Transmission dynamique d’énergie par induction
Principe de l’induction
Le système étudié repose sur un phénomène physique fondamental en électromagnétisme : l’induction. Ce phénomène peut être défini par une observation : lorsqu’une spire formée par un fil conducteur est traversée par un flux magnétique variable, elle voit apparaître à ses extrémités une différence de potentiels : une « tension induite ». Le champ d’induction magnétique #»B est à l’origine d’une force – la force de Lorentz – qui s’exerce sur les électrons de la spire conductrice, et cause cette tension induite. Pour modéliser ce phénomène, l’équation la plus utilisée est sans aucun doute la loi de Faraday, décrite en convention générateur en Eq. (1.1). Pour un enroulement composé de n spires, le flux total reçu Φ correspond au flux reçu par une spire multiplié par n, ce qui donne la loi exprimée en Eq. (1.2). Le signe négatif indique que la tension induite sera toujours dans le sens opposé au sens du courant choisi dans la convention de signe utilisée. Cette loi sera utilisée par la suite pour dessiner les schémas électriques. uspire = − dϕ dt (1.1) uenroulement = − dΦ dt = −n dϕ dt (1.2) Le système de transfert d’énergie sans contact fonctionne de la manière suivante : une bobine au sol est alimentée par une tension alternative, ce qui permet de créer un champ d’induction magnétique variable. Un flux magnétique variable traverse donc la bobine embarquée dans le véhicule. Cela entraîne une tension induite aux bornes de 8 Chapitre 1 : Principes à l’œuvre et bibliographie cette bobine, et donc un courant lorsqu’une charge y est connectée. C’est ainsi que s’établit le transfert de puissance. La difficulté principale de l’utilisation de l’induction pour la charge d’un véhicule électrique concerne l’entrefer important entre les bobines primaire et secondaire. Cet entrefer, de l’ordre de 15 à 20 cm, va demander des niveaux de tensions ou de courants élevés afin de pouvoir recevoir un champ magnétique suffisant au secondaire pour transmettre la puissance. Pour une puissance de quelques dizaines de kilowatts, la tension peut être de l’ordre de quelques kilovolts, ou bien le courant de l’ordre de la centaine d’ampères. Pour accomplir cela, les structures de convertisseur privilégiées sont les structures résonnantes. Utilisation de la résonance en électronique de puissance De manière classique, les circuits résonnants sont utilisés en électronique de puissance afin de réduire les pertes par commutation dans les convertisseurs à découpage [10]. En effet, la résonance permet de donner, au niveau de l’interrupteur utilisé, une forme de tension ou de courant qui ressemble à un arc de sinusoïde (Fig. 1.1). Ici la tension va, grâce à la résonance, s’annuler spontanément. On profite ainsi de cet instant pour assurer la mise en conduction de l’interrupteur à tension nulle. Cela dit, ce n’est pas vK Blocage Conduction t Figure 1.1 Exemple d’utilisation du phénomène de résonance pour assurer une commutation douce vraiment le principal trait de la résonance qui conduit à son utilisation dans le cadre de la charge inductive. C’est justement la contrainte de devoir fournir une forte tension ou bien un fort courant au niveau de la bobine primaire afin de pouvoir magnétiser tout l’entrefer entre les bobines émettrice et réceptrice et permettre le passage de la puissance. Comme tout système résonnant lorsqu’il est excité à une fréquence adéquate, même une faible excitation permet d’obtenir des grandeurs physiques qui suivent de fortes variations. Pour illustrer l’explication, nous allons prendre l’exemple bien connu de la corde vibrante (Fig. 1.2). Pour rappel, en excitant la corde avec une vibration de faible amplitude, mais à l’une de ses fréquences de résonance, certains points de la corde vont se mouvoir avec grande amplitude. Les points dont la trajectoire suit une plus grande amplitude sont appelés « ventres » quand les points immobiles sont appelés « nœuds ». Quelque chose de similaire se produit ici. Il est possible d’exciter le circuit résonnant formé par un condensateur associé à l’inductance de chaque bobine, avec une tension raisonnable (de l’ordre de 60 V ou bien encore 400 V), à une fréquence proche de la fréquence de résonance. Une tension sera alors obtenue aux bornes de la bobine et du condensateur, pouvant varier de plusieurs kilovolts. Le même raisonnement peut être conduit en terme de courant pour un fonctionnement dual. excitation Figure 1.2 Schéma du principe de la corde vibrante, avec la représentation de la corde au repos en pointillé Plusieurs types de circuits résonnants existent. Avant de présenter ces différentes structures, nous allons décrire certaines façons de modéliser le coupleur magnétique. C’est une étape importante pour pouvoir faire une étude électrique du système, afin de comprendre son comportement et éventuellement aboutir à une logique de dimensionnement. La manière de faire cette modélisation est un point clef, car certains paramètres critiques, notamment au niveau de leur signe, dépendent fortement de la convention utilisée.
Modélisation électrique du coupleur et convention
Modèle à base des inductances propres et mutuelles
Une manière classique de modéliser un transformateur est d’utiliser les inductances propres et mutuelles. Ces inductances permettent de matérialiser les tensions induites dues aux flux d’induction. Une bobine reçoit deux flux : le flux dû au courant qui la parcourt, et le flux dû aux autres sources. Dans le cadre de la charge inductive dynamique, il faut prendre en compte la bobine émettrice, la bobine réceptrice, ainsi que les bobines alentours pour pouvoir prendre en compte toutes les intéractions. Cela dit, dans un premier temps, nous allons nous limiter au couple de bobines émetteur– récepteur. Les flux s’expriment donc comme en Eq. (1.3). 10 Chapitre 1 : Principes à l’œuvre et bibliographie ΦP = ΦP→P + ΦS→P = LP iP + MSP iS ΦS = ΦS→S + ΦP→S = LS iS + MPS iP (1.3) Néanmoins, il faut garder à l’esprit ici que les cœfficients LP, LS, MPS et MSP dépendent dans le cas général des courants iP et iS. Dans les milieux linéaires, le principe de superposition s’applique. Il consiste à considérer des cœfficients indépendants des courants. Cela permet par exemple de trouver chaque cœfficient en se plaçant dans le cas où on annule l’un ou l’autre des courants. Dans le cadre de la charge inductive, nous ne sommes pas en milieu linéaire à cause de la présence de matériau magnétique (nécessaire a minima pour réduire au maximum le flux qui atteint le bas de caisse du véhicule, et ainsi les courants de Foucault correspondants). Nous nous permettons néanmoins l’approximation du principe de superposition. En effet, les lignes d’induction traversent principalement de l’air, ce qui fait que cette approximation ne va pas donner des résultats très éloignés de la réalité. Il est possible de montrer par ailleurs, en utilisant le principe de superposition, que MPS = MSP. Nous utiliserons donc par la suite la notation unique M pour ces inductances mutuelles. En présence d’un circuit résonnant, une approximation souvent utilisée est celle de réduire l’étude du système à celle des premières harmoniques pour chaque grandeur. Le circuit résonnant se comporte comme un filtre : il laisse passer les fréquences de résonance, alors que les autres fréquences sont atténuées. Dans le cadre de la charge sans contact pour véhicule électrique, il suffit de se limiter à la première harmonique. En appliquant la loi de Faraday, nous obtenons le modèle représenté en Fig. 1.3a. La loi des mailles appliquée à ce modèle donne l’Eq. (1.4) et donc le modèle équivalent de la Fig. 1.3b. Ce modèle est souvent utilisé pour établir simplement l’impédance d’entrée du système et étudier son comportement selon la commande qui lui est appliquée. ZS iS = − jMω iP iS = −jMω ZS iP jMω iS = M2ω 2 ZS iP (1.4) (a) (b) Figure 1.3 Modèle électrique du coupleur destiné au calcul d’impédances, où Zbob S est l’impédance vue par la bobine secondaire
Modèle à base de composants
Nous allons présenter ici une autre façon de modéliser électriquement le coupleur : le modèle classique du transformateur de la Fig. 1.4 (dit « modèle en T ») . Il modélise les phénomènes magnétiques en jeu, exclusivement par des inductances et le modèle du transformateur idéal. Un autre modèle du même type peut aussi être utilisé, pour faciliter les calculs dans certains cas : le « modèle en π ». Son étude, qui suit le même principe que pour le modèle en T, est détaillée dans l’annexe A. Ce type de modèle est utile pour étudier le comportement du système, et pour mettre en évidence les paramètres clefs. Dans ce raisonnement, nous allons parler de différents flux (se conférer à la nomenclature pour identifier chaque symbole au flux correspondant en cas de doute). Dans un premier temps, il est important de réfléchir sur le sens des enroulements. Cela a plusieurs implications que nous allons développer ici.
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