Localisation géographique des aérosols
Divers processus physiques peuvent être considérés comme responsables de l’émission et de la mise en suspension d’une particule d’aérosol au sein de l’atmosphère. Ces processus d’émission assez complexes sont alimentés par des réservoirs de nature très différente, de par leurs propriétés chimiques et physiques respectifs, et qui expliquent l’hétérogénéité à l’échelle globale de la nature des aérosols. La courte durée de vie des particules d’aérosols dans la troposphère libre (environ 7 jours) explique aussi cette hétérogénéité. Trois grands types d’aérosols sont principalement rencontrés : les poussières désertiques (aussi appelées Dust), les particules émises par les feux de biomasses, et celles injectées par les activités humaines (industries, trafic automobile, …). Nous observerons dans le cadre de cette étude utilisant les données LITE, assez peu d’aérosols anthropiques ou correspondant à des feux de biomasse. On s’intéressera donc plus dans la suite de ce chapitre, et dans le chapitre 5, à l’étude des aérosols désertiques. Cette figure montre une distribution spatiale non homogène des aérosols aussi bien sur la latitude, que sur l’altitude. Différentes structures d’aérosols semblent distinguables sur cette figure le long des latitudes.La Figure 4.1.2 donne la carte géographique des structures aérosols retrouvées. On observe tout d’abord que les panaches d’aérosols dominants sont majoritairement localisés dans les régions tropicales et intertropicales, ce qui correspond bien aux zones d’émissions de poussières désertiques, ainsi qu’aux zones de feux de biomasse.On remarque tout d’abord au sein de cette distribution horizontale une signature forte de la trajectographie liée à LITE, ce qui constitue un aspect limitatif qu’il nous faudra en effet garder à l’esprit dans le cadre de cette analyse. Un autre biais possible de cette analyse est constitué par l’effet de masquage introduit par le couvert nuageux. De plus, le manque des données associées aux longitudes correspondantes à l’Inde constitue une lacune évidente dans cette analyse. La mission INDOEX a en effet déjà montré l’importance de cette région en terme d’émission d’aérosols par les feux de biomasse, et suite aux activités humaines [Léon et al., 2002]. Le but ultime de l’analyse n’est pas ici de dresser une carte globale de la répartition des aérosols. Ceci nécessiterait un nombre de données bien plus important que celui qui a pu être apporté par la seule mission LITE. Une telle étude, difficilement réalisable à partir des données de la mission GLAS, ne pourrait être mise en place que dans le cadre de la mission CALIPSO, et si le système lidar reste suffisamment longtemps opérationnel.L’idée consiste donc à essayer d’identifier le type des aérosols retrouvés (Dust ou Biomass Burning), et d’essayer d’identifier ainsi des zones d’études géographiques caractéristiques.
Zones d’occurrence des poussières désertiques
Les principales régions connues pour être responsables de l’émission de poussières désertiques sont situées dans les zones désertiques, telles que le Sahara, l’Arabie Saoudite et le Nord-est de la Chine (Désert de Gobi et du Taklemakan, voir [Laurent et al., 2005]. L’émission de ces poussières désertiques est principalement liée à l’occurrence de forts épisodes de vents associés à une rugosité aérodynamique de surface permettant un soulèvement efficace ([Marticorena et al.,1997]). La Figure 4.1.1 montre bien entre 10°N et 35°N la présence de panaches d’aérosols désertiques. La localisation géographique des aérosols désertiques peut être mise en corrélation avec celle retrouvée par [Grini et al, 2005], obtenue grâce au modèle de transport DEAD (Dust Entrainement And Deposition model [Zender et al., 2003], à partir des données du mois d’octobre 1996 (voir la Figure 4.1.3).La comparaison de la Figure 4.1.2 et de la Figure 4.1.3 permet d’identifier clairement la zone Saharienne, ainsi que le panache est-ouest dont elle est originaire. La péninsule AraboPersique, le Moyen et Proche Orient, ainsi que l’ensemble de la zone méditerranéenne sont eux aussi survolés par des panaches de ce type.
Zones d’occurrences des feux de biomasses (Biomass Burning)
Les principales régions émettrices d’aérosols issus des feux de biomasses correspondent à l’Afrique centrale et sub-saharienne, l’Amérique centrale et l’Amérique du sud, ainsi que les régions de l’Indonésie et l’Indochine. Des feux peuvent être aussi observés plus sporadiquement dans les forêts boréales, le Canada et la Sibérie. De nombreux panaches de fumée, s’étendant de façon très homogène, sur de très grandes distances (plus de 1000 km) sont courants au sein des données LITE. En l’occurrence, l’exemple d’une telle observation, faite au dessus de la Bolivie et de l’Argentine, pour le mois de septembre 1994 est donné en Figure 4.1.4. La même zone vue par le détecteur passif MODIS en septembre 2001 montre elle aussi l’existence d’un tel panache bloqué par la cordillère des Andes. L’existence de ce panache est associée pour le mois de septembre à l’activité saisonnière des « Chaqueos», correspondant à l’abattage et la mise à feux de la forêt équatoriale et des pâturages.Les observations d’aérosols effectuées sur bandes de latitudes [40°S ; 20°S] et [20°S ; 10°N] de la Figure 4.1.1 peuvent être identifiées sans trop de difficultés comme étant liées aux feux de biomasse. Ces deux bandes de latitudes correspondent respectivement à l’Amérique du sud pour la première bande de latitude, et l’association du bassin Amazonien et de l’Afrique du Sud pour la seconde. L’hypothèse d’identification de ces zones comme étant principalement émettrices d’aérosols de type Biomass Burning est appuyée par la corrélation qui peut être effectuée avec la carte de probabilité d’occurrence des feux (surfaces brûlées) (voir la Figure 4.1.5), obtenues par la compilation des données de l’instrument AVHRR entre 1982 et 1999 [Carmona-Moreno et al, 2005].Les zones identifiées dans cette carte pour le mois de septembre correspondent bien avec celles identifiées grâce aux données LITE. On retrouve, en effet, les zones couvrant : Î L’Amérique du sud (Bolivie, Nord de l’Argentine, Paraguay et le centre du Brésil) Î L’Amérique centrale (Mexique) Î L’Afrique (Zambie, Kenya, Madagascar) Î L’Australie (Cote Nord) Î La Turquie. On remarquera que la zone équatoriale de l’Afrique, naturellement émettrice à cette période de l’année, se trouve masquée par la présence de la zone de convergence Inter-Tropicale (ZCIT ou ITCZ (anglais)).
Les zones de mélanges entre les aérosols désertiques et de feux de Biomasse
La distinction entre feux de biomasses et aérosols désertiques est sur certaines zones assez difficile, voire impossible, à effectuer de manière directe, car ces zones sont souvent le lieu de mélange entre ces deux types d’aérosols. Ces zones correspondent par conséquent aux zones communes ou limitrophes données par la Figure 4.1.3 et la Figure 4.1.5, c’est à dire : Î Une grande partie du Moyen-Orient (Turquie, Arménie, Iran) (entre 30°N et 45°N) Î La limite équatoriale Africaine (entre 5°N et 10°N). Un cas typique de l’existence de tels mélanges est illustré en Figure 4.1.6. Cette figure montre un nuage de poussières s’échappant de la dépression de Bodele (Tchad). Le panache de poussières désertiques s’étend vers le sud-ouest, à la rencontre de foyers de feux savanes au dessus du Sahel. Une situation de ce type à été observée pendant la période de janvier-février 2006, lors de la campagne internationale AMMA (Analyse Multidisciplinaire de la Mousson Africaine) par Chazette et al.[2006].La bande de latitude comprise entre 35°N et 60°N (voir la Figure 4.1.1), est donc par conséquent difficilement caractérisable à partir de l’utilisation seule des données LITE. L’identification véritable du type d’aérosol, nécessitera par conséquent l’utilisation d’un modèle de transport (rétro trajectoires), ou bien l’apport des données d’un autre instrument d’observation.