ETUDE ANALYTIQUE DU PHENOMENE NEO-RURAL
Cette deuxième partie présente une analyse des personnes néo-rurales. Elle vise d’une part à décrire de manière quantitative les profils néo-ruraux et à en soutirer (ou non) un ou des profils majoritaires sur les différents territoires ruraux. D’autre part, elle vise à évaluer qualitativement la valeur ajoutée de ces migrants au travers de l’analyse des opportunités et des menaces pour le territoire en question. « Entre 1990 et 1999, plus de dix-huit millions de personnes ont changé de commune de résidence. Ce phénomène a d’importantes répercussions sur la distribution spatiale de la population sur le territoire, mais il est aussi à l’origine de profondes transformations de la composition sociale des espaces ruraux. »1 La population française est aujourd’hui plus mobile que par le passé. Avec 8 millions de migrations vers l’urbain au cours de la période 1990-1999, la ville reste le lieu privilégié d’installation, car elle regroupe la plupart des avantages de commerces, de services et d’emplois que ne peut pas forcément offrir tout autre territoire. Cependant, une grande partie des migrations s’effectue aujourd’hui de la ville vers la campagne et démontre une inversion démographique dans le rural, longtemps marqué par l’exode et l’abandon. Le poids des migrations dans le milieu rural est en effet relativement important, si on le compare avec le nombre d’habitants présents sur certaines communes rurales. C’est ainsi que depuis 1999, la population des espaces ruraux croît en moyenne de 0,7% par an. Ce chiffre est le résultat de la combinaison entre la croissance de la population française, mais également d’un solde migratoire positive non négligeable. D’après la carte 2, le nombre de personne migrantes sortantes (c’est-à-dire qui quittent le territoire de base) est le plus important dans les pôles urbains, alors que le nombre de personnes migrantes entrantes (c’est-à-dire qui arrivent sur le territoire nouveau) est majoritaire dans les périphéries de ces grands pôles. Cette constatation s’explique en partie par la relégation des classes moyennes des centres urbains vers les banlieues, ces classes recherchant prioritairement des logements au coût accessible. Mais au-delà des périphéries des villes, le territoire rural plus indépendant accueille aujourd’hui ces néo-ruraux qui font le choix définitif d’un mode de vie nouveau dans un milieu qui n’est pas le leur.
Comme nous l’avons cité dans la partie précédente, le phénomène néo-rural existe depuis les années 70. Aujourd’hui plus que par le passé, la constatation et le rejet de valeurs urbaines telles la pollution, le rythme de vie, le coût élevé de la vie ou la culture individualiste font que la volonté de migrer vers un milieu rural aux connotations « sereines » n’a jamais été aussi élevée. Selon les statistiques IPSOS, en 2003, 2,4 millions de citadins affirmaient vouloir engager d’ici cinq ans une démarche active d’installation à la campagne.1 Mais au-delà d’une simple volonté, les démarches néo-rurales sont nombreuses pour une installation définitive dans le rural. En effet, en 2003 les néo-ruraux représentaient 4,2% de la population de plus de 15 ans, soit deux millions de personnes. Le phénomène amorcé depuis Mai 1968 continue donc sa course. Bien que les aspirations d’une autre vie à la campagne ne soient pas toujours concrétisées, les citadins sont nombreux à penser leur exode urbain. Ce raisonnement est parfois alimenté par les amis ou connaissances soixante-huitards ayant fait l’éloge de la campagne suite à leur installation ou à leur passage dans le milieu rural. Les statistiques IPSOS de 2003 ont montré à ce titre qu’en 2008, huit millions de Français souhaiteraient s’installer à la campagne.
Le choix de migration et du lieu d’installation des néo-ruraux n’est, dans la grande majorité des cas, pas aléatoire. Celui-ci est fortement influencé par la conscience et l’implication des maires dans l’accueil de ces populations. D’après le sondage IPSOS effectué en 20021, 77% des maires interrogés considèrent le phénomène néo-rural comme un véritable fait de société, bien plus que comme une simple mode passagère. Cette affirmation s’explique notamment par les démarches informatives ou d’installations effectuées par les néo-ruraux potentiels auprès des collectivités locales. En effet, 84% des maires interrogés ont été sollicités en 2001 et 2002 par des citadins venus s’informer sur les possibilités d’accueil de leur commune et 81% d’entre eux ont eu l’expérience dans leur commune d’installations effectives de populations originaires du milieu urbain. Finalement, entre 2001 et 2002, les néo-ruraux potentiels ou avérés ont effectué une démarche auprès de 93% des maires interrogés, ce qui représente un chiffre très conséquent et montre l’effet de masse de la néo-ruralité. Dans la majorité de cas, les citadins désireux de s’installer à la campagne recherchent en priorité un logement non loin de la ville la plus proche (cf tableau 1 ci-dessous). C’est ici un cadre de vie privilégié et un coût de la vie moindre qui poussent d’abord les citadins à migrer vers la campagne. Leurs plus grandes attentes dans le rural est donc