Exploiter le potentiel des chaînes de valeur mondiales pour l’Afrique
Les performances économiques de l’Afrique se sont considérablement améliorées au cours des 15dernières années. Après deux décennies de croissance négative, le PIB de la région a progressé de par an en moyenne, et son PIB par habitant de depuis 2000. Mais l’Afrique reste confrontée à d’importants problèmes, qui pèsent sur sa compétitivité, comme le montre le chapitre1.1 du présent Rapport. L’intensification des liens entre les échanges et les investissements, et notamment l’expansion du commerce intrarégional, aurait des répercussions bénéfiques sur les pays africains. Cependant, même si la participation de l’Afrique aux flux d’échanges et d’investissements mondiaux reste modeste en valeur absolue par rapport à celle d’autres régions1 (par exemple, le commerce en Afrique subsaharienne n’entre que pour 2pourcent dans le total des échanges mondiaux), on constate un certain nombre d’évolutions positives: ainsi, avec 60milliards de dollarsEU, l’investissement direct étranger (IDE) est cinq fois plus élevé qu’en 2000, et les flux d’échanges ont augmenté de 10pourcent par an sur la même période.Ces évolutions positives s’inscrivent dans un contexte de participation accrue aux chaînes de valeur mondiales (CVM).2 On cherche de plus en plus à évaluer ce qui détermine cette participation, quels peuvent en être les effets et les conséquences pour l’élaboration des politiques publiques. Ces questions revêtent une importance particulière pour nombre de pays africains dont l’environnement d’affaires est généralement peu compétitif et qui manquent de ressources publiques pour remédier à leurs problèmes. Elles montrent aussi l’importance du débat en cours sur le degré d’intégration dans les chaînes de valeur régionales et mondiales, sur l’opportunité de cette intégration et sur les bienfaits d’une participation plus large des pays en développement.3
Selon de récentes études, la participation de nombre de pays en développement aux CVM s’accroît, et elle est généralement bénéfique sur le plan économique car elle s’accompagne de gains de productivité, ainsi que d’une sophistication et d’une diversification plus grandes des exportations.4 Néanmoins, ces bienfaits sont très variables d’un pays à l’autre, et les pays d’Afrique ne font pas exception.Ce chapitre vise à évaluer les progrès accomplis par ce continent pour s’intégrer aux CVM, à mettre en évidence les principaux obstacles à une intégration plus poussée et à suggérer des solutions devant permettre aux économies africaines de poursuivre leur intégration dans les CVM afin d’améliorer leurs performances et de créer des conditions de prospérité pour leur population. Les CVM offrent des opportunités de transformer les économies africaines en développant de nouvelles activités et en accroissant le dynamisme et la compétitivité de l’industrie manufacturière, de l’agriculture et du secteur des services. Les chaînes de valeur régionales (africaines) peuvent, elles aussi, jouer un rôle essentiel en permettant aux producteurs locaux, notamment aux petites et moyennes entreprises (PME), de pénétrer sur des marchés en forte croissance et plus facilement accessibles, dans toute l’Afrique. Cependant, comme l’ont montré les chapitres précédents, la région reste aux prises avec de graves problèmes, qui nuisent à sa compétitivité, et la productivité de tous les secteurs de son économie (agriculture, industrie manufacturière et services) est encore faible. De surcroît, dans les prochaines décennies, les évolutions démographiques rendront plus difficile la transformation de ce continent. En Afrique, le nombre de travailleurs devrait augmenter de 910millions entre 2010 et 2050, dont 830millions en Afrique subsaharienne.5 Ce «dividende démographique» sans précédent nécessite également de créer des emplois. Pour se transformer, l’Afrique doit donc relever un double défi: accroître sa productivité et créer massivement des emplois.
Les recommandations sur la forme de participation aux CVM la plus souhaitable (une participation en amont est préférable dans certains cas, et une participation en aval dans d’autres), sur la manière dont la participation influence les résultats économiques et sur les segments de la chaîne de valeur à privilégier dépendront des caractéristiques du processus de production, ainsi que de celles du pays et de ses entreprises (qualifications de la main-d’œuvre et dotation en ressources naturelles, par exemple). Davantage de données et d’études empiriques sont nécessaires pour évaluer pleinement l’ampleur et les déterminants de l’intégration des différents pays dans les CVM, ainsi que les répercussions sur le développement (gains de main-d’œuvre et autres effets sociaux et environnementaux). Étant donné ces limites, l’analyse qui suit constitue un point de départ qui permettra aux pouvoirs publics d’évaluer la participation de leur pays et les mesures envisageables pour participer davantage aux CVM, avec des retombées sociales bénéfiques.