Extraction de l’émission anormale des données WMAP

EXTRACTION DE L’EMISSION ANORMALE DES DONNEES WMAP

L’émission Galactique 

Nous faisons dans cette partie une revue des différents processus d’émissions Galactiques dans le domaine micro-onde et submillimétrique. Ils sont connus sont le nom d’avant-plans ou foregrounds dans le contexte de l’étude du CMB. Cette appellation vient du fait que le domaine de fréquences que nous considérons ici est le domaine optimal pour la mesure des fluctuations du fond diffus cosmologique. L’émission thermique des gros grains, l’émission free-free et l’émission synchrotron sont ici brièvement décrites ainsi que leur dépendance spectrale. 6.1.1 Emission thermique des gros grains L’intensité émise par un ensemble de grains peut être exprimée par : I(ν) =  (ν)dl (6.1) EXTRACTION DE L’EMISSION ANORMALE DES DONNEES WMAP 106 6.1. L’EMISSION GALACTIQUE ´ o`u (ν) est l’émissivité à la fréquence ν et l’intégrale se fait le long de la ligne de visée. Cette intensité peu également être exprimée en fonction de la loi de Planck Bν(T) ou Bλ(T) et de l’indice spectral des gros grains β (voir §2.4.1) : Bν(T) = 2hν3 c2 1 exp(hν/kBT) − 1 en W.m−2 .Hz−1 .sr−1 (6.2) Bλ(T) = 2hc2 λ5 1 exp(hc/λkBT) − 1 en W.m−2 .µm−1 .sr−1 (6.3) avec |dλ| = c ν2 |dν| et |dν| = c λ2 |dλ| et I(ν) ∝ Bν(T) ν−β (6.4) Un des moyens de caractériser l’intensité spécifique à une fréquence donnée est de lui donner la température du corps noir ayant la même brillance à cette fréquence. C’est la fac¸on habituelle de représenter la brillance des sources en cosmologie. Ainsi, pour toutes les valeurs de I(ν), on définit la température de brillance1 TB : I(ν) = Bν(TB) (6.5) La température de brillance est surtout utilisée en radioastronomie o`u l’approximation de RayleighJeans est généralement applicable : hν  kBT ⇒ I(ν) = 2ν2 c2 kBTB soit TB = c2I(ν) 2ν2k (6.6) La température de brillance n’a de signification que si l’équilibre thermodynamique local est réalisé. Elle permet cependant d’exprimer la brillance d’une source avec des unités très simples. Cette équation est utilisée dans la suite pour faire la conversion intensité/température de brillance pour tous les avant-plans dans le domaine radio (free-free et synchrotron). On a alors la relation : TB ∝ (ν)ν−2. Quand on veut modéliser l’émission de la poussière, il faut donc être capable de déterminer l’émissivité et l’intensité du flux à toutes les fréquences. Or d’après Draine et Lee (1984) l’émissivité des gros grains, assimilés à du graphite, est proportionnelle à ν2. L’indice spectral de l’émissivité dépend de la nature du grain et il y a peu de mesures de laboratoire disponibles. Une mesure observationnelle peut être faite à partir de la distribution spectrale d’énergie des gros grains et les valeurs obtenues pour β sont comprises entre 1 et 2 (Lagache et al. 1999). Les régions illuminées par l’ISRF de Mathis et al. (1983) présentent une température moyenne de 17.5 K pour le corps noir. Une description détaillée de la nature des gros grains et de leur mécanisme d’émission est faite au chapitre 2. Plusieurs missions spatiales ont permis d’observer l’émission des gros grains : IRAS avec une bande à 100 µm ; COBE-DIRBE avec des bandes à 100, 140 et 240 µm ; COBEFIRAS un spectrophotomètre dans l’IR lointain de 0.1 à 10 mm ; WMAP avec une bande à 94 GHz (3 mm) ; et enfin Spitzer2 avec une bande à 160 µm.

Emission free-free 

 Mecanisme à l’origine de l’ émission free-free 

 On appelle émission free-free (ou Bremsstrahlung) l’émission due à l’accélération d’une charge dans le potentiel coulombien d’une autre charge. On estime cette émission à partir d’une approche classique, dans un cadre relativiste, en apportant ensuite des termes de correction quantique. En effet, les photons émis ont des énergies comparables à celles des particules les ayant émise. On fait la simplification suivante : au cours d’une interaction électron/ion, seul l’électron émet un photon free-free. En effet, comme l’accélération est inversement proportionnelle à la masse de la particule et que l’ion est beaucoup plus massif que l’électron, on peut le considérer comme statique et donc n’émettant pas. On va donc considérer le cas d’un électron qui se déplace dans un champ fixe.a) Pour un ensemble d’electrons ayant une seule vitesse ´ Considérons dans un premier temps le cas d’un électron unique. Pour déterminer la fonction décrivant son émission, on suppose que l’électron ne dévie quasiment pas de sa trajectoire pendant l’interaction avec le champ créé par l’ion. Ceci est une bonne approximation si l’électron se déplace rapidement : la variation de la vitesse →−v est alors principalement perpendiculaire à la trajectoire de l’électron et on peut négliger les variations parallèles à ce chemin. Si donc on considère un electron de charge ´ −e, ayant une trajectoire rectiligne, qui passe près d’un ion de charge Ze avec le paramètre d’impact b, le moment dipolaire associé est →− d = −e →− R et →−¨ d = −e →−˙ v o`u→−v est la vitesse de l’électron. Dans le cadre de l’approximation dipolaire, on peut écrire que l’énergie émise par unité de fréquence est (Rybicki et Lightman 1979) : dW dω = 8πω4 c3 |dˆ(ω)| 2 (6.7) o`u dˆ(ω) est la transformée de Fourier du moment dipolaire qu’on peut obtenir en faisant la transformée de Fourier de→−¨ d = −e →−˙ v : −ω2 dˆ(ω) = − e 2π  ∞ −∞ v e˙ iωt dt (6.8) L’ion et l’électron ne sont en interaction que pendant un cours intervalle de temps, le “temps de collision” : τ = b/v. On peut donc simplifier l’équation précédente : dˆ(ω)  e 2πω2 ∆v si ωτ  1  0 si ωτ  1 (6.9) 108 6.1. L’EMISSION GALACTIQUE ´ o`u ∆v est le changement de vitesse de l’électron pendant la collision. Avec l’hypothèse ∆→−v = ∆−→v⊥+ ∆→−v ∼ ∆−→v⊥, on peut intégrer la partie perpendiculaire de l’accélération et en déduire l’émission d’une interaction électron/ion : ∆v = Ze2 m  ∞ −∞ bdt (b2 + v2t2)3/2 = 2Ze2 mbv (6.10) dW dω = 8Z2e6 3πc3m2v2b2 si b  v ω = 0 si b  v ω (6.11) On étend maintenant ce résultat à une densité d’électrons ne, interagissant avec ni ions par unité de volume : le flux d’électrons par unité de temps et de surface est donc simplement nev et la surface el´ ´ ementaire de collision pour un ion est 2πbdb. L’émission totale par unité de temps de fréquence et de volume est alors : dW dωdV dt = 2πvneni  bmax bmin dW(b) dω b db (6.12) et en substituant l’Eq. 6.10, le résultat final après intégration est : dW dωdV dt = 16πe6 3 √ 3c3m2v neniZ2 gf f(v, ω) (6.13) o`u les paramètres bmin et bmax sont inclus dans le facteur de Gaunt gf f(v, ω). Ce facteur dépend de l’énergie de l’interaction et inclut les corrections quantiques nécessaires. Les valeurs de g f f sont tabulées (Bressaard et Van de Hulst 1962; Karzas et Latter 1961).Pour des électrons ayant une distribution de vitesse thermique ´ En réalité les électrons n’ont pas une vitesse de déplacement unique. On va donc considérer un ensemble thermique de paires électron/ion en interaction. La probabilité dP qu’un électron ait une vitesse dans l’intervalle d3→−v est : dP ∝ e−E/kT d3 v = exp  − mv2 2kT  d3 v avec d3 v = 4πvdv ∝ v2 exp  − mv2 2kT  dv (6.14) On intègre donc l’Eq. 6.13 sur la distribution de vitesses, de vmin a l’infini. La vitesse ` vmin correspond à la vitesse incidente minimale qui permet d’émettre un photon d’énergie hν : v ≥ vmin = 2hν/m. On obtient donc : dW dωdV dt =  ∞ vmin dW dωdV dt v2exp  −mv2 2kT  dv  ∞ −∞ v2exp  −mv2 2kT  dv (6.15) Le résultat final pour l’émissivité du free-free est (avec ν = ω/2π) : (ν) = 6.8 × 10−38Z2 neniT −1/2 e−hν/kT gf f en erg/s/Hz/cm−3 (6.16) o`u gf f est moyenné sur les vitesses. Aux fréquences GHz, les fréquences d’intérêt pour l’émission anormale, on mesure (ν) ∝ ν−0.1 (soit un indice spectral de 2.1 en température

Observation de l’emission free-free Galactique

 L’émission free-free n’étant dominante à aucune fréquence, elle est un des avant-plans les moins connus car difficile à extraire. Comme la raie de Balmer Hα est produite par la recombinaison du même gaz ionisé que l’émission free-free et que les deux processus dépendent du produit neni, on peut utiliser les cartes d’émission Hα corrigées de l’extinction pour la déterminer. En faisant quelques hypothèses, on peut déduire une relation entre les émissions Hα et free-free (Dickinson et al. 2003) : T f f b IHα ∝ ν−2 T 0.5 e 10290/Te × $ ln(0.05 ν−1 ) + 1.5 ln(Te) % en K/R avec Te en K et ν en GHz (6.17) o`u Te est la température des électrons. La première incertitude lorsqu’on essaie de prédire l’émission free-free vient de l’incertitude sur la température des électrons. L’erreur correspondante dans l’Eq. 6.17 est de 10 %. La seconde source d’erreur provient de l’estimation de l’absorption de l’émission Hα par les nuages de poussières. La densité de colonne de ces dernières, estimée avec EB−V, prend en compte toute la poussière présente sur la ligne de visée et pas seulement les nuages se trouvant entre l’observateur et le gaz ionisé. Il faut corriger l’absorption d’un facteur fd rendant compte du mélange gaz ionisé/poussières : pour un mélange uniforme, fd = 0.5. Dickinson et al. (2003) estiment que fd ∼ 0.33 sur la plus grande partie du ciel. L’erreur sur la mesure d’absorption peut donner une incertitude allant jusqu’à 30 % dans l’Eq. 6.17 dans les régions à haute latitude Galactique o`u la densité de poussières est moindre. Par ailleurs, pour |b| < 5 ◦, la confusion sur les lignes de visée est trop grande pour que l’estimation du free-free soit réellement fiable. Pour extraire l’émission anormale des données WMAP, l’émission free-free est estimée par la méthode que nous venons de décrire quand AV < 6. Pour les régions plus denses, la carte d’émission free-free de l’équipe WMAP, obtenue par la méthode du maximum d’entropie, est utilisée. Ils utilisent un indice spectral constant sur le ciel et égal à 2.15. Cette estimation ne dépend pas de la température électronique. Les principaux relevés en Hα sont les relevés WHAM3, SHASSA4 et VTSS5. La première observation de l’émission du gaz ioniséaété faite en 1962 par Hoyle et Ellis qui montrèrent l’existence d’une couche de gaz ionisé dans le plan de la Galaxie. La brillance en Hα est dominée par l’émission des régions HII denses qui ont une faible extension spatiale et sont distribuées dans le plan de la Galaxie. Cependant, pour les galaxies spirales, 25 à 60% de la luminosité Hα provient de leur WIM et pas de ces régions (Reynolds et al. 1973). Le WIM est généralement distribué comme un disque épais de H+ ayant pour échelle de hauteur 1 à 3 kpc. La densité de ce milieu est faible (ne = 0.1 cm−3) avec des températures électroniques de 6 000 à 10 000 K. Dans la Galaxie, 90% de la masse de H+ se trouve dans le WIM et 10% dans les régions HII (présentation orale de M. Haffner à la conférence “CMB Foregrounds”, Pasadena, juillet 2008)

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