Influence de l’argilite du COx sur l’altération de UO2
Depuis 15 ans, une démarche expérimentale visant à étudier l’altération de la matrice du combustible irradié en situation de stockage a été mise en place au CEA dans le cadre des projets PRECCI puis COSTO. Cette démarche consiste en une complexification de l’environnement de lixiviation afin de se rapprocher des conditions du site de stockage et déterminer séparément les mécanismes d’altération et leurs cinétiques. Aujourd’hui, afin de compléter cette démarche, le rôle de la roche hôte, l’argilite du Callovo-Oxfordien, reste encore à étudier. Dans ce chapitre, les résultats obtenus lors d’expériences de lixiviation de matériaux modèles U1-xPuxO2 en présence d’argilite du COx sont présentés. La première partie de ce chapitre est un court état de l’art sur les argiles, représentant entre 40 et 50 % de la masse de l’argilite. Dans un second temps, la méthode développée pour l’intégration de l’argilite dans nos expériences est présentée. Finalement, la dernière partie de ce chapitre présente les résultats obtenus lors des expériences d’altération des matériaux modèles U1-xPuxO2 en présence d’argilite. L’argilite est une roche argileuse, c’est-à-dire composée majoritairement de minéraux argileux, plus du quartz, des feldspaths, de la calcite ainsi que de faibles quantités de pyrite et de matière organique. La structure des minéraux argileux, en feuillets, et le taux de compaction font de l’argilite une matrice imposant une perméabilité très faible limitant ainsi la circulation d’eau à des valeurs de l’ordre de 0,01 à 0,1 mm/an [2]. Ce confinement physique, couplé à la grande capacité de sorption des radionucléides et aux conditions réductrices minimisant la solubilité des actinides, en font une roche hôte de premier choix pour le stockage des déchets radioactifs. D’un point de vue mécanique, l’argilite présente également une capacité d’auto-scellement des fissures, permettant ainsi d’atténuer les effets du creusement.
Afin de quantifier les effets de l’argilite sur l’altération de la matrice du combustible, il faut faire face à la complexité de l’argilite, chacune des phases présentes pouvant avoir un rôle sur les mécanismes d’altération. En première approximation des mécanismes pouvant survenir au contact de l’argilite, un état de l’art a été réalisé sur les minéraux argileux, composant 40 à 50% de la masse de l’argilite du COx. x+y.nH2O, où x correspond aux substitutions T et y aux substitutions O. E+ correspond aux cations contenus dans l’inter-feuillet qui compensent la charge négative due aux substitutions isomorphiques. Les illites ont une structure très similaire à celle des smectites (2:1). Leur charge négative est plus élevée et est compensée par des cations potassium. Les différences majeures se situent dans la très faible capacité d’hydratation de l’espace interfoliaire et dans la plus faible capacité d’échange ionique. Ce sont ainsi des argiles non gonflantes, en opposition aux smectites. Finalement, les argiles ne peuvent pas être décrites comme des entités isolées. En effet, ces feuillets d’argiles vont s’agencer les uns avec les autres et ainsi former différents schémas, comme présenté Figure IV-2.
Propriétés d’adsorptions des argiles
Le choix des argiles comme barrière naturelle est en partie dû à leur capacité de rétention. Cette capacité, différente d’une argile à l’autre, est fonction de l’élément retenu, du pH, de la force ionique mais également de la présence de ligands dans la solution. Cette rétention, qualifiée au sens large de sorption, est due à deux mécanismes : L’échange ionique est dû aux substitutions isomorphiques dans les couches d’oxyde O ou T, donnant ainsi une charge négative aux argiles. Cette charge permanente est compensée par la présence de cations labiles entre les feuillets de l’argile. La quantité de charge positive échangeable constitue la capacité d’échange cationique, ou CEC, exprimée en eq+/g d’argile sèche. Pour l’argilite du COx, la capacité d’échange cationique moyenne est de 15,5 ± 0,5 meq+/100g d’argilite [66]. Le paramètre Kd est une constante empirique, et non une constante d’équilibre thermodynamique. La sorption est très différente en fonction du degré d’oxydation de l’espèce, ainsi dans ce manuscrit nous définirons, pour la sorption de l’uranium sur une argile, les grandeurs Kd_U(IV) et Kd_U(VI). Un bref tour de la littérature concernant les valeurs de Kd_U(IV) et Kd_U(VI) est présenté dans la suite de ce paragraphe, en se concentrant sur l’argilite du COx ou bien sur des argiles proches de la fraction argileuse de l’argilite du COx (illite, smectite ou inter-stratifié illite/smectite).