Le domaine et les corpus d’analyse
Dans une perspective contrastive français-italien, nous avons essayé de repérer un secteur d’activité commun aux sociétés française et italienne, qui pouvait faire l’objet d’une production écrite scientifique. Le choix est tombé sur la médecine thermale, branche de la médecine dans laquelle la France et l’Italie se vantent d’une longue tradition et sans doute moins exploitée dans des travaux d’analyse terminologico-linguistique que d’autres branches de la médecine. Le choix de la médecine thermale se révèle intéressant aussi d’un autre point de vue, celui de la continuité entre vocabulaire général et vocabulaire technique, comme nous le verrons à partir de §2.4. Souvent la médecine thermale est considérée comme un type de tourisme à but curatif plutôt qu’une branche de la médecine, en raison du déplacement du malade vers les stations thermales. À bien regarder, parallèlement au thermalisme se développe tout un marché de remise en forme par l’eau, que nous avons défini comme tourisme de santé et de bien-être après avoir mené des recherches sur un ensemble de sources assez hétérogènes, incluant des dictionnaires, des encyclopédies, des corpus de presse en ligne et de pages Web90. Dans un premier temps, nous avions décidé de réunir sous l’étiquette tourisme de santé et de bien-être tant la médecine thermale que le marché de la remise en forme par l’eau. Toutefois, comme les textes relatifs à ce dernier domaine sont surtout des brochures publicitaires, nous avons circonscrit notre étude au seul domaine de la médecine thermale.
Se soigner par l’eau, une tradition millénaire
On retrouve des éléments similaires en ce qui concerne la tradition thermale sur le territoire correspondant à l’Italie actuelle. Les magnifiques établissements thermaux créés par les Empereurs romains subirent un important déclin, suite à la chute de l’Empire, à la diffusion du christianisme et aux invasions barbares. En revanche, à la fin du Moyen Âge la création de nouvelles stations thermales marqua un intérêt renouvelé pour le d’eaux minérales ouvrirent la voie vers les séjours dans les stations au XIXe siècle. Toutefois, étant données les mauvaises conditions dans lesquelles se trouvaient les établissements thermaux, les curistes choisissaient plutôt des destinations étrangères. Après l’Unification (1861), le redressement des stations thermales existantes fit connaître un regain d’intérêt pour le thermalisme italien. Tout comme en France, un thermalisme social a vu le jour dans les années 1940 et a connu un important essor jusqu’aux années 1980. À notre connaissance, deux corpus parallèles français-italien sur la médecine thermale sont indisponibles. Ainsi, nous avons collecté des articles scientifiques ayant trait à ce domaine et constitué deux corpus comparables, en français et en italien. Nous distinguons à ce propos les notions de corpus de référence et corpus d’étude : une fois identifié un ensemble textuel ayant trait à un sujet (corpus de référence), on en délimite une partie en vue des besoins de l’application (corpus d’étude).
Nous considérons que notre corpus de référence pour le français est constitué par les publications officielles sur la médecine thermale : la revue La Presse thermale et climatique (PTC), organe officiel de la Société française d’hydrologie et climatologie médicales, dont la parution est annuelle ; les communiqués de presse des stations thermales et les publications disponibles sur le site de l’AFRETh (Association Française des nous ont fournies deux experts du secteur96. Dans un souci de qualité, les pages Web de publicité – bien que susceptibles de faire augmenter considérablement la taille du corpus – n’ont pas été prises en considération. Les détails des textes composant les deux corpus d’étude sont fournis dans les annexes A et B. Chaque texte a gardé le nom qu’il s’était vu attribuer sur les sites d’origine. Tous les textes ont été convertis au format .txt et encodés en Unicode UTF-8, en vue de leur traitement informatique avec le logiciel Unitex. Pendant cette phase de préparation des textes nous avons procédé aussi à l’effacement des résumés en anglais et des tableaux éventuellement présents, afin de ne pas compromettre le Lors de l’état de l’art de la terminologie (§I.2.4.1.), nous avons évoqué la proposition de GAMBIER (1991) de parler de « registre » plutôt que de « langue technique » ou de « langue de spécialité », en raison de l’interpénétration des connaissances et des termes qui les désignent entre plusieurs champs d’activité. Quatre ans après l’article de Gambier, LERAT publie un volume entièrement consacré au sujet, dans lequel il propose la dénomination langue spécialisée.