Introduction à la simulation des grandes échelles des équations de Navier-Stokes compressibles 

Télécharger le fichier original (Mémoire de fin d’études)

Introduction à la simulation des grandes échelles des équations de Navier-Stokes compressibles

Objectif du chapitre

L’objectif de ce chapitre est de présenter les bases de la simulation des grandes échelles pour les équations de Navier-Stokes compressibles. La section 3.2 explique la modélisation des écoulements compressibles par les équations de Navier-Stokes. La section 3.3 résume de façon très succincte les éléments de la simulation des grandes échelles qui sont nécessaires pour les calculs décrits dans les chapitres 13 et 14.

Introduction aux équations de Navier-Stokes compressibles

Une application importante de la méthode des volumes finis est l’approximation des équa-tions de Navier-Stokes qui gouvernent la dynamique de fluides compressibles. La modélisation suit l’approche de la mécanique des milieux continus. Cette approche permet une description satisfaisante de la dynamique des fluides si le libre parcours moyen des particules dans le fluide est beaucoup plus petit que l’échelle de l’écoulement en considération. On peut alors décrire l’état du fluide en un point de l’espace par des grandeurs moyennées comme la densité ̺ (x, t), la vitesse v (x, t) et des variables thermodynamiques telles que la pression p (x, t), la tempéra-ture T (x, t), la densité de l’énergie totale etot (x, t) et la densité de l’énergie interne eint (x, t).
Des références pour le matériel présenté ici sont par exemple les livres [11], [34] et [25].
Les équations de Navier-Stokes sur un domaine physique Ω ⊂ Rd se formulent à partir des principes de la conservation de la masse, de la quantité de mouvement et de l’énergie du fluide. Soit O ⊂ Ω un volume suffisamment régulier dont la surface ∂Ω admet une normale ν (x) en chaque point x ∈ ∂Ω en dehors d’un ensemble de mesure nulle. Pour alléger l’écriture des formules, on omet dans la suite la dépendance des inconnues par rapport à x et t. Si l’on suppose O fixe, le principe de conservation de la masse du fluide contenu dans O s’écrit comme d ̺ dx = − ∂O ̺ (ν v) dσ (3.2.1) où dσ est l’élément surface du bord ∂O de O. Dans la suite, on néglige les forces volumiques. Le principe de conservation de la quantité de mouvement est alors donné par l’équation d ̺v dx = − ∂O (ν v) v̺ dσ − ∂O νp dσ + ∂O ν τ dσ (3.2.2) dt O où τ (x, t) est le tenseur des contraintes visqueuses. Le principe de conservation de l’énergie se formule comme d ̺etot dx = − ∂O (ν v) etot̺ dσ − ∂O (ν v) p dσ + ∂O ν τ v dσ − ∂O ν qth dσ (3.2.3) dt O où qth (x, t) est le flux de chaleur. La densité d’énergie totale est la somme de la densité d’énergie interne et de la densité d’énergie cinétique etot (x, t) = eint (x, t) + 12 v (x, t) 2 .
Sous l’hypothèse d’une régularité suffisante de la solution, il est possible de formuler les équations (3.2.1), (3.2.2) et (3.2.3) comme le système d’équations aux dérivées partielles ∂̺ + ∇ (̺v) = 0 (3.2.4)
∂ (̺v) + ∇ (̺v ⊗ v) + ∇p − ∇ τ = 0 (3.2.5) ∂ (̺etot) (3.2.6) + ∇ (̺vetot + pv − τ v + qth) = 0 .
Il faut compléter les trois équations (3.2.4), (3.2.5) et (3.2.6) par des relations thermodyna-miques et mécaniques qui décrivent le comportement du fluide. Dans un sens strict, les relations thermodynamiques sont uniquement valables pour un système à l’équilibre. L’hypothèse adop-tée ici est que le fluide contenu dans un petit volume autour de chaque point x ∈ Ω peut être considéré comme étant localement à l’équilibre. On formule donc toutes les relations thermody-namiques pour les quantités qui dépendent de l’espace et du temps comme la pression p (x, t), la température T (x, t) et la densité de masse ̺ (x, t).
Les écoulements d’air considérés dans les chapitres 13 et 14 permettent d’utiliser l’hypothèse des gaz parfaits. Pour un gaz parfait, la pression p (x, t), la température T (x, t) et la densité de masse ̺ (x, t) sont reliées par la formule p (x, t) = Rm ̺ (x, t) T (x, t) Rm = 8, 314472 K mol est la constante universelle des gaz parfaits et Mgaz est la masse molaire du gaz considéré, c’est-à-dire la masse d’une mole du gaz exprimée en kg. La constante Rm est reliée à la constante de Boltzmann kB = 1, 3806 × 10−23 J et le nombre d’Avogadro NA = 6, 022 × 1023 1 mol par Rm = NAkB .
Puisque la masse molaire de l’air sec vaut kg Mair = 0, 0289644 mol , la constante spécifique de l’air sec est rair = Rm = 287, 058 J . K kg Mair
La loi d’état de l’air sec sous l’hypothèse d’un gaz parfait est alors donnée par p (x, t) = rair̺ (x, t) T (x, t) .
En général, l’énergie interne eint du fluide dépend de la pression p et de la température T . Bien que Cedre prenne en charge la modélisation des gaz réels, il suffit pour les calculs effectués dans le cadre de cette thèse d’adopter l’hypothèse des gaz parfaits, pour lesquels l’énergie interne ne dépend que de la température. L’air est principalement un mélange de gaz diatomiques composé 78% d’azote N2 et à 21% d’oxygène O2. D’après la théorie cinétique des gaz, la densité d’énergie interne d’une mole de gaz parfait diatomique est égale à eint (x, t) = 5 Rm T (x, t) = cVT (x, t) 2 Mgaz où cV est la capacité thermique massique à volume constant. La capacité massique à pression constante cp d’un gaz parfait peut être déterminée à partir de la capacité massique à volume constant selon la formule cp = cV + Rm = 7 Rm 2 Mgaz Mgaz où la deuxième égalité est vraie pour un gaz idéal diatomique.
Ensuite, il est nécessaire d’exprimer le tenseur des contraintes visqueuses en fonction des autres variables. Pour les écoulements d’air simulés dans les chapitres 13 et 14, on considère l’air comme un fluide newtonien. Cela signifie que le tenseur des contraintes visqueuses est donné par (x, t) = λL (∇ v (x, t)) δ(2) + 2 L ∇ ⊙ v (x, t) où ⊙ est le produit tensoriel symétrique défini par (5.2.19) et δ(2) est le tenseur identité défini par (5.2.23). Les grandeurs λL et L sont respectivement le premier et le deuxième coefficient de Lamé. Le deuxième coefficient de Lamé est aussi appelé viscosité dynamique ou viscosité moléculaire. Dans la suite, on adopte l’hypothèse de Stokes 2 L , (3.2.7) λL=− 3 ce qui donne le tenseur des contraintes visqueuses τ (x, t) = L 2 ∇ ⊙ v (x, t) − 2 (∇ v (x, t)) δ(2) . (3.2.8)
La viscosité dynamique L n’est pas constante. Aux températures considérées, L dépend uni-quement de la température. Cette dépendance peut être modélisée par la formule de Sutherland L = ref T 3/2 Tref + 110, 4 K (3.2.9) Tref T +110,4K où Tref = 273, 15 K et ref = 1, 716 10−5 kg . La viscosité cinématique νcin s’obtient par la division de L par la densité ms νcin = L .
Il reste encore à définir le flux de chaleur qth (x, t). La loi de Fourier permet de l’exprimer comme fonction de la température qth (x, t) = −κth∇ (T (x, t)) (3.2.10) où la grandeur κth est appelée la conductivité thermique. La conductivité thermique caractérise le comportement des matériaux lors du transfert thermique par conduction. Elle est étroitement liée à la diffusivité thermique αth par la formule αth = κth ̺cp où cp est la chaleur spécifique à pression constante. La diffusivité thermique caractérise la facilité avec laquelle la chaleur diffuse dans le matériau. Les valeurs de la viscosité dynamique et de la diffusivité thermique sont comparées entre elles au moyen du nombre de Prandtl Pr = νcin = Lcp . αth κth

Éléments de la simulation des grandes échelles

Cette section présente les éléments de la simulation des grandes échelles (SGE) qui sont nécessaires pour modéliser la turbulence dans les simulations d’écoulement décrites dans les chapitres 13 et 14. La description donnée ici suit les lignes du livre [92] qui est un ouvrage de référence pour la simulation des grandes échelles dans le cas des écoulements incompressibles. L’adaptation des modèles au cas des écoulements compressibles reprend l’approche utilisée dans [75] et [17]. Le terme anglais pour simulation des grandes échelles est large eddy simulation, abrégé LES.
Considérons la simulation d’un écoulement de fluide. Pour obtenir un résultat très proche de la réalité physique, la simulation doit résoudre toutes les échelles de la dynamique de l’écou-lement. Cela signifie que les échelles de la discrétisation, c’est-à-dire le diamètre des mailles et le pas de temps, doivent être petites par rapport à toutes les échelles de l’écoulement. Notons Lsc l’échelle de la dynamique qui porte le plus d’énergie et ηsc l’échelle de Kolmogorov, c’est-à-dire la plus petite échelle de la dynamique de l’écoulement. Pour un écoulement turbulent homogène et isotrope, il est possible d’estimer le rapport entre Lsc et ηsc par Lsc 3 = O Re 4 ηsc où Re est le nombre de Reynolds, cf. [92]. Pour simuler l’écoulement dans un cube de volume L3sc , il faut donc simuler O Re9/4 degrés de liberté. Une estimation similaire vaut pour le rapport des échelles temporelles.
l’heure actuelle, les ordinateurs sont encore trop faibles pour pouvoir simuler un tel nombre de degrés de liberté. Dans les écoulements qui intéressent l’aéronautique, les nombres de Reynolds peuvent atteindre des ordres de grandeur de 108. Une solution consiste à simuler uniquement une partie des degrés de liberté de façon directe. L’interaction entre ces degrés de liberté et ceux qui ne sont pas simulés directement doit être prise en compte par un modèle. Cela se fait en général par l’ajout de termes spécifiques dans les équations qui gouvernent les degrés de liberté simulés. Ces termes décrivent alors uniquement une moyenne statistique de l’action des degrés de liberté négligés.
La simulation des grandes échelles réduit le nombre de degrés de liberté par une séparation entre grandes et petites échelles à l’aide d’une longueur de coupure Δ. Dans l’espace spectral, la longueur de coupure correspond à une fréquence de coupure. Les fréquences inférieures à la fréquence de coupure sont résolues par la simulation alors que les fréquences supérieures sont modélisées.
Pour effectuer explicitement cette séparation des échelles, on applique un filtre aux équations de Navier-Stokes. Pour des raisons de simplicité, on suppose ce filtre isotrope et homogène, c’est-à-dire indépendant de la position et de l’orientation dans l’espace. Dans l’espace physique, un filtre homogène et isotrope peut être représenté par un opérateur de convolution. La partie résolue d’une variable φ (x, t) est donnée par G x − x′, t − t′ φ x′, t′ dt′ dx′ (3.3.1) φ (x, t) = R3 −∞ où G est le noyau de convolution du filtre. Dans l’espace spectral, les transformés de Fourier obéissent à la relation
(k, ω) = G (k, ω) φ (k, ω) .
La partie non résolue de φ est donnée par φ′ (x, t) = φ (x, t) − φ (x, t) .
Afin de pouvoir manipuler les équations de Navier-Stokes après filtrage, on exige que le filtre préserve les constantes φ0 =φ0, qu’il soit linéaire φ (x, t) + ψ (x, t) = (φ + ψ) (x, t) et qu’il commute avec la dérivation ∂φ ∂φ (3.3.4) (x, t) = (x, t) , ∇φ (x, t) = ∇φ (x, t) . ∂t ∂t
Il faut noter que le filtrage décrit ci-dessus n’est pas adapté aux équations de Navier-Stokes compressibles car il donne un nombre important de termes inconnus. Pour adapter la simulation des grandes échelles aux écoulements compressibles, on poursuit ici l’approche utilisée dans [75] et [17]. ̺ (x, t)
On commence par introduire un filtrage pondéré par la masse volumique qui s’inspire d’une démarche proposée par A. Favre et al., cf. [49]. Pour ce filtre, appelé filtre de Favre ou opérateur
de Favre, la partie résolue d’une variable φ (x, t) est notée φ (x, t) et définie par φ (x, t) = (̺φ) (x, t) . (3.3.5)
La partie non résolue de la variable φ (x, t) est définie par φ” (x, t) , φ (x, t) − φ (x, t) .
La partie non résolue φ” (x, t) s’appelle également la partie sous-maille de φ (x, t) car elle re-présente les échelles inférieures à la longueur de coupure Δ.
L’opérateur de Favre satisfait (3.3.2) et (3.3.3) mais ne satisfait plus (3.3.4). On peut consi-dérer ce filtrage comme un changement de variable qui est bien défini car ̺ (x, t) > 0. Son intérêt réside dans le fait qu’il donne des équations dont la structure est proche des équations de Navier-Stokes, cf. [75].
Afin d’obtenir les équations de Navier-Stokes filtrées, on applique d’abord le filtrage ho-mogène défini par (3.3.1) aux équations de conservation de la masse (3.2.4), de la quantité de mouvement (3.2.5) et de l’énergie (3.2.6). Les termes immédiatement calculables sont placés dans le membre de gauche et les termes sous-maille à modéliser dans le membre de droite. On omet la dépendance des variables par rapport à x et t pour rendre les formules moins encombrantes. L’équation de conservation de la masse devient, avec le changement de variables de Favre (3.3.5)
∂̺ + ∇ ( v) = 0 . (3.3.6) ∂t
L’équation de la quantité de mouvement pour la simulation des grandes échelles s’écrit sous la forme ∂ (̺v) + ∇ (̺v ⊗ v) + ∇p − ∇ τ = −a1 + a2 (3.3.7) où les termes dans le membre de droite sont donnés par a1 = ∇ v ⊗ v − v ⊗ v (3.3.8) a2 = ∇ ( −τ) . (3.3.9)
Ces termes s’appellent termes sous-maille car ils représentent l’influence des parties sous-maille sur les échelles résolues.
Le terme a1 contient le tenseur τ (sgs) , v ⊗ v − v ⊗ v (3.3.10) qui s’appelle tenseur sous-maille. La décomposition de Leonard, cf. [77], permet d’écrire τ (sgs) sous la forme τ (sgs) = v ⊗ v − v ⊗ v + v” ⊗ v + v ⊗ v” + v” ⊗ v” . (3.3.11)
Le premier tenseur dans le membre de droite de (3.3.11) s’appelle tenseur de Leonard et décrit les interactions entre les grandes échelles. Il est directement calculable car il dépend uniquement des parties résolues de v et ̺. Le deuxième tenseur dans le membre de droite de (3.3.11) s’appelle tenseur des contraintes croisées et le troisième est le tenseur de Reynolds qui décrit l’interaction entre les échelles sous-maille.
Le terme a2 est composé du tenseur des contraintes visqueuses des grandes échelles τ , défini
par τ , L T 2 ∇ ⊙ v − 2 (∇ v) δ(2) , (3.3.12) et du tenseur τ issu du filtrage du tenseur des contraintes visqueuses τ . Il est généralement admis que la viscosité dynamique L et le gradient de la vitesse v sont décorrélés, ce qui permet d’écrire le tenseur τ sous la forme τ = L (T ) 2∇ ⊙ v − 2 (∇ v) δ(2) . (3.3.13)
Le tenseur δ(2) dans (3.3.12) et (3.3.13) est le tenseur (5.2.23) dont les composantes sont le symbole de Kronecker.
Pour établir une équation pour la conservation de l’énergie des grandes échelles, on adopte la notion d’énergie calculable, proposée par Vreman dans [111] et définie par ̺etot , 1 + 1 v v (3.3.14) p ̺ γ − 1 2 pour un gaz parfait à cp constant. Les grandeurs filtrées de la pression p, de la densité de masse et de la température T sont reliées par la loi d’état filtrée = rair T . (3.3.15) p ̺
La dérivation en temps de (3.3.14) donne ∂̺etot 1 = 1 ∂p + (v v) ∂̺ + v ∂v . (3.3.16) ∂t γ − 1 ∂t 2 ∂t ∂t
Il est possible de reformuler les deux derniers termes dans le membre de droite de (3.3.16) en utilisant (3.3.6) 1 ∂v 1 ∂v ∂̺ ∂̺ ∂̺
(v v) + ̺ v = − (v v) + v v + v ̺ = 2 ∂t ∂t 2 ∂t ∂t ∂t 1 ∂ ( v) 1 ∂ ( v) ∂̺ ̺ ̺ (3.3.17) = − (v v) + v = (v v) ∇ ( ̺ v) + v . 2 ∂t ∂t 2 ∂t
L’utilisation de (3.3.17) dans (3.3.16) donne une équation d’évolution pour ̺etot ∂̺etot 1 ∂ ( v) 1 ∂p ̺ (3.3.18) = + v + (v v) ∇ (̺v) . ∂t γ − 1 ∂t ∂t 2
L’insertion de l’équation de la quantité de mouvement (3.3.7) dans (3.3.18) permet alors d’établir l’équation d’évolution de l’énergie calculable ∂̺etot (3.3.19) + ∇ v ̺etot + p − ∇ (τ v) + ∇qth = −b1 − b2 − b3 + b4 + b5 + b6 − b7 ∂t où τ est donné par (3.3.12) et qth est le flux de chaleur calculable
qth = −κth∇T . (3.3.20)
La somme dans le membre de droite de (3.3.19) regroupe les termes sous-maille donnés par
1 ∇ ( b1 = pv − p v) γ − 1
b2 = p∇ v − ∇ v p
b3 = ∇ τ (sgs) v
b4 = τ (sgs) • (∇ ⊗ v)
b5 = τ • (∇ ⊗ v) − τ • (∇ ⊗ v)
b6 = ∇ (τ v − τ v)
b7 = ∇ (q − q) .
Afin de pouvoir résoudre le système des équations (3.3.6), (3.3.7) et (3.3.19), il est nécessaire de modéliser les termes sous-maille a1, a2 et b1à b7.
Le terme le plus important est le terme a1 qui est le seul terme présent dans le cas des écoulements incompressibles. Il contient le tenseur sous-maille τ (sgs) qui n’est pas directement calculable car il contient les échelles non résolues v” de la vitesse v. Un classement introduit par Sagaut [92, p. 72] permet de distinguer deux catégories de modèles.
Les modèles structurels essaient d’approcher la structure du tenseur τ (sgs). Dans cette approche, l’hypothèse de modélisation consiste à exprimer v” ou τ (sgs) en fonction des échelles résolues v, ce qui nécessite une bonne connaissance de la structure des petites échelles. La dynamique des petites échelles doit être indépendante de l’évolution des échelles résolues ou dépendre de façon suffisamment simple de cette dernière.
Au lieu d’approcher le tenseur τ (sgs), les modèles fonctionnels tentent de modéliser l’action des échelles sous-maille v” sur les échelles résolues v par l’introduction de termes dissipatifs ou dispersifs dans l’équation de la quantité de mouvement. Dans cette approche, l’hypothèse de modélisation consiste essentiellement à exprimer ∇ τ (sgs) en fonction des échelles résolues v. Cette approche nécessite une bonne connaissance des mécanismes d’échange interéchelle. Il faut que la dynamique des petites échelles soit universelle et indépendante des échelles résolues de l’écoulement.
Les calculs effectués dans le cadre de cette thèse reposent sur l’approche fonctionnelle.
Le cadre naturel pour l’approche fonctionnelle est la théorie de la turbulence développée par Kolmogorov, cf. [72]. Le processus de transfert d’énergie entre les différentes échelles de la turbulence peut être présenté sous une forme simplifiée, la cascade de Kolmogorov.
L’écoulement moyen transmet de l’énergie cinétique aux grosses structures tourbillon-naires.
L’énergie cinétique est ensuite transférée d’une échelle supérieure vers l’échelle immé-diatement inférieure par des phénomènes d’étirement tourbillonnaire.
Aux plus petites échelles, la viscosité moléculaire dissipe l’énergie cinétique sous forme de chaleur.
La cascade de Kolmogorov donne lieu à la notion de viscosité sous-maille qui repose sur l’hypo-thèse que le mécanisme de transfert d’énergie des échelles résolues vers les échelles sous-maille ressemble aux mécanismes moléculaires de diffusion. Cela permet de représenter le tenseur sous-maille τ (sgs) comme un tenseur de contraintes visqueuses τ (sgs) = (sgs) 2 ∇ ⊙ v − 2 (∇ v) δ(2) (3.3.28) où la viscosité sous-maille L(sgs) doit être modélisée.
Un exemple important de modèle sous-maille est le modèle de Smagorinsky [92, p. 107] qui exprime la viscosité sous-maille sous la forme (sgs) 2 (3.3.29) = CSΔ 2 (∇ ⊙ v) • (∇ ⊙ v  où ∇ ⊙ v est le tenseur des taux de déformation, Δ est la longueur de coupure et CS est une constante. Sous l’hypothèse que le spectre d’énergie de l’écoulement reste constant dans le temps [92, p. 98] la constante CS s’évalue à CS ≈ 0,18.
Pour les besoins de la simulation, Δ peut être identifié au diamètre des mailles. Les équations (3.3.28) et (3.3.29) permettent donc de modéliser le terme a1 en fonction des échelles résolues. Vreman et al., cf. [112] ont effectué des simulations numériques directes d’une couche de mélange pour évaluer l’importance des différents termes sous-maille. Le résultat indique qu’il est possible de négliger la contribution du terme a2 par rapport à celle de a1. Parmi les termes b1 b7 dans l’équation de l’énergie, les termes b1, b2 et b3 sont jugés prépondérants et les termes b4 à b7 peuvent donc être négligés.
Dans le modèle de Smagorinsky, le terme b3 devient directement calculable grâce aux équations (3.3.28) et (3.3.29). L’introduction d’une conductivité thermique sous-maille κ(sgs)th et l’ana-logie de Prandtl, cf. [112, 76], permettent de modéliser la somme de b1 et b2 comme b1 + b2 = −∇ κ(sgs)th∇T .
La conductivité thermique sous-maille κ(sgs)th peut être calculée au moyen du nombre de Prandtl sous-maille Pr(sgs) par la formule κ(sgs) = L cp th Pr(sgs) où cp est la chaleur spécifique à pression constante. Dans le cadre de cette étude, le nombre de Prandtl sous-maille a été fixé à Pr(sgs) = 0, 9 qui est la valeur de cette constante pour les modèles RANS, cf. [17].
Le modèle de Smagorinsky a été implémenté dans Cedre dans le cadre de la thèse de N. Bertier [17]. Concernant la présente étude, le modèle de Smagorinsky a servi pour les calculs tridimensionnels décrits dans les chapitres 13 et 14.

Table des matières

Chapitre 1. Introduction 
1.1. Contexte et objectif
1.2. Étude de la stabilité et précision du schéma MUSCL
1.3. Étude de la montée en ordre du schéma
1.4. Plan de l’étude
Chapitre 2. Bilan bibliographique du schéma MUSCL 
2.1. Objectif du chapitre
2.2. L’approche de Godounov
2.3. L’approche de Van Leer
2.4. Les schémas TVD
2.5. Les schémas ENO
2.6. Extension aux maillages non structurés
2.7. Méthodes apparentées : DG, SVM, RD et GRP
2.8. Positionnement de la présente étude
Chapitre 3. Introduction à la simulation des grandes échelles des équations de Navier-Stokes compressibles 
3.1. Objectif du chapitre
3.2. Introduction aux équations de Navier-Stokes compressibles
3.3. Éléments de la simulation des grandes échelles
Chapitre 4. La chaîne de calculs CEDRE 
4.1. Domaines d’application et modèles physiques
4.2. Méthodes numériques
4.3. Aspects logiciels
Chapitre 5. Introduction à la géométrie des maillages non structurés 
5.1. Objectif du chapitre
5.2. Notations mathématiques
5.3. Notion de maillage non structuré général
5.4. Définition des voisinages
5.5. Notation géométrique allégée
5.6. Propriétés du produit tensoriel symétrique
5.7. Tenseurs géométriques en maillage non structuré
5.8. Développement de Taylor des moyennes de cellule
5.9. Identités géométriques en maillage non structuré
5.10. Calcul avec des tenseurs symétriques
5.11. Bilan du chapitre
Chapitre 6. Discrétisation spatiale par la méthode des volumes finis 
6.1. Objectif du chapitre
6.2. Formulation générale de la méthode des volumes finis
6.3. Amélioration de la précision des méthodes des volumes finis
6.4. Bilan du chapitre
Chapitre 7. Étude de la reconstruction locale en maillage non structuré 
7.1. Objectif du chapitre
7.2. Définition de reconstructions précises par une reproduction de polynômes
7.3. Formulation explicite des conditions de consistance
7.4. Interprétation de la consistance comme approximation des dérivées
7.5. Définition des reconstructions conservatives
7.6. Formulation matricielle des conditions de consistance
7.7. Minimisation de la norme de la reconstruction
7.8. Interprétation algébrique des reconstructions consistantes
7.9. Analyse de deux méthodes particulières pour la reconstruction linéaire par morceaux
7.10. Étude numérique
7.11. Bilan du chapitre
Chapitre 8. Étude de méthodes de reconstruction compactes 
8.1. Objectif du chapitre
8.2. Analyse de la méthode des moindres carrés couplés
8.3. Analyse de la méthode des corrections successives
8.4. Élargissement des voisinages de reconstruction par des méthodes itératives
8.5. Étude numérique
8.6. Bilan du chapitre
Chapitre 9. Étude des intégrales de surface des flux 
9.1. Objectif du chapitre
9.2. Intégration par des fonctions de base
9.3. Intégration par formule de quadrature
9.4. Bilan du chapitre
Chapitre 10. Étude de la stabilité en maillage non structuré général 
10.1. Objectif du chapitre
10.2. Construction des schémas semi-discrets
10.3. Notions de stabilité asymptotique
10.4. Analyse de la stabilité du schéma d’ordre un
10.5. Analyse de la stabilité du schéma d’ordre deux : le cadre général
10.6. Propriété minimisante de la méthode des moindres carrés
10.7. Conclusions pratiques de l’étude théorique pour le schéma d’ordre deux
10.8. Généralisation de l’étude aux schémas d’ordre trois et quatre
10.9. Étude numérique
10.10. Bilan du chapitre
Chapitre 11. Caractérisation et évaluation des erreurs numériques en maillage non structuré général 
11.1. Objectif du chapitre
11.2. Définition de l’équation modifiée d’un schéma MUSCL semi-discret
11.3. Étude numérique en dimension deux
11.4. Bilan du chapitre
Chapitre 12. Reconstruction monotone en maillage non structuré 
12.1. Objectif du chapitre
12.2. Présentation d’un critère de monotonie : le principe du maximum
12.3. Interprétation géométrique du critère de monotonie
12.4. Algorithmes approchés pour la limitation directionnelle
12.5. Étude numérique
12.6. Résumé des méthodes de limitation existantes dans CEDRE
12.7. Bilan du chapitre
Chapitre 13. Simulation des grandes échelles d’un écoulement subsonique au-dessus d’une cavité profonde 
13.1. Objectif du chapitre
13.2. Résumé de l’étude expérimentale
13.3. Description des calculs
13.4. Résultats de l’étude numérique
13.5. Bilan du chapitre
Chapitre 14. Simulation des grandes échelles d’un jet chaud supersonique 
14.1. Objectif du chapitre
14.2. Résumé de l’étude expérimentale
14.3. Description des calculs
14.4. Résultats de l’étude numérique
14.5. Bilan du chapitre
Chapitre 15. Conclusion 
15.1. Synthèse
15.2. Perspectives
Annexe A. Étude détaillée de la reconstruction des polynômes de degré un, deux et trois
A.1. Objectif du chapitre
A.2. Étude des reconstructions linéaires
A.3. Étude des reconstructions quadratiques
A.4. Étude des reconstructions cubiques
Annexe B. Étude détaillée de la stabilité en dimension un
B.1. Objectif du chapitre
B.2. Construction du schéma semi-discret en dimension un
B.3. Analyse de stabilité du schéma d’ordre deux en dimension un
Bibliographie 
Index

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *