Etude du métabolisme des pyramides du néocortex dans un modèle murin de la maladie d’Alzheimer

Etude du métabolisme des pyramides du néocortex dans un modèle murin de la maladie d’Alzheimer

Anatomie externe du néocortex 

Originaire du télencéphale, il apparaît avec les mammifères et forme la partie la plus superficielle du cerveau. D’aspect lisse chez les mammifères dits « primitifs » (lissencéphales), le néocortex des mammifères dits « supérieurs » (gyrencéphales) comporte de nombreux sillons et circonvolutions (Figure 1). Figure 1 : Lobes composants le néocortex humain La fissure sylvienne (ou sillon latéral) sépare le lobe frontal du lobe temporal. Le sillon central sépare le lobe frontal du lobe pariétal. Le lobe occipital est la partie la plus postérieure du néocortex. 

Aires corticales et fonctions cognitives associées

 Le néocortex est la partie la plus superficielle de l’encéphale. Il est constitué de deux hémisphères cérébraux et est délimité par des sillons et des fissures. Ces caractéristiques anatomiques permettent de cartographier quatre lobes distincts (Figure 1) : le lobe frontal, qui comprend l’aire motrice principale responsable de la genèse des mouvements volontaires ; le lobe pariétal (séparé du lobe frontal par le sillon central), impliqué dans la somesthésie ; le lobe occipital comprenant les aires visuelles et enfin, replié vers l’avant, le lobe temporal, impliqué dans l’audition et la mémoire (Connors et al., 1997). Certaines de ces aires corticales ont leur équivalent chez les mammifères plus « primitifs ». Chez la souris par exemple, l’aire sensorimotrice est l’équivalent humain des aires somesthésiques et motrices. C’est au niveau de cette aire que les différents travaux réalisés pendant ma thèse ont été conduits. 

Processus cognitifs régionalisés

 Au cours du XIXème siècle, le neurologue français Paul Broca a pu associer certaines fonctions cérébrales à une portion localisée du néocortex. La description post mortem du cerveau d’un de ses patients lui a permis de faire le lien entre une lésion du lobe frontal gauche et l’incapacité de son patient à parler. En multipliant ses observations sur d’autres cas, Paul Broca fit le lien entre le lobe frontal gauche et le langage. En 1873, Wernicke, un confrère allemand, étudiait un patient ayant subi une attaque cérébrale. Bien que l’homme fût capable de parler et d’entendre, il pouvait à peine comprendre ce que les gens lui disaient à l’oral ou par écrit. Après sa mort, le neurologue découvrit une lésion au niveau de la région temporo-pariétale postérieure gauche. Il conclut que cette région, qui était proche de l’aire auditive, était impliquée dans la compréhension du langage. Ces travaux révélèrent que commande motrice du langage et compréhension des mots faisaient intervenir deux régions cérébrales bien distinctes, annonçant l’existence d’une régionalisation des processus cognitifs complexes. 26 Cartographie originale colorisée Schémas des attributions fonctionnelles Figure 2 : Les aires corticales définies par Korbinian Brodmann Subdivision du néocortex humain en 52 aires selon leurs propriétés cytoarchitecturales et fonctionnelles. Haut : vue latérale. Bas : vue parasagittale. En 1909, le neuroanatomiste allemand Korbinian Brodmann divise le cortex en 52 aires en se basant sur la taille des neurones, leur densité, le nombre de couches présentes dans chaque région et l’abondance des axones myélinisés. Il élargit alors l’hypothèse de Paul Broca en postulant qu’à chaque aire corticale correspond une fonction spécifique. Ces fonctions sont regroupées en trois groupes : motrices, sensorielles et associatives (Figure 2). A la fin du XXème siècle, la mise au point des techniques d’imagerie cérébrale non invasives comme l’IRMf4 ou encore la TEP5 a permis de valider cette théorie. 4 IRMf : Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle 5 TEP : Tomographie par Emission de Positons 

Structure interne du néocortex 

Le néocortex est divisé en deux parties superposées. A la surface du cerveau se trouve la substance grise, caractérisée par la présence d’un grand nombre de corps cellulaires. En profondeur se trouve la substance blanche. Délimitée par les ventricules et le striatum, elle est essentiellement composée de fibres nerveuses myélinisées. La suite de ce manuscrit portera uniquement sur la substance grise du néocortex.

Organisation en couches horizontales

 Le néocortex est organisé en six couches. Au milieu du XIXème siècle, l’allemand Theodor Meynert réalise le premier dessin de la structure laminaire d’un cortex (pour revue, voir Jones, 1984). L’avancée des techniques de coloration, notamment l’imprégnation au nitrate d’argent de Golgi, la coloration de Nissl et la coloration des fibres myélinisées ont permis de décrire plus précisément sa cytoarchitecture (Figure 3). Du point de vue histologique, la substance grise est composée de six couches distinctes parallèles à la surface du néocortex. L’épaisseur de chaque couche peut varier en fonction des aires corticales. Au niveau du cortex moteur, par exemple, la couche IV va jusqu’à disparaître au profit d’une couche V très développée. La couche I, la plus superficielle, se situe juste sous la pie-mère. Aussi appelée couche moléculaire ou couche plexiforme, elle est en grande partie composée de fibres nerveuses. On y trouve toutefois quelques corps cellulaires de neurones. Les couches II-III, appelées respectivement couche granulaire externe et couche pyramidale externe, contiennent de nombreux corps cellulaires de neurones. La couche granulaire interne, ou couche IV, est densément peuplée de cellules à l’aspect étoilé et épineux (cellules en grain) mais pauvre en cellules pyramidales. La couche V, nommée couche ganglionnaire ou pyramidale interne, regroupe les grandes cellules pyramidales du néocortex. Enfin, la couche VI autrement appelée couche polymorphe, tire son nom de ses cellules aux formes irrégulières (Figure 3). 28 Figure 3 : Le néocortex est organisé en six couches Illustration représentant des sections de coupes perpendiculaires à la surface corticale, observées après traitement par différentes techniques de coloration. La coloration de Golgi marque à la fois les cellules et leurs prolongements. La coloration de Nissl marque uniquement les corps cellulaires. La coloration de la myéline met en évidence les axones myélinisés. D’un point de vue fonctionnel, le néocortex est regroupé en trois couches distinctes. La couche supragranulaire, formée des couches I à III, envoie des projections vers d’autres aires corticales. La couche granulaire (couche IV) reçoit la grande majorité des afférences sensorielles du thalamus. Les couches V-VI forment la couche infragranulaire et se projettent vers les zones extra-corticales (Lee and Winer, 2008a, 2008b ; Linden and Schreiner, 2003).

Organisation en colonnes fonctionnelles verticales

 En 1957, Vernon B. Mountcastle réalise des enregistrements in vivo dans le néocortex de chats. Il montre que les neurones répondant à une stimulation localisée de récepteurs sensoriels périphériques sont regroupés en colonnes fonctionnelles (Mountcastle, 1957). Figure 4 : Organisation des colonnes corticales chez le rongeur (A) : coloration de Nissl révélant une forte densité cellulaire en couche IV et en bordure de tonneau. (B) : afférence thalamique se projetant en couches IV et Vb. (C) : confinement des dendrites à l’intérieur du tonneau. (D) : projections des neurones infragranulaires et supragranulaires localisés en bordure de tonneau. [Source : Adapté de Waite & Tracey, 1995] Ces colonnes (ou tonneaux) ont un diamètre compris entre 300 et 600 µm et s’étendent perpendiculairement à la surface piale de la couche II jusqu’à la couche VI. Elles contiennent plusieurs milliers de neurones et sont elles-mêmes constituées d’un assemblage d’unités de base appelées mini-colonnes (Mountcastle, 1997). Les colonnes corticales sont des unités 30 complexes de traitement et de distribution de l’information qui lient ensemble un grand nombre d’entrées et de sorties synaptiques via un processus complexe d’intégration interne. La forme et la taille des colonnes varient suivant les espèces ; chez le rongeur par exemple, elles sont particulièrement développées au niveau du cortex somatosensoriel (Figure 4). Chaque colonne est composée d’un grand nombre de cellules en étroite relation.

Table des matières

REMERCIEMENTS
PREAMBULE
SOMMAIRE
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX
LISTE DES PUBLICATIONS
RESUME
PARTIE 1
LE NEOCORTEX COMME STRUCTURE D’INTERET
I. ANATOMIE EXTERNE DU NEOCORTEX
A. Aires corticales et fonctions cognitives associées
B. Processus cognitifs régionalisés
II. STRUCTURE INTERNE DU NEOCORTEX
A. Organisation en couches horizontales
B. Organisation en colonnes fonctionnelles verticales
III. DIVERSITE CELLULAIRE DU NEOCORTEX
A. Les cellules gliales
1. La microglie
2. Les oligodendrocytes
3. Les astrocytes
B. Les neurones
1. Les interneurones
3. Les cellules pyramidales
a. Caractérisation morphologique
b. Caractérisation électrophysiologique
PARTIE 2
ETUDE DU METABOLISME DES NEURONES PYRAMIDAUX CORTICAUX DANS UN MODELE MURIN DE LA PATHOLOGIE ALZHEIMER
INTRODUCTION
I. LE METABOLISME DU GLUCOSE EST ESSENTIEL AUX FONCTIONS NEURONALES
A. Le glucose sanguin fournit l’énergie nécessaire au maintien des activités neuronales et à l’intégrité du
tissu nerveux
1. Le glucose est la principale source d’énergie pour le cerveau
2. En quoi l’activité cérébrale est-elle énergivore ?
a. Rétablir les gradients ioniques
b. Synthétiser et recycler les neurotransmetteurs
c. Maintenir l’intégrité du tissu cérébral
3. Le passage du glucose sanguin vers les cellules se fait grâce à des transporteurs spécifiques
a. Familles de transporteurs du glucose
b. Isoformes cérébrales des transporteurs du glucose
B. Le métabolisme du glucose fait intervenir différents compartiments cellulaires
1. Oxydations partielles cytosoliques
a. Rétention du glucose dans la cellule
b. Glycolyse
c. Voie des pentoses phosphates
d. Glycolyse « aérobie »
2. Transformation du pyruvate dans la mitochondrie
a. Formation d’acétyl-CoA
b. Cycle de Krebs
3. Oxydation complète au sein de la chaîne respiratoire 4
a. Oxydation des coenzymes réduites et formation d’un gradient de protons
b. Synthèse d’ATP dans la matrice mitochondriale
C. Le métabolisme du glucose nécessite des interactions étroites entre astrocytes et neurones
1. Les astrocytes libèrent du lactate, substrat énergétique pour les neurones
2. Les astrocytes assurent la recapture du glutamate issu de l’activité synaptique
3. Contrairement aux neurones, les astrocytes possèdent des réserves de glycogène
4. La protection contre le stress oxydant nécessite une collaboration entre les deux types cellulaires
a. La respiration neuronale produit des dérivés actifs de l’azote et de l’oxygène
b. Les réserves antioxydantes des neurones sont limitées
c. Le métabolisme du glucose protège du stress oxydant via la voie des pentoses phosphates
II. LE METABOLISME DU GLUCOSE EST ALTERE DANS LA PATHOLOGIE ALZHEIMER
A. Caractéristiques anatomopathologiques de la maladie d’Alzheimer
1. Périodes cliniques et évolution de la pathologie
2. Accumulations protéiques constituant les lésions spécifiques de la MA
3. Recherche de la pathogenèse de la MA
B. Etude de la MA grâce aux techniques d’imagerie cérébrale
1. Outils d’imagerie cérébrale utilisés dans le contexte de la MA
a. Imagerie par résonnance magnétique fonctionnelle96
b. Spectroscopie par résonnance magnétique nucléaire 96
c. Imagerie du tenseur de diffusion
d. TEP
2. Biomarqueurs utilisés pour l’étude de la MA par imagerie fonctionnelle
a. Dépôts amyloïdes et protéines Tau hyperphosphorylées
b. Réduction du volume cérébral
c. Altération de la connectivité structurelle et anatomique
d. Métabolites cérébraux et RMN
3. Hypométabolisme du glucose, biomarqueur précoce de la MA
a. FDG et réductions locales du métabolisme cérébral chez les patients de la MA
c. FDG et réductions locales du métabolisme cérébral dans les cas de MCI
PROBLEMATIQUE
MATERIELS ET METHODES
A. Les souris 3xTg comme modèle d’étude de la MA
B. Etude du métabolisme au moyen de sondes FRET
1. Expression en tranches des biosenseurs FRET codés génétiquement
2. Imagerie dynamique du métabolisme
3. Inhibiteurs pharmacologiques des voies métaboliques
RESULTATS : ARTICLE
DISCUSSION
A. Le métabolisme du glucose est progressivement altéré dans la MA
1. Transport du glucose
2. Activité glycolytique
3. Phosphorylation oxydante
4. Stress glycatif
5. Stress oxydant
6. Voie des PPP
B. Il existe des interactions entre altérations métaboliques, peptides Aβ et protéines Tau
1. Déficits métaboliques et Aβ
2. Déficits métaboliques et hyperphosphorylation de la protéine Tau
C. Les déficits métaboliques affectent les fonctions neuronales
1. Métabolisme et dysfonctions synaptiques
2. Pourquoi certaines régions cérébrales sont-elles plus sévèrement affectées que d’autres ?
CONCLUSION
PARTIE 3 :CONTRIBUTION DES RECEPTEURS Α1 ET Β NORADRENERGIQUES DANS LA MODULATION DE L’EXCITABILITE DES CELLULES PYRAMIDALES CORTICALES CHEZ LA SOURIS
INTRODUCTION
I. PHYSIOLOGIE DE LA NORADRENALINE DANS LE SYSTEME NERVEUX CENTRAL
A. La NA est impliquée dans de nombreuses fonctions cérébrales
1. Régulation du flux sanguin cérébral
2. Réponse au stress
3. Eveil, attention et concentration
4. Acuité sensorielle
5. Formation de la mémoire, sa consolidation et sa rétention
B. La production de la NA est assurée par des groupes de neurones formant des noyaux
1. Les noyaux noradrénergiques sont localisés au niveau du tronc cérébral
2. Le Locus Coeruleus est le principal noyau noradrénergique
3. Les fibres noradrénergiques innervent l’ensemble du néocortex
C. Le métabolisme de la NA est compartimenté
1. Voie de synthèse et stockage de la NA
2. Libération de la NA par exocytose
3. Recapture de la NA extracellulaire
4. Recyclage de la NA par les neurones noradrénergiques
5. Catabolisme
II. EFFET DE LA NA SUR LES NEURONES PYRAMIDAUX CORTICAUX
A. Les récepteurs noradrénergiques sont largement exprimés dans le néocortex
1. Distribution corticale des récepteurs α adrénergiques
a. Localisation des récepteurs α1
b. Localisation des récepteurs α2
2. Distribution corticale des récepteurs β adrénergiques
B. Les récepteurs noradrénergiques sont couplés à des protéines G assurant la transduction du signal
1. Les récepteurs α adrénergiques
a. Récepteurs α1 adrénergiques et protéine Gq
b. Récepteurs α2 adrénergiques et protéine Gi
2. Les récepteurs β adrénergiques sont couplés aux protéines Gs
3. L’oligomérisation des récepteurs module la signalisation intracellulaire
D. La NA agit sur les propriétés électrophysiologiques des neurones pyramidaux du néocortex
1. Effets à long terme sur la plasticité synaptique
2. Effets synaptiques de la NA
a. Régulation des courants glutamatergiques
b. Régulation de la signalisation GABAergique
3. Modulation des propriétés intrinsèques des cellules
a. Modulation des canaux calciques
b. Modulation des canaux potassiques
PROBLEMATIQUE
MATERIEL ET METHODES
A. Préparation des tranches de cortex
B. Enregistrement par patch-clamp des cellules pyramidales corticales
C. Statistiques
D. Pharmacologie
E. Révélation du marquage à la biocytine et immunofluorescence
RESULTATS
I. L’effet de la NA sur la sAHP ne passe pas uniquement par l’activation des récepteurs β adrénergiques
A. Inhibition de la sAHP par la NA (10 μM)
B. Effet significatif des agonistes des RA-α1et β adrénergiques sur la sAHP
II. Les agonistes α1 et β adrénergiques ont un effet complémentaire sur IsAHP
A. Inhibition de IsAHP par des concentrations croissantes de NA 239
B. Effet noradrénergique indépendant du réseau neuronal alentour
C. Effet complémentaire des agonistes α1 et β adrénergiques sur IsAHP
DISCUSSION
A. Implication des récepteurs β et α1 dans la modulation de la sAHP des pyramides des couches II et III
du néocortex
B. Effet additif des RA-β et α1
C. Hétérogénéité de la sAHP
1. Génération d’une sADP
2. Rôle des RA-α1 sur IsAHP ou IsADP ?
3. Répartition des deux sous-types de récepteurs
4. Quelles conductances seraient responsables de la sADP ?
Conclusion
ANNEXE 1 :LES NEURONES CORTICAUX EXPRIMANT LA NNOS ET NK1R SONT REGULES PARLES PROJECTIONS CHOLINERGIQUES DU CERVEAU ANTERIEUR BASAL
ANNEXE 2 :METABOLIC IMPAIRMENT OF THE ASTROCYTE SERINE SYNTHESIS PATHWAY
CONTRIBUTES TO THE DEFICITS OF SYNAPTIC PLASTICITY IN A MOUSE MODEL OF
ALZHEIMER’S DISEASE
BIBLIOGRAPHIE

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