Etude des états finals à deux bosons Z dans le canal leptons-neutrinos dans l’expérience CMS auprès du LHC au CERN
De la création à l’observation
Si le gars a vraiment cherché pour trouver ça, il doit vachement se paumer dans le métro ! F. Le Grand Collisionneur de Hadrons (LHC) est le plus grand anneau de collision existant. Cet accélérateur est situé à l’Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire (CERN) à la frontière Franco-Suisse. Le LHC permet de réaliser des collisions proton proton et des collisions de noyaux de plombs ionisés 1 . Situé à une centaine de mètres sous la surface terrestre, quatre expériences principales, ALICE, ATLAS, CMS (Compact Muon Solenoid) et LHCb utilisent les données fournies par le LHC. ATLAS et CMS sont deux expériences généralistes optimisées pour la recherche du boson de Higgs et de physique au- delà du Modèle Standard. LHCb est axé sur le secteur de la saveur et la violation de la symétrie CP et le boson de Higgs y est également recherché. ALICE étudie les états de matière dense dans des collisions plomb-plomb qui doivent produire un tas de matière similaire à celui présent dans les premiers instants de l’Univers. Les analyses présentées dans cette thèse ont été réalisées avec l’expérience CMS. On présente dans ce chapitre le LHC, le détecteur CMS ainsi que la reconstruction des particules dans de CMS et les outils de simulation utilisés.
Le Grand Collisionneur de Hadrons
Le LHC est constitué d’environ 9500 aimants (dont 1232 aimants dipolaires) formant un anneau de 27 km de circonférences par en 8 secteurs. Les aimants sont supraconducteurs et sont refroidis à partir d’hélium superfluide maintenu à une température de 1.9◦ K. Le champ magnétique nominal créé par ces aimants est de 8.33 T. Les deux faisceaux de protons circulent dans deux lignes distinctes mais proviennent de la même source [1]. Les protons utilisés dans les collisions sont produits par ionisation d’atomes d’hydrogène et sont immédiatement accessibles pour atteindre une énergie de 750 keV. L’injection de ces protons dans le LHC est réalisée avec un ensemble d’accélérateurs représenté sur la figure fig. 1.1 : – Un LINAC (LINear ACcelerator ) accélère les protons à une énergie de 50 MeV – Les protons sont injectés dans le Proton Synchrotron (PS) et rassemblés en paquets espacés de 25 ans. L’énergie atteinte en sortie du PS est de 26 GeV. 1. Seules les collisions proton-proton seront utilisées dans cette thèse. Les paquets sont acculés à 450 GeV dans le Super Proton Synchrotron (SPS) et sont assemblés par groupes de 4. Ils sont ensuite transférés dans le LHC. Cette séquence est répétée 12 fois pour former un train de paquets. Chaque groupe de paquets est séparé par un temps mort de 1 µs, nécessaire pour ouvrir et fermer les injecteurs magnétiques du SPS. Un deuxième temps mort d’environ 3 µs est inséré entre deux trains de paquets pour permettre le changement de configuration des aimants afin de provoquer l’abandon des faisceaux. La structure des trains est illustrée sur la figure 1.2. Le terme de faisceau est couramment utilisé pour décrire l’ensemble des paquets circulant sur une ligne. Le nombre de trains/paquets présents dans un faisceau dépend de la période de prise de données. Figure 1.1 – Cha ́ıne actuelle d’injection des protons dans le LHC. La cha ̂ ıne future est également représentée en orange. Figure 1.2 – Disposition des paquets de protons formant un faisceau du LHC.
Le Grand Collisionneur de Hadrons
Les paramètres de la configuration nominale et des configurations utilisées en 2010 et 2011 sont inventoriés dans le tableau 1.1. On remarque que le nombre de protons par paquet atteint déjà la valeur nominale. Le temps de séparation entre les paquets a t fortement réduit entre 2010 et 2011 et le nombre de paquets a augmenté pour atteindre les 4/5e du nominal en juin 2011. conditions nominales 2010 juin 2011 séparation des paquets 25 ns > 150 ns 50 ns nombre de paquets 2808 < 368 1092 nombre de protons par paquets 1.15 × 1011 1.2 × 1011 1.2 × 1011 Table 1.1 – Configurations du LHC Des cavités radio-fréquence présentes dans le LHC permettent d’augmenter l’énergie des protons de 0.5 MeV par tour. L’énergie nominale d’un faisceau est de 7 TeV, mais suite à l’incident survenu en septembre 2008 [2], la limite de sˆuret sur le courant maximal injecté dans les dipˆoles a t abaisse et l’énergie maximale de chaque faisceau a t fixe à 3.5 TeV pour 2010 et 2011.
La luminosité instantané
L correspond au taux d’interactions proton-proton (pp) par unit de surface et est donne par la formule : L = γf kBN2 p εnβ ∗ F (1.1) o`u γ est le facteur de Lorentz des protons, f la frquence de rvolution des protons (11 kHz), kB le nombre de paquets et Np le nombre de protons par paquet (cf. tableau 1.1). L’mittance transverse du faisceau est note εn (valeur nominale 3.75 µm·rad). Ce paramètre est directement lié à la répartition spatiale des protons dans un paquet et à l’espace des phases autorisées pour ces mêmes protons. Le facteur F correspond au facteur de rduction de luminosit dˆu à l’angle de croisement (plus l’angle est lev plus la luminosit est faible) et β ∗ est la fonction bˆetatron (caractristique de la focalisation des faisceaux, exprime en mètre) au point d’interaction. Le β ∗ nominal est de 0.55 m. La bonne focalisation des faisceaux a permis d’atteindre une valeur β ∗ = 1.5 m en 2011, seulement un an et demi après le dbut du fonctionnement du LHC. Les définitions précises des paramètres sont présentes dans [3]. La luminosité instantanée en conditions nominales est de 1034 cm−2 s −1 . Les valeurs de L en 2010 sont inférieures ou égales à 1 × 1032 cm−2 s −1 . Le pic de luminosité instantané enregistré en juin 2011 est de 1.27 ×1033 cm−2 s −1 . L’évolution de la luminosité instantanée et intégrale courant 2011 est représentée sur la figure 1.3. Après un remplissage du LHC, la luminosité instantanée décroît avec un temps caractéristique τ donné par : τ = N0 kbL0σppnip (1.2) 8 Chapitre 1. De la création à l’observation (a) (b) Figure 1.3 – Evolution courant 2011 de la luminosité (a) intégré (b) instantanée. 1.2. Le dtecteur CMS 9 o`u N0 est le nombre initial de protons prsents dans un paquet, L0 la luminosit instantane initiale, σpp la section efficace totale d’interaction proton-proton (∼ 110 millibarns) et nip le nombre de points d’interaction (gnralement entre 2 et 3 effectifs) [4]. Le temps de croissance en conditions nominales (L0 = 1034 cm−2 s −1 , deux expériences fonctionnant à haute luminosité, espacement des paquets à 25 ans) est estimé à environ 15 heures [4]. La luminosité instantanée décroît selon la formule L(t) = L0 (1 + t τ ) 2 (1.3) et le faisceau est généralement abandonné lorsque la luminosité instantanée a diminué de moitié.
Empilement
Plusieurs interactions proton-proton peuvent se produire pendant un même croisement de paquet. Ces interactions multiples (aussi nomm empilement) correspondent à des collisions inélastiques pp. Ces événements sont dits de biais-minimum et chaque interaction supplémentaire en plus du processus principal est appelé événement d’empilement. Le niveau d’empilement dépend de la configuration du LHC : fréquence de collision fc, nombre de protons par paquet, profil du faisceau, etc. Le nombre moyen d’interactions supplémentaires est donn par : µ = σpp × L/fc (1.4) Avec fc = 40 MHz (31.7 MHz effectifs en comptant les temps morts) et à luminosité nominale, le nombre moyen d’événements d’empilement par croisement de paquet est µ ≃ 25. Le nombre moyen d’événements d’empilement est mesuré à µ ≃ 1 en 2010 et µ ≃ 4.5 en juin 2011. On distingue l’empilement produit en même temps que le processus principal de l’empilement produit dans un croisement (ou plusieurs) précédant ou suivant le croisement enregistré. Le premier est appelé empilement en-temps et le deuxième hors-temps . L’empilement en-temps a des effets conséquents sur la plupart des analyses de physique réalisées au LHC, comme l’augmentation de l’activité présente dans le détecteur ou l’augmentation des fluctuations énergétiques. Même si les détecteurs ont une réponse rapide, les signaux associés à des particules mises hors-temps peuvent se superposer en partie aux signaux des particules mises en temps. Les formes des signaux sont alors modifiées et ne correspondent plus aux signaux des particules mises en temps, dégradant les performances du détecteur. Cet effet apparaît principalement lorsque le temps de séparation des paquets est petit.
Le détecteur CMS
Le détecteur CMS est une des deux expériences généralistes du LHC. CMS est situé dans la caverne du point d’interaction 5, à Cessy en France. Le terme Compact provient de la densité du détecteur (l’ensemble pèse 12500 tonnes pour un volume de 3800 m3 ). CMS contient un aimant solno¨ıdal qui délivre un champ magnétique de 3.8 T10 Chapitre 1. De la création à l’observation à l’intérieur du solo¨ıde et 1.9 T à l’extérieur. Des parties actives du détecteur sont intégrées dans les éléments de retour de champ externe. La grande intensité du champ magnétique est motivée par la précision des mesures des impulsions transverses des muons. Le détecteur CMS est composé de plusieurs sous-détecteurs disposés en couches cylindriques autour de l’axe du faisceau. Deux bouchons couvrent les parties avant et arrière du détecteur (fig. 1.4). Les sous-systèmes sont complémentaires entre eux et permettent la détection directe de la plupart des particules du Modèle Standard. Seuls les neutrinos sont identifiés indirectement par repérage d’énergie manquante. Figure 1.4 – Schéma du détecteur CMS Les limitations technologiques actuelles (temps de calcul, système de stockage de données) ne permettent pas d’enregistrer l’ensemble des événements produits à une fréquence de 40 MHz. Un système de déclenchement lié à l’ensemble des sous-détecteurs permet de réduire le flux de données à un taux d’acquisition de quelques centaines de Hertz. Les sous-systèmes et leurs finalités sont listés ci-dessous et sont ordonnés selon leur proximité avec l’axe du faisceau : – Le trajectographe, composé de senseurs en silicium : reconstruction des trajectoires (notes traces) des particules chargées. – Le calorimètre électromagnétique formé de cristaux scintillants de PbWO4 : mesure des dépôts d’énergie électromagnétique (photons, lectrons). – Le calorimètre hadronique, alternance de couches de scintillateurs en plastique et de laiton : mesure des dépôts d’énergie hadronique. – Le spectromètre à muon, composé de détecteurs gazeux : détection et reconstruction des trajectoires des muons. Chaque sous-système est décrit plus en détail par la suite, après la description des repères géométriques de CMS. Compte tenu de la place importante du calorimètre électromagnétique dans cette thèse, le chapitre 2 lui sera entièrement dédié.
Géométrie de CMS
La géométrie du détecteur CMS est cylindrique autour de l’axe de circulation des faisceaux. Dans un repère cartésien, cet axe est déterminé comme l’axe z. L’axe x est dirigé vers le centre de l’anneau du LHC et l’axe y vers la surface de la Terre. Le plan x – y est communément appelé plan transverse et les variables physiques (comme l’impulsion d’une particule) projetées dans ce plan sont dites transverses . Le système de coordonnées cylindrique associes (r, φ, z) o`u r est la coordonnée radiale dans le plan x − y, φ l’angle azimuthal (φ = 0 si la direction d’une particule est orienté selon l’axe x) et z l’axe du faisceau. On définit également θ l’angle polaire mesuré à partir de l’axe z. Le système de coordonnées utilisé pour déterminer la direction d’une particule est η − φ o’u η est la pseudo-rapidité de cette particule, définie par : η = − ln(tan(θ 2 )) (1.5) La pseudo-rapidité est une approximation de la rapidité y = 1 2 ln(E + pz Z − pz ) valide pour une particule ultra-relativiste. Cette variable est utilisée car une distribution différentielle selon η est invariante par translation le long de l’axe z. Deux sections séparées sont apparentes dans CMS. La partie centrale est appelé tonneau et couvre des régions typiques de pseudo-rapidité |η| . 1.5. Les deux régions à plus haute pseudo-rapidité sont appelées bouchons et ferment les faces latérales du détecteur.
Le trajectographe
Le trajectographe couvre une région de pseudo-rapidité |η| < 2.5 et est composé de couches (disques) de senseurs dans le tonneau (bouchons). Les premières couches de senseurs actifs sont situées à 4 cm de l’axe du faisceau et les dernières à 110 cm. Dans des conditions de luminosité nominales, le flux de traces dans CMS est important (107 traces par seconde pour r = 10 cm) et une très fine granularité du trajectographe est nécessaire pour reconstruire précisément les traces proches du point d’interaction. L’occupation des senseurs diminue pour des rayons plus élevés et la granularité peut alors être moins fine. Trois régions sont définies, en fonction du rayon r. Des technologies différentes sont employées pour chacune d’elles : – Des détecteurs à pixels de silicium (surface 100×150µm2 ) forment le trajectographe interne. L’occupation à luminosité nominale est estimée à 10−4 par pixel et par croisement de paquets 2 . La zone de couverture des pixels est 4 cm < r < 20 cm. 2. L’occupation par senseur doit être de l’ordre de 1% pour atteindre les performances nominales . De fines bandes de silicium sont utilisées pour 20 cm < r < 55 cm. La surface d’une bande est de 10 cm × 80 µm et l’occupation est de 2 à 3%. – Pour 55 cm < r < 55 cm, les bandes de silicium deviennent plus larges (25 cm × 180 µm) et l’occupation atteint 1%. Les couches de pixels et les bandes de silicium sont présentes dans le tonneau et les bouchons (fig. 1.5). Trois couches de pixels (r = 4, 7, 11 cm) forment le Tracker Inner Barrel dans le tonneau et deux disques de pixels (z = 34.5, 46.5 cm) forment le Tracker Inner Disk dans les bouchons. Les bandes de silicium sont disposes en couches/disques croiss permettant la reconstruction de la position de l’impact de la trace dans le plan η − φ.
Introduction |