L’ENGAGEMENT OU LA VOLONTÉ DE POURSUIVRE UNE RELATION
L’engagement du consommateur envers une marque (brand commitment) est une attitude fréquemment citée dans la littérature et qui a déjà fait l’objet de nombreuses recherches. Nous consacrerons la première partie de ce chapitre à la présentation des différentes définitions qui en ont été proposées. Nous montrerons que, bien que la plupart des recherches soulignent le rôle crucial de l’engagement dans la formation de la fidélité, chaque auteur semble proposer sa propre définition de l’engagement, qui n’est pas forcément compatible avec les autres… Ironiquement, on retrouve une situation très comparable à celle de l’étude de la fidélité il y a une trentaine d’années. L’engagement est partout et il n’est une branche du marketing qui n’utilise cette notion : les relations client-fournisseur témoignent d’un engagement ; le choix d’un prestataire de service repose sur l’engagement ; la performance d’un vendeur est fonction de son engagement La liste est longue9, encore avons-nous négligé d’autres domaines de la gestion qui témoignent eux aussi de l’omniprésence de ce construit. Pour certains auteurs, l’engagement et la fidélité se confondent, d’autres les distinguent. Pour d’autres, l’engagement n’est qu’un autre nom donné à l’attachement… On est en présence d’engagement calculé ou d’engagement affectif, d’engagement émotionnel, voire d’engagement de continuité… des chercheurs différencient l’engagement implicite et explicite… L’étude de sa structure souffre des mêmes travers… Certains chercheurs considèrent que l’engagement possède deux dimensions, d’autres ne veulent en voir qu’une seule…
Cette absence de définition et l’absence d’accord sur sa nature explique que cette attitude ait parfois été confondue avec d’autres construits. Nous profiterons donc de la présentation des caractéristiques de l’engagement pour insister sur ce qui le différencie d’autres construits parfois très proches. Cette clarification nous semble nécessaire : l’étude du comportement du consommateur repose sur des concepts nombreux et fortement reliés entre eux ; la différence entre les attitudes évoquées est parfois ténue ; tout ceci contribue à entretenir une certaine confusion. Nous montrerons pourtant que l’engagement possède des qualités et un pouvoir explicatif qui justifient son utilisation dans la recherche sur la fidélité à la marque. Nous étudierons ensuite la structure de cette attitude. Là encore, la lecture des différentes recherches fait apparaître une certaine confusion. Existe-t-il un ou plusieurs types d’engagement ? Le but de cette recherche sera notamment de répondre à cette question. Nous proposerons un modèle explicatif décrivant la formation de l’engagement à partir des évaluations de la marque et montrant quelles sont ses principales conséquences sur le comportement d’achat du consommateur. Nous essaierons enfin de déterminer si la formation et les conséquences de l’engagement restent les mêmes, quelle que soit la catégorie de produit considérée, ou si au contraire, les attitudes envers la catégorie de produits interviennent dans la formation de l’engagement.
Définition(s) de l’engagement
Meyer et Allen (1991) remarquent que de « nombreuses revues de la littérature ont été faites sur ce sujet et qu’un des problèmes majeurs de ces revues réside dans le manque de consensus dans la définition du construit ». Ils ajoutent que « ce problème est aggravé par l’utilisation de mesures de l’engagement qui ne correspondent pas toujours aux définitions appliquées » et concluent qu’« il est difficile d’effectuer une synthèse des résultats de recherches sur l’engagement ». Le manque de consensus et de définition commune n’est donc pas un problème spécifique au marketing… Deux ensembles de définition peuvent être recensés, selon qu’ils mettent l’accent sur l’identification de l’individu à une organisation ou sur la poursuite d’une relation. Ainsi, Steers (1977) définit l’engagement organisationnel comme l’identification d’un individu avec une organisation et son implication dans celle-ci. L’auteur indique que « l’individu engagé croie en les buts et les valeurs de l’organisation, les accepte ; il témoigne d’un souci réel pour sa santé et son développement et consent des efforts considérables en ce but ; il désire rester un membre de l’organisation » (Steers, 1977 ; Kelley et Davis, 1994). Ce critère d’identification est repris et précisé dans les définitions ultérieures : « on conceptualise l’engagement par la force relative de l’identification de l’individu à une organisation et son implication envers celle-ci. » (Mowday, Porter and Steers, 1979) Garbarino et Johnson (1999) identifient en outre quatre aspects principaux de l’engagement dans la littérature consacrée à l’engagement des employés : identification à l’organisation, attachement psychologique, souci de son développement et loyauté. Dans leur tentative de synthèse des différentes approches, Mowday et al. (1979) différencient deux types d’engagement : « L’engagement attitudinal se concentre sur la manière dont les individus viennent à penser à leur relation avec l’organisation. Par bien des aspects, on peut le définir comme le fait que les individus évaluent jusqu’à quel point leurs propres buts et valeurs sont en conformité avec celles de l’organisation.