donnera son nom.
En 1920, un an après la découverte du processus lésionnel dans la substance noire, il apparait de nombreux cas de syndromes parkinsoniens dus à l’encéphalite épidémique.
Dans les années 60, la mise en évidence de l’effondrement du taux de dopamine chez ces patients a permis le développement de la dopathérapie qui a vu son effet diminué au cours du temps. Depuis, grâce à de nombreux travaux et aux progrès médicaux notamment en neurochimie, de nouveaux traitements se sont suivis commençant par les inhibiteurs de la décarboxylase, puis depuis une quinzaine d’années, par les agonistes dopaminergiques.
Anatomo-physiopathologie :Le locus niger ou substance noire du cerveau est composé de nombreuses cellules nerveuses, les neurones dopaminergiques. La dopamine de ces cellules module par la synapse nigro-striée le fonctionnement des ganglions de la base qui jouent un rôle dans l’élaboration des actes moteurs. Ces ganglions sont nécessaires à l’initiation des fonctions motrices par déclenchement des programmes moteurs et par l’exécution automatique de ceux-ci. Les noyaux gris centraux peuvent ainsi faciliter les mouvements intentionnels et inhiber les mouvements indésirables.
La dégénérescence progressive de ces neurones dopaminergiques dans la substance noire et au niveau du striatum notamment s’accompagne d’une perturbation des réseaux neuronaux. Cette disparition est également associée à la présence de corps de Lewy, marqueur évocateur de la maladie. Ces marqueurs sont des amas pathogènes formés par l’α-synucléine, protéine naturellement présente chez les sujets sains mais retrouvée sous une forme remaniée chez les malades.
L’atteinte de cette voie correspond à l’origine de la maladie de Parkinson et entraine donc un déficit du contrôle de certains mouvements.
La dysphagie parkinsonienne
La dysphagie est un symptôme moteur secondaire de la maladie de Parkinson. Elle se définit comme un trouble de la déglutition se caractérisant par des difficultés à avaler et/ou une toux lors du passage des aliments de natures diverses. Il en existe de deux types : la dysphagie oropharyngée et la dysphagie œsophagienne.
Signes évocateurs et risques :Touchant plus de 80% des patients parkinsoniens, ce symptôme reste une priorité à diagnostiquer.
La sémiologie dysphagienne est très variable et diffère pour chaque personne. Les fausses routes alimentaires correspondent au principal signe évocateur, et se manifestent par un passage d’un aliment dans les voies aériennes. Ces mauvais acheminements peuvent être silencieux et ne pas être décelable ou à contrario ressenties par le patient et fragilisant les voies respiratoires. D’autres signes présents lors des repas favoriseront le constat de la dysphagie tels que l’existence de toux régulière, de reflux nasaux, fuites alimentaires buccales et des douleurs lors de la déglutition. Le maintien prolongé des aliments dans la bouche, une durée de repas excessives, le changement de voix et la présence de restes après la déglutition sont des situations évocatrices.
Il existe également des symptômes non spécifiques au repas. Nous retrouvons la perte de poids, des épisodes de fièvres récurrents et inexpliqués ou encore une pneumopathie chronique qui suis une infection due à des aliments passés dans les voies pulmonaires.
Chaque signe est important à prendre en compte car il entraine de nombreux risques. La dénutrition, la pneumonie d’inspiration ou l’étouffement sont les principaux risques, d’autant plus qu’à terme ils peuvent entrainer la mort.
L’insuffisance d’apports nutritionnels aura un impact sur l’état général et l’activité du malade. Des carences alimentaires ainsi qu’une déshydratation feront leur apparition lorsque des catégories de nourriture vitale ne seront plus consommées. Les autres risques causeront des problèmes respiratoires et un arrêt de nutrition, dangereux pour sa santé.
Origines et causes :La déglutition est une activité fonctionnelle qui dure une vingtaine de seconde en moyenne divisée en trois temps.
Lorsque la nourriture est mise en bouche, une étape de préparation orale est nécessaire. Elle est composée de la mastication et de la salivation pour permettre l’obtention d’une consistance adéquate. La langue s’occupe ensuite du temps de transport orale vers le pharynx.
Ce processus se termine par un temps de passage pharyngien puis œsophagien avec l’arrivée des aliments dans l’estomac.
Le réflexe de déglutition se passe au niveau du deuxième et troisième temps avec la fermeture de la cavité nasale et de la trachée faisant suite à l’élévation du voile du palais, du larynx et la descente de l’épiglotte. Nous pouvons distinguer deux catégories de troubles présents à tous les temps de la déglutition : des défauts de transport et des défauts de protection respiratoire.
En effet, la perte de gestion de quantité de salive (diminution ou excès) ainsi qu’une faiblesse des muscles masticateurs rendra difficile leur travail sur la consistance, sur le contrôle du bolus et le transport oral. L’initiation et le déclenchement des différents temps sont souvent différés (akinésie/bradykinésie). Le transport du pharynx vers l’œsophage sera aussi limité à cause de la déficience des muscles de la gorge (hypokinésie). Il y aura ainsi une difficulté à la propulsion les aliments.
Le dernier facteur causal concernant le transport est une mauvaise coordination motrice entrainant un désordre dans le processus.
Pour la protection des voies aériennes, les défauts concernent le mécanisme d’expulsion mais surtout la fermeture des voies, et notamment de la cavité buccale antérieure et postérieure, du rhino-pharynx et de la glotte. Le dysfonctionnement des sphincters supérieurs et inférieurs œsophagiens n’aurait pas de corrélation chez le parkinsonien. Ces causes ont donc pour origine un vieillissement des parois digestives avec un relâchement et un affaiblissement moteur principalement.
L’Expiratory Muscle Strength Training (EMST)
Découverte :L’EMST a été développé il y a environ 20 ans à l’Université de Floride. Il a d’abord été le fruit d’une collaboration entre des physiothérapeutes, des neurologues et des ingénieurs, mais a ensuite impliqué des professeurs et chercheurs clés en orthophonie, le Dr Christine Sapienza, le Dr John Rosenbek et le Dr Michelle Troche.
Cette technique a été développé à l’origine pour améliorer la force respiratoire expiratoire, mais on a découvert par la suite qu’il renforçait également certains muscles des voies respiratoires supérieures. Ce système a été testé à l’origine sur un groupe d’élèves du secondaire, garçons et filles. L’objectif était de voir si les jeunes jouant des instruments de musique nécessitant une forte puissance expiratoire, pouvaient augmenter leur pression d’air expiré en s’entraînant à la puissance avec l’EMST150 ™. Tous les étudiants qui ont reçu une formation avec l’EMST150 ™ ont connu une augmentation de la force expirée.
À partir de là, l’équipe de recherche a continué à appliquer la formation à un large éventail de personnes et a constaté que l’appareil augmentait la pression d’air expiré, ou la force, chez tous les participants. L’équipe EMST150 ™ s’est donc aperçue qu’en augmentant la puissance expiratoire, diverses fonctions respiratoires de base telles que la toux, la déglutition et la parole étaient également améliorées. Certains des résultats les plus gratifiants proviennent du travail avec des personnes âgées et des personnes souffrant de troubles neurologiques. L’université de Floride a largement soutenu et continue de soutenir la recherche impliquant l’EMST. Des études, ne datant que de 2019, sont en cours d’achèvement dans d’autres pays comme l’Australie et un récent examen des recherches réalisées a révélé des avantages continus pour les patients atteints de dysphagie parkinsonienne.
Description de l’appareil :Le dispositif concernant l’EMST est un appareil breveté, facile de transport divisé en deux catégories : seuil de pression et résistance. La différence entre l’entraînement au seuil de pression et l’entraînement à la résistance traditionnelle est que l’entraînement au seuil de pression ne permet pas de modifier la mécanique du flux d’air.
Cet outil thérapeutique est constitué d’une valve réglable, d’un ressort avec soupape et d’un embout buccal. L’appareil utilisé pour le travail de renforcement des muscles expirateurs est l’EMST avec seuil de pression. Il est composé d’une soupape de décharge calibrée, unique, qui crée une charge isométrique sur les muscles fonctionnels de la toux, de la déglutition et de la respiration. Ce dispositif calibré est composé d’une valve interne à ressort avec un cadran externe réglable permettant d’ajuster la quantité de pression, qui varie de 0 à 150 cmH2O. La détermination de la charge du seuil de pression est basée sur la pression expiratoire maximale (MEP) d’une personne, qui est obtenue par un manomètre de pression. La charge seuil est alors fixée à 75% de cette MEP et après chaque semaine d’entraînement, ce processus est répété pour déterminer une nouvelle charge de seuil adapté au patient.
Mécanisme de l’EMST
Activités physiologiques
L’EMST possède une action précise sur les muscles expirateurs (abdominaux et intercostaux internes), les muscles des cordes vocales, du pharynx, du larynx, du palais mous et sous cutanés de la région cervicale. Avec le temps, sous l’effet du vieillissement ou d’une maladie, ces muscles squelettiques perdent leur fonction.
Cependant, ils ont la capacité à se différencier et à s’adapter à d’autres fonctions c’est ce que l’on appelle la neuro-plasticité. Cette adaptation n’est rendue possible qu’après l’exposition à de nouveaux stimuli, ici la génération d’une force comme la force respiratoire.
Ce traitement est l’une des rares thérapies de la dysphagie qui intègre les principes de réentrainement et de la plasticité neurale, essentiels à une rééducation réussie sur le long terme. La neuro-plasticité s’appuie sur des principes tels que l’intensité, la répétition, la contrainte (ou surcharge) ou encore la spécificité tous intégrés dans l’EMST et en accord avec les principes pour la prise en charge d’un patient parkinsonien.
Pour ce faire, les muscles souhaités sont sollicités au-delà de leur activité habituelle afin de favoriser les adaptations neuromusculaires désirées et d’améliorer leur fonctionnement. De plus, la progression et la réitération des mouvements justifient les principes de surcharge et de répétition. Les muscles squelettiques ont des fibres de contraction lentes et rapides. Les fibres rapides génèrent une force mais sont sujettes à la fatigue tandis que les fibres lentes se contractent lentement mais résistent à la fatigue. L’entraînement de la force musculaire respiratoire, en général, stimule les fibres de contraction rapides, ce qui entraîne un élargissement musculaire. Ceci est similaire à l’expérience qui se produit lorsque l’on soulève des poids pour renforcer les muscles d’autres parties de notre corps.
Actions sur la dysphagie parkinsonienne
Le réentrainement expiratoire va permettre de renforcer les muscles essentiels à la déglutition pour redonner une activité efficiente et faciliter la réorganisation du processus.
Les taux d’intensité sont conçus pour augmenter la force musculaire, et les groupes musculaires ciblés peuvent ainsi bénéficier d’une meilleure capacité de génération de force.
C’est l’amélioration de la capacité de génération de force qui agit comme une plateforme pour améliorer la respiration et la production de toux. L’utilisation de la RMST, et en particulier de l’EMST, pour améliorer la fonction de déglutition repose sur l’entraînement de la musculature laryngo-pharyngée.
En effet, l’augmentation de la génération de force musculaire sub-mandibulaire entraîne une augmentation du mouvement du complexe hyopharyngien, ce qui a pour effet d’augmenter la protection des voies respiratoires.
L’EMST aurait donc pour but de prolonger l’amplitude d’activation du groupe musculaire supra-hyoïdien qui participe au déplacement antéro-supérieur de l’os hyoïde et du larynx et à l’ouverture du sphincter supérieur de l’œsophage. Par ailleurs, l’augmentation du volume pulmonaire a été associé à une augmentation de l’activité musculaire de l’adducteur laryngé cricoaryténoïdien, muscle nécessaire à une amélioration de la fermeture du plan glottique.
Enfin, l’effet sur la toux est multiple. Il participerait à une diminution des dystonies, de l’akinésie et à un recrutement moteur. La toux efficace aurait également un besoin réduit de temps et de volume lors de la phase inspiratoire préalable. Cette technique de rééducation indirecte est centrée sur la composante balistique de l’expiration, similaire à celle de la toux.
Table des matières
1. INTRODUCTION
1.1 LA MALADIE DE PARKINSON
1.1.1 Histoire de la maladie
1.1.2 Anatomo-physiopathologie
1.1.3 Causes, facteurs de risques et facteurs préventifs
1.1.4 Symptomatologie
1.1.5 Traitements
1.1.6 Évolution et échelles
1.2 LA DYSPHAGIE PARKINSONIENNE
1.2.1 Signes évocateurs et risques
1.2.2 Origines et causes
1.2.3 Bilans et évaluations
1.2.4 Prise en charge thérapeutique
1.3 L’EXPIRATORY MUSCLE STRENGTH TRAINING (EMST)
1.3.1 Découverte
1.3.2 Description de l’appareil
1.3.3 Objectifs du traitement
1.3.4 Mécanisme de l’EMST
1.3.4.1 Activités physiologiques.
1.3.4.2 Actions sur la dysphagie parkinsonienne
1.3.5 Précautions et contre-indications
2. METHODE
2.1 CRITERES D’ELIGIBILITE DES ETUDES POUR CETTE REVUE
2.1.1 Type d’étude
2.1.2 Population et pathologie
2.1.3 Intervention
2.1.4 Comparateurs
2.1.5 Critères de jugement
2.2 METHODOLOGIE DE RECHERCHE DES ETUDES
2.2.1 Sources documentaires
2.2.2 Équation de recherche
2.3 METHODE D’EXTRACTION ET D’ANALYSE DES DONNEES
2.3.1 Méthode de sélection des études
2.3.2 Évaluation de la qualité méthodologique des études sélectionnées
2.3.3 Extraction des données
2.3.4 Méthode de synthèse des résultats
3. RESULTATS
3.1 DESCRIPTION DES ETUDES
3.1.1 Diagramme de flux
3.1.2 Synthèse des études inclues
3.2 RISQUE DE BIAIS DES ETUDES INCLUES
3.2.1 Présentation des biais
3.2.2 Évaluation des biais
3.3 EFFETS DE L’INTERVENTION SUR LES CRITERES DE JUGEMENT
3.3.1 Effets de l’EMST sur la dysphagie parkinsonienne
3.3.1.1 Étude de Troche M.S. et al, 2010
3.3.1.2 Étude de Claus I. et al, 2021
3.3.1.3 Étude de Sapienza C. et al, 2011
3.3.1.4 Étude de Byeon, 2016
3.3.1.5 Étude de Reyes A. et al, 2018
3.3.2 Effet de l’EMST sur la toux réflexe et volontaire
3.3.2.1 Étude de Sapienza et al, 2011
3.3.2.2 Étude de Reyes et al, 2018
4. DISCUSSION
4.1 ANALYSE DES PRINCIPAUX RESULTATS
4.1.1 Analyse sur la dysphagie parkinsonienne
4.1.1.1 Le P-A score
4.1.1.2 La mesure de la Pression Expiratoire Maximale (MEP)
4.1.1.3 Les techniques d’exploration visuelle (VFS et FEES)
4.1.1.4 Les questionnaires et temps de déglutition
4.1.2 Analyse sur la toux reflexe et volontaire
4.2 INTERPRETATION DES RESULTATS
4.2.1 Résultats observés
4.2.2 Pondération des données
4.3 APPLICABILITE DES RESULTATS EN PRATIQUE CLINIQUE
4.4 QUALITE DES PREUVES
4.5 BIAIS POTENTIELS DE LA REVUE
4.6 OUVERTURE
5. CONCLUSION
5.1 IMPLICATION POUR LA PRATIQUE CLINIQUE
5.2 IMPLICATION POUR LA RECHERCHE
6. BIBLIOGRAPHIE
7. ANNEXES