Etude couplée modélisation/télédétection pour le suivi des états et bilans hydriques de surface en zone sahelienne
Quelques éléments sur le climat de l’Afrique de l’Ouest
On distingue trois régimes climatiques différents en Afrique de l’Ouest. Ils se distinguent par le cumul de pluie annuel, et par le type de saison :
Le régime désertique (moins de 200 mm de pluie par an) : une seule saison des pluies qui ne dure que trois mois au maximum, de mi-juillet à mi-septembre.
Le régime sahélien (200 à 700 mm de pluie annuelle) : la saison des pluies s’étend sur trois à quatre mois, le mois d’août étant le plus arrosé, le reste de l’année ne comportant généralement aucune averse. 3. Le régime tropical (700 à 1200 mm de pluie annuelle) : la saison des pluies s’allonge et passe à cinq, voire six mois en limite sud de cette zone. Entre le 9ème parallèle et l’équateur, soit au sud de la position la plus méridionale du FIT (Front InterTropical), l’air continental ne fait que de très brèves incursions durant l’hiver (”coup d’harmattan). Le climat passe progressivement vers le sud de une à deux saisons sèches et deux saisons des pluies.
En descendant vers le sud, la saison des pluies du régime tropical s’allonge ( régime tropical de transition ), puis se dédouble nettement (régime équatorial de transition ). Le climat de l’Afrique de l’Ouest est régi par une cellule de Hadley (Hadley, 1735), qui est une cellule thermique caractérisée par une expansion ascendante près de l’équateur météorologique et divergence en altitude vers les pôles. Les alizés de l’hémisphère Nord, qui soufflent vers le sud-ouest, et ` ceux de l’atmosphère Sud, orientés vers le nord-ouest, se rencontrent dans les régions équatoriales en formant tout autour du globe un flux convergent qui surmonte une zone méridienne appelée pour cette raison la zone de convergence intertropicale (en abrégé, la ZCIT ). La ZCIT, particulièrement bien marquée sur la moitié occidentale de l’Afrique, sépare la mousson de Sud-Ouest, chaude et humide, de l’Harmattan, vent saharien très sec et plus chaud encore, à forte composante Est.
Il se forme alors d’énormes systèmes convectifs parsemés de foyers orageux et fréquemment parcourus de grains. Cette zone convective ainsi formée crée une région de basses pressions. Les moyennes annuelles de ces pressions se répartissent suivant un thalweg dont l’axe, appelé équateur météorologique, est situé aux alentours de 5 degrés de latitude nord. La position de cette trace au sol varie très sensiblement au cours de l’année, puisqu’elle tend à suivre le mouvement apparent du Soleil , vers le nord en été, puis vers le sud en hiver. C’est en juillet-août que la ZCIT atteint sa position la plus septentrionale et dessine très haut vers le nord les frontières de la mousson d’été au-dessus de l’Afrique sahélienne. La ou les alizés d’un hémisphere transportent de l’air venu du continent tandis que ceux de l’autre ` hémisphère transportent de l’air océanique, plus humide et moins chaud que l’air continental, les contrastes de température et d’humidité entre les deux masses d’air ainsi transportées s’ajoutent aux différences de direction entre vents des deux hémisphères pour établir un front quasi permanent appelé front intertropical (en abrégé FIT ) ou aussi front équatorial ; cette zone frontale est particulièrement active en été dans l’arrière-pays du golfe de Guinée, où elle diffuse les pluies de mousson entre l’Harmattan, qui souffle du nord-est après avoir traversé le Sahara, et les vents issus des alizés de sud-est, qui transportent de l’air très humide et plus frais en provenance de l’Atlantique. ` Il existe un découplage entre la zone de pluies maximales et la position en surface de la ZCIT.
Bien que l’oscillation interannuelle de la ZCIT conserve une position relativement stable, celle des précipitations connaît des déplacements importants (Grist et Nicholson, 2001). Les conditions de surface aussi bien océaniques que continentales sont également des facteurs importants agissant sur la mousson africaine. Certaines études (Lamb, 1978,1992 ; Janicot et al, 2001 ; Nicholson, 2001 ; Giannini et al., 2003) ont montré une forte sensibilité de la circulation de la mousson africaine à la répartition spatiale (globale et régionale) des anomalies de température de surface de la mer. Durant les décennies passées, des études, basées sur des méthodes statistiques empiriques, ont été proposées pour prédire les précipitations sur le continent ouest africain à partir de la distribution ` de la température de surface de la mer (Folland et al., 1991 ; Landsea et al., 1993 ; Ward, 1998). Plus récemment, des études tendent à améliorer ces prédictions par la modélisation en utilisant des modèles de circulation atmosphérique forcés par des observations de températures de surface de la mer ou couples des modèles de circulation océanique (Palmer et al., 2004).
Les résultats obtenus restent peu précis ce qui suggère que seule une partie de la variabilité des précipitations sur l’Afrique de l’Ouest peut être expliquée par les anomalies de température de surface de la mer (Rowell, 1998). Ainsi des études se concentrent sur les autres effets potentiels pouvant améliorer la prédiction des précipitations. Des études montrent l’importance du rôle joué par la végétation sur la dynamique de la mousson africaine (Monteny et al., 1997 ; Clark et al., 2004 ; Taylor et al., 2005 ; Taylor et al., 2006). L’étude de sensibilité de Charney et al. (1977) met en avant l’influence de la végétation, au travers d’un changement d’albédo de surface, sur les précipitations. D’autres études ont montré l’importance de l’humidité des sols. Par exemple Philippon et Fontaine (2002) ont proposé un mécanisme de régulation de la mousson par l’humidité du sol, dans lequel les précipitations sur le Golfe de Guin entre septembre et novembre peuvent influencer les précipitations entre juillet et septembre de l’année suivante au Sahel.
A une échelle plus locale, Taylor et al. (2007a,b) ont montré, par l’observation aéroportée et la télédétection spatiale, comment le flux d’ évaporation induit par une pluie récente peut influencer la circulation atmosphérique à méso échelle au Sahel. La mousson africaine est donc un phénomène complexe, résultat d’un système couplé océan-terre atmosphère à toutes les échelles. Bien que la variabilité interannuelle et inter décennale soit relativement bien documentée (Nicholson, 1981 ; Lamb, 1983 ; Le Barbé et al., 2002), on n’est toujours pas en mesure de prédire la qualité de la mousson en terme de précipitation et ainsi d’estimer à l’avance les conséquences au niveau du développement de la région sahélienne, notamment en ce qui concerne la dégradation des terres, la sécurité alimentaire et sanitaire ou encore la disponibilité de la ressource en eau..
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